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DÉBATS PARLEMENTAIRES

TOME XIV DE LA NOUVELLE SÉRIE

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 1885

Tome III — Du 10 Novembre au 29 Décembre 1885

PARIS

IMPRIMERIE DES JOURNAUX OFFICIELS, QUAI VOLTAIRE, 31

1886

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ANNALES DU SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 1885

SÉANCE DU MARDI 10 NOVEMBRE 1885

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SOMMAIRE. Lecture, par M. le président, d'un décret de M. le Président de la République portant convocation des Chambres et déclarant ouverte la session extraordinaire de 1885. Communication de M. le président relative au décès de MM. Fayolle, sénateur de la Creuse, Robin, Communication par M. le président sénateur de l'Ain, Jumeau, sénateur d'Eure-et-Loir, Labitte, sénateur de la Somme. Demande de congé. du dépôt, par M. Fresneau, d'un projet de résolution tendant à la nomination d'une commission chargée d'ouvrir une enquête sur les provenances, Rejet qualités et prix des fournit ures militaires et autres inscrites au budget de l'Etat. - Demande d'urgence: M. Fresneau, le président. de l'urgence, renvoi du projet de résolution à la commission d'initiative parlementaire. = Tirage au sort des bureaux. = Question par M. Emile Lenoël à M. le ministre de la guerre.: MM. Emile Lenoël, le général Campenon, ministre de la guerre. Règlement de l'ordre du jour : MM. Georges, le colonel Meinadier, Tolain, le président. Renvoi de la prochaine séance au lundi 16 novembre.

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je déclare ouverte la session extraordinaire du
Sénat.

Aux termes de l'article 11 de la loi consti-
tutionnelle du 16 juillet 1875, le bureau de
chacune des deux Chambres est élu chaque an-
née pour la durée de la session et pour toute
session extraordinaire qui aurait lieu avant la
session ordinaire de l'année suivante.

En vertu de cette disposition, les membres du bureau élu pour la session de 1885 restent en fonctions et le Sénat se trouve ainsi constitué.

DÉCÈS DE SÉNATEURS

M. le président. Messieurs les sénateurs, depuis notre séparation, la mort a frappé quatre de nos collègues, MM. Fayolle, Robin, Jumeau et Labitte.

M. Fayolle a toujours été un ferme républicain.

Né en 1815, avocat distingué, il avait représenté le département de la Creuse à l'Assemblée constituante de 1848 et à la Législative, apportant son infatigable dévouement à la défense des intérêts du peuple des campagnes.

Le 2 Décembre le contraignit à chercher dans l'exercice de sa profession une diversion à sa douleur de patriote.

Conseiller général en 1871, il entra au Sénat en 1876.

Tous ceux qui l'ont connu ont su apprécier sa modération et sa haute honorabilité. (Très bien ! très bien !)

M. Robin, né en 1821, était déjà l'une des gloires scientifiques de la France lorsqu'en 1876 le département de l'Ain l'envoya siéger parmi nous.

La fermeté de ses convictions républicaines s'alliait à la plus parfaite tolérance.

Adversaires et amis rencontraient chez lui une même courtoise bienveillance.

Il professait une égale estime pour tous les esprits sincères. Ses vastes connaissances étaient précieuses dans les commissions.

M. Charles Robin laissera à tous ses collègues le souvenir d'un homme aussi dévoué à la patrie et à la liberté qu'à la science. (Vive approbation et applaudissements.)

Moins brillante, mais non moins honorable a été la vie de M. Jumeau.

Né en 1824, il renonça à la carrière du barreau à laquelle il s'était préparé, pour se consacrer exclusivement à l'agriculture.

En 1858, il fonda un organe technique, pour la défense des intérêts agricoles. Il conquit rapidement une légitime influence.

