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ADOPTION DU PROJET DE LOI PORTANT AP

PROBATION DE LA CONVENTION CONSULAIRE, SIGNÉE A PARIS, LE 25 OCTOBRE 1882, ENTRE LA FRANCE ET LA RÉPUBLIQUE DOMINIGAINE

M. le président. L'ordre du jour appelle la 1re délibération sur le projet de loi portant approbation de la convention consulaire, signée à Paris, le 25 octobre 1882, entre la France et la république Dominicaine.

M. le président du conseil. Je suis heu- un grand nombre d'opinions sont faites, que le reux de pouvoir dire à la Chambre que l'in débat qui se poursuit ne saurait ébranler les terpellation ne présente aucun caractère d'ur- partis pris, qu'un certain nombre de nos colgence, que la petite bande qui s'était formée lègues faisant abstraction des vues de doctrines en Corse est aujourd'hui dispersée. · et des théories, considèrent qu'ils ont pris des M. Cuneo d'Ornano m'a prévenu tout à engagements vis-à-vis de leurs mandants, et, l'heure qu'il demandait la fixation de la dis-je les en loue, ils tiennent à honneur de les cussion à lundi: au nom de M. le garde des remplir. sceaux et au mien, j'accepte cette date.

M. Cuneo d'Ornano. Je tiens absolument à faire observer que j'aurais désiré, pour le développement de l'interpellation dont il s'a

M. le ministre des affaires étrangères de- git, un jour plus rapproché. mande la déclaration d'urgence.

Je consulte la Chambre.

(La Chambre, consultée, déclare l'urgence. -Elle passe ensuite à la discussion de l'article unique.)

« Article unique. Le Président de la Ré. publique est autorisé à ratifier et, s'il y a lieu, à faire exécuter la convention consulaire si-❘ gnée à Paris, le 25 octobre 1882 entre la France et la république Dominicaine.

. Une copie authentique de cette convention sera annexée à la présente loi. » (L'article unique du projet de loi est mis aux voix et adopté.)

DÉPÔT D'UN RAPPORT

M. Jales Roche. Au nom de la commission du budget, j'ai l'honneur de déposer un rapport sur le projet de loi concernant : 1o la régularisation d'un décret rendu en conseil d'Etat, qui a ouvert un crédit sur l'exercice 1886; 2o l'ouverture de crédits de l'exercice 1886; 3° l'ouverture de crédits spéciaux d'exercices périmés et clos.

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C'est uniquement en raison de la grande discussion sur les céréales que j'ai consenti au renvoi à lundi.

A l'extrême gauche. A un mois !

M. le président. Messieurs, l'auteur de l'interpellation et le Gouvernement sont d'accord pour la fixation de la discussion à landi; pourquoi vous montreriez-vous plus diffici es qu'eux ? (Bruit à gauche.)

Est-ce qu'on insiste pour le renvoi à un mois ? (Oui! oui ! à gauche.)

En ce cas, je vais consulter la Chambre. M. Cuneo d'Ornano. Je demande à faire une observation.

M. le président. Vous avez la parole.

M. Cuneo d'Ornano. Notre règlement, messieurs, me fournit deux moyens de vous saisir du débat que j'entends soulever ici : le moyen de l'interpellation, que je préfère parce qu'il permet à ceux de nos collègues qui voudront se mêler au débat, d'y intervenir; et le moyen du dépôt d'une proposition de loi, sur l'urgence de laquelle je pourrais très aisément présenter mes observations.

Ce second moyen me donnerait souveraineM. le président. Le rapport sera imprimé ment le choix du jour. Mais, par déférence et distribué. pour un grand nombre de collègues, et pour ne pas interrompre la discussion engagée sur les céréales, je propose la voie de l'interpellation et je consens à attendre jusqu'à lundi puisque, au surplus, ce jour-là convient au Gouvernement. (Bruit à gauche.)

PRÉSENTATION D'UN PROJET DE LOI

M. René Goblet, président du conseil, ministre de l'intérieur et des cultes. J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre un projet de loi tendant à allouer au ministre de l'intérieur un crédit extraordinaire de 1 million pour venir en aide aux populations éprouvées par les tremblements de terre.

Je demande le renvoi à la commission du budget.

M. le président. Le projet de loi sera imprimé et distribué.

Il n'y a pas d'opposition au renvoi à la commission du budget ?... Le renvoi est ordonné.

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M. le président. Tout le monde est d'accord! (On rit.)

L'interpellation est fixée à lundi.

SUITE DE LA DISCUSSION DES PROPOSITIONS DE LOI PORTANT MODIFICATION DU TARIF GÉNÉRAL DES DOUANES, EN CE QUI CONCERNE LES CÉRÉALES (BLÉ, AVOINE ET FARINE)

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion des propositions de loi de MM. Baucarne Leroux, Milochau, Ba rouille et plusieurs de leurs collègues, portant modification du tarif général des douanes, en ce qui concerne les céréales (blé, avoine et farine).

