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elle y apporterait le trouble si les magistrats substi>> tuaient l'arbitraire à une juste sévérité, s'ils se ren>> daient les instrumens involontaires des passions » particulières ou des préventions aveugles. Ce n'est » point sur de simples soupçons, sur des dénonciations vagues qu'on doit priver un citoyen de sa >> liberté... Le respect que commande la liberté individuelle vous fait un devoir d'apporter, dans cette partie de vos fonctions, l'attention la plus scrupu» leuse; le gouvernement, qui ne veut exercer que... » dans l'intéret de l'État le pouvoir extraordinaire dont » il est momentanément revêtu, doit trouver dans >> l'impartialité des préfets et dans la célérité de leurs >> rapports, la garantie de sa responsabilité, comme >> tous les sujets de S. M., comme tous tous les hom>> mes paisibles doivent y trouver celle de leur repos et » de la protection qui leur est due. »

»

Les 11, 15 et 17 novembre, M. Decazes alla, avec tous les ministres, déposer à la chambre des pairs les ordonnances et les actes en vertu desquels cette assemblée fut saisie de l'affaire du maréchal Ney, et il assista à tous les débats du procès.

Les 23 et 24, le ministre de la police fut, ainsi que M. Barbé-Marbois, ministre de la justice, attaqué vivement dans la chambre des députés, au sujet de l'évasion de M. de Lavalette. On proposa, dans ces deux séances publiques, d'obliger ces deux ministres à fournir des renseignemens sur cet événement. La chambre, malgré le renvoi de cette proposition aux bureaux, ne donna aucune suite à cette affaire.

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M. Decazes fut créé comte par une ordonnance du roi, du 27 janvier, dont voici le considérant: «Vou» lant donner à notre féal et bien-aimé sujet le sieur >> Elie Decazes, écuyer, notre ministre secrétaire-d'é» tat au département de la police générale, un témoi»gnage éclatant de notre satisfaction, et récompen» ser, de la manière la plus honorable, le dévoûment » dont il n'a cessé de nous donner des preuves, et les » services signalés qu'il nous a rendus dans l'exercice » des hautes fonctions que nous lui avons confiées ; >> vu les titres de noblesse accordés en 1595 au sieur >> Raimond Decazes, un de ses ancêtres, par notre » illustre aïeul le roi Henri quatrième, etc. »

Le 22 février, M. Decazes, accompagnant le duc de Richelieu, vint, de la part du roi, apporter aux deux chambres la lettre que la reine Marie-Antoinette, au moment de porter sa tête sur l'échafaud avait écrite à Madame Elisabeth, sœur du roi. Cette lettre avait été trouvée dans les papiers de l'ex-conventionnel Courtois. Beaucoup d'autres pièces importantes ont été recouvrées dans la même occasion par les soins de M. Decazes. Louis XVIII lui dit-on, beaucoup de gré de cette découverte. Courtois, est-il dit dans un écrit qui fut distri»bué aux chambres en 1820, avait caché ses papiers » dans un château qu'il occupait en 1816, époque à » laquelle il fut banni de France comme régicide. Courtois était lié d'amitié avec M. Baren.... Il » lui écrivit pour engager le ministre de la police à ne »pas lui appliquer la loi qui le chassait de France,

sut,

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TAYLOR

FORD

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»ct il offrit, en reconnaissance de cette exception, de » remettre à la famille royale une pièce d'une haute importance, des cheveux de la reine et des papiers. »M. Baren... confia la lettre de Courtois à M. De» cazes; celui-ci ordonna au préfet du département ⚫ de mettre promptement à exécution l'ordre de ban» nissement contre Courtois, de faire une perquisition » dans son domicile, et de faire saisir tous les objets » appartenant à la famille royale, dont il fit l'indication. La perquisition eut lieu; Courtois remit les objets précieux dont on faisait la recherche, et re» çut l'ordre de sortir de France dans les vingt-quatre > heures. >>

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M. Benoist, lieutenant de gendarmerie, depuis gendre de M. d'Ivory, maréchal-de-camp et député des Ardennes, fut chargé d'enlever ces papiers, qu'il remit à M. Maussion, préfet de la Meuse.

