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tauration en 1814. Accouru aussitôt à Paris, il fut d'abord intendant des domaines de la couronne, puis, le 4 décembre de la même année, directeurgénéral de la police, en remplacement de M. Beugnot.

Dandré exerça ces dernières fonctions jusqu'en mars 1815, sans y développer l'expérience qu'on avait lieu d'attendre de lui. On se rappellera les prétendues intelligences qui facilitèrent les événemens du mois de mars; et en voyant ce fonctionnaire rester dans une inaction complète, on sera forcé ou de regarder le retour de Napoléon comme spontané et effectué sans artifice, ou de faire partager à Dandré le blame si généralement et si justement déversé sur la haute administration de cette époque. Ce blâme paraît en effet bien mérité par des hommes qui, loin de ménager à l'autorité nouvelle une affection que la France était si bien disposée à lui porter, ne travaillèrent par leurs actes impolitiques qu'à exciter des mécontentemens assez graves pour qu'une grande partie des Français se montrát favorable ou au moins indifférente à une pareille catastrophe. Dandré avait de plus, en sa qualité de chef de la police, la responsabilité particulière de l'emploi des moyens qu'une pareille charge mettait à sa disposition, et dont il ne sut pas se servir.

Après le second retour de Louis XVIII, Dandré rentra à l'intendance des domaines de la couronne. Il est mort depuis quelques années.

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d'œil général jeté sur la vie publique de

çe personnage ne fait apercevoir en lui qu'un de ces hommes qui se jettent avec une confiance vaniteuse au milieu d'affaires trop vastes pour leur médiocre capacité, et qui, après avoir fait quelque bruit, ne laissent après eux qu'un nom sans gloire et sans autorité.

FRANCHET.

Les sentimens religieux, lorsqu'ils sont sincères, élèvent l'âme au-dessus des faiblesses humaines, éloignent l'homme des intérêts de la terre, ou l'y rattachent par une abnégation de soi-même, qui devient alors une vertu; les actions du fidèle sont louables, pures, charitables, portées vers le bien; les fautes, les erreurs du prochain, lui paraissent excusables; il ne persécute pas ses semblables pour des opinions politiques contraires à la sienne, s'il en a; puisque tout doit retourner vers le Créateur, et que désespérer de la clémence éternelle est se rendre coupable de mé→ connaître sa divinité, l'indulgence pour le chrétien a sa place parmi les plus pressans besoins de la foi.

Les sentimens religieux manquent-ils au contraire de sincérité, la croyance se manifeste au-dehors par une piété farouche et du fanatisme le plus odieux; l'humilité est de l'hypocrisie; les tentatives pour ramener au giron de l'Église sont les folies de l'orgueil ou les fureurs de l'ambition; on veut commander, on veut soumettre; la haine accueille toute contradiction, et le fer, ct le feu, et le sang sont les

ne s'était pas borné à menacer l'empereur d'une excomunication, menace qui avait décidé ce prince à réunir les États romains à l'empire, mais encore il avait lancé contre lui ses foudres au moins inutiles.

On lisait dans la Bulle du Saint-Père: Que les souverains apprennent encore une fois qu'ils sont soumis, par la loi de Jésus-Christ, à notre trône et à notre commandement, car nous exerçons aussi une souveraineté, mais une souveraineté bien plus noble (1).

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M. Franchet fut-il chargé par ses compatriotes, comme on le pense, du colportage de cette bulle, ou tint-il sa mission de quelque personnage ou de quelque corps dévoué à la cour de Rome? c'est ce que je ne puis dire; mais il est certain que le commis-colporteur fut emprisonné, pour ce fait, à Sainte-Pélagie.

La misère l'aurait fort tourmenté dans sa prison, si le greffier ne lui eût fait connaître M. Ouvrard, que le gouvernement y tenait pour je ne sais quel motif de finances.

M. le comte Alexis de Noailles, également compromis dans l'affaire de la bulle, partageait le sort de M. Franchet, et ce fut là qu'ils se connurent.

Les événemens de 1814 rendirent M. Franchet à

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(1) Les vicaires de Jésus-Christ n'ont jamais eu sa modestie, car il avouait que son royaume n'était pas de ce monde, tandis que les successeurs de saint Pierre ont une cour fastueuse, et voudraient être les seuls princes temporels de l'univers entier.

la liberté. Il en usa sur-le-champ pour aller trouver M. de Noailles, qui, nommé commissaire du roi dans la dix-neuvième division militaire, le fit son secrétaire intime, et l'emmena avec lui.

Déjà s'agitaient à Lyon les membres de la vieille société de Jésus, que des vues de rétablissement ramenaient en France à la suite de l'ennemi. Ils cherchaient à conquérir la bienveillance du commissaire extraordinaire; aussi le secrétaire, qui avait des antécédens propres à les rassurer, fut-il flatté, fêté, recherché par leurs révérences.

Fondant ses espérances nouvelles sur leurs projets, vastes et savamment combinés, le dévouement le plus absolu à ces pères devint incontinent un de ses devoirs.

Fier, fort de leur appui, et recommandé d'ailleurs par M. de Noailles au marquis d'Herbouville, nommé directeur - général des postes, M. Franchet eut l'adresse de se faire attacher à cette administration et de s'y faire confier un bureau.

Il est vrai que le marquis d'Herbouville, qui arriva, sans avoir fait la guerre, et en passant par tous les grades, à celui de lieutenant-général, avait besoin de ramener l'esprit des Lyonnais, qu'il s'était aliéné par une conduite excessivement rigoureuse pendant ses fonctions de préfet du Rhône.

Les liaisons de M. Franchet avec messieurs de Jésus, et son affiliation à la Société pour le soulagement des prisonniers, l'avaient fait connaître du feu duc Mathieu de Montmorency et de M. de Corbière.

Lorsque, en 1821, le ministère Pasquier et de Serre fut obligé de céder la place au ministère Montmorency, Corbière, Peyronnet, Villèle et ClermontTonnerre, la manne tomba du ciel pour M. Franchet: le duc de Montmorency ou le futur comte Corbière, et tous deux peut-être en firent un directeur de la police du royaume, qui s'arrogea ensuite le titre de directeur-général, et prit le nom de FranchetDesperey. Ce nom de guerre lui vient-il de sa femme, mademoiselle Sainte-Luce, fille d'un sellier? je l'ignore. Il serait possible que son père possédât quelque coin de champ dans un lieu ainsi nommé; et si ma mémoire m'est fidèle, il me semble qu'il y a un village ainsi appelé, ou à peu près, sur les bords du Rhône, je ne sais de quel côté.

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Depuis, M. Franchet a été nominé conseiller d'État, récompense singulière, mais enfin récompense de ses importans services (1).

Compris, il y a quelques mois, dans le renvoi des hauts fonctionnaires de l'État, contre lesquels la France entière élevait sa voix puissante, ce directeur de police avait obtenu pour retraite la recette générale du Rhône; mais M. Roy s'étant refusé à contre - signer l'ordonnance de sa nomination, il se trouve aujourd'hui réduit à solliciter la recette de la Nièvre il est commandant de la Légion-d'Honneur!

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(1). Une ordonnance royale vient de le placer en service exiraordinaire.

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