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A MME ET MLLE VAILLANT DE BRULE.

Grand merci, belle Caroline,

Grand merci, charmante Claudine,

De ces riches tissus travaillés

par vos mains;

Les rois mêmes en seroient vains.

Ces mailles, de Vulcain ingénieux ouvrage,
Qui, sur Mars et Vénus expiant son outrage,
Dans le même filet les surprirent tous deux,
Et de leur embarras amusèrent les dieux;
Pallas, dont l'aiguille savante

Marioit les couleurs sur la toile vivante;
Arachné, que perdit un défi périlleux,
Et dont le changement funeste
De la tapissière céleste

Vengea le dépit orgueilleux;
Enfin tous ces arts merveilleux,

Jadis si vantés dans la Grèce,

Auroient cédé la palme à votre heureuse adresse.
Plus clairvoyant je l'admirerois mieux ;
Privé de la douce lumière,

De l'ingénieuse ouvrière

A peine j'entrevois le travail précieux,

Mais mon cœur en jouit au défaut de mes yeux.

INSCRIPTION EN VERS

POUR MOULIN-JOLI".

Je suis le talisman de ces lieux de féeries:
Malheur à qui me détruira ;

Bonheur à qui conservera

Les droits de la nature et ces rives chéries!

Un bon meunier autrefois me plaça
Sur le cours de cette onde pure;

Un vieux curé me conserva;
Un couple heureux, ami de la nature,
Me prit en gré, me respecta,

Et dit, lorsqu'il me répara :

« Deviens le talisman de ces lieux de féeries: Malheur à qui te détruira ;

Bonheur à qui conservera

Les droits de la nature et ces rives chéries! »
Il dit encore: «< Ah! crains que quelque jour
Le faste destructeur, l'ignorance hardie,

* Cette maison de campagne appartenoit à M. Watelet, de l'Académie française, qui y avoit fait placer ces vers.

Pénétrant en ces lieux, n'usurpe ce séjour.
L'ignorance, avec industrie,
D'un air capable enlaidira

Ce que sans art, sans symétrie,

La nature, en riant, de ses mains décora.

Les détours ondoyants de ces rives fleuries,
Le faste les redressera;

Ces arbres, de leurs bras couronnant les prairies,
Le faux goût les mutilera;

Ces réduits ombragés, propres aux rêveries,
Un cœur faux les profanera;

Et par-tout la nature, insultée et flétrie,
En détestant la barbarie,

De ce séjour disparoîtra.

Ah! sois le talisman de ces lieux de féeries:

Malheur à qui te détruira ;

Bonheur à qui conservera

Les droits de la nature et ces rives chéries! »

EPISTLE

TO D. ARBUTHNOT.

Shut, shut the door, good John! fatigued I said,

Tye up the knocker, say I'm sick, I'm dead.
The dog-star rages! nay 'tis past a doubt,

All Bedlam, or Parnassus, is let out :

Fire in each eye, and papers in each hand,
They rave, recite, and madden round the land.

What walls can guard me, or what shades can hide?
They pierce my thickets, through my grot they glide;
By land, by water they renew the charge:
They stop the chariot, and they board the barge.
No place is sacred, not the church is free,

Ev'n Sunday shines no Sabbath-day to me:
Then from the Mint walks forth the man of rhyme,
Happy! to catch me just at dinner-time.

Is there a parson, much bemused in beer, A maudlin poetess, a rhyming peer,

TRADUCTION

DE L'ÉPITRE DE POPE

AU DOCTEUR ARBUTHNOT.

Jean, qu'on ferme la porte, et qu'on la barricade; Qu'on mette les verrous; dis que je suis malade, Dis que je suis mourant, que je suis mort!... ô cieux! Quels torrents de rimeurs répandus en ces lieux! Mon œil épouvanté croit voir sur cette place Tout l'hôpital des fous, ou bien tout le Parnasse. Les vois-tu, récitant, courant en furieux, Un papier dans les mains, et le feu dans les yeux? Contre ce vil essaim qui fourmille sans cesse, Quel rempart assez sûr, quelle ombre assez épaisse? Il m'attaque par terre, il m'assiège par eau, Se glisse dans ma grotte, investit mon berceau, Inonde mes bosquets, borde mon avenue,

Me poursuit dans l'église, et m'atteint dans la rue; Ou, pressé par la faim, pour mieux m'assassiner, M'aborde... justement à l'heure du diner.

Est-il un vil rimeur, dont la verve grossière Exhale en plats écrits les vapeurs de la bière;

« EelmineJätka »