La parole est à M. Rouvier,

M. Maurice Rouvier. Messieurs, en intervenant pour la seconde fois dans le gravə débat ouvert devant la Chambre, je ne me dissimule point les difficultés de ma tâche. Il faudrait être étranger au courant d'opinion qui Quel jour propose le Gouvernement pour la existe dans la Chambre même, pour ne pas sa

• S'gné: CUNEO D'ORNANO »

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Nous nous trouvons donc dans des conditions particnlièrement difficiles. On dit même, et c'est comme une vérité acceptée d'avance, qu'il y a une majorité prête à voter le droit. Je ne le veux point croire...

M. Gustave Rivet. A la bonne heure!

M. Maurice Rouvier, Il est certain que cette opinion est à ce point répandue et solide qu'elle a pu déterminer le Gouvernement à ne pas apporter dans cette discussion le poids de son opinion collective.

Quoi qu'on en dise, je veux croire qu'il y a dans cette grande Assemblée un certain nombre d'hommes qui n'ont pas encore fermé l'oreille à toutes les démonstrations, et qui hésitent encore. J'ai bien souvent recueilli sur les bancs de cette Chambre cette opinion: si on pouvait nous démontrer que l'augmentation du droit aura pour effet certain, inéluctable, l'augmentation du prix du pain, nous ne la voterions point; et, certes, je pourrais dire prononcé hier à cette tribune par notre honoqu'après l'éloquent et remarquable discours rable collègue M. Fairé, de grands efforts sont inutiles pour démontrer que l'augmentation. du droit doit avoir pour eflet nécessaire sa répercussion sur le prix de la farine et sur celui du pain.

Mais, cependant, je demande la permission de reprendre la question dans son ensemble, de l'examiner au point de vue des doctrines dont se réclament les deux partis qui cherchent à former une majorité dans le sein de cette assemblée, sauf à examiner ensuite les faits eux-mêmes, les transactions qui peuvent intervenir, le côté pratique des choses, après en avoir vu le côté théorique.

J'ai hésité à le faire, parce que j'avais fini par croire qu'il y avait sur cette matière des engagements positifs et certains, que la liberté d'action de la plupart d'entre nous n'était plus intacte, qu'il était intervenu entre ceux qui réclament l'augmentation du droit à 5 fr. et leurs mandants un contrat formel et précis ; si j'avais pu me convaincre qu'il en était ainsi, j'aurais renoncé à un effort qui met à une nouvelle épreuve votre bienveillance et, je puis le dire aussi, mes forces.

Mais j'ai eu la curiosité de parcourir le vo⚫ lume des professions de foi; je me suis dit :

Paisque cette question d'élévation des droits sur les céréales à 5 fr. est la première qui ait surgi au lendemain de la réunion de cette Chambre, puisque, alors qu'elle était à peine constituée, deux propositions de loi tendant & élever le droit de 3 fr. établi par vos prédé cesseurs et à le porter à 5 fr., ont été déposées simultanément par nos collègues de gauche et nos collègues de droite, puisque c'est là le mandat le plus précis et le plus pressant que mes collègues ont reçu, j'en dois évidem

électoraux, dans l'ensemble des documents qui constituent le contrat intervenu entre les représentants de la nation et la nation elle-❘ même. »

J'ai donc entrepris le dépouillement des professions de foi et des manifestes électoraux, convaincu que j'allais trouver en grande majorité les engagements précis, formels, et que cette constatation faite, je n'aurais qu'à m'incliner et à renoncer à la parole. Je dois dire qu'il n'en a point été ainsi. J'ai dépouillé toutes les manifestations qui se sont produites dans les divers départements, et j'ai eu, dirais-je la satisfaction, dirais-je la stupéfaction? mieux vaut ne pas chercher de terme de voir qu'on ne retrouvait pas dans les professions de foi et dans les manifestes électoraux une seule explication entre les électeurs et les candidats dans laquelle ait été pris l'engagement de voter le droit de 5 fr. (Très bien! très bien à gauche. Exclamations à ! droite.)

M. le comte de Kersauson. Il n'y a pas, dans l'Ouest, une seule profession de foi où nous n'ayons demandé le relèvement da droit!

M. de Chatenay. Dans les départements agricoles, la chose allait de soi: on n'avait pas besoin de le dire.

|

a été élue, je me tairais, je ne vous demande- | pas du tout aux ouvriess agricoles ou indus rais pas, quoi que j'en puisse penser, de ne triels du département des Ardennes qu'on veut augmenter les difficultés de l'existence; pas remplir les promesses que vous avez faites à la démocratie. Mais je dis que ces promesses c'est une formule vague, élastique, et nos hoformelles, ces engagements, on ne vous les a norables collègues de ce département ont làpas demandés et vous n'avez pas pu les dessus la plus entière liberté d'action. faire !

Evidemment, je constate que dans certains départements, que j'ai classés par ordre alphabétique, des formules savantes, qui semblent faites à la fois pour aviver les espérances de ceux qui demandent l'augmentation du droit, et en même temps pour ne pas éloigner cette masse des consommateurs dont les suffrages sont nécessaires quand on veut avoir la majo· rité dans une élection, je constate certaines déclarations protectionnistes.

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Je trouve dans le département de l'Aisne, par exemple, il n'est pas suspect, celuilà, c'est un de ceux sur lesquels il n'y a pas à épiloguer,

je trouve, dis je, que dans le département de l'Aisne on veut « une protection sérieuse, efficace, des denrées agricoles.

