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l'impérissable renommée sortie de la tombe du poète. Tout ce qui tient aux entraînemens des partis et aux passions du moment, meurt comme eux et avec elles.

Les réactions de la Restauration en Angleterre furent beaucoup plus vives que les réactions de la Restauration en France, parce que les convictions étaient plus profondes, et les caractères plus prononcés. Le retour des Bourbons n'a point étouffé les réputations de la République ou de l'Empire, comme le retour des Stuart étouffa la renommée de Milton. Il est juste aussi de dire que, le poète ayant écrit en latin la plupart de ses disquisitions, elles restèrent inaccessibles à la foule.

AFFRANCHISSEMENT DE LA GRÈCE.

De même qu'il avait demandé la liberté de la presse, l'Homère anglais remplit un devoir filial en se déclarant pour l'affranchissement de la Grèce. Camoëns avait déjà dit : « Et nous >> laissons la Grèce dans la servitude! » Milton écrit à Philarès « qu'il voudrait voir l'armée » et les flottes de l'Angleterre employées à » délivrer du tyran ottoman la Grèce, patrie » de l'éloquence, >> ut exercitus nostros et classes, ad liberandam ab ottomannico tyranno Græciam, eloquentiæ patriam.

Si ces vœux avaient été exaucés, le plus beau monument de l'antiquité existerait encore : les Vénitiens ne firent sauter une partie du temple de Minerve qu'en 1682; Cromwell aurait conservé le Parthénon dont lord Elgin n'a dérobé que les ruines. Milton avait encore ici

une de ces idées qui appartiennent aux générations actuelles et qui de nos jours a porté son fruit.

Qu'il soit permis au traducteur de Milton de lui faire hommage de quelques lignes qui ont préparé la délivrance de la Grèce :

« Il s'agit de savoir si Sparte et Athènes re» naîtront, ou si elles resteront à jamais ensevelies dans leur poussière. Malheur au siècle » témoin passif d'une lutte héroïque; qui » croirait qu'on peut, sans péril comme sans

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pénétration de l'avenir, laisser immoler une » nation! cette faute ou plutôt ce crime serait » tôt ou tard suivi du plus rude châtiment. » Des esprits détestables et bornés, qui, s'imaginant qu'une injustice par cela seul qu'elle est consommée, n'a aucune consé»quence funeste, sont la peste des États. Quel » fut le premier reproche adressé pour l'extérieur, en 1789, au gouvernement monarchique de la France ? Ce fut d'avoir souffert » le partage de la Pologne. Ce partage, en >> faisant tomber la barrière qui séparait le » Nord et l'Orient du Midi et de l'Occident de l'Europe, a ouvert le chemin aux armées qui tour à tour ont occupé Vienne, Berlin, » Moscou et Paris.

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» Une politique immorale s'applaudit d'un » succès passager : elle se croit fine, adroite, » habile; elle écoute avec un mépris ironique » le cri de la conscience et les conseils de la probité. Mais tandis qu'elle marche, et qu'elle se dit triomphante, elle se sent tout-à-coup arrêtée par les voiles dans lesquels elle s'enveloppait; elle tourne la tête, et se trouve » face à face avec une révolution vengeresse qui l'a silencieusement suivie. Vous ne voulez pas serrer la main suppliante de la Grèce? » Eh bien! sa main mourante vous marquera » d'une tache de sang, afin que l'avenir vous >> reconnaisse et vous punisse (1). »

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A la chambre des Pairs j'obtins un amendement pour qu'on ne vendît plus en Égypte, sous le pavillon français, les victimes enlevées à la Morée.

« Considéré dans ses rapports avec les af» faires du monde, disais-je, mon amende>>ment est aussi sans le moindre inconvénient. » Le terme générique que j'emploie n'indique aucun peuple particulier. J'ai couvert le » Grec du manteau de l'esclave, afin qu'on ne

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(1) Préface de l'Itinéraire pour l'édition des OEuvres complètes; 1826.

» le reconnût pas, et que les signes de sa mi» sère rendissent au moins sa personne invio»lable à la charité du chrétien.

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» J'ai lu hier une lettre d'un enfant de ⚫ quinze ans, datée des remparts de Missolonghi. Mon cher compère, écrit-il dans » sa naïveté à un de ses camarades à Zante, j'ai été blessé trois fois; mais je suis, moi et › mes compagnons, assez guéri pour avoir repris nos fusils. Si nous avions des vivres, > nous braverions des ennemis trois fois plus › nombreux. Ibrahim est sous nos murs; il » nous a fait faire des propositions et des me› naces; nous avons tout repoussé. Ibrahim a des officiers français avec lui; qu'avons-nous » fait aux Français pour nous traiter ainsi ? ▾ Messieurs, ce jeune homme sera-t-il pris, transporté par des chrétiens aux marchés » d'Alexandrie ? s'il doit encore nous demander ce qu'il a fait aux Français, que notre » amendement soit là pour satisfaire à l'interrogation de son désespoir, au cri de sa mi» sère, pour que nous puissions lui répondre : Non, ce n'est pas le pavillon de saint Louis. qui protège votre esclavage, il voudrait » plutôt couvrir vos nobles blessures.

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