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3. - Discussion du projet de loi ayant pour objet de porter de 1 million de francs à 1,491,907 fr. le maximum des subventions que le ministre des travaux publics peut s'engager à accorder, en 1905, aux entreprises de chemins de fer d'intérêt local et de tramways : MM. Louis Lacombe, Massabuau, Georges Cochery, président de la commission du budget. Adoption.

4. Suite de la discussion: 1° de l'interpellation de M. Georges Grosjean sur l'incessante propagande internationaliste et antimilitariste des bourses du travail; 2° de l'interpellation de M. Vaillant sur les abus et l'arbitraire de l'ingérence gouvernementale et préfectorale dans l'administration de la bourse du travail de Paris: MM. Edouard Vaillant, Georges Grosjean, Paul Deschanel.

5. Communication d'un décret désignant

6.

7.

SOMMAIRE

des commissaires du Gouvernement pour assister le ministre de l'intérieur dans la discussion du projet de loi portant fixation du budget de l'exercice 1906.

Règlement de l'ordre du jour.

Dépôt, par M. le ministre de l'intérieur, d'un projet de loi tendant à autoriser la ville de Rennes (Ille-et-Vilaine) à percevoir des taxes directes en remplacement de droits d'octroi supprimés sur les boissons hygiéniques.

Dépôt, par M. le ministre des finances, de dix projets de loi concernant les octrois de Concarneau, Armentières, Tréboul, Laigle, Quimerch, Caudan, Moncontour, la Ciotat, Guilvinec et Saint-Raphaël.

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Dépôt, par M. J. Thierry, d'une proposition de loi sur la répression de la fraude douanière en matière de navigation.

Dépôt, par M. Mas, d'une proposition de loi tendant à ouvrir au ministre de l'agriculture un crédit extraordinaire de 400,000 fr. pour venir en aide aux victimes de la grêle dans les cantons d'Aniane, de Claret, de Saint-Martin de Londres et des Matelles, arrondissement de Montpellier.

Dépôt, par M. Mas et plusieurs de ses collègues, d'une proposition de loi tendant à mettre l'article 23 de la loi du 21 mars 1905 sur le service militaire en harmonie avec les décrets du 10 novembre 1903 et du 10 mai 1904 qui suppriment l'ancienne école normale supérieure, et instituent un concours commun pour l'école normale supérieure de l'université de Paris et les bourses de licence des universités de province.

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M. Félix Marot, l'un des secrétaires, donne lecture du procès-verbal de la séance de ce matin.

M. le président. La parole est à M. de Mahy sur le procès-verbal.

M. de Mahy. C'est par erreur que je suis porté comme ayant voté « contre » l'article 2 de la loi relative à la sécurité et à la liberté du suffrage universel. Je regrette amèrement cette erreur. J'étais absent. Présent, j'aurais voté « pour ». Cet article, essentiel, est le meilleur de cette loi, et cette loi est l'une des meilleures, des plus sages, des plus clairvoyantes, des plus honnêtes, des plus salutaires dont puisse se glorifier le Parlement. Je m'honore d'avoir fait partie

des commissions qui l'ont élaborée. Nos collègues M. Defontaine, en la présentant, et M. Charles Benoist, en la faisant triompher, ont rendu le plus éminent service au pays et à la République.

objet de porter de 1 million de francs à 1,491,907 fr. le maximum des subventions que le ministre des travaux publics peut s'engager à accorder en 1905 aux entreprises de chemins de fer d'intérêt local et de

La parole est à M. Lacombe.

M. le président. Il n'y a pas d'autre oh- tramways.
servation sur le procès-verbal ?...
Le procès-verbal est adopté,

2. EXCUSES

M. le président. MM. Louis Martin et Pugliesi-Conti s'excusent de ne pouvoir assister à la 2o séance de ce jour.

M. Andrieu s'excuse de ne pouvoir assister

M. Louis Lacombe. Messieurs, la loi de finances du 22 avril 1905 a fixé à la somme de 1 million de francs, le maximum des engagements que le ministre des travaux publics est autorisé à prendre pour subventionner les entreprises de chemins de fer d'intérêt local et de tramways. A la date du 13 juillet der

aux séances de ce jour ni à celles de demain. nier, M. le ministre a déposé un projet de

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loi tendant à élever cette subvention de 1 million à 1,491,907 fr., 1 million et demi en chiffre rond.

Bien que l'opération ne se justifie pas par elle-même au point de vue de la tradition financière, il y a cependant des précédents, et elle s'explique parce qu'il s'agit simplement de reporter sur l'exercice actuel une

somme de 500,000 fr. non employée en 1904.