Eh bien, comment s'exprime-t-on ? Dit-on avec netteté: Augmentation du droit, relèvement à 5 fr.?

Non; il y a même un euphémisme, on dit: Défense de la production nationale agricole. >

M. Rigaut (Aisne). Je l'ai dit nettement, mon cher collègue. (Applaudissements à droite.)

M. le comte de Kergariou. Et les vœux des conseils généraux ? * M. Maurice Rouvier. Ne vous batez point de protester! je ne puis tout dire à la fois, et faites-moi l'honneur de croire que j'ai bien songé à consulter les vœux des conseils géné-je raux. Mais je parle en ce moment des professions de foi des candidats aux élections des 4

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Je dis et c'est là un fait contre lequel personne ne peut protester qu'il n'y a pas dans l'ensemble des professions de foi des élections du 4 octobre un seul document dans lequel on ait dit avec clarté et en ces matières il faut parler clairement avec précision, que le cadeau qu'on allait faire à la démocratie française, au moment de la constitution de la Chambre nouvelle, était une augmentation de 2 francs ajoutée au droit déjà existant sur les céréales.

On me dit: Il y a eu des formules! Nous les examinerons, et je m'inclinerai devant l'habileté de ceux qui les ont rédigées. Mais quand on s'adresse au suffrage universel, et quand on est sûr de traduire son sentiment, on parle avec clarté. Examinez la façon dont est traitée la question du service militaire dans les professions de foi; y trouvez-vous : « Allègement des charges, diminution, réduction? Non, la formule claire, précise, sur laquelle est établi un véritable contrat, contient: Réduction du service militaire à trois ans.

(Très bien ! très bien ! à gauche.)

Si j'avais trouvé sur la question des céréales, dans vos professions de foi, la même précision et la même clarté que je constate, en ce qui touche le service militaire, dans la ma

M. Maurice Rouvier. Mon cher collègue, vous ai dit que je n'analyse et que je ne puis analyser que les manifestes électoraux des élections des 4 et 18 octobre.

M. Rigaut. La situation est changée. M. Georges Roche. Je ne voudrais pas interrompre, mais...

M. le président. Restez dans cette bonne pensée. (On rit.)

Dans l'Aveyron on demande la protection ⚫ contre la concurrence étrangère ».

Dans le Calvados on ne peut émouvoir l'opinion qui n'est pas directement frappée par le spectacle des souffrances de la culture des céréales...

M. Jules Delafosse. Je vous demande pardon!

M. Maurice Rouvier. Aussi emploie-t-on une autre phrase très habile...

M. Jules Delafosse. Elle n'est pas habile, elle est sincère !

M. Maurice Rouvier. Oh! ne vous plaigniez pas de mon appréciation; si c'est vous qui êtes le rédacteur de cette phrase, je vous en fais mes compliments. Les pays de céréales sont ruinés, dit-on.»

A droite. C'est vrai ! Et c'est assez clair! M. Maurice Rouvier. Mais enfin qu'est-ce que cela veut dire ?

Dans la Charente-Inférieure, là encore, on demande la protection nécessaire contre la concurrence étrangère ».

M. Georges Roche. Monsieur Rouvier, j'ai eu l'honneur de vous dire que ce passage avait été développé dans les réunions électorsles et qu'il y avait été parfaitement expliqué Exclama. que la protection.... (Bruit. tions sur divers bancs)... se manifesterait par une augmentation de droits.

M. le président. Permettez!... Si chacun des membres de cette Chambre veut expliquer son programme, il n'y aura pas moyen d'en finir. (On rit.)

A droite. L'orateur nous pose des questions !

M. le président. Messieurs, l'orateur a le

M. Georges Roche. J'y reste; seulement... M. le président. Non, ne revenez pas droit de prendre votre programme, de le dissur cette salataire inspiration. (Nouveaux rires.)

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cuter...

M. le comte de Kergariou. Mais pas de le fausser!

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Dans le département des Basses-Alpes on dit avec beaucoup de netteté et de précision, c'est à peu près le seul département : « Les droits votés sont insuffisants pour protéger l'agriculture. » Il est certain que les électeurs qui ont nommé les candidats qui te-même. naient ce langage voulaient le relèvement des droits.

M. Maurice Rouvier. Je rends hommage à votre loyauté. Vous avez dit qu'une protec tion était nécessaire contre la concurrence étrangère et on peut, en effet, dégager de cette formule un vou en faveur du relèvement des droits.

Dans le programme des Ardennes, je trouve ces mots: Sige protection». Qu'est-ce que cela veut dire? Mais le droit de 3 fr. est, à mes yeux et aux yeux de beaucoup, la sage protection, la transaction entre les deux doc.

