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» commandé aux hommes de mettre tout sous » les pieds de la Charité. »

Milton ne résout ici aucune question particulière; il n'entre point dans les difficultés touchant les enfans et les partages: son esprit large était contraire à l'esprit anglais qui se renferme dans le cercle de la société pratique. Milton généralise les idées, les applique à la société dans son ensemble, à la nature humaine entière; il fait liberté de tout, et prêche l'indépendance de l'homme sous quelque rapport que ce soit. Et cependant cet ardent champion du divorce a divinement chanté la sainteté et les délices de l'amour conjugal: « Salut, amour conjugal, mystérieuse loi,véritable source de l'hu » maine postérité. » ( Paradis perdu, livre IV.)

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D'après ce principe sur le Divorce, Milton voulut épouser une fille du docteur Dawis, jeune et spirituelle, mais elle ne se souciait pas du beau génie qui la recherchait. La première femme du poète se ressouvint de lui alors : la famille Powell, devenue moins royaliste à mesure que la cause royale devenait moins victorieuse, désirait un raccommodement. Milton étant allé chez un de ses voisins nommé Blackborough, soudain la porte d'une chambre s'ouvre Marie Powell se jette en larmes aux

pieds de son mari et confesse ses torts; Milton pardonne à la pécheresse: aventure qui nous a valu l'admirable scène entre Adam et Ève au Xe livre du Paradis perdu.

Soon is heart relented

Tow'reds her, his life so late and sole dilight,
Now, at his feet submissive in destrees!

« Son cœur bientôt s'attendrit pour elle, naguère sa vie et ses seules délices, à présent » à ses pieds soumise dans la douleur.»

La postérité a profité d'une tracasserie de ménage.

Un mariage romanesque commencé dans le mystère, renoué dans les larmes, eut pour résultat la naissance de trois filles, et deux de ces Antigones rouvrirent les pages de l'antiquité à leur père aveugle.

Après le triomphe des Parlementaires, Milton offrit un asile à la famille de sa femme. Todd a retrouvé des papiers dans les archives publiques, par lesquels on voit que Milton prit possession du reste de la fortune de son beau-père lorsqu'il mourut; fortune qui lui revenait comme hypothèque d'une somme prêtée par le père du poète. La veuve de Powell pouvait réclamer son douaire; elle ne l'osa, « car,

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dit-elle, M. Milton est un homme dur et colère,

» et ma fille qu'il a épousée, serait perdue si je poursuivais ma réclamation. »

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Les Presbytériens ayant attaqué l'écrit sur le Divorce, l'auteur irascible se détacha de leur secte, et devint leur ennemi.

DISCOURS SUR LA LIBERTÉ DE LA PRESSE.

Milton fit bientôt paraître son Areopagitica, le meilleur ouvrage en prose anglaise qu'il ait écrit; cette manière de s'exprimer, liberté de la presse, n'étant pas encore connue, il intitula son ouvrage : A speach for the liberty of unlicend's printing,

To the Parliament of England.

Discours pour la liberté d'imprimer sans licence (permission) au Parlement d'Angleterre.

Après avoir remarqué que la censure est inutile contre les mauvais livres, puisqu'elle ne les empêche pas de circuler, l'auteur ajoute: Tuer un homme, c'est tuer une créature raisonnable; tuer un livre, c'est tuer la rai» son, c'est tuer l'immortalité plutôt que la

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» vie. Les révolutions des âges souvent ne re» trouvent pas une vérité rejetée, et faute de laquelle des nations entières souffrent éter» nellement.

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» Le peuple vous conjure de ne pas rétrograder, d'entrer dans le chemin de la vérité » et de la vertu. Il me semble voir dans ma pensée une noble et puissante nation se le» ver, comme un homme fort après le sommeil; il me semble voir un aigle muant sa puissante jeunesse, allumant ses regards non » éblouis au plein rayon du soleil de midi, » ôtant à la fontaine même de la lumière cé» leste, les écailles de ses yeux long-temps » abusés, tandis que la bruyante et timide > volée des oiseaux qui aiment le crépuscule, » finit en désordre. Supprimerez-vous cette » moisson fleurie de connaissances et de lu>> mières nouvelles qui ont grandi et qui gran» dissent encore journellement dans cette cité? Établirez-vous une oligarchie de vingt monopoleurs, pour affamer nos esprits ? N'au>> rons-nous rien au-delà de la nourriture qui » nous sera mesurée par leur boisseau? Croyezmoi, Lords et Communes, je me suis assis parmi les savans étrangers; ils me félicitaient

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» d'être né sur une terre de liberté philoso

« EelmineJätka »