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donne aux puissances contendantes le soin de s'arranger entre elles.

Les négociations de paix se suivent rarement dans la résidence de l'un des souverains ennemis, ce qui serait fort souvent le meilleur moyen de les abréger, car la crainte de paraître annoncer un trop pressant besoin de la paix, par l'envoi d'un plénipotentiaire dans la capitale ennemie, est d'autant plus mal fondée, qu'en plusieurs occasions on a vu les ministres du vainqueur se rendre près du vaincu pour traiter. Les plénipotentiaires qui sont ainsi envoyés à la cour de l'ennemi, après avoir reçu de lui les passe-ports nécessaires, ne sont pas communément admis à l'audience du souverain, mais ils présentent leurs pleins pouvoirs au secrétaire d'État avec lequel ils entrent en négociation; ils jouissent, du reste, de tous les droits essentiels attribués aux ministres, et surtout de l'inviolabilité, qui doit être sacrée, lors même qu'ils sont renvoyés ou rappelés. Ordinairement on place le siége des négociations à une distance à peu près égale de la résidence des deux souverains, ou dans tel autre lieu qui offre des facilités. Si les circonstances obligent de l'établir en pays ennemi, et à proximité du théâtre de la guerre, il est d'usage de déclarer neutre l'endroit qui a été choisi, et les courriers des plénipotentiaires voyagent sous la protection du droit des gens.

III. Paix préliminaire et paix définitive. Lorsque, avant ou pendant la guerre, les relations de plusieurs puissances se sont extrêmement compliquées, il faut souvent établir des conférences préalables pour statuer quelles seront les puissances qui prendront part aux négociations, quels gouvernements se chargeront de la médiation, et de quelle manière ils procéderont; en quel lieu, et à quelle époque, les plénipotentiaires se réuniront, quel mode on adoptera pour traiter, quel

cérémonial les ministres observeront entre eux. La solution de ces diverses questions constitue ce qu'on appelle préliminaires de paix.

Il arrive assez fréquemment qu'une des puissances belligérantes, avant d'entamer des négociations, exige de la partie adverse la concession absolue de certains points, en écartant toute discussion ultérieure à cet égard, et quelquefois même en refusant toute espèce de compensation. Telle fut la renonciation de Philippe V à la succession éventuelle au trône de France, lors du congrès d'Utrecht. On donne à ces stipulations le nom de conditions préliminaires.

Dans les temps modernes, on a jugé à propos de supprimer les conférences ayant pour objet les simples préliminaires de paix, en se concertant, soit directement par écrit, soit par l'entremise d'une tierce puissance, sur les points dont il pourrait être question. Lorsqu'ensuite les plénipotentiaires se sont réunis pour traiter de la paix même, on est d'abord convenu des articles essentiels et principaux, renvoyant à des négociations ultérieures la déduction des conséquences et la discussion des détails, afin de mettre le plus tôt possible un terme aux calamités de la guerre, et d'éviter l'effusion du sang pour des objets d'une importance secondaire. On suit partout cette marche, si l'on n'a pas conclu d'armistice pendant qu'on négociait. C'est ainsi que la distinction entre la paix préliminaire et la paix définitive s'est établie.

Dans la règle générale, la première n'est que provisoire : son principal objet est d'arrêter les hostilités, en fixant les bases d'un traité définitif; ainsi, elle devient caduque si celui-ci n'a pas lieu. La pratique est conforme à ce principe.

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IV. Modes de négociations, congrès. On a peu d'exemples de négociations pour la paix, suivies par

les souverains en personne; et, d'une autre part, l'incertitude du succès que l'on se promettrait d'une simple correspondance qui serait établie dans le même dessein entre les cours respectives, ne doit pas engager à choisir cette voie. En 1761, des négociations entre la France et la Grande-Bretagne avaient été commencées par ce moyen, mais on n'en sentit que plus vivement l'insuffisance. La diversité des matières qui doivent être réglées, et la multitude des incidents qui ̧ peuvent survenir, nécessiteront toujours une réunion de plénipotentiaires.

On appelle Congrès, en général, une assemblée des plénipotentiaires de plusieurs puissances, à l'effet de traiter d'affaires communes aux divers gouvernements qu'ils représentent.