M. Georges Roche. Je vous ai expliqué

M. Maurice Rouvier. Laissez-moi poursuivre.

J'ai eu l'honneur de vous dire, au début de cette revue, qui me paraît nécessaire pour vous rappeler à vous-mêmes, messieurs, votre entière liberté d'action et pour la signaler au pays qui nous écoute et qui nous jugera, j'ai eu l'honneur de vous dire au début de ces observations qu'il y a une trentaine de départe `ments où on a employé des formules qui, sans être précisément celles qu'il faudrait invoquer pour justifier un vote de l'importance de celui qu'on vous propose d'émettre, semblaient indiquer qu'on maintiendrait ou qu'on relèverait le droit sur les céréales.

à la précision, à la loyauté de la formule que M. Adolphe Cochery. Nous nous som-
je mettais sous les yeux de la Chambre: Remes expliqués nettement dans les réunions pu-
lèvement du droit sur les céréales et les bes- bliques.
tiaux. Oui, c'est un des rares départements
où on a dit avec clarté et précision ce qu'on
se proposait de faire !

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Mais avez-vous oublié qu'il y avait dans ce
département un autre candidat, notre regretté
collègue M. Raoul Duval, qui ne tenait pas le
même langage, et avez-vous oublié qu'il a été
élu dans ce département? D'où l'on peut dé-
duire, et j'en pourrais citer d'autres preuves
et cette constatation est à l'honneur de cette
nation que quand le peuple est assemblé
dans ses comices pour faire le choix des ci-
toyens qui devront défendre ses aspirations et
ses intérêts, je ne dis pas qu'il ne donne pas
à la question des céréales et de ses intérêts ma-
tériels toute l'attention qu'il leur doit, mais je
dis, je constate, que les courants qui dominent
l'élection sont d'ane autre nature, qu'il s'éta-
blit des courants politiques. J'en trouve la
preuve dans cette élection de l'Eure même,

J'énumérais ces départements et je rappelais les formules employées partout pour justifier la protection à l'agriculture, et je disais qu'il n'y a pas eu un département, pas un programme, dans lequel un candidat se soit exprimé en toutes lettres, avec la netteté qu'il faut avoir quand on s'adresse au suffrage universel. Tout cela ne veut pas dire: relèvement du alors que vous vous présentiez avec le prodroit à 5 fr. gramme protectionniste et qu'à travers votre Personne ne l'a dit, et j'en fais la démons-liste était élu M. Raoul Duval qui n'était pas, tration.

Messieurs, je passe les départements comme la Corrèze, où il n'est question que de l'aboli tion de la surtaxe du blé. Ma discussion sera assez longue sans cela.

Dans les Côtes-du-Nord, Protection efficace de l'agriculture; défense au Gouvernement d'acheter du blé en Amérique.» (Rires à gauche.)

Dans l'Eure: Protection douanière; relè vement des droits sur les céréales et sur les

bestiaux. Ceci est net.

M. Camille Fouquet. Citez donc les pa. roles mêmes de M. Louis Passy, s'il vous plait ! Les voici... (Exclamations.)

M. le président. Monsieur Fouquet... M. Camille Fouquet. Je demande à l'orateur de citer les paroles de celui qui était en tête de la liste de l'Eure.

M. le président. Je vous préviens, et ja préviens tous mes collègues, que je ne peux pas tolérer cette manière de discuter; et, quoi · que ce soit la marque d'une grande attention de la part de la Chambre, je serai obligé de réprimer réglementairement les interruptions. Comment, vous auriez la pensée de lire des discours ou des professions de foi, de votre place ?... (Très bien ! très bien !

. On rit.) M. Maurice Rouvier. Je ne connais pas l'opinion exprimée par M. Louis Passy.

M. Camille Fouquet. Je puis vous indiquer la page...

M. le président. Encore une fois, monsieur Fouquet, si vous ne voulez pas garder le silence, je serai obligé de vous rappeler à l'or

dre.

M. Camille Fouquet, J'indique seulement la page où l'orateur peut trouver le programme de M. Louis Passy.

M. le président. Je vous prie de cesser d'interrompre.

M. Maurice Rouvier. Je me hâte de dire que l'opinion de notre honorable collègue

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que je sache, protectionniste.

|

M. Maurice Rouvier. Il paraît, d'après l'interruption de mon honorable ami M. Cochery, que ce n'est pas la valeur qu'il faut attribuer à cette formule. Mais cela n'enlève rien à la démonstration que je veux faire, à savoir que, là même où on représente les populations comme le plus ardemment attachées au relèvement des droits, on s'est bien gardé de leur parler un langage clair, net et précis; on a employé des périphrases extrêmement habiles, mais on n'a pas pris d'engagements formels.

J'abrège, messieurs. Parlerai je de la Meuse? Peut-être, puisqu'on nous annonce qu'un de ses représentants, et non le moins éminent, interviendra dans la discussion, non pas,- dit on, au nom du cabinet dont il fait partie, mais comme député de la Meuse. Je suis obligé de reconnaître que, là, il y a une formule qui défie toute équivoque. On dit: Défendre par tous les moyens possibles l'agriculture ».

M. Andrieux. Par tous les moyens légaux! (On rit.)

M. Wickersheimer. On n'en propose aucun !

pas ! Vous m'obligeriez à constater que c'est le département de France où le cours des céréales est le plus élevé...

