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chargés des fonctions de Juges de Paix à compétence étendue se sont trouvés saisis de cas litigieux reposant sur la vente ou l'achat des personnes. Dans toutes les affaires de ce genre le droit à la liberté a été hautement proclamé, et les dispositions de la loi Française ont été appliquées dans le seul but d'assurer le maintien de ce principe. Cependant, dans aucune circonstance, les décisions de l'autorité judiciaire n'ont porté atteinte aux droits de la famille. Il est à remarquer, d'ailleurs, qu'au Dahomey, et surtout dans le Royaume de Porto-Novo, ainsi qu'à Lagos, à la Côte d'Or Anglaise et au Togo, l'esclavage s'est toujours présenté sous la forme de "l'esclavage domestique," coutume en vigueur, chez tous les peuples primitifs, et qui subsiste encore dans la partie du continent noir où l'influence des nations Européennes n'a pu jusqu'à présent pénétrer.

Cette œuvre de libération a pu s'accomplir sans de trop grandes difficultés, en dehors des quelques inconvénients qui s'attachent forcément à des changements aussi radicaux dans les habitudes séculaires d'un pays.

Après avoir obtenu ces premiers résultats, l'Administration locale n'a pas considéré son rôle comme terminé. Soucieuse d'accomplir intégralement son devoir, elle a voulu parachever son œuvre. Dans cet ordre d'idées, les Résidents et Chefs de Poste ont reçu des instructions en vue de faire remettre en liberté, et rendre à leurs familles et à leur pays d'origine, les captifs d'autrefois. Ils ont usé à cet effet, aussi souvent que l'occasion s'en est présentée, de tous les moyens compatibles avec la tranquillité des pays soumis à notre domination.

Cette influence s'est même exercée à l'extérieur. En effet, par Arrêté du 15 Septembre, 1895, M. Ballot autorisait dans la Colonie la fondation d'une Société ayant pour but d'encourager le retour à la côte des esclaves d'anciens sujets Dahoméens et de leurs descendants actuellement en Amérique, et de leur assurer aide et protection à leur arrivée dans la Colonie.

En ce moment même, et conformément aux instructions du Département, des pourparlers sont engagés avec M. le GouverneurGénéral de San Thomé, en vue de faire revenir dans la Colonie des Dahoméens transportés depuis longtemps dans ce pays, et ayant contribué dans une certaine mesure à sa prospérité.

En résumé, dans le Bas-Dahomey la Traite n'existe plus qu'à l'état de souvenir. Dans le Haut-pays je veux dire dans toute la partie du territoire soumis directement à notre autorité la répression de la Traite des Esclaves s'est exercée d'une manière permanente et efficace. Les chefs indigènes, surveillés de près, se sont vus contraints de renoncer à leurs anciennes coutumes.

En un mot, dans la presque totalité de la région comprise entre

la côte et le Niger, la Traite ne se fait plus ouvertement, ce qui, on en conviendra, est un progrès considérable dans un pays tout nouvellement conquis, et où cette coutume constituait depuis des siècles la principale ressource des chefs indigènes.

11 est donc permis d'affirmer que dans un délai rapproché la Traite, même secrète, sera devenue impossible dans l'ensemble de la Colonie du Dahomey. La création de voies de communication, les relations commerciales fréquentes avec les points les plus éloignés de la côte, la pacification complète du pays, sont autant de facteurs puissants destinés, petit à petit, à faire disparaître à la Côte des Esclaves les mœurs d'autrefois. Cet heureux résultat qu'il est permis, ainsi que je viens de le dire, de considérer comme prochain, ne pourra dans l'avenir qu'exercer une heureuse action sur les territoires conquis à notre influence au nom de la civilisation et de l'humanité.

RAPPORT du Lieutenant-Gouverneur du Congo Français, sur la Traite des Esclaves.-Libreville, le 24 Novembre, 1898.

