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sur ces traités ne pourront être décidés qu'en pleine diète, et par accommodement entre les États des deux religions.

Le dernier chef parmi les affaires de l'Empire concerne le commerce1. Les nouveaux péages et les autres entraves qui s'étaient introduits pendant la guerre, sont abolis, et les choses remises à cet égard dans l'état où elles avaient été auparavant. On maintient toutefois les péages, établis avant la guerre du consentement de l'empereur et des électeurs; de ce nombre est le péage du Wéser du comte d'Oldenbourg, dont il a été si souvent question de nos jours sous le nom de péage d'Estflelh.

A l'occasion des entraves que le commerce avait éprouvées, il est question des abus de la bulle d'Or de Brabant. On appelait ainsi un privilége que l'empereur Charles IV avait donné, en 1349, aux habitants' du Brabant, et qui interdisait d'évoquer leurs procès à des tribunaux de l'Empire. Les Brabançons donnèrent à ce privilége un telle extension qu'ils prétendirent même pouvoir actionner devant leurs tribunaux des étrangers n'ayant pas de domicile en Brabant.

-La satisfaction de la France est traitée au § 69 et suivants de la paix de Munster. On y cède à cette puissance: 1° La souveraineté de l'Empire sur les trois évêchés de Metz, Toul et Verdun, sur les villes de ce et sur les districts de ces évêchés.

nom,

Le terme de district, qui est ici employé dans le traité, ne semble avoir d'autre signification que celle de territoire ou de finage 1; en sorte qu'avec les TroisÉvêchés, l'Empire cède aussi à la France la souverai

1 Article 9 du traité d'Osnabruck.

neté sur les territoires ou finages de ces évêchés. Louis XIV donna cependant, à l'époque de ses réunions, une signification beaucoup plus ample à ce terme. En se réclamant de l'acte particulier de cession qui lui avait été délivré, il soutint que le mot de district, renfermait pareillement la cession de la souveraineté sur les territoires de tous les États immédiats de l'Empire, qui étaient vassaux des Trois-Évêchés1.

2o La souveraineté et les droits de l'Empire sur la ville de Pignerol, cédée en 1632 à la France, par la maison de Savoie, à la suite du traité de Quérasque2.

3o Le Vieux-Brisach, avec sa banlieue et son territoire, et les villages de Hochstadt, Niederimbsing, Harten et Acharren en dépendant 3.

4o Le droit de garnison dans Philippsbourg, sauf à l'évêque de Spire ses droits de propriété et de supériorité territoriale*.

5o Le landgraviat de la haute et de la basse Alsace, avec le Sundgau et la préfecture des dix villes impériales d'Alsace.

Il n'y a pas une disposition dans les traités de Westphalie qui soit moins claire que celle qui établit cette dernière cession, et l'esprit de parti est parvenu à l'embrouiller encore davantage. Aujourd'hui que la dispute qui s'est prolongée pendant un siècle et demi, n'a plus le même intérêt, il nous sera peut-être permis de chercher la vérité à travers les ténèbres qui l'environnent. Pour y parvenir, nous allons d'abord rapporter les

'C'est ainsi que l'a traduit Léonard, dans ses traités de paix.

2 Voy. ci-dessus, p. 170. Pignerol fut rétrocédé à la maison de Savoie par le traité de Turin, de 1696.

* Cette ville, avec ses dépendances, fut rendue à la maison d'Autriche par le traité de paix de Riswick, en 1697.

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SS 76 et 77 du traité de Munster. Ce droit de garnison a été rétrocédé à l'Empire par la paix de Nimègue, en 1679.

textes, dire ensuite comment ils ont été interprétés, et finir par émettre notre opinion.

Nous avons parlé des textes; il y a en effet, dans le traité, trois stipulations différentes qui se rapportent à la cession de l'Alsace. La première est renfermée dans les SS 73 et 74 du traité de Munster. « L'empereur, y est-il dit, tant en son nom qu'en celui de toute la maison d'Autriche, comme aussi l'Empire, cèdent tous les droits, propriétés, domaines, possessions et juridictions qui, jusqu'ici, ont appartenu tant à lui qu'à l'Empire et à la famille d'Autriche, sur la ville de Brisach, le landgraviat de la haute et basse Alsace, le Sundgau et la préfecture provinciale des dix villes impériales, situées en Alsace; savoir: Haguenau, Colmar, Schélestadt, Wissembourg, Landau, Oberehnheim, Rosheim, Munster dans la vallée de Saint-Grégoire, Kaisersberg, Thuringheim, et tous les villages et autres droits qui dépendent de ladite préfecture, et les transfèrent tous sur le roi très-chrétien, et le royaume de France, ainsi que ladite ville de Brisach, avec les villages de Hochstadt, Niederimbsing, Harten et Acharren, qui appartiennent à la commune de Brisach, avec tout le territoire et la banlieue, tels qu'ils s'étendent depuis les anciens temps, sauf les priviléges et les immunités de la même ville qu'elle a anciennement obtenus de la maison d'Autriche. Ledit landgraviat des deux Alsaces et du Sundgau; ainsi que la préfecture provinciale sur lesdites dix villes et les lieux qui en dépendent, de même que tous les vassaux, landsasses, sujets, hommes, villes, châteaux, villages, forteresses, bois, forêts, mines d'or, d'argent et d'autres minerais, fleuves, ruisseaux, pâturages, et tous les droits régaliens et appartenances, sans aucune réserve, avec toute espèce de juridiction, de supériorité et de domaine suprême, appartiendront dorénavant à per