Je suis, quant à moi, partisan trop résolu des subventions et des encouragements à donner aux entreprises de chemins de fer d'intérêt local pour protester et combattre le projet de loi qui étend la subvention de l'Etat aux départements qui ont présenté des projets approuvés. ·

J'estime en effet que le troisième réseau de chemins de fer à voie normale, d'intérêt général, étant sur le point d'être achevé, la sollicitude du Parlement devra s'appliquer maintenant d'une façon particulière aux chemins de fer à voie étroite, d'intérêt local, que nous avons grand intérêt à voir se développer dans les plus larges proportions et qui seront les compléments nécessaires des grandes lignes.

Reste à savoir si la méthode employée jusqu'à présent pour la répartition des encouragements de l'Etat entre les divers départements ne laisse rien à désirer et s'il n'y aurait pas lieu, au contraire, de modifier cette répartition d'une façon profonde.

Je prie mes collègues de vouloir bien remarquer que ces considérations très brèves intéressent quarante départements qui, jusqu'à présent, ont été privés, d'une façon à peu près absolue, des subventions de l'Etat. Il est en effet d'observation et de statistique incontestables que les départements les plus fortunés, les plus favorisés déjà au point de vue des chemins de fer d'intérêt général, sont en mème temps les mieux pourvus au point de vue des chemins de fer d'intérêt local, en sorte qu'ils sont dès à présent les plus largement dotés quant au réseau à voie étroite.

Le fait s'explique aisément les chemins de fer d'intérêt général construits par les grandes compagnies furent établis tout d'abord dans les pays les plus riches; ils les ont bien desservis et ont augmenté leur activité économique. Cette prospérité s'est ensuite étendue par voie de conséquence aux chemins de fer d'intérêt local, en sorte que les statistiques du ministère nous indiquent qu'à l'heure actuelle trente départements français ont à peu près épuisé le maximum de la subvention à laquelle ils ont droit et que, par contre, quarante départements en ont été jusqu'à présent entièrement privés; leurs ressources propres, additionnées aux subventions de l'Etat, ne leur permettent pas d'aborder leur réseau d'intérêt local.

actifs et dévoués, a consenti des sacrifices importants et créé un magnifique réseau; le Tarn achève le sien, mais vous avez, à côté, d'autres départements plus pauvres et tout aussi intéressants-l'Aveyron est de ce nombre - dont les ressources propres, additionnées à la subvention actuelle de l'Etat, ne peuvent pas leur permettre d'aborder utilement le réseau de chemins de fer économiques dont retireraient cependant les avantages les plus importants ces régions déshéritées. Les départements du Cantal, du Lot et de l'Aveyron sont dans ce

cas.

M. Desfarges. Ajoutez-y la Creuse.

M. Louis Lacombe. Il y en a quarante que leur situation financière condamne à l'immobilité, si l'Etat ne vient pas à leur aide. J'espère arriver à déterminer la Chambre à adopter, lors du vote de la prochaine loi de finances, un mode de répartition qui facilitera aux départements pauvres dont nous parlons l'accès des subventions de l'Etat. J'ai la conviction qu'il est très facile de modifier la situation actuelle, de l'améliorer dans une très notable proportion.

Il serait injuste assurément d'adresser aux conseils généraux de ces départements pauvres le reproche d'inertie et d'inaction; il leur était impossible, malgré leur vif désir, de créer leur réseau d'intérêt local; leurs ressources ne le leur permettaient pas.

Nous n'envions pas l'heureux sort de nos voisins, départements plus riches, qui ont obtenu les magnifiques résultats que nous avons pu constater, mais nous disons à la Chambre qu'il serait temps de rendre les subventions de l'Etat abordables par les départements peu fortunés. C'est là la démonstration que je voudrais faire en quelques minutes. (Parlez! parlez!)

M. Massabuau. C'est très intéressant! M. Desfarges. On a mème diminué les subventions accordées aux départements les plus pauvres.

M. Louis Lacombe. C'est exact. Mon collègue a raison. Une jurisprudence récente a diminué la participation de l'Etat pour les départements peu fortunés. Voici comment Depuis quelques années l'Etat a limité sa cotisation à un maximum absolu de 2 p. 100 du capital engagé. Ainsi les départements qui ne trouvent pas à emprunter et à amortir en soixante-cinq ans leur capital de premier établissement, au taux de 4 p. 100, tout compris, ne reçoivent de l'Etat que 2 p. 100.