Libreville, le 24 Novembre, 1898. LA Traite des Esclaves n'existe pas à proprement parler dans les territoires du Congo Français, car on ne saurait appeler de ce nom l'habitude qu'ont un grand nombre d'indigènes, relativement aisés, d'attacher à leur personne et à leur service, par une sorte d'adoption, d'autres indigènes moins fortunés qui sont, dès lors, considérés comme faisant partie de la famille.

Les efforts du service des affaires indigènes et du service judiciaire s'appliquent entièrement, depuis la création du tribunal criminel, à faire disparaître certaines pratiques indigènes qui ont pour base l'épreuve par le poison, sous couleur de jugement de Dieu, et pour résultats certains de nombreux empoisonnements.

DOLISIE.

RAPPORT du Gouverneur-Général de Madagascar, sur la Traite des Esclaves.- Tananarive, le 23 Novembre, 1898.

Le Général Gallieni, Commandant-en-chef du Corps d'Occupation et Gouverneur-Général de Madagascar et Dépendances, à M. le Ministre des Colonies.

Tananarive, le 23 Novembre, 1898. J'AI invité les Commandants territoriaux des régions de l'ouest et du sud-ouest à me renseigner aussi exactement que possible sur la

Traite des Esclaves et sur les moyens à employer pour sa répression. J'ai l'honneur de vous adresser ci-dessous le résumé de leurs rapports sur cette question.

Tout d'abord, je crois inutile de vous rappeler que l'esclavage est effectivement supprimé, depuis longtemps, daus les provinces septentrionales et orientales de l'île. Je ne saurais malheureusement être aussi affirmatif en ce qui concerne le sud-ouest et le sud. Quoique le premier soin de nos troupes, au fur et à mesure de leur prise de possession du sol, soit d'exiger des chefs indigènes la libération des esclaves, ceux-ci sont au contraire conservés, avec un soin jaloux, par leurs maîtres partout où notre autorité ne peut encore s'exercer d'une façon efficace. Mais cet état social est destiné à disparaître peu à peu des districts situés à l'intérieur des terres, en raison des progrès de notre occupation.

La surveillance active qu'exercent nos navires dans l'Océan Indien donne lieu de penser que l'on arrivera bientôt également à assurer la répression complète et efficace de l'esclavage sur les côtes de la Grande Ile.

GALLIENI.

RAPPORT de l'Administrateur du Protectorat Français de la Côte des Somalis, sur la Traite des Esclaves.-Djibouti, le 14 Décembre, 1898.

L'Administrateur Adjoint au Ministre des Colonies.

Djibouti, le 14 Décembre, 1898. Vous avez bien voulu m'inviter à vous transmettre tous renseignements utiles pour la préparation d'un nouveau fascicule que le Bureau spécial de Bruxelles se propose d'élaborer sur la Traite des Esclaves.

J'ai l'honneur d'informer votre Excellence que je n'aurai rien à ajouter aux dernières communications faites à ce sujet pour le compte du Protectorat.

Je crois devoir annoncer toutefois, en ce qui concerne les armes, que l'Administration locale se préoccupe activement de toutes les mesures nécessaires pour empêcher la vente aux indigènes Musulmans de l'intérieur. Dans ce but, elle a prohibé d'une manière absolue le transit des armes et munitions destinées à l'Abyssinie Chrétienne par les ports d'Obock et de Tadjourah, où la surveillance s'exerçait plus difficilement; c'est uniquement à Djibouti que peut avoir lieu aujourd'hui le transit dont il s'agit.

DE LÉCHAUX.

ORDONNANCE du Gouverneur des Territoires de Cabo Delgado, concernant la Traite des Esclaves dans les Territoires de la Compagnie Portugaise du Nyassa.—Ibo, le 9 Mai, 1898.