Si j'en voulais trouver d'autres preuves, cela me serait facile, et si je ne craignais pas de m'égarer au milieu de ces questions un pẹu M. Maurice Rouvier. J'ai cité votre détrop personnelles, peut-être me serait-il per-partement, monsieur Andrieux; ne réclamez mis de citer un autre exemple que M. Raoul Duval, M. Deschanel, qui, quel que soit son talent et quelle que soit la passion avec laquelle il promettait de servir les intérêts agricoles dans le département d'Eure-et-Loir, n'a cependant jamais pu être élu contre M. Gatineau, tant que celui-ci a été vivant, et M. Gatineau n'était pas, que je sache, partisan du droit sur les blés.

Nous pourrions trouver dans divers départements encore d'autre exemples. Je n'aurais pas insisté, si je n'avais pas été interrompu à propos du département de l'Eare. Je passe d'ailleurs et j'abrège cette nomenclature, non cependant sans m'arrêter au département du Loiret.

M. Andrieux. Je demande la parole.
M. Maurice Rouvier. et tellement

...

élevé, que la moyenne des cours, d'après les

statistiques mêmes da ministère de l'agricu!ture, est supérieure à 25 fr. Et cette constatation porterait une grave atteinte à la confiance que j'ai dans les déclarations de mon honorable ami et adversaire M. Máline, qui nous a dit, dans de précédentes discussions, que toutes ces mesures de protection n'étaient que des mesures transitoires, temporaires, et que, quand on arriverait au cours d'environ 25 fr. le quintal, il serait avec nous pour les

M. Adolphe Cochery. Nous vous écou- réduire, les atténuer, les supprimer. tons avec attention! (Rires.)

M. Maurice Rouvier. Le département dn Loiret a trouvé une formule heureuse entre toutes, que je suis heureux de saluer au passage. On dit aux électeurs du Loiret : « Nous continuerons à protéger l'agriculture. »

M.Adolphe Cochery. Et notre vote continuera à la protéger. (Très bien ! très bien ! à droite.)

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comme vous

Eh bien, votre département a cette bonne on cette mauvaise fortune voudrez - de payer son pain plus cher que tous les autres, et cet autre privilège de réclamer que, par une aggravation du droit, on le rende plus cher encore.

A gauche. C'est pour cela qu'on en émigre! M. Maurice Rouvier. Messieurs, il est inutile de poursuivre. Je tiens ce travail à la Un membre à droite. Nous ne demandons disposition de ceux de mes collègues qui vou pas plus que cela ! dront le voir; ils pourront, d'ailleurs, en faire eux-mêmes un semblable.

M. Maurice Rouvier, « Continuer à protéger l'agricaltare, nous saurons, après le Je constate qu'il y a en tout 33 départescrutin, ce que cela veut dire sous la plume ments dans lesquels, sous une forme plus ou de ceux qui ont rédigé cette formule habile. moins claire, plus ou moins nette, plus ou Mais au moment des élections dans ce dé- | moins déguisée, on a promis ou fait entrevoir partement comme dans les autres, il y a peutêtre un certain nombre de crédules et de naïfs, qui ont pu croire que continuer à protéger l'agriculture cela voulait dire continuer d'accorder à l'agriculture la protection dont

des mesures de nature à protéger l'agricul ture, mais que, nulle part — je le répète pour la troisième fois on n'a dit quelles étaient ces mesures; nulle part on n'a dit aux agriculteurs, qu'on nous montre si intéressés au

que la mesure au moyen de laquelle on entendait protéger l'agriculture était un relèvement du droit. Voilà la constatation que je voulais faire; elle est faite : vous viendrez la détruire à votre tour.

M. Ganault. Nous l'avons dit dans l'Aisne. M. le comte de Maillé. Et nous dans Maine-et-Loire !

M. Le Hérissé. Nous l'avons dit égale. ment dans le département d'Ille-et-Vilaine. A droite. Nous l'avons dit partout! M. Maurice Rouvier. On me répond: Nous l'avons dit dans le département d'Ile. et-Vilaine ! J'ai trop de confiance dans la pa. role de l'honorable collègue qui m'interrompt pour ne pas être convaincu qu'il l'a dit dans son département, du moment où il l'affirme. Mais aussi je ne suis pas sûr qu'il n'ait pas été élu dans une élection partielle.

M. le Hérissé. J'avais inscrit en tête de mon programme: « Relèvement de droit sur le blé», et je tiendrai mes engagements !

M. Maurice Rouvier. Je n'avais malheureusement pas votre programme, autrement je l'aurais apporté à cette tribune, car j'aurais pu dire: Sar 584 députés, il y en a un seul qui ait inscrit sur son programme un relèvement du droit sur le blé ! a

M. Bergerot. Lisez le programme du Nord!

A droite. Nous l'avons tous dit de la manière la plus formelle !

M. le comte de Kergariou. Et nous ne pouvons pas permettre à l'orateur de le contester!

M. le président. L'orateur n'a aucune permission à vous demander...

M. le comte de Kergariou. Nous protestons contre ses allégations!

M. le président. ... et je vous rappelle à l'ordre, pour votre persistance à interrompre.

L'orateur n'a aucune permission à vous demander; il a, à la tribune, la liberté la plus complète; il a le droit d'apprécier vos paroles et vos programmes.

