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rut, le 2 novembre 1804, d'une attaque d'apoplexie foudroyante.

Il ne dévia jamais de la route qu'il s'était tracée. Janséniste et démocrate, enthousiaste de religion et de liberté, il déclamait à la tribune contre les rois et le despotisme, la cour de Rome et le clergé, et, matin et soir, il se prosternait devant un grand crucifix de bois placé dans son cabinet. Ce double fanatisme était commun en Angleterre pendant l'époque de sa révolution il semblait que Camus fût un membre du parlement de Cromwell transplanté dans la Convention nationale.

COCHON

(CHARLES), comte de Lapparent.

M. Cochon de Lapparent a commencé sa carrière politique à l'ouverture des États-Généraux, et l'a terminée à l'époque des cent jours.

Il naquit le 25 janvier 1750, dans le département de la Vendée.

Au commencement de la révolution il était conseiller au présidial de Fontenay. Nommé député du tiers-état de la sénéchaussée de Poitou aux États-Généraux, en remplacement de M. Thibaud, qui avait refusé cette mission, il se fit remarquer, dans cette assemblée célèbre, par la sagesse de ses principes, et par son dévoûment à la cause de la liberté. La part qu'il prit à toutes les délibérations importantes lui

acquirent à la fois l'estime de ses collègues et une grande popularité. Rentré dans ses foyers, après la clôture de la session, il y suivit, avec la plus vive sollicitude, la marche des événemens et des partis, sous l'Assemblée législative, et se montra le partisan de toutes les mesures qui accéléraient le mouvement de la révolution.

Appelé à la Convention nationale par le département des Deux-Sèvres, Cochon se signala parmi ceux qui portaient les plus rudes coups au système monarchique. Son républicanisme énergique le rattacha au parti de la Montagne, qui demandait à grands cris le jugement du roi. A l'époque où Louis XVI fut traduit à la barre de cette assemblée, il vota pour la

mort.

Nommé commissaire à l'armée du Nord, en remplacement de Camus et de ses collègues, que Dumouriez venait de livrer aux Autrichiens, il chercha en vain à pénétrer jusqu'au quartier-général, et fut obligé de s'enfermer dans Valenciennes, qui ne tarda pas à être assiégée par les Autrichiens. Après s'être opposé long-temps à toute capitulation, il fut obligé d'en sortir avec la garnison, le 1er août 1793, et reparut, le 6 du même mois, à la Convention, pour y justifier la conduite du général Ferrand et des volontaires républicains, qui, dit-il, s'étaient couverts de gloire, tandis que les habitans de Valenciennes et les troupes de ligne avaient seuls mérité d'être soupçonnés de trahison. A partir de cette époque, Cochon ne s'occupa plus que d'affaires militaires. Il resta

à peu près étranger à toutes les intrigues des divers partis qui, dans le sein de la Convention, se faisaient une guerre à mort.

La chute de Robespierre, au 9 thermidor, le plaça dans une position influente; il entra au comité de salut public, où il obtint, par son crédit, la nomination au commandement des armées de Brest, de l'Ouest, et des Alpes, des généraux Dumas, Can* claux et Moulins.

Ses missions aux armées, et les travaux auxquels il avait pris part, lui avaient fait acquérir des connaissances pratiques sur les affaires militaires; on le choisit donc de nouveau, en 1795, pour accompagner l'armée du Nord en Hollande.

Devenu membre du Conseil des Anciens, en vertu de la réélection légale des deux tiers conventionnels, Cochon se déclara contre les déclamations démagogiques qui compromettaient le triomphe de la cause républicaine.

Il fut choisi, au mois de germinal an 4, pour remplacer Merlin au ministère de la police générale. Ce ministère, créé depuis peu, était le plus important, puisqu'il s'agissait de rétablir la tranquillité après une aussi violente commotion. Cochon déploya dansce poste une grande habileté.

Le Directoire, placé dans une situation mixte, gouvernement de transition, se trouvait être le point de mire des factions qui divisaient la république. Le parti vaincu au 9 thermidor se montrait encore menaçant; les royalistes se réunissaient à lui. Menacé

à la fois par deux conspirations flagrantes, le Directoire se jeta dans le système de bascule. Il craignait plus les royalistes qu'il n'avait de confiance aux constitutionnels, et trouvait plus commode de faire la guerre aux premiers que de faire des sacrifices aux seconds. Il marchait avec le parti qui l'avait nommé, c'est-à-dire des Jacobins de seconde origine, formant mille petites intrigues, qu'il regardait comme des moyens de gouvernement; se dirigeant en sens contraire des deux opinions les plus actives, il perdait chaque jour sa force, et courait droit à l'abîme qui devait l'engloutir. Marchez avec moi, disait-il. Non pas, répondait la faction, c'est à toi de marcher avec nous. La conspiration de Babeuf vint à point pour lui donner occasion de frapper les anarchistes.

Le Directoire avait toujours feint de confondre les anarchistes avec les royalistes. La couleur de cette conspiration n'était pas équivoque. Les partisans des anarchistes, et leurs journaux, honteux de voir la plus grande partie des leurs pris en flagrant délit, ne pouvaient nier ce qui était évident (1),.

(1) La conspiration de Babeuf fut découverte le 21 floréal an 4; elle devait éclater la nuit du 22 au 23. Babeuf, qui seul l'avait conçue, en dirigeait seul l'exécution. Il se proposait de rétablir la démocratie sur les ruines du gouvernement directorial. La démocratie de Babeuf était le gouvernement populaire le plus illimité. Le génie remuant, inquiet, fougueux de cot anarchiste, trahit son secret au moment même où, rassemblant

Louvet disait dans sa Sentinelle : « Les Clichiens, irrités de la commission pour faire le rapport sur la loi du 3 brumaire, vont commander quelque conspiration à leur ministre Cochon. >>

Le ministre, disaient les uns, était instruit du mouvement, il pouvait le prévenir : il ne l'a pas fait, donc il en est l'auteur.

Les autres avançaient hardiment que c'était un mouvement royaliste sous couleur populaire, qu'avait favorisé le ministre de la royauté.

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Qui ne sait, disait un journal, le Rédacteur, que les royalistes ont intérêt à propager l'anarchie; il est un autre parti qui en a besoin pour sa propre ambition, pour son avidité, pour l'impunité et la continuité de ses crimes. >>

Sans doute une bonne police doit tout faire pour prévenir les complots : le ministre, instruit que les

autour de lui les rivalités, la haine, la vengeance des proscrits, la terreur des suspects, l'envie des mécontens, il tenait dans sa main la torche qui devait embraser de nouveau le volcan révolutionnaire.

Marat avait été le vil instrument de la démagogie, sous un maître qui l'aurait un jour puni, bien qu'il l'eût provoquée. Babeuf la convertit en système, et il croyait pouvoir se rendre maître d'une puissance qui se détruit sans cesse elle-même.

On nomma babouvistes les partisans du système de Babeuf, et les réacteurs appliquaient cette dénomination aux amis de la liberté, quelque modérés qu'ils fussent. Et ceux-là attribuent la conspiration aux anarchistes.

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