Les départements riches, dont les revenus d'exploitation et le crédit sont suffisants pour trouver de l'argent à 4 p. 100, sont donc favorisés, puisque leur charge an

Il est aisé de se rendre compte que les ressources des départements pauvres n'étant pas appelées à s'accroitre, il est interdit à tout jamais à ces départements d'aborder la construction de leur réseau d'intérêt local si la subvention de l'Etat n'est pas aug-nuelle ne dépasse pas 2 p. 100. En revanche, mentée. C'est une question de justice qui les départements pauvres, dont parlait mon se posera à bref délai devant le Parlement. collègue Desfarges avec beaucoup de raiUn certain nombre de départements ont son, ne trouvant pas, à cause de l'insuffipu faire, je le sais, les sacrifices nécessai- sance de leurs produits et de leur crédit, de res pour se créer un réseau d'intérêt dépar- l'argent amortissable à p. 100, doivent temental à peu près complet; il y en a dans payer 2.25, 2.50 p. 100, alors que le taux de notre région: à côté de nous, la Haute-2 p. 100 aurait dû demeurer la limite maxiGaronne, sous l'action de ses représentants mum. Voilà en quoi mon collègue a pu dire

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Une modification de la loi du 11 juin 1880 s'impose donc d'une façon absolue; cette modification doit avoir pour but de faciliter aux départements que l'exiguïté de leurs ressources a tenu jusqu'à présent éloignés de toute subvention de l'Etat, l'accès de cette subvention.

Jusqu'à présent, si la Chambre a essayé de modifier, par la loi de finances, la loi du 11 juin 1880, elle l'a fait sous l'impulsion de représentants des départements fortunés qui jugeaient insuffisant le maximum de 400,000 francs accordés à chaque département; nul département ne peut, d'après la loi de 1880, recevoir une subvention supérieure à 400,000 fr.; aussi avons-nous vu les départements riches, qui avaient déjà reçu une subvention approchant de 400,000 fr., faire des efforts pour que ce chiffre fût porté à 600,000 et même 800,000 fr. La loi de finances du 22 avril 1905 a augmenté la participation de l'Etat pour chaque département jusqu'à 800,000 fr.

M. Gauthier (Aude), ministre des travaux publics. Il y a deux ans, la subvention de l'Etat a été portée de 400,000 à 600,000 fr. L'année dernière l'amendement tendant à porter la participation de l'Etat à 800,000 fr. a été retiré sur l'annonce du dépôt d'un projet de loi.

M. Louis Lacombe. L'article de la loi de finances qui portait à 600,000 fr. au lieu de 400,000 fr. la subvention de l'Etat a été, l'année dernière, par deux fois rejeté par le Sénat qui ne l'adopta qu'après que la Chambre le lui eut renvoyé une troisième fois en persévérant dans sa décision.

Il est donc Fien établi que les efforts tentés jusqu'à présent pour modifier la loi de 1880 sur les chemins de fer d'intérêt local, ont eu pour objet de reculer la limite de la subvention de l'Etat pour les départements riches, cependant que les départements pauvres continuaient à ne rien recevoir du tout; n'oublions pas qu'il y en a 39 dans ce cas.

Cette situation une fois connue et n'étant, je crois, contestée par personne, il conviendrait d'examiner très rapidement les deux solutions qui pourraient y porter remède. Ces deux solutions sont très simples; je vais essayer de les indiquer à la Chambre. La première consisterait, à mon sens, à étudier s'il n'y aurait pas lieu, dans beaucoup de cas, de transformer des lignes de chemins de fer d'intérêt général à voie large, actuellement en projet, en lignes d'intérêt local à voie étroite.

M. Massabuau. On l'a fait déjà dans beaucoup de départements; je citerai particulièrement les Basses-Pyrénées.

M. Louis Lacombe. Mon collègue a raison; il y a des précédents. La solution consisterait donc à étudier la transformation possible des projets restant à exécuter de chemins de fer à voie large en chemins de fer à voie étroite coûtant six fois moins cher.

Dans certains départements, notamment dans celui que j'ai l'honneur de représenter, on a prévu des chemins de fer dont la dépense est supérieure à 300,000 fr. par

kilomètre.

terrain, serait enchanté d'accepter des conventions de cette nature.

Mais la solution la plus complète de cette question si importante de la participation de l'Etat aux réseaux ferrés départementaux, serait dans une modification profonde du barème des subventions établies par la loi de 1880.