M. le comte de Kergariou. J'ai le droit de protester !

M. le président. Vous n'aurez qu'à mon ter à la tribune après lui et vous aurez également toute liberté pour lui répondre.

recte, précise, accessible à tous; mais qu'on fait dans certaines conditions obscures et douteuses.

Jene fais autre chose, depuis un quart d'heure, I pose pas de faire sous une forme nette, corque de chercher à établir que personne ici, sauf l'honorable M. le Hérissé, n'a dit à ses électeurs qu'il entendait protéger l'agriculture en portant le droit de 3 fr. à 5 fr. Ma démonstration est donc complète, et je n'insiste pas davantage. (Très bien! très bien à gauche. Exclamations et bruit à droite.)

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Je dis que personne n'oserait venir à cette tribune et personne n'y est venu demander au profit d'une partie quelconque de la nation le droit de percevoir des taxes sur

M. Récipon. Nous l'avons dit; mais on l'universalité des citoyens français, et j'allais n'écrit pas tout ce qu'on dit!

ajouter, quand j'ai été interrompu, que ce M. Maurice Rouvier. Messieurs, je m'ex- qu'on n'ose pas faire sous une forme diplique mal l'émotion que fait naître chez cer- recte, visible, accessible à tous, qui pourrait tains de nos collègues la démonstration à la- être jugée par tout le monde, on le fait par quelle je me livre. Qu'est ce que je veux des voies détournées : tantôt on donne à la prouver? Croyez-vous donc que je recherche prouver? Croyez-vous donc que je recherche production des betteraves une prime qui conɛle vain plaisir de vous mettre en contradiction titue un véritable impôt prélevé sur le reste de avec vous-mêmes? D'ailleurs, il n'y a pas de la nation qui ne produit pas les betteraves; contradiction. Si vous croyiez que je n'ai d'au- | tantôt on donne aux armateurs des ports une tre but que da surexciter les passions, vous prime prélevée également sur l'ensemble des me jugeriez bien mal. Ce que je veux, c'est consommateurs; tantôt — et c'est là la violaprouver au pays et à vous-mêmes qu'il n'y a lation la plus grave, la plus flagrante, celle pas d'engagements formels et précis sur la qui devrait avoir, sur une nation bien convainquestion et que vous allez tout à l'heure voter cue de ses droits, la répercussion la plus vive dans la liberté de votre conscience, pour la et soulever la réprobation la plus universelle, solution que vous croirez la meilleure dans tantôt, dis-je, on ne craint pas de porter l'intérêt de vos mandants. atteinte au principe que j'invoquais tout à l'heure en frappant d'un droit les céréales, c'est-à-dire l'alimentation publique, la subsistance qui donne à l'homme de ce pays qui se croit libre la force nécessaire pour vivre, pour se nourrir, pour jouir des droits et de la liberté, que vous vous êtes efforcés de lui donner. (Très bien ! très bien ! à gauche.)

Pourquoi ces protestations?

Est-ce qu'un vote émis dans ces conditions aurait moins de valeur que celui qui serait émis sous l'empire de je ne sais quel mandat impératif, que vous repoussez et que vous flétrissez quand il est souscrit par vos collègues de la gauche, mais dont vous vous targuez quand il s'agit de vous et de la question agricole? (Très bien ! très bien ! à gauche)

Je ne veux pas insister; je ne le pourrais pas, d'ailleurs; vous me rendriez la tâche impossible.

Laissons donc de côté les explications données au cours de la période électorale. A côté et au-dessus, dirai-je, de ces explications, n'y a-t-il donc pas des principes qui, dans une démocratie libre comme celle ci, ont une sul fisante notoriété pour qu'il soit inutile de s'en expliquer avec ses électeurs, pour qu'il soit expliquer avec ses électeurs, pour qu'il soit permis de soutenir que quand on n'a pas promis de les enfreindre, de les violer, on a en quelque sorte pris l'engagement tacite de les observer?

Parmi ces principes, messieurs, est celui que Bastiat formulait en ces termes : « On ne M. le comte de Kergariou. Je dedoit d'impôt qu'à l'Etat. » Est-ce un principe mande la parole sur le rappel à l'ordre ! qui soit contestable dans une Assemblée élue M. le président. Vous l'aurez à la fin de par le suffrage universel ? Est-ce que quella séance.

M. Maurice Kouvier. On me dit: Lisez le programme du Nord! Je cède volontiers à cette invitation. Dans le programme du Nord, il y a Protection de l'agriculture. Je ne l'ai pas caché; si je n'ai pas lu tous les pro. grammes, j'en ai lu un certain nombre.

M. Bergerot. Nous avons dit : Protection de l'agriculture, principal élément de la fortune publique !

M. Maurice Rouvier. Ajoutez, si vous voulez: ... principal élément de la fortune publique. Je regrette que vous ne puissiez pas compléter votre interruption en disant: «Au moyen d'un droit de 5 fr. » (Rires à gan

qu'un oserait venir à cette tribune demander qu'on autorisât telle partie de la nation, telle région, telle profession, à prélever sur l'ensemble des contribuables français un droit à son profit? Non, on ne l'oseralt pas.