AYANT pris connaissance du rapport de M. le Capitaine de Cavalerie José Matheus Lapa Valente, Commandant du Corps de Police, relatif à la mission dont il avait été chargé par ma note confidentielle du 31 Mars dernier, et consistant à se rendre avec la chaloupe Lago Nyassa à la côte sud, afin d'y capturer des négriers qu'on disait s'y livrer à la Traite des Esclaves;

Vu la manière distinguée dont cet officier s'est acquitté de sa difficile et ingrate mission en réussissant, avec les forces limitées dont il disposait, à capturer dans la Rivière Mucufi cinq Arabes négriers, à libérer plus de 100 esclaves dont trois voulurent le suivre à Ibo, et à saisir trois barques indigènes dont deux durent être brûlées vu l'impossibilité de les conduire à Ibo, et dont la troisième, échouée sur le sable, ne put être renflouée et est hors d'état de reprendre la mer;

Considérant que l'acte accompli dans cette circonstance, indépendamment de sa portée hautement humanitaire, est de nature à enrayer efficacement la Traite sur cette partie de la côte;

J'adresse mes félicitations au Capitaine José Matheus Lapa Valente, et lui exprime en même temps ma satisfaction pour la manière dont il a exécuté ses instructions et pour la promptitude avec laquelle il a agi dans le commandement de sa troupe. Je félicite également le second de l'expédition, M. Philippe da Veiga, SousLieutenant de l'Armée Royale, qui a, avec les hommes sous son commandement, accompagné le Capitaine Lapa Valente depuis Pemba, et dont le zèle et l'activité ont contribué en partie au succès de l'expédition.

Secrétariat du Gouvernement des territoires de Cabo Delgado, Ibo, le 9 Mai, 1898.

J. M. G. D'AMORIN, Gouverneur.

(Annexe 1).-Dépêche adressée par le Président du Conseil d'Administration de la Compagnie du Nyassa au Commissaire Royal près la même Compagnie.-Lisbonne, le 11 Juillet, 1898.

Nous avons l'honneur de porter à la connaissance de votre Excellence qu'il résulte des communications reçues du Gouverneur des territoires sous notre juridiction, que pendant la première

quinzaine d'Avril les troupes de police de la Compagnie ont fait à l'entrée de la Rivière Mucufi, au nord de Lurio, une importante opération se rapportant à la Traite des Esclaves. Trois barques ont été saisies et cinq hommes d'équipage capturés. Ceux-ci, après avoir fait des aveux complets, ont été remis au pouvoir judiciaire. D'après les rapports qui nous sont parvenus, il ne peut y avoir le moindre doute que ces bâtiments se livraient au Trafic des Esclaves. Toutes les formalités ont été observées au moment de la saisie, et les barques ont été brûlées.

L'expédition avait été confiée, d'après les instructions du Gouverneur des territoires, au Capitaine de la Cavalerie José Matheus Lapa Valente, Commandant du Corps de Police, ayant sous ses ordres le second du même corps, M. Philippe da Veiga, commandant le détachement de Pemba, un sergent, un caporal, et trente hommes. Ils s'étaient rendus sur les lieux dans les chaloupes de la Compagnie.

Le Conseil d'Administration, dans sa séance du 25 Juin dernier, à laquelle votre Excellence assistait, a apprécié, comme il convenait, les services éclatants rendus en cette circonstance, et il a décidé d'adresser ses félicitations au Gouverneur pour l'organisation de cette expédition, au Capitaine Lapa Valente et à ses subordonnés pour la manière dont ils se sont acquittés de leur tâche.

Nous estimons que la connaissance de ces faits sera aussi agréable au Gouvernement qu'elle nous l'a été à nous-mêmes; c'est pourquoi nous prions votre Excellence de vouloir bien l'informer de ce qui précède en lui faisant savoir en même temps que notre administration est résolue à user, dans l'avenir comme par le passé, de tous les moyens dont elle dispose pour réprimer les tentatives de la nature de celle mentionnée dans la présente.

Dieu garde votre Excellence.

Lisbonne, le 11 Juillet, 1898.

Pour la Compagnie du Nyassa:

ANTONIO CENTENO, Président du Conseil d'Administration.

M. le Conseiller Eduardo Jose Coelho,

Commissaire Royal près la Compagnie du Nyassa.

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