Dans les derniers temps, on a vu des monarques eux-mêmes présider à des congrès qui avaient pour but de resserrer leurs alliances, et d'arrêter des mesures d'intérêt général.

Quel que soit le lieu où se tiennent les conférences pour la paix, les ministres chargés de la conclure, doivent y jouir de l'inviolabilité et de toutes les immunités, que l'usage a de tous les temps et chez tous les peuples, attachées à leur caractère, et toutes les précautions doivent être prises pour la sûreté de leur route, comme pour celle de leur séjour.

Quant au cérémonial que les plénipotentiaires observent entre eux, ils le règlent eux-mêmes; et lorsque le désir de faire la paix est sincère de part et d'autre, on se débarrasse de la gêne de l'étiquette. Dans le cas contraire, les difficultés peuvent devenir interminables. Tout ce que nous croyons utile d'observer à cet égard, est que les plénipotentiaires doivent se légitimer réciproquement, en produisant des pleins pouvoirs revêtus des formes généralement adoptées.

Si un médiateur intervient, l'échange se fait communément par son entremise. On désigne un local fixe pour les séances ordinaires, à moins qu'elles ne se tiennent alternativement chez les ministres.

Ces premières formalités accomplies, les négociations sont entamées par l'échange des notes et mémoires, et on les continue, soit en émettant des votes par écrit, soit par des discussions orales que l'on consigne dans des procès-verbaux ou protocoles.

Quelquefois pour accélérer les travaux, on forme des commissions particulières, qui font leurs rapports à l'assemblée générale.

On entend par vote, un mémoire très-succinct par lequel un plénipotentiaire déclare, au nom de son souverain, son avis ou opinion sur un objet soumis aux débats.

Ils sont conçus dans la forme des notes verbales ou memorandum, sans introduction, sans conclusion et sans autre courtoisie; souvent aussi les votes sont émis au nom même du constituant, et, dans ce cas, le plénipotentiaire n'y fait aucune mention de sa personne. Le texte du vote se compose d'une exposition de l'état de la question, et d'une déclaration concise de l'opinion que l'on adopte, et des raisons sur lesquelles on les fonde.

Les protocoles, ou procès-verbaux, sont des relations exactes de ce qui se passe aux séances; on les dresse pendant les discussions mêmes, afin d'établir de l'ordre dans les débats et de conserver mémoire des points arrêtés.

On met en tête du protocole la date de la séance; on dresse ensuite un rapport substantiel de la discussion, et l'on termine par un résumé qui contient les résolutions que l'on a prises.

Quant à la clôture des congrès, elle se fait par la

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signature d'un acte final, qui peut être : 1° un traité; 2o un recès général, c'est-à-dire, une transaction commune, un instrument général, comprenant et coordonnant entre eux les différents traités particuliers; 3o une déclaration : telle fut celle de Laybach; enfin, une décision arbitrale, comme celle qui fixa, en 1816, le droit de succession au duché de Bouillon.

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Il nous reste à consigner ici une observation utile. La nature et les attributs d'un congrès n'étaient pas même encore parfaitement déterminés, en 1814, lors de la première réunion à Vienne, et des discussions s'élevèrent à cet égard. Les uns voulaient que le congrès fût le tribunal suprême de l'Europe, avec un pouvoir illimité; d'autres ne l'envisageaient que comme un centre de négociations sans formes précises.

Mais, en nous référant à la définition que nous avons adoptée, nous établissons que les plénipotentiaires représentant des États indépendants, l'organisation et la manière de procéder d'un congrès, sont libres de leur part; qu'ils ne sauraient être astreints qu'au mode de négocier qui leur convient, et que tout rentre dans la forme des négociations ordinaires, modifiées par les circonstances et les besoins présents. Dès lors, toute discussion sur la forme obligée d'un congrès, cesse, et l'on s'en convaincra en jetant un coup d'œil sur les principaux congrès des deux derniers siècles.

A Munster, les plénipotentiaires agirent séparément, et n'eurent point de séances communes. Tout passait par les mains des deux médiateurs, Contarini et Chigi, lesquels recevaient et transmettaient les notes, proposaient des avis conciliatoires, mais ne décidaient rien. On n'y vit point de comités, ni de commissions, mode d'opérer introduit dans les assemblées délibérantes de nos jours. A Osnabruck, il n'y eut pas même de médiateur, mais quelques conférences par

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