M. Massabuau. Voilà la vraie solution.

M. Louis Lacombe. La loi du 11 juin 1880 sur les chemins de fer d'intérêt local et les tramways est la seule qui comporte des subventions fixes. Le système de la subvention fixe, invariable, a été abandonné par toute notre législation fiscale. Je crois bien Ne pourrait-on pas négocier avec ces dé- qu'il n'y en a plus d'exemple. La loi du partements et avec la compagnie de chemins 30 octobre 1886 sur l'enseignement primaire de fer chargée de l'exécution de ces voies des filles et les décrets ultérieurs ont prévu, normales de façon à construire six fois plus pour la construction de maisons d'école, des de chemins de fer à voie étroite, sauf à subventions proportionnelles au nombre abandonner tels tronçons à voie large? des centimes communaux, à la dette de la L'opération entraînerait des dépenses moin- commune et enfin aux constructions scodres et constituerait pour nombre de dépar-laires qui existent déjà. La loi sur l'assistements la plus heureuse des solutions.

Quels sont donc les départements où des chemins de fer à voie large sont encore en projet? Ce sont précisément les départements retardataires. Pensez-vous qu'ils ne préféreraient pas, en général, posséder 100 ou 150 kilomètres de chemins de fer à voie étroite, que gagner 25 kilomètres d'un tronçon à voie large concédé et non exécuté depuis les conventions de 1883?

M. Rousé. En ce qui concerne le transbordement, mon cher collègue, il y aurait des frais de passage d'une ligne à l'autre.

M. Louis Lacombe. Je ne prétends pas que cette transformation s'opère sans aucune difficulté il n'est question ici que d'études à faire, mais il y en a des exemples. Je connais un département dans lequel était projeté un chemin de fer de 50 kilomètres coûtant 300,000 fr. le kilomètre et qui aimerait mieux être doté d'un réseau complet au lieu d'un tronçon qui ne lui servira à rien. Cette solution fut mise en avant dans mon départemeut pour la ligne de Saint-Affrique à Albi; nous y avons définitivement renoncé en présence d'objections tirées de considérations d'intérêt régional.

tance médicale du 13 juillet 1893 a également adopté un barème variant en raison inverse de la valeur du centime départemental et communal. Le barème fixe, appliqué aux subventions d'Etat, n'existe plus dans la loi du 11 juin 1880 en matière de chemins de fer à voie étroite. Je crois qu'il faut faire disparaître ce dernier vestige d'une législation surannée. (Très bien! très | bien! sur divers bancs.)

La Chambre est déjà entrée résolumen dans cette voie. Elle a, en 1895, abandonné le système des subventions fixes en matière de chemins vicinaux. La voirie vicinale était jusqu'alors subventionnée par l'Etat d'après le barème fixe établi par la loi de 1881. Or, en 1895, le rapporteur du budget de l'intérieur, l'honorable M. Boucher, établit sur notre demande et avec notre collaboration un barème de subventions inversement proportionnelles à la valeur du centime kilo métrique du département et de la commune. Ce système a donné, à l'expérience, les meilleurs résultats.

Ce que le Parlement a fait pour la voirie vicinale, je propose de le faire pour la voirie vicinale ferrée, c'est-à-dire pour les chemins de fer d'intérêt local. (Très bien! très bien!) Le chemin de fer d'intérêt local n'est pas

M. Bouhey-Allex. Ce sont des questions autre chose qu'un chemin vicinal à voie d'espèce.

M. Louis Lacombe. Les compagnies de

chemins de fer elles-mêmes ne se refuseraient pas à entrer en négociations sur ce point.

M. Louis Puech, rapporteur. Elles l'ont déjà fait.

M. Louis Lacombe. Je sais qu'on a engagé des négociations dans ce sens-là. Les grandes compagnies de chemins de fer auraient avantage à accepter cette solution qui leur procurerait des affluents pour leurs grandes lignes; elles y sont aussi intéressées que le pays lui-même. J'ajoute que le conseil général de ces départements, n'ayant à sa charge que les acquisitions de 1905. - DÉP., SESS. EXTR. - ANNALES, T. UNIQUE. (NOUV. SÉRIE, ANNALES, T. 77.)

rapide. Les subventions que nous avons votées, le barème que nous avons adopté il y a bientôt dix ans pour la voirie vicinale, doivent être applicables aux chemins de fer d'intérêt local. Je demande à la Chambre de les leur appliquer.

converti d'avance à cette thèse, c'est-à-dire à l'application aux voies ferrées du barème qui existe en matière de chemins vicinaux. Ce barème, établi en raison inverse de la valeur du centime kilométrique du département, permettrait à l'Etat, sans augmenter sensiblement les crédits, de participer aux dépenses de chemins de fer dans les départements peu fortunés jusqu'à concurrence de 75 p. 100. De ce chiffre maximum de 75 p. 100, l'échelle descendrait jusqu'à 15 p. 100, pour les départements les plus riches et les mieux pourvus.

