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22 mars 1886.

Coram DORION, J. en C., MONK, RAMSAY, CROSS, BABY, JJ.

LA COMPAGNIE D'ASSURANCE MUTUELLE CONTRE LE FEU DE LA CITÉ DE MONTRÉAL,

(Défenderesse en Cour inférieure),

APPELANTE;

ET

DAME VILLENEUVE ET VIR,

(Demandeurs en Cour inférieure),

INTIMÉS.

Grevé de substitution-Possession-Assurance-Déclaration

Arbitrage-Renonciation lacite.

JUGÉ:-10. Qu'un grevé de substitution possède à titre de propriétaire et peut comme tel faire assurer la propriété qu'il possède; et que la déclaration qu'il aurait pu faire à la compagnie d'assurance avant d'effectuer son contrat, qu'il était propriétaire, n'est pas une fausse déclaration.

20. Que lorsque une compagnie d'assurance assure une maison, une cuisine d'été et un hangar avec tout le ménage "contenu dans la dite maison, et lorsqu'il y a des meubles qui de leur nature doivent se trouver dans le hangar v. g. le charbon, l'assurance couvre tous les meubles de l'assuré, même ceux qui étaient dans la maison et qui auraient été transportés dans la cuisine d'été ou le hangar.

30. Que lorsqu'une compagnie d'assurance consent à un arbitrage pour faire déterminer le montant des dommages soufferts par l'assuré, elle renonce par là même à son droit d'invoquer toute cause de déchéance connue par elle avant la nomination des arbitres.

Le jugement suivant rendu par la Cour Supérieure (MATHIEU, J., 16 décembre 1884), contient tous les faits de la cause, et les fait ressortir suffisamment :

"La Cour, etc.

"Attendu que le 5 octobre 1883, la demanderesse agissant par son époux, Tancrède Jobin, s'adressa au secrétaire de la défenderesse pour faire assurer contre le feu pour trois ans, sa maison, une cuisine d'été y attenante et un hangar érigés sur un immeuble qui lui appartenait

1886.

La Cie d'Assurance et

Villeneuve.

comme grevée de substitution, et son ménage; que la demanderesse, par Jobin, son dit époux, signa une demande d'assurance en blanc, la date seulement 5 octobre 1883" étant remplie, et laissa ce blanc de demande au secrétaire de la défenderesse qui lui remit un blanc de billet de dépôt, pour le faire signer par la demanderesse; que le lendemain, 6 octobre, Jobin rapporta le billet de dépôt, signé par la demanderesse, et indiqua verbalement au secrétaire de la défenderesse, le montant pour lequel il désirait obtenir une assurance comme suit :

lo. La maison, résidence de l'assurée 166 Rue Drolet, Montréal..$1400 00 20. La cuisine d'été............

30. Le hangar....

40. Les meubles de ménage, hardes et linges..

60 00

60 00 2000 00

Total,.......... $3520 00

Qu'il ne fut pas question de la bâtisse où se trouvaient les meubles de ménage, hardes et linges, que le secrétaire de la défenderesse prit note des détails, calcula la valeur du risque et fixa le montant du billet de dépôt à $174, remplit le billet de ce chiffre, et déclara à Jobin que la prime à payer était de $8.68 moins le bonus de $4.34, laissant une balance de $4.34 que Jobin paya alors, laissant entre les mains du secrétaire de la défenderesse la demande d'assurance en blanc, sauf les mots et chiffres, "$3520; $174; $8.68; bonus, $4.34; balance, $4.34," qui furent alors écrits par le secrétaire de la défenderesse, en présence de Jobin; que le 9 novembre 1883, le feu détruisit et endommagea 1o. Les immeubles ainsi assurés au montant de $270.00. 20. Les biens meubles se trouvant partie dans la maison, partie dans la cuisine, et partie dans le hangar, au montant de $799.75, formant la somme totale de $1,069.75.

Que lors de cet incendie la demande d'assurance n'était pas encore remplie, et la police n'était pas préparée; qu'après avoir reçu avis de cet incendie par la demanderesse qui parait avoir rempli toutes les formalités exigées pour faire connaître cet incendie à la défenderesse, cette dernière, par ses officiers, remplit, le 19 novembre 1883, la demande d'assurance dans les termes

1886.

La Cie

et

suivants, quant aux meubles; '40. meubles de ménage, hardes et linges, miroirs, horloges, argenterie, vaisselle, d'Assurance verrerie, livres imprimées, cadres et gravures, provisions Villeneuve. de bouche, bois de chauffage et charbon, $1,540; sur un piano, $400, et sur une machine à coudre $60, le tout, la propriété de l'assurée et contenu dans la dite maison; que la police d'assurance, qui est datée du 5 octobre 1883, mais qui parait avoir été antidatée et qui n'a été préparée et transmise à la demanderesse que le 19 novembre 1883, contient aussi la description suivante des meubles assurés; "40. sur meubles de ménage, hardes et linge, miroirs, horloges, argenterie, vaisselle, verrerie, livres imprimés, cadres et gravures, provisions de bouche, bois de chauffage et charbon, $1540, sur un piano, $400, sur une machine à coudre $60, le tout la propriété de l'assurée et contenu dans la dite maison'; que les mots, 'et contenu dans la dite maison' qui ont été mis dans la demande d'assurance et dans la police y ont été insérés par les employés de la défenderesse hors la connaissance et sans le consentement de la demanderesse; que lors du dit incendie, comme lors de la dite assurance, il y avait dans la cuisine d'été et dans le hangar du linge et des effets mobiliers au montant de $709.50; que les parties nommèrent des arbitres qui évaluèrent les dommages causés à la maison à $150, à la cuisine d'été à $60.00, et au hangar à $60.00, et aux meubles à $799.50 ;