Plusieurs versions ont couru sur cette affaire. Voici celle que les rédacteurs de la Biographie de Bruxelles ont adoptée :

En faisant la recherche des papiers de Robespierre, Courtois << trouva le testament de Marie-Antoinette, » et la lettre adressée à Madame Elisabeth, la veille » de son supplice. Il conserva soigneusement cette lettre, et l'adressa, en 1816, à M. Becquey, conseil» ler-d'état, en le priant de la mettre sous les yeux du » roi, et ce monarque lui fit répondre que si la re» mise de cette lettre ne pouvait lui être utile, elle le » serait du moins à ses enfans. »>

L'autre est, en quelque sorte, une conséquence de

celle-là ; mais les politiques de salon la préféraient à la précédente, parce qu'ils s'en servaient pour expliquer la haute fortune du ministre favori.

Selon eux, M. Decazes ayant su, par le roi et par M. Becquey, la remise que Courtois avait faite des deux pièces relatives à la reine, présuma que cet exconventionnel devait en posséder quelques autres non moins importantes, et touchant plus particulièrement la personne de Louis XVIII. D'après eux encore, le ministre aurait obtenu du votant, par adresse, et en lui faisant espérer l'autorisation de rester en France, des papiers très-secrets, compromettant beaucoup la réputation de républicanisme de Robespierre, et M. Decazes, possesseur de ces objets précieux, se serait contenté d'en entretenir le roi, et de lui vanter les nombreux moyens qu'il employait pour se les procurer.

M. Decazes, est-il dit encore dans l'écrit adressé aux chambres, avait appris, par des agens de police, qu'il existait à Gaillardon, près Chartres, un cultivateur, qui se disait inspiré, en communication avec des anges, et homme de tête. Il le fit circonvenir par un nommé Souque, qui l'entretint du roi, de M. Decazes et de la France. Martin fut amené à Paris, et envoyé à Charenton. Il en sortit bientôt. M. Decazes lui montra, dit-on, Tous les papiers pris chez. Courtois, et l'introduisit dans le cabinet du roi. Ignace Martin fit imprimer la relation de sa visite au roi; cette relation fut saisie un mois après sa publication il y était dit que le roi avait pleuré,

:

et que Martin avait la connaissance d'un grand se

cret.

Les amateurs du merveilleux pourront croire s'ils le veulent à ce conte ridicule : le roi et le ministre avaient tous deux trop d'esprit, l'un pour faire parler un fou et l'autre pour l'écouter.

Il n'est pas besoin de recourir à de pareilles puérilités pour s'expliquer l'attachement dont le prince honorait son jeune ministre.

A cette époque, le comte Decazes était souvent attaqué à la tribune. Le 22 mars, M. de Kergorlay l'accusa, en comité secret, d'organiser un système de diffamation dans les journaux, contre les principes religieux et monarchiques de la chambre.

Au mois de mai de la même année, des troubles éclatèrent à Grenoble. La ville fut assiégée par des insurgés; et le général Donadieu, qui y commandait, en prévint le ministère. Le ministre de la police s'empressa de lui envoyer des pleins pouvoirs par le télégraphe. Des ordres de mort étaient donnés par la même voie. Cette formule: exécutez, suffit pour ôter la vie à vingt-un hommes, au nombre desquels était un enfant de quinze ans et demi. Les juges avaient recommandé cinq de ces malheureux à la clémence du roi. Cette affaire nécessita plus tard des explications à la tribune.

La faction contre-révolutionnaire a voulu, à cause de cette malheureuse circonstance, faire porter sur M. Decazes tout l'odieux de cette exécution. En vain, disait-il, pour justifier le rejet de la demande

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