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DES ASSEMBLÉES POLITIQUES

DÉLIBÉRANTES.

LE

CHAPITRE PREMIER.

SUJET DE L'OUVRAGE:

E mot Tactique, emprunté du grec et rendu familier par son application à une branche de l'art militaire, signifie, en général, l'art de mettre en ordre. Il peut servir à désigner l'art de conduire les opérations d'un corps politique, aussi bien que l'art de diriger les évolutions d'une armée.

Ordre suppose but. La tactique des assemblées politiques est donc la science qui enseigne à les conduire vers le but de leur institution, au moyen de l'ordre à observer dans leurs démarches.

Dans cette branche de gouvernement, comme dans plusieurs autres, le but est, pour ainsi dire, de nature négative. Il s'agit d'éviter des

inconvénients, de prévenir les difficultés qui doivent résulter d'une grande réunion d'hommes appelés à délibérer en commun. L'art du Législateur se borne à écarter ce qui pourroit nuire au développement de leur liberté et de leur intelligence.

Le bien ou le mal que peut faire une Assemblée dépend de deux causes générales. La plus palpable et la plus puissante est sa composition; l'autre est son mode d'agir. De ces deux causes, la dernière est la seule qui appartienne à notre sujet. La composition de l'assemblée, le nombre et la qualité de ses membres, le mode de son élection, ses relations avec les citoyens ou avec le gouvernement, tout cela est du ressort de la constitution politique.

Je me bornerai à dire sur ce grand objet,

que la composition d'une assemblée législative sera d'autant meilleure, qu'elle aura plus de points de contact avec la nation, c'est-à-dire que son intérêt sera plus semblable à celui de la Communauté (1).

(1) Il y a quatre conditions requises pour inspirer à la nation une confiance permanente dans une assemblée, qui est censée la représenter. 1.o Une élection directe; 2.o l'amovibilité; 3.° certaines conditions pour être électeur ou éligible; 4.° un nombre proportionnel à

Dans un traité de tactique, on suppose une assemblée toute formée; on ne s'occupe que de la manière dont elle doit s'y prendre pour conduire ses opérations.

l'étendue du pays. C'est sur ces points que les questions de détail se multiplient.

L'élection doit être directe. Si elle passe par plusieurs degrés, le peuple, qui n'élit que des électeurs, ne peut point regarder les députés élus comme son ouvrage il ne tient à eux ni par l'affection du choix, ni par le sentiment du pouvoir. Les élus ne tiennent au peuple ni par reconnoissance, ni par responsabilité. Il n'y a point de rapprochement entre des classes 'supérieures et inférieures, et le lien politique reste imparfait.

L'amovibilité est absolument nécessaire. Qu'est-ce qu'une élection? C'est une déclaration solennelle qu'un tel homme jouit actuellement de la confiance de ses commettants. Mais cette déclaration ne renferme pas une vertu miraculeuse qui garantisse le caractère et les actions futures de cet homme. Il est absurde de faire prononcer à tout un peuple cette grave ineptie : « Nous déclarons que ces cinq cents individus qui ont >> notre confiance actuellement, l'auront également » quoiqu'ils fassent, tout le reste de leur vie. »

Les conditions à exiger sont d'une nature plus douteuse. Les conditions pécuniaires pour être éligible semblent porter sur une défiance générale contre les individus qui n'ont pas à offrir le gage d'une propriété: on les considère comme étant moins attachés au main

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