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› gent d'établir à Paris une police active, sévère, qui déjoue tous les complots, évente tous les projets, > contienne tous les séditieux, éclaire toutes les intrigues, et maintienne le calme au milieu des orages, des passions particulières. La dépravation des » mœurs, la salubrité publique, méritent une solli»citude de tous les instans. Ces importans devoirs » sont du ressort du ministre de l'intérieur; mais » l'immensité de ses attributions ne lui permet pas » de donner à cette partie importante de son ad>ministration toute l'attention qu'elle commande si impérieusement. »

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En conséquence, le Directoire proposait de distraire la police à exercer dans le département de la Seine, des attributions du ministère de l'intérieur, de créer un septième ministère, et de lui donner pour attribution cette partie de police qui veille à la sûreté et à la tranquillité des habitans, ainsi qu'à la propreté et à la salubrité des communes. Les conseils, disait encore le message, pèseront dans leur sagesse s'il ne convient point d'y comprendre la garde nationale sédentaire, la gendarmerie et la légion de police, les prisons, maisons d'arrêt, de justice ct de réclusion, les hôpitaux civils, les établissemens et ateliers de charité, la répression de la mendicité et du vagabondage; les secours civils, les établissemens destinés aux sourds-muets et aux aveugles, les spectacles, les lieux publics, les cafés, les maisons de jeu, les maisons garnies, les logeurs, les poids et mesures, et la répression du scandale qu'offre le dé

bordement des mœurs et de la morale; le tout dans le seul arrondissement du département de la Seine. Dans la séance du g nivôse, Delaunay présenta au conseil des Cinq-Cents le rapport de la commission chargée d'examiner la proposition. Après quelques considérations préliminaires, il dit : « Paris n'est point une commune ordinaire : dans tous les temps, son immense population a nécessité, de la part du gouvernement, une surveillance particulière. Cette vaste cité, le centre des lumières, a toujours été, même avant la révolution, le rendez-vous des habitans de la France et des étrangers. Depuis la révolution, Paris est devenu le point de ralliement des factions. Ainsi ce n'est point créer un ministère pour un seul département, c'est l'organiser pour la république entière; laisser au ministre de l'intérieur la police générale dans la république, excepté dans le département de la Seine, c'est établir entre ces deux ministres une surveillance réciproque qui ne peut qu'être utile pour la chose publique ; c'est balancer de grands pouvoirs, dont l'exercice, divisé entre deux mains, ne peut jamais être dangereux. »

Dumolard prit aussitôt la parole: « Il faut savoir, s'écria-t-il, si vous n'aurez qu'un ministre pour Paris, ou si vous n'en établirez pas un qui surveille la police générale de la république; car, sous l'ancien régime, le lieutenant-général de police de Paris avait aussi une inspection sur toute la France. » L'orateur demanda l'ajournement.

Génissieux soutint la proposition du Directoire :

On ne peut exercer une bonne police à Paris, qu'autant qu'on aura l'œil ouvert sur les départemens. Si vous divisez la police entre plusieurs ministres, elle se fera mal : les relations qu'ils seront obligés d'entretenir ensemble feront qu'ils emploieront à délibérer le temps pendant lequel il serait nécessaire d'agir. Je ne vois nul inconvénient à adopter sur-le-champ la résolution. »

Massan du Loiret se livra à des développemens qu'il est important de reproduire; il s'exprima en ces termes : « La police de Paris se divise, suivant la loi de brumaire an 4 sur les délits et les peines, en police administrative et en police judiciaire. La police administrative consiste à prévenir les délits la police judiciaire à les réprimer.

» Le bureau central a la police administrative. » Les juges de paix ont la police judiciaire.

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» Il en résulte que, du moment où un délit est commis, le bureau central doit en livrer l'auteur à la police judiciaire : la recherche des complices est dès-lors confiée aux juges de paix; mais on observe qu'ils sont au nombre de quarante-huit, disséminés dans cette grande commune; que le lieu du délit détermine leurs attributions locales et respectives.

» On conçoit, par ce premier exposé, que le bureau central est un instant le point d'où partent les premières mesures. Avant la loi précitée, les commissaires recevaient la première impulsion de la commission de police; ils en étaient l'action; ils lui ren

daient compte, par l'envoi des procès-verbaux et pièces à conviction. Le départ s'en faisait aux tribunaux qui en devaient connaître ; et, dans ce passage, les notes et renseignemens se prenaient et s'inscrivaient sur les registres de la police: dans ce passage, les ramifications se faisaient connaître; des mandats d'amener étaient décernés contre les suspects de complicité; souvent même une première instruction était faite par la police pour saisir les fils; et dans les cas de récidive, les tribunaux en étaient informés.

» Il est inutile de démontrer les inconvéniens de cet ordre de choses.

Dans l'ancien régime, le lieutenant-général de police de Paris avait des bureaux divisés par attributions, à peu près comme ceux qui existent aujourd'hui,à la différence près des individus, qui valaient beaucoup mieux, parce qu'il les choisissait lui-même, et qu'il les payait bien. Il travaillait avec les chefs des différentes parties, et tout se réunissait à ce centre commun; ses pouvoirs étaient très-limités; il empruntait la puissance du ministère de l'intérieur.

» L'action de la police a, dans tous les temps, été considérée comme devant être tellement ardente, qu'on accordait au magistrat la faculté d'agir avant les ordres, qui ne lui étaient transmis qu'après, et que même, suivant les circonstances, on lui confiait des blancs-seings, dont malheureusement des lieutenans de police ont abusé, parce qu'alors la res

ponsabilité des fonctionnaires publics n'était qu'un vain mot.

» Des inspecteurs, répartis dans différens quartiers de Paris, avaient des parties distinctes confiées à leur vigilance. Ils avaient sous leurs ordres des surveillans subalternes qu'ils dirigeaient, et dont ils répondaient. Ces inspecteurs faisaient des patrouilles et des rondes, suivant les circonstances, avec cette espèce de milice grise, dans tous les endroits où le bon ordre et la sûreté l'exigeaient; les délinquans étaient arrêtés et conduits chez les commissaires de police, qui faisaient les premières instructions, envoyaient devant les juges, et rendaient compte à la police, ainsi que de tous les événemens de leur quartier respectif; les inspecteurs, de leur côté, faisaient des rapports. Ces différens anneaux correspondaient ainsi au point d'où la chaîne était partie. Le bureau central n'offre point tous ces avantages dans son organisation. Trois chefs sont à la tête de cette administration. De là le manque d'unité.

On ne peut pas se le dissimuler, la police en elle-même, dans une aussi grande cité que Paris, ne peut pas être considérée comme un objet de simple administration; elle exige un régime particulier, un chef et des hommes qui soient réellement propres à cette partie intéressante de l'ordre public. Il faut, pour l'exercer, un pouvoir qui s'étende presque jusqu'à l'arbitraire; et la responsabilité de ce chef ne peut être attaquée que d'après la perver

« EelmineJätka »