Certains départements, tels que le Rhône et la Gironde, ont achevé leur réseau d'intérêt local; ils pourraient, par conséquent, recevoir encore pour le développement d'un second réseau, pour ainsi dire, superposé au premier, une subvention de 15 p. 100. Ils y gagneraient encore cependant, car ils verraient en même temps supprimer le maximum de 400,000 fr. établi par la loi de finances. Cette barrière, actuellement opposée au développement de leur réseau, disparaîtrait. Ces départements n'auraient droit, il est vrai, qu'à une subvention de 15 p. 100, mais la barrière, l'obstacle que je signale serait levé. Pendant ce temps, les départements peu fortunés et pauvres pourraient au moins amorcer leur réseau local. Tel est l'avantage qu'offrirait cette combinaison.

Pour résumer les résultats que produirait la modification du barème des subventions que j'ai l'honneur de réclamer, j'invoquerai le témoignage de l'honorable ministre des travaux publics lui-même qui déclarait -- je cite presque textuellement ses paroles que ces dispositions nouvelles auraient pour effet de donner satisfaction: aux départements pauvres en leur permettant d'amorcer largement leurs réseaux de chemins de fer d'intérêt local; aux départements moyennement riches, en leur permettant de développer dans de justes proportions les réseaux déjà commencés; aux départements riches, puisqu'en supprimant tout maximum elles leur donneraient de nouvelles facilités pour multiplier leurs lignes d'intérêt local. Enfin, l'Etat lui-même n'y perdrait rien, puisque tout en aidant efficacement les départements peu fortunés, il se couvrirait du côté des départements riches en diminuant la quotité de leurs subventions. L'équilibre de ce chapitre du budget serait done parfaitement maintenu.

Résumant d'un mot ces trop longues considérations que la Chambre a bien voulu me permettre, j'estime qu'un barème plus M. le comte de Lanjuinais. Vous avez équitable et mieux proportionné établirait parfaitement raison.

M. Louis Lacombe. Quel serait le résultat d'une pareille mesure? Nous permettrions ainsi aux départements peu fortunés d'obte

nir des subventions.

Je sais qu'en m'adressant à M. le ministre des travaux publics je parle à un convaincu, puisque l'honorable M. Gauthier a proposé un barème identique à la commission sénatoriale des chemins de fer; je le sais done

dans la dispensation des subventions nationales une large période d'égalité et de véritable justice. (Applaudissements à gauche.)

M. le président. La parole est à M. Massabuau.

M. Edouard Vaillant. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

La Chambre a fixé d'une façon ferme à cette séance la discussion de l'interpellation

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sur les bourses du travail et des interpellations qui y sont jointes. M. le président pensant que la discussion en cours serait très brève a permis qu'on la mît en tète de l'ordre du jour, mais réellement la Chambre ne verrait pas ses intentions remplies si cette question occupait la séance. (Applaudissements.)

M. Paul Deschanel. C'est inadmissible. M. Edouard Vaillant. Je demande done que l'interpellation vienne maintenant; la discussion amorcée continuerait ensuite.

M. le président. Cette discussion a pris, en effet, plus d'ampleur que nous ne pensions, mais M. Massabuau m'annonce qu'il n'a que de courtes observations à présenter. (Très bien ! très bien!)

M. Massabuau. Je n'abuserai pas des instants de la Chambre; je veux simplement m'associer à l'observation de l'honorable

M. Lacombe.

Notre collègue a insisté sur cette anomalie qui fait traiter les départements pauvres d'après la loi de 1880, sur le même pied que les départements riches, alors qu'il faudrait leur accorder un traitement de faveur, précisément parce qu'ils sont pauvres.

Il est encore une autre raison qui milite en leur faveur : par une coïncidence forcée, inéluctable, toujours le département pauvre est montagneux et particulièrement accidenté; les constructions, soit de chemins vicinaux, soit de chemins de fer, y sont par conséquent beaucoup plus coûteuses.

M. Louis Lacombe. C'est exact.

M. Massabuau. Ainsi, par exemple, dans le département de l'Aveyron il y a des régions où la moyenne de construction d'un chemin vicinal ordinaire coûte 15,000 fr., 18,000 fr. et jusqu'à 20,000 fr. le kilomètre, alors que dans la plupart des départements de France elle est au maximum de 6,000 fr. le kilomètre. Ainsi, lorsque dans ce département on voudra construire des chemins de fer d'intérêt local, le coût kilométrique s'élèvera à une somme beaucoup plus élevée que dans la moyenne des départements.