1

L'indépendance de sa plume ne tarda pas à ¡ avant d'avoir pu donner suite à leurs meilexciter les susceptibilités ombrageuses des leures intentions. maîtres d'alors, le journal l'Union agricole fut supprimé. Conseiller général en 1868 et en 1870 contre un candidat officiel, M. Jumeau a été élu sénateur d'Eure-et-Loir en janvier dernier. Enlevé au Sénat par une mort prématurée, il emporte l'estime de tous ses collègues, qui avaient de suite reconnu ses qualités sérieuses et pratiques. (Approbation.)

mes relativement petites importent peu, habitués qu'ils sont aujourd'hui à compter par centaines de millions et par milliards.

Dans des termes que j'écoutai avec reconnaissance, l'honorable général Lewal me ré- J'estime au contraire que quelques-uns de pondit que les vues que j'exposais étaient en- ces pauvres petits millions, j'allais dire queltièrement les siennes ; que rien ne lui était ques centaines de mille francs sauvés ainsi de plus agréable que de voir les Chambres lui l'émigration du capital et rendus au travail indiquer la voie où je le sollicitais d'en- intérieur, rendent un service sensible, signalé, trer, et qu'avant peu j'aurais entière satisfac-et j'en ai trouvé bien des preuves dans l'étude attentive que j'ai faite depuis dix ans de la situation de nos différentes industries. Ce qui les étiole, c'est le capital qui s'écoule dans des proportions inouïes jusqu'ici et sans compensation par nos frontières pour aller vivifier des chantiers ruraux ou urbains qui ne sont point les nôtres.

tion.

Par malheur, un mois ne s'était pas écoulé que l'honorable général Lewal était emporté dans la bourrasque parlementaire que vous vous rappelez.

M. Labitte, né en 1823, a consacré sa vie à l'étude des sciences naturelles. Il fut tour à tour élève, préparateur et collaborateur des Brongniart, des Dufrénois, des Duvernoy. Il organisa, avec le concours de M. Massiat, le Je suis donc obligé, messieurs, de recourir à musée Orfila. Propriétaire dans le départe l'initiative parlementaire pour appeler l'attenment de la Somme, il fut êlu conseiller génétion du Sénat sur la provenance, la qualité et ral en 1871, député en 1876, sénateur en les prix des fournitures militaires et autres 1882. inscrites au budget de l'Etat, et sur la situation faite à notre agriculture et à notre industrie par les traités de commerce et l'ensemble

Il appartenait à ce groupe d'hommes fermes et modérés qui apportent une égale résistance aux entraînements de l'impatience et aux ten-de notre régime économique, ce n'est pas une petite question que je soulève.

tatives réactionnaires.

Le Sénat a perdu en M. Labitte un savant modeste, un homme de bien et un bon citoyen. (Applaudissements.)

DEMANDE DE CONGÉ

Personne n'ignore que nous allons être obligés de faire de grandes dépenses pour la réfection de notre matériel naval. N'y eût-tl que l'entretien de notre armée de terre et de mer, dans les proportions que nous avons dû leur donner, quand on songe qu'un seul chapitre, celui des vivres, au ministère de la guerre, dépasse 90 millions, celui des fourrages 76; qu'à la marine, celui des approvisionnements santé. généraux ordinaires atteint 50 millions, il est La demande est renvoyée à la commission bon de se préoccuper d'où viennent ces pro. des congés. duits, à qui nous les payons, et si cette agriculture dont on parle tant et à laquelle j'espère bien que le Sénat donnera autre chose que des consolations platoniques, au lieu de trouver

M. le président. M. Gilbert-Boucher demande un congé de deux mois pour raison de

DEPOT D'UN PROJET DE RÉSOLUTION

En conséquence, je supplie le Sénat de vouloir bien considérer, dans sa haute impartialité, qu'il n'y a point de question d'opinions politiques, nl de vainqueurs, ni de vaincus dans mon humble demande de réforme économique, et pour lui donner en cette matière la mesure de ma sincérité, je n'ajouterai rien à ce que je viens d'indiquer si sommairement, si ce n'est la réflexion que voici :

Le pays sort à peine de grandes émotions. Dans une autre enceinte, protestataires d'un côté, invalidateurs de l'autre, sont rangés en bataille. Si pendant ce temps le Sénat voulait prendre pour sa part d'invalider les abus...