M. Henri Marmonnier. On l'a fait pour les sucres !

M. Maurice Rouvier. Ne m'interrompez pas, même de ce côté (la gauche). Vous pen. sez bien que je me doute qu'on l'a fait pour les sucres; la démonstration que je voulais faire est celle-ci :

Il est certains principes qu'on ne peut pas combattre ouvertement, mais qu'on viole par des voies latérales, détournées; il y a des

Toutes ces choses ont été dites au mois de juillet; je ne sache pas qu'il y ait été répondu. Pour ma part, j'ai essayé à ce moment de montrer qu'il y a entre le suffrage universel et la libre consommation des denrées alimentaires un lien étroit, indissoluble; que ces deux choses se pénètrent, se confondent, ne font qu'une. Je ne veux pas recommencer cette démonstration. Pourquoi le ferais-je ? Il n'y a pas été répondu.

On nous a bien parlé de l'Amérique; nous verrons tout à l'heure ce qu'il faut en penser. Mais, en définitive, personne n'est venu dire que le dernier mot du suffrage universel, des libres institutions que s'est données ce pays, devait être d'aggraver les difficultés de l'alimentation pour les plus humbles, pour les plus petits, pour les plus faibles. Personne n'a osé dire cela, et personne ne l'osera. (Très bien ! très bien ! à gauche.)

dernières années. Je l'ai invité

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M. Fairé nous faisait, hier, un tableau des souffrances de l'agriculture; il nous montrait la décadence du prix des céréales dans ces dans une interruption que j'avais tort, assurément, de faire, à étendre le cercle de ses investigations, à remonter de quelques années encore en arrière, à aller jusqu'à la Restauration. Il aurait vu alors que son assertion n'est pas absolument exacte. Elle est vraie si l'on envisage un petit nombre d'années, si l'on étudie le petit côté de la question; mais si l'on considère le mouvement général de la valeur des marchandises, on arrive à cette constatation diametralement opposée, que, depuis cinquante ans, les prix des choses que l'on con

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Qu'est-ce à dire? Au milieu d'une baisse générale des prix des denrées, s'il en est une qui reste invariable, qui ne descend pas, est-ce que cela ne revient pas à dire qu'elle a augmenté? Est-ce qu'il n'y a pas une juste proportion entre les prix de toutes choses? Si je puis me procurer, pour trois fois moins d'argent qu'autrefois, le coton, la laine dont j'ai besoin, alors qu'il me faut payer un prix égal pour la quantité de pain nécessaire à ma subsistance, est-ce qu'il n'est pas exact de dire qu'en demeurant invariable le prix du pain a augmenté dans la proportion même où les autres denrées ont baissé ?

On n'a pas contesté ces faits; on ne le pouvait pas. Si vous le faites, j'essayerai de vous répondre.

J'avais déduit lors de ma première intervention dans cette discussion, au mois de juillet, cette conclusion, — que j'ai été heureux de retrou. ver hier dans l'argumentation si nette, si serrée, si démonstrative de mon honorable collègue et ami M. Duché, que ce que vous entendez protéger, ce n'est pas l'agriculture, ce ne sont pas les ouvriers agricoles, c'est la propriété du sol. (Très bien! très bien à gauche.)

Vous entendez, messieurs, au moyen de mesures législatives, faire que dans un temps et dans un pays où tout varie, aussi bien le taux du rendemeni de l'argent que le mouvement même de la valeur des marchandises, que le taux même des salaires; alors que tout obéit à cette loi de la mobilité, de la variation, qui est l'existence même et la vie des peuples, vous entendez, au moyen de mesures législatives, faire qu'il y ait une chose qui soit fixe, immuable, qui ne varie point, et cette chose, c'est la rente terrienne, la rente du sol! (Très bien! très bien!)

est en soi mobile, variable, destinée à suivre I que l'Italie et que les autres nations qui nous
la loi inéluctable de l'offre et de la demande, disputent la suprématie commerciale?
puisse être, de par votre caprice, de par votre
volonté, rendue immuable, inflexible.

Si cela se pouvait, nous examinerions si cette fixité serait un bien ou un mal; mais je dis que cela ne se peut pas. Il est donc bien inutile de rechercher si cela aurait de bons ou de mauvais effets. Si vous pouviez atteindre cette fixité, je vous montrerais qu'elle serait funeste. Comme vous ne pouvez pas légiférer sur les événements qui se pas. sent au delà de nos frontières, comme vous

ne

pouvez pas empêcher que, à chaque
jour, l'activité humaine n'aille défricher des
terres nouvelles, et ne produise ainsi, en
dehors de votre puissance législative, une
nouvelle quantité de denrées, que faites-vous
donc quand vous créez à votre gré une situa-
tion particulière si ce n'est de vous mettre en
dehors du mouvement général du monde, et
de préparer ainsi, pour le jour où ces barrières
devront s'abaisser, car rien ne dure de ce
qui est contraire aux faits et aux principes
je ne sais quelle crise épouvantable qui por-
tera la perturbation la plus grave dans les in-
térêts que vous aurez voulu sauvegarder?
(Très bien! très bien à gauche)

S'il en est ainsi, et je crois que cela n'est pas contestable, ne pensez vous pas que si nous n'occupons pas le premier rang, si nous venons après l'Angleterre, il est permis de se demander si cette situation n'est pas le résultat de nos tergiversations, de nos hésitations, de ce chaos et de cette imprévoyance qui est au fond de nos institutions fiscales et douanières? (Très bien ! très bien! à gauche.)