"Attendu que le 19 novembre 1883 le secrétaire de la défenderesse, en transmettant à la demanderesse la police d'assurance en question, lui a offert de lui payer la somme de $332.25, montant qu'il considérait alors être le seul qui fut couvert par la dite assurance;

"Attendu que le 11 janvier 1884, par le ministère de Mtre Morin, notaire, la dite défenderesse aurait déclaré à la demanderesse que sans aucunement reconnaître ni admettre les chiffres de la réclamation de la demanderesse, elle était disposée à lui offrir une somme de $720, pour parfait acquit de sa réclamation, laquelle somme elle lui offrit à deniers découverts, ce que la demanderesse refusa d'accepter;

1886.

La Cie

et

Villeneuve.

"Attendu que le 6 janvier dernier la demanderesse d'Assurance poursuivit la défenderesse, réclamant d'elle la dite somme de $1,069.75, et alléguant, dans sa déclaration, les faits ci-dessus mentionnés, et de plus, que les biens meubles étaient assurés tels que contenus soit dans la dite maison, soit dans les autres bâtiments assurés, conformément aux conditions ordinaires de la défenderesse, telles qu'écrites sur le dos de ses polices d'assurance, et extraites de sa charte et ses règlements;

"Attendu que le 1er mars dernier la défenderesse a plaidé à l'action de la demanderesse, et qu'elle alléguait dans une première exception, que parmi les objets ainsi assurés se trouvaient quatre valises et un baril contenant des hardes et du linge et divers objets mobiliers qui auraient été endommagés pour une somme de $675.55 que réclame la demanderesse et qui, au moment de l'incendie, ne se trouvaient pas dans la maison assurée, mais dans une petite construction en bois, en dehors de la dite maison, et servant de cuisine d'été ; que lors de la dite assurance la défenderesse ignorait que la demanderesse gardait des hardes et du linge de grande valeur dans cette cuisine d'été, et qu'il ne fut pas alors déclaré par la demanderesse qu'une partie notable des meubles offerts à assurer ne se trouvait pas dans la maison; que si la défenderesse eût connu ce fait, elle aurait refusé d'effectuer la dite assurance ou, à tout événement, elle ne l'aurait fait qu'à un taux beaucoup plus élevé et justifié par de plus grands risques résultant de l'état des lieux à cette époque, et qu'en conséquence la dite assurance est nulle, par suite des fausses représentations et réticences de la demanderesse; que lors de la dite assurance la demanderesse ne déclarant pas le lieu où étaient les dits objets, la défenderesse crut naturellement qu'ils étaient dans la maison, vu que dans le cours ordinaire des choses, des objets de cette nature ne se trouvent pas dans une cuisine, qu'elle les assura comme tels, et chargea à la demanderesse le taux d'assurance fixé par l'usage et les règlements pour tels cas; qu'il était du devoir de la demanderesse de déclarer toutes les circonstances qui pouvaient affecter l'apprécia

tion du risque que la demanderesse proposait à la défenderesse d'assurer; qu'il résulte de ce que dessus que la demanderesse ne peut réclamer les dommages causés aux dits effets et objets qui ont été estimés à la somme de $675.55, non plus qu'une autre somme de $33.95, pour certains meubles endommagés dans le hangar et qui n'ont pas été couverts par la dite assurance, vu qu'ils n'ont pas été déclarés alors; que la seule somme qui soit due en vertu de la dite assurance est celle de $360.25, savoir $270, pour dommages à la maison, $90.25 pour dommages causés aux meubles de la maison, et conclut en demandant acte du dépôt et de la consignation qu'elle fait de la dite somme de $360.25, et que l'action de la demanderesse soit renvoyée avec dépens;

"Attendu que par une autre exception, la défenderesse alléguait que lorsque la dite assurance a été effectuée les quatre valises et le baril en question avec leur contenu se trouvaient dans la maison assurée et non dans la cuisine d'été, et qu'ils n'ont été transportés dans ce dernier endroit qu'après le 5 octobre sans avis à la défenderesse, ce qui mit fin au contrat d'assurance des dits objets ;

Attendu que par une troisième exception péremptoire, la défenderesse allégua que la demande d'assurance ne fut pas rempli et la police préparée avant le dit incendie, parce que les officiers étaient alors surchargés d'ouvrage, que le 18 novembre 1883, le dit Tancrède Jobin vint avertir la défenderesse du dit incendie, et qu'en réponse aux questions posées par les officiers de la défenderesse, il leur déclara que le ménage était assuré pour $2000, mais ne dit pas alors où se trouvait ce ménage lors de l'incendie; que le même jour les officiers de la défenderesse se transportèrent sur les lieux incendiés, et que c'est alors que pour la première fois la défenderesse constata qu'une quantité considérable de hardes et linge se trouvait dans la cuisine, et quelques uns dans le hangar; que subséquemment, et en conformité à la loi et aux règlements de la défenderesse, des arbitres furent nommés par les parties pour estimer les dommages causés par le dit incendie; mais que la défenderesse s'objecta à ce qu'ils estimassent

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