Voilà l'argument particulier que je tenais à ajouter aux raisons données par notre collègue. La pauvreté de certains départements et la difficulté naturelle topographique expliquent, d'ailleurs que ces départements n'aient pas profité des facilités budgétaires

qui ont été accordées jusqu'ici, soit pour T'achèvement du réseau vicinal, soit pour la construction des chemins de fer d'inté

départements pour la construction des che- | cussion a pour objet de reporter à 1905 un mins vicinaux. (Très bien! très bien!) crédit d'engagement non consommé en 1904. Je ne vois pas comment on pourrait distribuer pendant l'exercice 1905 une partie des subventions d'après une règle, et une autre partie suivant une autre règle. (Très bien! très bien!)

Aujourd'hui, M. Lacombe voudrait, par analogie, voir faire pour les chemins de fer à voie étroite un barème analogue à celui de 1895 pour les chemins vicinaux, afin d'indemniser ces départements à raison des difficultés qui les ont empèchés de procéder à ces constructions. Je m'associe à cette soution qui ne serait qu'un acte de justice. En ce qui concerne le premier système proposé par notre collègue, et sur lequel il n'a pas insisté, la Chambre me permettra | de faire des réserves. Pour les lignes à voie large restant à construire et réclamées par les populations, il convient en effet de faire deux parts: tout d'abord, les lignes qui, raisonnablement, peuvent être construites à voie étroite et desservir néanmoins le pays d'une façon satisfaisante, et, d'autre part, les lignes à voie large qui, comme celle que M. le ministre des travaux publics a fait étudier, entre Aurillac et Espalion, n'ont surtout leur raison d'être que comme créant des facilités nouvelles en vue du trafic général. Si cette ligne, par exemple, était faite à voie étroite, elle n'aurait plus la même utilité.

Les observations de nos collègues doivent donc être retenues pour le jour où nous discuterons leur proposition au fond. Mais je demande instamment à la Chambre de voter immédiatement le projet, car ce serait vraiment une étrange méthode, quand le budget est à l'ordre du jour, de discuter les interpellations, et quand ce sont au contraire les interpellations qui sont à l'ordre du jour, de passer toute la séance à discuter le budget. Applaudissements.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole pour la discussion générale?...

Je consulte la Chambre sur la question de savoir si elle entend passer à la discussion de l'article unique du projet de loi.

La Chambre, consultée, décide de passer à la discussion de l'article.)

M. le président. « Article unique. L'article 81 de la loi de finances du 22 avril 1905 est modifié comme suit :

Il en est de même de la ligne de Brioude à Saint-Flour qui constitue la soudure du Paris-Lyon-Méditerranée avec le Midi à Saint-Flour, alors que jusqu'à présent ces compagnies sont, dans cette contrée, tribuaires pour leur jonction d'un tronçon du réseau d'Orléans. Cette ouverture permettra aux marchandises de gagner deux jours de délai entre le Nord et le Midi, abrégera de deux heures la durée du parcours pour les voyageurs entre Saint-Flour et Paris. Il est clair que si cette ligne se construisait à voie étroite, les deux inconvénients dont on poursuit la suppression, soit la compagnie intermédiaire, soit le transbordement des voyageurs, subsisteraient et la ligne ne répondrait plus au double but qui a présidé à son étude et qui va justifier 4. prochainement la déclaration d'utilité publique.

Il en est de même pour le prolongement jusqu'à Espalion de cette ligne de Brioude à Saint-Flour, prolongement qui reliera directement l'est de la France au chemin de fer transpyrénéen, prévu par la convention internationale que vous avez approuvée.

droite.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission du budget.

C'est dans ces conditions et sous les rétion de la Chambre et du Gouvernement serves que j'ai faites, que j'appelle l'attensur la question intéressante que leur a sirèt local. Ces départements, malgré les sub-gnalée M. Lacombe. (Très bien ! très bien ! à ventions élevées qui leur étaient allouées, rencontrant de plus grandes difficultés de construction, ont été en retard; c'est pourquoi, lorsque fut supprimée la caisse des chemins vicinaux qui donnait des facilités extraordinaires, puisqu'elle permettait d'emprunter à un taux d'intérêt simple de 1 fr. 25 p. 100, les représentants des départements pauvres, comme le rappelait tout à T'heure M. Lacombe, ont fait voter le barème de 1895 qui n'a jamais été qu'une réparation tardive de ce qu'on devait à ces

M. Georges Cochery, président de la commission du budget. Je n'ai qu'une simple observation à présenter à la Chambre.

«Le montant total des subventions an

nuelles que le ministre des travaux publics peut s'engager, pendant l'année 1905, à allouer aux entreprises de chemins de fer d'intérêt local et de tramways en vertu de la loi du 11 juin 1889, ainsi qu'aux services réguliers de voitures automobiles, ne devra pas excéder la somme de 1,491,907 fr. » Personne ne demande la parole?... Je mets aux voix cet article. (L'article unique du projet de loi, mis aux voix, est adopté.)

