Page images
PDF
EPUB

de Bade se partageait alors en deux lignes, celle de Bade qui était catholique, et celle de Dourlach, protestante; la première possédait ce qu'on appelait le margraviat supérieur, l'autre le margraviat inférieur. Édouard-Fortuné, margrave de Bade, avait contracté tant de dettes, que l'empereur se vit obligé d'ordonner le séquestre de ses États, entre les mains des ducs de Bavière et de Lorraine. Ces deux commissaires traitèrent avec les comtes de Fugger, pour leur abandonner le margraviat supérieur. Ernest-Frédéric, margrave de Bade-Dourlach, demanda la priorité que les pactes de famille lui adjugeaient, et se mit en possession du pays en 1595. Édouard-Fortuné périt par un accident en 1600. Le margrave de Dourlach contesta, au fils qu'il laissa, et qui se nommait Guillaume, non-seulement l'habilité à succéder, sa mère, une demoiselle d'Eyken, n'étant pas de haute noblesse, mais même la légitimité de sa naissance; ainsi, il transmit le margraviat supérieur à son frère et successeur, George-Frédéric. Ce fut ce prince qui, au commencement de la guerre de Trente ans, prit les armes contre l'empereur, et que Tilly défit à Wimpfen, le 6 mai 1622. Il avait cédé ses États, en 1621, à son fils Frédéric V. Un arrêté du conseil aulique, du 26 août 1622, condamna ce prince à rendre aux héritiers d'Édouard-Fortuné le margraviat supérieur et les fruits perçus depuis vingt-huit ans. Cette sentence, obtenue par les sollicitations du nonce du pape ', fut mise à exécution par la force des armes. Cependant les vicissitudes de la fortune ne laissèrent pas la branche d'Édouard en possession tranquille.

Le margrave de Bade-Dourlach demanda à être rétabli, en vertu de l'amnistie, dans la possession de

[ocr errors][merged small]

tout ce qu'il avait eu au commencement de la guerre ; mais il ne réussit pas entièrement. Le margraviat supérieur fut adjugé aux descendants d'Édouard-Fortuné, ou plutôt on ne rendit à la branche de Dourlach que celles de ses terres qui ne faisaient pas partie de la succession de Bade.

Au lieu des fruits perçus que le conseil aulique avait condamné la maison de Dourlach à restituer, celle-ci s'était chargée du payement d'une somme de trois cent quatre-vingt mille florins, par une transaction passée à Ettlingen, en 1629; pour sûreté de ce payement, elle avait abandonné aux héritiers d'Édouard-Fortuné les bailliages de Stein et de Remchingen. La paix de Westphalie les lui rendit, annula la transaction d'Ettlingen et toute prétention pour dommages et intérêts de la part de la branche de BadeBade.

L'épouse de Frédéric V, margrave de Bade-Dourlach, était fille unique du dernier comte de Geroldseck, mort en 1634. Elle réclama la succession de son père; mais l'empereur en avait accordé l'expectative au baron de Kromberg, qui s'en était mis en possession. Le traité de Westphalie renvoya cette affaire aux tribunaux. La chose n'eut pas de suite; et à l'extinction de la famille de Kromberg, l'empereur conféra le comté de Hohen-Geroldseck à la maison de la Leyen, qui en est encore en possession.

-Le duc de Wurtemberg avait été excepté de l'amnistie de Prague. Les nombreux couvents qui avaient été sécularisés dans le duché furent alors rendus au clergé; la maison d'Autriche s'empara de quelques bailliages à sa convenance, et Ferdinand II disposa de plusieurs terres et châteaux en faveur de ses ministres

[blocks in formation]

et de ses généraux. La branche de la maison de Wurtemberg, qui régnait à Montbéliard, fut dépouillée de plusieurs terres en Alsace, et de deux fiefs francscomtois, Clerval et Passavant. Cette maison obtint, par la paix, sa restitution complète, et, ce qu'on regarde comme une grande preuve de l'adresse de son plénipotentiaire, Varnbühler, elle l'obtint, non en termes généraux énonçant un principe, mais de manière que tout ce qui devait lui être rendu fût dénommé dans l'instrument1.

Plusieurs autres princes, comtes et seigneurs, auxquels revenait le bienfait de l'amnistie, furent encore spécialement nommés dans le traité; mais le grand nombre de ceux qui réclamaient cette faveur fut cause qu'on cessa de les désigner, et que quelques-uns même, qui avaient déjà été portés dans le projet, en furent rayés. On convint ensuite d'énoncer, dans le préambule de l'article 4, la clause que ceux qui n'étaient pas nommés ou qui avaient été effacés, ne seraient pas pour cela regardés comme omis ou exclus.

