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nistes. St. Martin prioit l'Empereur Maxime d'épargner le sang de ces hérétiques; et quand ils eurent été exécutés, St. Ambroise et St. Martin refusèrent de communiquer avec Ithace qui s'étoit fait leur accusateur.

S. Augustin écrit à un Proconsul d'Afrique, pour le prier de ne pas faire punir de mort les Donatistes et les Circoncellions, et il finit sa lettre par ces paroles remarquables: » Quelque grand que soit le mal qu'on vent » faire quitter, et le bien qu'on veut faire >> embrasser, c'est un travail plus onéreux » qu'utile d'y contraindre, au lieu d'ins>>truire. «

» C'est par la douceur et les exhor»tations, écrivoit le Pape St. Grégoire le » Grand, à un évêque de Terracine qui per» sécutoit les Juifs, qu'il faut appeler les infi» delles au Christianisme; il ne faut pas les » en éloigner par les menaces et la terreur, « Et dans une lettre aux Evêques d'Arles et de Marseille, parlant encore des Juifs: » Il faut, » dit-il, se contenter de les prêcher, et de >> les instruire, pour les éclairer et les con>> vertir. <<< Dans un concile de Tolede, tenu en 633, il est dit, que désormais on ne contraindra int loi à professer la foi » qui

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doit être embrassée volontairement, et par

persuasion. «

Le Roi Ethelbert, converti par Augustin, l'apôtre de l'Angleterre, eût bien voulu que tous ses sujets se fissent chrétiens; » mais, » ajoute le vénérable Bede, il ne contrai» gnoit personne, parce qu'il avoit appris des » missionnaires romains, que le service de » J. C. doit être volontaire. <<<

» Nous pouvons exhorter tous les Chrẻ» tiens à l'union, dit l'Empereur Constantin » Pogonat, écrivant au Pape Domnus, mais » nous ne voulons contraindre personne.

"

Je sais que ces principes ont souvent été méconnus, sur-tout dans les siècles d'ignorance, et que les passions humaines se mélant à la Religion, ont enfanté le faux zèle et l'intolérance civile. Je conviens aussi que les Princes ont souvent abusé du droit incontestable qu'ils avoient de protéger l'Eglise, et qu'au lieu de se borner, comme ils le devoient, à réprimer les attentats de Phérésie, ils se sont permis quelquefois des violences qu'il est impossible de justifier. "Enfin, j'avoue, que parmi les ministres de l'Eglise, il s'est rencontré de ces enfans du tonnerre, qui sembloient avoir totalement

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oublié à quel esprit ils appartenoient. Mais la doctrine de l'Eglise n'a jamais varié; et pour en citer un témoin non suspect, le Jésuite Mariana, en parlant d'un édit d'Emanuel Roi de Portugal, qui ordonnoit que les enfans des Juifs seroient enlevés à leurs parens, et baptisés, dit expressément, que rien n'est plus contraire aux lois et aux coutumes de l'Eglise que cet étrange décret: Insolens decre tum, à legibus et institutiș christianis abhorrens maximè.

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Jusqu'où s'étendent les droits de la conscience erronée? Quelles sont, à cet égard, les bornes de la tolérance civile?

La conscience est un sanctuaire, où nulle puissance humaine n'est en droit de pénétrer: Dieu seul est juge des pensées. Mais si une conscience erronée se produit au dehors par des discours, des écrits, ou des actes dangereux, la loi, sans blesser l'invio labilité de la pensée, peut la réprimer par des peines proportionnées au délit.

Dans la déclaration des droits, de l'homme, article XI, l'Assemblée constituante s'exprimoit en ces termes: „La libre communica » tion des pensées et des opinions est un » des droits les plus précieux de l'homme

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»out citoyen peut donc parler, écrire, » imprimer librement, sauf à répondre de » l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. «

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Il étoit difficile d'accumuler, en moins de mots, un plus grand nombre d'idées fausses et incohérentes. La libre communication des opinions n'est pas un droit plus précieux que celui d'user de toute autre faculté naturelle; et ce droit, comme tous les autres, doit être limité par les lois de la justice naturelle et civile. La liberté des mouvemens est certainement un des droits, les plus précieux de l'homme, et cependant, on n'a pas encore vu de législateur établir, comme un des axiomes de sa Constitution, que tout citoyen peut librement faire tous les mouvemens, c'est-à-dire, toutes les actions qu'il voudra. La dernière phrase de cet article XI détruit les deux premières, Car, pourquoi qualifier de droit précieux, une faculté dont on reconnoît que le citoyen peut abuser? Et que devient cette liberté de parler, d'écrire et d'imprimer, s'il faut en répondre dans les cas déterminés par la

loi ?

Un Gouvernement sage se gardera bien

f

de laisser à la presse une liberté effrénée. Il connoit trop la légéreté, l'ignorance, la crédulité du peuple, pour l'abandonner à cette tourbe de sophistes et de discoureurs qui se font un jeu cruel de confondre l'erreur et la vérité, le vice et la vertu. Il regardera son peuple, comme des enfans sans expérience, qu'un père éclairé doit tenir éloignés de tout ce qui peut les corrompre; et il ne permettra pas plus l'enseignement public et indistinct de toute opinion, que la vente et l'emploi de tous les poisons,

L'intérêt des sciences ne demande pas cette liberté illimitée de la presse. Il reste au génie et à la raison un champ assez vaste, même en leur interdisant toute incursion contre la Religion et le Gouvernement. Les systèmes de l'impiété et de l'anarchie n'ont

pas

reculé les bornes des connoissances humaines. Que l'on place d'un côté Bacon, Descartes, Galilée, Pascal, Malebranche, Locke, Newton, Leibnitz, Boyle, Addisson; et de l'autre, Spinosa, Tyndal, Woolston, Bolingbrocke, la Mettrie, Helvétius, Diderot, et que l'on me dise où sont les vrais philosophes. Buffon en seroit-il moins le peintre de la Nature, si l'on arrachoit de son

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