M. Testelin. Vous voulez invalider les avoines!

M. Fresneau. ... plus il y réfléchira, plus il verra que cette part serait la meilleure et qu'il ferait en s'en emparant une chose utile et sage. (Approbation à droite).

M. le président. Personne ne demande

M. le président. M. Fresneau a déposé dans ces immenses consommations un soula- la parole sur l'urgence ?

sur le bureau du Sénat une proposition conçue en ces termes : « J'ai l'honneur de déposér sur le bureau du Sénat le projet de résolu. tion suivant:

gement et quelques compensations, n'en est
pas, au contraire, artificiellement en quelque
sorte appauvrie.

Dans la sorte d'interpellation que je trans« Le Sénat nommera immédiatement dans forme aujourd'hui en une proposition positive, ses bureaux une commission de 9 membres j'ai rappelé le chiffre formidable de 50 millions chargée d'ouvrir une enquête sur les prove-d'avoines que nos derniers états de douanes nances, qualités et prix des fournitures mili- constataient que nous avions payés l'année taires et autres inscrites au budget de l'Etat, précédente à l'étranger, et je citais l'opinion et de déposer un rapport dans le plus bref de nos officiers, constatant que les avoines russes et suédoises ne rendaient point les mêmes services que les avoines françaises à nos chevaux de cavalerie.

délai sur les réformes à introduire dans cette
portion des dépenses publiques. »
L'auteur de la proposition demande l'ur-
gence.

La parole est à M. Fresneau.

M. Fresneau. Messieurs, je me conformerai au règlement en ne proportionnant pas à l'importance de ma proposition les développements que je lui donnerai.

Le 28 février dernier, à propos de la discussion du budget et particulièrement de celui de la guerre, je m'excusais auprès du ministre chargé de ce département, de l'obligation où je me voyais de lui adresser du haut de cette tribune, une demande favorablement accueillie, mais bien inutilement, par quatre ou cinq de ses prédécesseurs.

Les ministres, lui disais-je, se succèdent avec une rapidité telle qu'ils disparaissent

Ceci est au milieu de considérations bien
autrement graves un imperceptible exemple
des horizons nouveaux que le Sénat peut
ouvrir, s'il veut bien ordonner qu'une com-
mission de neuf membres se rendra compte
des provenances, des qualités et des prix des
fournitures militaires d'abord, et de toutes

celles que l'Etat inscrit à son budget annuel-
lement pour des sommes si considérables.
Vous verrez, messieurs, en entrant dans le
détail, qu'il s'agit de conserver à nos ateliers
ruraux et autres un nombre formidable de
millions que les traités qui vous lient ne vous
permettent pas de leur restituer d'une autre
manière; et dès qu'il s'agit de millions, vous
savez, messieurs, l'impossibilité où je suis de
ne pas me séparer de ceux pour qui ces som

Je consulte le Sénat.

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(Le vote a lieu. L'urgence n'est pas prononcée.)

M. le président. La proposition est renvoyée à la commission d'initiative.

M. Fresneau. Je demande la parole pour une observation sur le règlement.

M. le président. La parole est à M. Fresneau sur le règlement.

M. Fresneau. Messieurs, il y a la lettre du règlement et il y en a l'usage. La sauvebilité à tous, consiste dans l'obligation impogarde de notre initiative, de notre responsa sée à la commission d'initiative de faire, dans un délai très court, un rapport sérieux sur mises. les propositions sérieuses qui lui sont sou

Je suis donc obligé de prévenir que si, l'expiration du délai légal— car le règlement est une loi le rapport n'était pas présenté, je viendrais en revendiquer le dépôt à cette

tribune.

TIRAGE AU SORT DES BUREAUX

M. le président. L'ordre du jour appelle le tirage au sort des bureaux.

(Il est procédé à cette opération.)

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