-A la suite de tous les princes et seigneurs nommément restitués, on parle aussi des sujets et vassaux des pays héréditaires de l'empereur et de la maison d'Autriche. Les Suédois n'avaient rien négligé pour leur faire accorder une amnistie complète; mais les ministres de l'empereur la refusèrent dans les termes les plus formels. La cour de Vienne craignait, pardessus tout, la rentrée d'une foule d'exilés, dont l'exaltation pouvait causer les plus grands troubles. La moitié des terres du royaume de Bohême et un tiers de celles de l'Autriche avaient changé de maîtres depuis trente ans. La cour ne s'était rien approprié des biens confisqués; mais elle en avait disposé, en faveur

• Article 4, de la paix d'Osnabruck, § 24.

de familles attachées au souverain, et des jésuites. Une grande partie de ces biens se trouvaient entre les mains de tiers possesseurs, auxquels il aurait fallu en rembourser le prix, si on les avait rendus aux premiers possesseurs. Il ne faut donc pas s'étonner que l'empereur se soit refusé à une restitution qui ne pouvait s'effectuer qu'avec de graves inconvénients. Il paraît que ses ministres employèrent différents moyens pour refroidir le zèle des Suédois en faveur des protestants des héréditaires. Un écrivain célèbre, que son attachement pour la religion catholique et pour la maison d'Autriche n'a pas rendu injuste, Ignace Schmidt, a donné de la probabilité à l'opinion, que l'on profita du besoin d'argent où se trouvait la reine Christine de Suède, pour acheter, moyennant une somme de six cent mille écus d'Empire, son désistement de la protection qu'elle avait accordée à ces exilés1.

pays

Quoi qu'il en soit, l'amnistie que le traité accorde aux sujets héréditaires de la maison d'Autriche est très-limitée, et n'a pour objet que leurs personnes, vies, renommée et honneur. Ils pourront revenir dans leur patrie, mais ils seront obligés de se soumettre aux lois existantes sur la religion, et ne jouiront point de la liberté de conscience; leurs biens leur seront rendus, s'ils n'en ont été dépouillés que depuis 1630, et pour avoir porté les armes, soit pour la Suède, soit pour la France; par conséquent, les Bohêmes, qui avaient pris fait et cause pour Frédéric V, restèrent dépouillés.

Après l'amnistie, nous parlerons des droits et des libertés des États d'Empire. Ils jouiront, dit l'article 8, du droit de suffrage dans toutes les délibérations sur les affaires de l'Empire, principalement lors

'Gesch. der Deustchen, vol. XI, p. 188.

qu'il s'agira de faire des lois ou de les interpréter, de résoudre une guerre au nom de tout l'Empire, d'imposer une contribution, d'ordonner des levées et logements de troupes, de construire de nouvelles forteresses, ou de mettre des garnisons dans les anciennes, comme aussi lorsqu'il s'agira de la paix ou de traités d'alliance, et autres choses semblables; rien de tout cela ne se fera, si ce n'est du libre consentement des États d'Empire assemblés en diète1. On peut envisager cet article du traité comme la base de la Constitution qui, depuis cette époque, a régi l'Empire. Il consacra un droit que les empereurs n'avaient jamais reconnu comme tel.

- Les États sont maintenus à jamais dans l'exercice de la supériorité territoriale et des autres droits, prérogatives et priviléges, dont ils avaient joui précédemment. Leur supériorité territoriale est déclarée s'étendre aussi bien sur les choses ecclésiastiques que sur les choses politiques ou le temporel'. Il leur sera libre de faire des alliances tant entre eux qu'avec les puissances étrangères, chacun pour sa conservation et pour sa sûreté, pourvu que ces alliances ne soient point tournées contre l'empereur et l'Empire, ni contraires à la paix publique, ou à celle de Westphalie 3.

Cette clause surtout avait été vivement débattue dans les négociations. Les Impériaux soutenaient qu'il n'était permis à aucun prince d'Empire de s'allier avec une puissance étrangère, sans l'agrément de l'empereur, comme chef de l'Empire, et que toute alliance, faite d'une manière différente, était illégale, et devait être regardée comme un acte de rébellion. Il importait à la France de ne pas laisser prévaloir ce

[blocks in formation]
« EelmineJätka »