pétuité au roi et à la couronne de France, et seront censés incorporés à ladite couronne, sans aucune contradiction de la part de l'empereur, de l'Empire, de la maison d'Autriche, ou de tel autre que ce soit, de manière qu'aucun empereur ou prince de la maison d'Autriche ne puisse ni ne doive jamais à l'avenir prétendre posséder aucun droit ou pouvoir sur ces susdites parties situées en deçà et au delà du Rhin. »

Une cession si générale est limitée par le § 87 du même traité : « Que le roi très-chrétien, dit ce paragraphe, soit tenu de laisser non-seulement les évêques de Strasbourg et de Bâle, et la ville de Strasbourg, mais aussi les autres États ou Ordres qui sont dans l'une et l'autre Alsace, les abbés de Murbach et de Lure, l'abbesse d'Andlau, Munster au val Saint-Grégoire, de l'Ordre de Saint-Benoît, les palatins de la Petitepierre, les comtes et les barons de Hanau, Falckenstein, Oberstein et toute la noblesse de la basse Alsace, de même que les dix villes impériales qui dépendent de la préfecture de Haguenau, dans le droit dont ils ont joui jusqu'ici de relever immédiatement du Saint-Empire, de sorte qu'il ne puisse prétendre sur eux ultérieurement aucune supériorité royale, mais qu'il se contente des droits qui appartenaient à la maison d'Autriche, et qui, par ce présent traité de pacification, sont cédés à la couronne de France. »

Ainsi les deux landgraviats d'Alsace, le Sundgau et la préfecture provinciale des dix villes impériales, sont cédés à la France en toute souveraineté et propriété; car la juridiction, la supériorité territoriale et le domaine direct, constituent la véritable souveraineté et suzeraineté, ou l'ensemble des droits qui appartiennent au seigneur et de ceux qui appartiennent à l'Empire. La maison d'Autriche, d'une part, et l'Empire, de l'autre, perdent tous leurs droits sur ces provinces;

elles sont démembrées à la fois des États de la maison d'Autriche et de l'Empire germanique, et incorporées à la France. Tout est clair et précis, pourvu qu'il n'existe pas d'équivoque sur la signification des mots de landgraviats de la haute et basse Alsace, Sundgau, et préfecture des dix villes impériales. Supposons que ces mots expriment les possessions de la maison d'Autriche en Alsace, le § 87, autant que nous l'avons rapporté, est parfaitement en harmonie avec les SS 73 et 74, puisqu'il dit que de la cession de l'Alsace sont exceptées toutes les terres de cette province qui n'appartenaient pas à la maison d'Autriche, et qui relevaient immédiatement de l'empereur et de l'Empire. Le roi de France ne prétendra pas exercer sur eux de supériorité royale.

Mais nous n'avons pas rapporté en entier le § 87; il se termine ainsi : « de manière cependant que, par cette déclaration, il ne soit point dérogé aux droits de domaine suprême ci-dessus accordés à la France. »> Ici nous demandons si les §§ 73 et 74 n'ont cédé à la France que la souveraineté des possessions de la maison d'Autriche; si le.§ 87 stipule expressément ce que les deux premiers disaient implicitement, quel est donc ce domaine direct cédé par les SS 73 et 74, et réservé par le § 87? Si, dans les premiers paragraphes, les possessions autrichiennes sont seules cédées, mais qu'elles le soient avec la supériorité territoriale appartenant à l'Autriche, et avec le domaine direct qui constituait le droit de l'Empire; et si les États dont il est question dans le § 87 n'étaient pas compris dans S la cession énoncée dans les deux premiers paragraphes, quel est donc ce domaine direct cédé par les SS 73 et 74, et auquel les exceptions du § 87 ne doivent pas déroger? Si les SS 73 et 74 ont cédé à la France un domaine direct au delà des possessions de la maison

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