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Et maintenant, messieurs, si nous interrogeons la tradition nationale et il nous sera permis de le faire que voyons-nous? On a répandu dans ce pays l'opinion que la liberté économique, que ce qu'on appelle le libreéchange, dont on parle avec une sorte de mépris, est une invention de cerveaux mal équilibrés, la conséquence des doctrines qui ont pris naissance à la fin du dix-huitième siècle; on assure que le libre-échange a été constamment démenti par les faits, qu'il est contraire aux intérêts nationaux et à la situation que nous occupons dans le monde.

esprit peu libéral, comme le fondateur du régime protectionniste.

Voilà ce qu'on dit. Mais, messieurs, avant que les économistes du dix-huitième siècle eussent formulé leurs théories, n'avons-nous pas pratiqué la liberté du commerce et des Je ne voudrais pas insister sur le côté doc- échanges? Faut-il remonter jusqu'à l'opinion trinal et théorique de la thèse que je soutiens: du grand ministre de Henri IV, de Sully? Je ne mais cependant je serais bien tenté d'opposer le ferai pas; mais voulez-vous celle de Colbert? certaines considérations, en réponse à tous les elle offre quelque intérêt au point de vue écosarcasmes qu'on a lancés ici contre les défen.nomique, car on considère Colbert comme un seurs de la liberté économique, contre ceux que plusieurs de mes contradicteurs affectent de considérer comme les défenseurs de nouveaux dogmes. Nous ne croyons plus aux dogmes; mais il y a des lois qui découlent de l'étude des faits, d'une observation attentive, et qui revêtent un caractère de généralité, de netteté, de sûreté qui défie la contradiction. Qu'elles soient subordonnées aux cir. constances, aux temps, aux milieux, à mille autres considérations, nul ne le nie.

Eh bien, je vais vous lire les instructions qu'il donnait à son frère, le marquis de Croissy, qui se rendait en Angleterre pour négo⚫ cier un traité. Je rappelle, d'ailleurs, aux membres de la droite, qui ne m'interrompent plus, que les traités de commerce ne sont pas des inventions diaboliques du second empire, qu'ils ne sont pas sorties non plus des temps troublés de la Révolution et de la première République. Non, les traités de commerce datent de la monarchie même.

En effet, Colbert donnait au marquis de de Croissy, partant pour l'Angleterre, dans les conditions que je viens de dire, des ins

Croyez-vous donc, messieurs, que la situa. tion géographique de la France ne soit pas fa. vorable à l'application du principe de la liberté économique? Je pense, quant à moi, que c'est le contraire qui est la vérité. Jetez les yeux sur une carte de l'Europe!tructions fort libérales dont je ne citerai que deux lignes. J'ai démontré, et j'y reviendrai tout à l'heure N'êtes-vous pas frappés de voir, à l'occident en répondant à l'argumentation de l'hono- même de cette Europe, placé comme à rable M. Fairé, que ce résultat que vous pour-l'avant-garde en quelque sorte, aussi bien suivez comme un bien n'a d'avantage que pour une infime minorité de la nation fran. çaise; qu'il n'y a pas en France trois millions de citoyens, et je comprends dans ce chif fre l'ensemble des familles qui en peuvent bénéficier, — qui ait intérêt à la mesure que vous réclamez.

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pour les communications avec le Nouveau-
Monde que pour les communications avec
Extrême-Orient, voire pays possédant une
situation géographique privilégiée ? Ne voyez.
situation géographique privilégiée? Ne voyez.
vous pas qu'avant même la création des lignes
ferrées qui partent du centre pour rayonner
vers la circonférence et qui s'en vont porter
le mouvement dans les ports et vers les fron.
tières, ne voyez vous pas que la nature a
tracé d'avance à travers nos vallées ces grands
fleuves qui se dirigent les uns vers la Manche,
les autres vers l'Océan, les autres vers la
Méditerranée? Et dites-moi si un pareil pays
n'est pas placé par sa situation même et avant
les découvertes des hommes, comme l'entrepôt
naturel du commerce du monde, mieux que

Il faut demander la liberté du commerce et de la navigation partout, et que les Anglais et les Français s'entre-donnent assistance les uns les autres. »

M. Allain Targé. L'Angleterre était prohibitionniste dans ce temps-là !

M. Maurice Rouvier. L'honorable M. Allain Targé me fait observer que l'Angleterre était prohibitionniste dans ce temps-là. Je m'en doutais; mais je le remercie de le rappeler, car quelques-uns de nos collègues pouvaient peut être l'ignorer, et il me donne ainsi l'occasion d'insister.

Oai, l'Angleterre était prohibitionniste et la France était libérale? Or, que disais-je ? que la tradition nationale française en matière de traité était une tradition libérale. Vous venez à l'appui de ma thèse, mon cher collègue, et

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