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donna lieu à une assez vive discussion, dans laquelle des députés l'inculpèrent d'étourderie et de légèreté.

Comme l'envie et la calomnie se glissent dans tout, l'accusation devint plus grave encore, lorsqu'on eut insinué qu'il avait voulu par là empêcher les députés d'assister, avec leur nouveau costume, le 21 janvier, à la fête anniversaire du supplice de Louis XVI.

Obligé de donner sa démission, non pas seulement par le motif de cette erreur, mais aussi parce que son républicanisme gênait les vues du Directoire, qui voulait se rendre maître des élections, et remplacé par Dondeau, le 12 février 1798, il fut envoyé, au mois de mai, en qualité d'embassadeur extraordinaire, à Gênes, où il succéda au ministre Faypoult.

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Une nouvelle gaucherie le fit rappeler au bout de deux mois. Le Directoire voulait s'emparer, sans coup férir, des États de Sardaigne. Il avait, en conséquence, donné des instructions écrites à Sotin. Aut lieu d'agir avec discrétion, Sotin écrivit ostensiblement au Directoire ligurien pour l'inviter à protéger et à seconder les insurgés piémontais contre la cour de Turin.

Le Directoire lui reprocha de s'être mis trop en évidence, lui donna sur-le-champ pour successeur le chargé d'affaires Belleville, et le nomma consul général à New-Yorck.

Il s'embarqua à Gênes, en juillet 1798, pour sa nouvelle destination.

Rentré en France après le 18 brumaire, il fut em

ployé dans les vivres de l'armée du Rhin, et se trouva, sans le savoir, sous les ordres de Durand de Molard, alors inspecteur, qu'il avait fait porter sur les listes des journalistes condamnés à l'époque du 18 fructidor.

Déchu des grandeurs, le sort sembla un moment se lasser de lui être contraire. Le premier consul, soit qu'il n'eût point oublié cet ancien ministre, soit que quelqu'un des amis de ce dernier l'en eût entretenu, le nomma commissaire des relations commerciales à Savanah.

La destinée de Sotin l'entraînait. Jérôme Napoléon s'étant marié à Savanah, sans le consentement de l'empereur, ce prince s'en prit à Sotin, qui, en sa qualité de consul, avait eu la maladresse de prêter la main à ce mariage au lieu de s'y opposer, et le rappela.

De retour à Nantes, en 1806, Sotin, dégoûté des honneurs, ruiné par ses fréquens déplacemens, demanda et obtint le modeste emploi de percepteur de la commune de la Chevrolière, où il avait une petite propriété. Il y mourut, le 13 juin 1810, laissant une nombreuse famille sans fortune.

Sotin est un exemple de la fragilité des grandeurs humaines.

DIRECTEURS-GÉNÉRAUX

DE LA POLICE.

Les événemens de 1814, qui eurent pour résultat de ramener en France l'ancienne famille des Bourbons, nécessitèrent des changemens dans la haute direction des affaires publiques.

Quelques jours après son entrée à Paris, le roi Louis XVIII jugea utile de supprimer le ministère de la police, et de le remplacer par une direction générale. Voici le texte de son ordonnance, datée des Tuileries le 16 mai 1814:

Art. 1°. Le ministère de la police générale et la préfecture de police de Paris sont réunis sous le titre de Direction générale de la police du royaume.

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Art. 2. En conséquence, le directeur-général aura les pouvoirs et exercera les fonctions ci-devant attribuées au ministre de la police de la ville de Paris.

Art. 3. Jusqu'à ce qu'il en soit autrement ordonné, les préfets et sous-préfets exerceront les fonctions de directeurs de police, et seront, à cet égard seulement,

sous les ordres du directeur-général de la police du

royaume.

Art. 4. Le directeur-général de la police aura, près de notre personne et dans notre palais, les honneurs attribués aux ministres, et prendra rang immédiatement après eux.

Au retour de Napoléon, le 20 mars 1815, cette direction générale fit place à l'ancien ministère, dont l'existence dura jusqu'au 29 décembre 1818, époque à laquelle on réunit l'administration de la police au ministère de l'intérieur.

La direction fut rétablie, par ordonnance du 21 février 1820, sous le titre de Direction générale de l'administration départementale et de la police.

Enfin, une ordonnance du 9 janvier 1822 en ordonna une seconde fois la suppression. Elle devint alors une des divisions du ministère de l'intérieur : celui qui en est chargé a le titre de directeur.

BEUGNOT

(JACQUES-CLAUDE), comte.

Une longue carrière administrative, parcourue en remplissant des fonctions nombreuses et variées, n'a fait de M. Beugnot que ce qu'il était avant de la commencer, à moins que l'on ne compte, comme une élévation digne de ses services, sa qualité de ministre d'État, celle de membre du conseil-privé, et le titre de comte. Son apparition, en 1814, au département

de la police, comme directeur-général, lui assigné une place obligée dans cette Biographie, malgré la courte durée et la presque nullité de son administration.

La révolution trouva M. Beugnot lieutenant-général au présidial de la ville de Bar-sur-Aube, où il est né en 1761. Lors de la division de la France en départemens, il fut élu procureur-général-syndic de celui de l'Aube, qui le nomma, en 1791, député à l'Assemblée législative. Ses travaux parlementaires furent principalement dirigés alors, comme ils le furent presque constamment depuis, vers les discussions financières. Au commencement de 1792, il combattit l'aperçu des dépenses de l'année, et, dans la séance du 5 janvier, il proposa de déterminer une époque de déchéance pour les demandes en liquidation des propriétaires d'offices supprimés. Le 15 du même mois, il répondit aux objections que fit le comité de la marine contre le ministre Bertrand-Molleville. Ce fut lui qui provoqua le décret du 4 février suivant, pour le paiement des rentes, et il combattit la motion faite par Condorcet, le 17 avril, d'accorder au peuple la nomination des commissaires de la trésorerie.

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La politique n'attira son attention que deux fois. A la séance du 21 janvier il insista pour qu'il fût demandé à l'empereur d'Allemagne des explications sur son adhésion au traité de Pilnitz, et sur la réponse ambiguë qu'il venait de faire à la notification de la constitution française. Le 3 mai, M. Beugnot donna le premier témoignage de ses

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