DISCUSSION DE DEUX INTERPELLATIONS RELATIVES AUX BOURSES DU TRAVAIL

M. le président. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion: 1° de l'interpellation de M. Georges Grosjean sur l'incessante propagande internationaliste et antimilitariste des bourses du travail; 2o de l'interpellation de M. Vaillant sur les abus et l'arbitraire de l'ingérence gouvernementale et préfectorale dans l'administration de la bourse du travail de Paris.

La parole est à M. Vaillant.

M. Edouard Vaillant. La Chambre a joint à mon interpellation sur la bourse du travail les interpellations sur la question antimilitariste, et c'est ainsi que cette question, greffée sur celle que j'ai l'intention d'apporter à la tribune, m'oblige à quelques déclarations, de façon à répondre autant aux dires de M. Grosjean, que par avance aux dires d'autres interpellateurs qui pourraient prendre la parole.

La proposition de nos collègues tendant à établir un barème nouveau pour la distribution des subventions aux chemins de fer d'intérêt local est peut-être très intéressante, mais je crois qu'elle ne peut pas être discutée à l'heure actuelle, car le projet en dis- | dit!

MM. le lieutenant-colonel Rousset et Georges Berry. M. Grosjean n'a encore rien

M. Edouard Vaillant. Pardon, il a parlé | tionaux du parti socialiste ont déterminé | générale qui sera la mème pour l'ensemble sur cette question.

M. le président. En effet, dans une précédente séance, on a commencé la discussion de cette interpellation, et M. Grosjean a pris la parole.

M. Edouard Vaillant. Dans tous les cas, je préviens ce qui pourrait être dit sur cette question par les déclarations qui me paraissent nécessaires, parce que les socialistes dans cette enceinte sont solidaires de ceux qui sont au dehors les militants de notre parti. Et je dois répondre à ce qui est dit contre notre internationalisme et notre antimilitarisme.

L'internationalisme est l'affirmation socialiste de la solidarité et de la lutte internationale du prolétariat de tous les pays pour la même cause, pour son émancipation. Le parti socialiste international, en ce qui concerne les rapports entre les nations, considère que chaque nation est un organisme social actuel, et, comme tout organisme, a pour première loi la conservation de son existence, de son énergie et de son indépendance. Le devoir moral correspondant à cette obligation est l'obligation de s'abstenir de toute agression contre toute autre nation. Mais cette obligation morale est loin d'ètre remplie par la classe dominante qui fait sortir des conflits économiques entre les nations des conséquences guerrières. Le parti socialiste international a, au contraire, sous ce rapport pour dessein de résister à ces tendances et à ces pratiques guerrières de la classe dominante et de maintenir la paix internationale.

Cette lutte contre la guerre est nécessaire à l'émancipation prolétaire, au développement du socialisme. Elle est nécessaire comme une conséquence de cette action internationale et de classe qui unit la classe ouvrière de tous les pays et tout le parti socialiste international pour l'émancipation ouvrière contre la classe dominante, possédante et gouvernante.

Dans ces conditions, alors que la classe dominante s'arme d'une façon systématique et arme sous ses ordres les prolétaires, dont elle est maîtresse, tant pour maintenir le prolétariat sous sa sujétion que pour continuer sa politique d'agressions continentales et coloniales, le prolétariat, contre ce militarisme, contre cet armement systématique de réaction et d'agression, cherche lui, au contraire, à désarmer la classe dominante de ces armes dirigées contre lui.

Il lui faut lutter contre ce militarisme, arme politique du pouvoir bourgeois et du capitalisme pour son émancipation, et en même temps pour empêcher les conflits à main armée entre les nations qui, désastres de la civilisation, se font au prix de son sang, de ses misères et contre ses revendications. C'est pour cela que partout le socialisme entend intervenir par l'action de la classe ouvrière et la sienne propre pour maintenir la paix internationale.

Sur tous ces points, et sans entrer dans aucun développement, les congrès interna

exactement quelle était notre doctrine, quelles étaient nos idées. Je n'ai pas à revenir sur ces définitions, ces déclarations et ces résolutions; j'ai exposé, ici, à plus d'une reprise, cette doctrine; je l'ai portée notamment à la tribune à propos de la loi sur le service de deux ans; je n'y reviendrai pas. Je dirai seulement qu'une de ses principales conséquences pratiques est exprimée en ce qui concerne notre action internationale contre la guerre, par une résolution que mon ami le citoyen Jaurès et moi avons présentée à l'une des séances du conseil national du parti, et que le conseil, l'adop- | tant au nom du parti socialiste entier, soumet en ce moment aux délibérations du parti socialiste international.

