Page images
PDF
EPUB

Nous

mais

pouvons nous en approcher de plus près, pouvons-nous y parvenir? Faut-il méconnoître tous les Gouvernements ? faut-il les attaquer dans le principe vital? faut-il ôter aux lois leur autorité parce qu'il y reste des imperfections?

2. Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empéché. Nul ne peut être contraint à faire ce que la loi n'ordonne pas. Même équivoque déjà observée, ne peut, au lieu de ne doit. Devra est le langage du Législateur, peut est le langage du fait. Ainsi le Législateur auroit dû dire : « Tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne devra pas être empêché, et nul ne devra être contraint, etc.

Substituez le mot peut, vous dites ce qui est, et non ce qui doit être. Si je consulte un homme de loi, il me répond, on ne peut pas vous empêcher, on ne peut pas vous contraindre, c'est-à-dire la loi ne donne aucune autorité à qui que ce soit de vous empêcher, de vous contraindre.

D'ailleurs cet article est trop vague. Il y manque une explication nécessaire. Pris dans son sens littéral, il anéantiroit toute autorité particulière, pouvoir domestique, pouvoir de police, pouvoir militaire. Si je dis à mon fil s

[ocr errors]
[ocr errors]

ne montez pas ce cheval que vous n'avez pas la force de manier ; si je dis à ma fille, ne lisez point ce livre qui est dangereux pour vous, ils peuvent me défier de leur montrer une loi qui défende de monter un cheval fougueux ou de lire un livre indécent. Ce n'est pas aux lois seulement qu'il faut obéir, mais encore aux différentes autorités créées par la loi. On peut dire, il est vrai, que cela est compris virtuellement dans l'article, mais en matière d'obéissance et de devoir, on ne sauroit être trop explicite (1).

Ajoutez à l'article « Nul ne peut être con» traint à faire ce que la loi n'ordonne pas,

(1) Peu de temps après que cette révélation des droits de l'homme eut êté sanctionnée, les écoliers d'un des grands Colleges de France (celui de la Flèche, si je ne me trompe) furent assez bons logiciens pour y trouver tous les principes de l'indépendance. Armés de ce manifeste, et forts de cet article qu'ils avoient inscrit sur leur bannière, ils refusèrent l'obéissance à leurs Préfets, et procédèrent à une insurrection en règle, pour maintenir leurs droits imprescriptibles et inaliénables. Cette scène de college n'étoit qu'un prélude de cet anéantissement de toutes les autorités et de cet esprit d'insubordination qui a couvert la France d'un déluge de sang et de boue.

t

>> bien entendu qu'il faut rendre obéissance à » toutes les autorités qui seront créés par la » loi, comme si c'étoit la loi même qui parlât >> en leur nom,» il n'y a plus de danger, mais je ne sais plus quel droit vous m'avez donné jusqu'à ce que je sache quelles sont les autorités que la loi peut créer. Nuisible ou frivole, c'est toujours l'alternative de cette déclaration.

[ocr errors]

LA

ART. VI.

4 loi est l'expression de la volonté générule. Tous les citoyens ont le droit de concourir personnellement ou par leurs représentants à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses yeux, sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.

OBSERVATION S.

[ocr errors]

Cet article est un chaos de propositions qui n'ont point de lien commun, et qui se rapportent à des lois constitutionnelles, - à des lois civiles, à des lois pénales. Examinonsles séparément.

[ocr errors]

1. Proposition. La loi est l'expression de la volonté générale.

De quelle loi parle-t-on?- de quel pays? — de quel temps? Je ne connois point de loi,

point de pays, point d'époque qui puisse justifier cette assertion. La définition est notoirement fausse; d'après cela, il n'y a point de pays qui ait des lois, car, même à Genève et dans les petits Cantons démocratiques, il s'en faut bien que le droit de suffrage ne soit universel, il ne s'étend pas même à la majorité du nombre total des habitants. Cet article est donc l'éponge de tous les Gouvernements : mais qu'importe ! puisque l'objet favori de cette effusion de bienveillance universelle étoit de déclarer tous les Gouvernements dissous et de le persuader à tous les peuples.

Cette prétendue définition n'étoit pas une invention des Législateurs François. Ils l'ont empruntée de Rousseau, qui, dans son Contrat Social, l'a présentée avec toute la solennité possible, comme une découverte de la plus haute importance pour le genre humain.

2.de Proposition. Tous les citoyens ont le droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants à sa formation.

Ici le langage change. Ce n'est plus un fait qu'on énonce. C'est un droit qu'on déclare. Il n'y a plus d'ambiguité. Il est décidé par les Législateurs de la France que dans tous

« EelmineJätka »