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et cette motion peut devenir l'occasion d'un nouveau débat, L'Opposition se sert trèsrarement de ces différens moyens pour retarder la marche d'un Bill, mais on les tient en réserve pour des cas extraordinaires, lorsqu'un délai pourroit produire des résultats importants.

On objecte contre ce plan, qu'il entraîne beaucoup de longueurs, et qu'il est des circonstances impérieuses où il importe qu'une loi soit passée avec beaucoup de rapidité. Je réponds à cette objection que, dans ces cas de nécessité; les trois lectures d'un Bill peuvent se faire dans le même jour et dans les deux Chambres. Il y en eut un exemple, si je trompe, à l'occasion de la révolte de la flotte du Nore, en 1797; mais il faut, pour en venir à ces moyens extrêmes, une urgence évidente qui surmonte toute opposition.

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Ceux qui objectent contre ces formes leur lenteur, ne s'aperçoivent-ils pas que leur objection porte contre la réflexion contre les informations, qui ne sont souvent que le fruit du temps et de l'étude ? Il y aura des répétitions. Mais une conviction raisonnée ne s'opère jamais tout d'un coup. Le meilleur argument a besoin d'être présenté à divers

intervalles, et sous plusieurs aspects. C'est ainsi qu'il s'adapte à la diversité des entendements, et qu'il se dépose dans la mémoire (1). Ces hommes que l'on persuade avec un mot, on les perd aussi facilement qu'on les a gagnés. Laissez naître l'opiniâtreté du débat, il en résultera de la persévérance dans la conduite. On doit se souvenir en France, avec effroi de ces terribles décrets d'urgence, de ces décrets pour fermer la discussion, c'est-à-dire pour subjuguer la minorité, pour étouffer les arguments que l'on craignoit le plus. Plus un peuple se sent facile à émouvoir et à entraîner, plus il doit se mettre sous la protection des formes qui imposent la nécessité de la réflexion, et qui préviennent les surprises.

On peut faire une réponse plus directe à cette objection des longueurs. Les trois débats amènent bien nécessairement des intervalles mais ils ne tendent point à rendre la discussion plus longue dans sa totalité. Ils ont plutôt l'effet contraire. En effet, ces trois débats ont

(1) Un Membre expérimenté de la Chambre des Communes disoit : a truth in the House of Commons requires a great deal of soaking. Ce mot présente le progrès de la vérité sous l'image d'une étoffe qui doit tremper long-temps dans la couleur pour s'en imbiber.

des objets différents, et divisent la délibération d'une manière très-convenable. Dans le premier, on se borne à considérer la convenance ou la disconvenance du projet de loi, sous un point de vue général. Est-il rejeté? il y aura eu une grande économie de temps, parce qu'on ne s'est point occupé de la critique particulière des divers articles. Et, en effet, à quoi serviroitil d'en examiner en détail toutes les clauses, et de proposer des amendements! Ce seroit ôter les taches d'un habit que peut-être on va jeter. au feu. Le projet de loi est-il admis comme convenable en lui-même et dans son principe?

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passe alors au second débat: et c'est là qu'on prend en considération, l'une après l'autre, chaque clause de la loi, qu'on propose des amendements, ou qu'on renvoie, dans l'intervalle d'une séance à l'autre, à un Comité particulier, chargé de rédiger toutes les corrections de détail, espèce de travail auquel une assemblée nombreuse n'est guères propre. Les votes qu'on prend dans ce second débat n'ont rien de définitif. Ces votes ne sont qu'une manière de terminer la discussion sur chaque article, et de pressentir le vœu de l'Assemblée.

Après un intervalle nécessaire pour laisser reposer l'esprit, et pour revoir de sang-froid

ee projet de loi, ainsi amendé ,. on arrive au troisième débat avec une connoissance approfondie de la loi ; on en reprend l'examen dans sa convenance générale et dans toutes ses clauses particulières. Ceux qui ont proposé des amendements les reproduisent s'ils ont obtenu l'assentiment de la majorité, et ne les reproduisent pas dans le cas contraire. Plus une Assemblée sera exercée, plus la matière sera éclaircie dans les deux premiers débats, et le troisième, en général, sera trèsrapide. Le premier, qui roule sur la convenance ou la disconvenance de la loi, peut être fort long, mais le plus souvent il est presque nul.

CHAPITRE XIX.

EXCLUSION DES DISCOURS ÉCRITS.

La règle d'exclusion par rapport aux discours

A

écrits est strictement observée dans le Parlement Britannique. Elle doit l'être dans toutes les Assemblées délibérantes.

« Le principal inconvénient de ces discours écrits, est de n'avoir point de suite, de liaison, de rapport les uns avec les autres.

>> Il est facile de sentir qu'une assemblée politique n'est pas une société d'académiciens; que le plus grand avantage d'un Sénat national et d'une discussion publique, est précisément dans cette activité des esprits, dans cette énergie de sentiments, dans cette abondance de moyens que produit le spectacle d'une grande assemblée d'hommes éclairés qui s'animent, qui s'inspirent, qui s'attaquent sans se ménager, et qui, se sentant pressés de toutes les forces d'un antagoniste, développent euxmêmes dans leur défense des forces qui leur étoient inconnues. L'attention est comme le verre qui concentrant tous les rayons dans un seul foyer, en fait jaillir le feu et la lumière.

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