Déjà plusieurs éléments importants du parti socialiste international, les partis socialistes des principaux pays ont répondu par leur approbation, et il est évident que l'approbation sera unanime et nous permettra, contre toute guerre menaçante, l'action socialiste et ouvrière internationale que nous voulons organiser. Il me suffira de vous lire cette résolution.

En voici le texte :

«Dès que, secrets ou publics, des événements pourront faire craindre un conflit aigu entre gouvernements, rendre une guerre possible ou probable, les partis socialistes des pays concernés devront de suite, spontanément et à l'invitation du bureau international, entrer en rapports directs à l'effet de déterminer et concerter les moyens d'action, ouvrière et socialiste, commune et combinée, pour prévenir et empêcher la guerre. En même temps les partis des autres pays seront avisés par le secrétariat du bureau, et une réunion du bureau socialiste international aura lieu, aussitôt que possible, à l'effet d'arrêter pour le parti socialiste international et la classe ouvrière organisée, l'action la plus propre à prévenir et empêcher la guerre. »

Il est évident qu'à ce propos il reste pour chaque pays, pour chaque parti socialiste, à déterminer par quelle action propre il secondera et exécutera cette action internationale.

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du parti, nationalement et internationalement, pour l'action commune.

Quant à nous, quelque vive ou violente que soit l'expression de l'opinion d'un d'entre nous, jamais nous ne renierons la solidarité qui nous lie, qu'il soit socialiste ou syndicaliste. Si son opinion diffère de la nôtre, c'est à nous de chercher à le convaincre que nous avons raison, et nous n'admettons pour personne de créer contre lui un délit ou crime d'opinion.

Par conséquent, dans ces conditions, les syndicalistes peuvent être assurés de la solidarité du parti socialiste avec eux. S'il se trouve que tels citoyens ou telle catégorie de citoyens se sont exprimés d'une façon particulièrement violente, cela ne regarde que leur opinion et nous ne concevons pas que personne puisse l'incriminer. Si cette conception n'est pas identique avec la notre, elle procède du moins du même sentiment, de la mème volonté antimilitariste; notre volonté est la même: combattre de toute façon et par tous les moyens le militarisme et tout ce qui en ressort, c'est-àdire cet appui par la force armée de la domination de la classe possédante, et en même temps cette politique de guerres coloniales et de guerres intestines entre les nations, qui est menée par la classe possédante et gouvernementale.

Mais, je n'insiste pas davantage. Je n'ajou terai que quelques très brèves observations.

On a dénié aux syndicats le droit de considérer l'antimilitarisme comme une question d'ordre syndical, et à ce point de vue j'affirme avec les syndicalistes qu'ils ont absolument raison, qu'il n'est pas possible de ne pas considérer que ce soit pour eux réellement une question syndicale que la question antimilitariste. Par le militarisme, par l'organition militaire ac

tuelle, la classe dominante arrache à la famille, au syndicat, à la classe ouvrière, au travail, des citoyens qu'elle habille en soldats (Mouvements divers), et quand se produit une grève, la classe dominante les envoie sur les champs de grève...

M. Grosdidier. Dites à vos amis les Allesocia-mands de donner l'exemple du désarmement! (Très bien! très bien !)

A ce sujet, comme pour tout acte liste, tout acte syndicaliste ou antimilitariste pour en déterminer le sens, la méthode, les opinions et les discussions sont entièrement libres. Nous avons les uns et les autres à instituer nos recherches librement. Nous avons les uns et les autres nos idées, nous les avons exprimées d'une façon très nette à diverses reprises. Les conclusions rationnelles des uns et des autres peuvent différer, mais le but est le même. Et si nous différons quelque peu quant aux résolutions à prendre pour empêcher la guerre, pour combattre la domination de la classe dominante, nous n'avons que davantage à rechercher par une libre discussion la décision la meilleure, la plus pratique.

En tout cela la libre discussion amènera au bout d'un certain temps une conception

M. Edouard Vaillant. ...où ils sont appelés par le patronat pour le soutenir.

Il est évident que lorsque des troupes apparaissent sur un champ de grève, les patrons les accueillent avec joie, sentant très bien que c'est un secours qui leur est envoyé; quant aux ouvriers, il leur est bien témoigné que c'est contre eux qu'ils sont envoyés. Ils l'apprennent bien d'ailleurs par les coups qu'ils reçoivent.

M. le général Jacquey. Et qu'ils donnent! M. Edouard Vaillant. Et tant à Châlons qu'à la Martinique dernièrement à Longwy et antérieurement à Limoges les coups sont meurtriers et mème mortels. Dans ces conditions, on voudrait que les syndicats n'aient pas cette conception que

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