Page images
PDF
EPUB

et qu'ainsi leur arrêté à cet égard ne peut être regardé que comme un refus positif. Par cette considération, et attendu que messieurs de la noblesse ne se sont pas même désistés de leurs précédentes délibérations, contraires à tout projet de réunion, les députés des communes pensent qu'il devient absolument inutile de s'occuper davantage d'un moyen, qui ne peut plus être dit conciliatoire, du moment qu'il a été rejeté par l'une des parties à concilier.

Dans cet état de choses, qui replace les députés des communes dans leur première position, l'assemblée juge qu'elle ne peut plus attendre, dans l'inaction, les classes privilégiées, sans se rendre coupable envers la nation, qui sans doute a le droit d'exiger d'elle un meilleur emploi de son temps; elle juge que c'est un devoir pressant pour tous les représentans de la nation, quelle que soit la classe des citoyens à laquelle ils appartiennent, de se former, sans autre délai, en assemblée active, capable de commencer à remplir l'objet de leur mission. L'assemblée charge messieurs les commissaires qui ont suivi les diverses conférences, dites conciliatoires, d'écrire le récit des longs et vains efforts des députés des communes, pour tâcher d'amener les classes privilégiées aux vrais principes. Elle les charge d'exposer les motifs qui la forcent de passer de l'état d'attente à celui d'action. Enfin, elle ordonne que ce récit et ces motifs seront présentés au roi, et imprimés ensuite à la tête de la présente délibération.

Mais, puisqu'il n'est pas possible de se former en assemblée active, sans reconnaître au préalable ceux qui ont droit de la composer, c'est-à-dire ceux qui ont qualité pour voter comme représentans de la nation, les mêmes députés des communes croient devoir faire une dernière tentative, auprès de messieurs du clergé et de la noblesse, qui annoncent la même qualité, et qui néanmoins ont refusé, jusqu'à présent, de se faire reconnaìtre. Au surplus, l'assemblée ayant intérêt à constater le refus de ces deux classes de députés, dans le cas où ils persisteraient à vouloir rester inconnus, elle juge indispensable de faire une dernière invitation, qui leur sera portée par des députés chargés de leur en faire lecture et de leur en laisser copie.

Dans cette invitation, on avertissait les deux premiers ordres que l'appel général de tous les bailliages convoqués se ferait dans le jour; et qu'il serait procédé à la vérification, tant en présence qu'en l'absence des députés des classes privilégiées.

Cette marche fière et décidée de la part des communes, vers le but de l'activité, étonna la noblesse, et

lui ouvrit les yeux sur sa véritable position; mais elle aima mieux tout braver que de rien faire contre ses principes. On proposa dans leur chambre une déclaration contre les prétentions des communes ; on y joignait une adresse au roi dans laquelle on lui disait en substance: « Que les droits de la noblesse étaient attaqués, qu'il en était le conservateur, et on le priai de les prendre en considération. » C'est dans ces circonstances que M. de Lally-Tolendal prononça le discours suivant.

DISCOURS DE LALLY-TOLENDAL, sur le projet d'adresse au roi. (Séance du 15 juin 1789.)

« Qu'une portion de l'assemblé législative, en contestation avec une autre, invoque le déploiement du pouvoir exécutif, c'est un paradoxe, c'est une espèce de monstre en constitution.

Après n'avoir cessé de dire, depuis un mois, que nos droits sont attaqués, aller dire aujourd'hui solennellement au roi qu'il en est le conservateur, et le prier de les prendre en considération, en même temps que nous lui portons une espèce de manifeste contre les prétentions de ceux que nous nommons malheureusement nos adversaires, c'est évidemment, quoique sous des termes déguisés, appeler l'autorité, appeler la force à notre

secours.

Je ne répéterai point tout ce qui vous a été dit, avec tant d'énergie, sur le danger d'une pareille mission. Je me bornerai à relever une circonstance qui me frappe.

Avant-hier encore, nous avons refusé un plan de conciliation proposé par le roi; et nous allons aujourd'hui provoquer des actes de son autorité!

Quand il voulait nous donner la paix, nous ne l'avons pas écouté; et nous allons lui demander de s'armer pour nous !

Quand il ne disait pas un mot qui ne fût une expression de sensibilité, de ménagement, j'oserai dire de respect pour les libertés nationales, il nous a trouvés ombrageux, inac

cessibles à la persuasion; et nous voilà tout-àcoup assez confians pour lui abandonner ces mêmes libertés!

Il en sera plus jaloux que nous, je n'en doute pas sa gloire augmente chaque jour par un parallèle qui, chaque jour, devient plus étonnant. C'est lui, jusqu'ici, qui nous a préservés de nous-mêmes. Dans l'ancien système des cours, c'était à lui à nous diviser, et il ne cherche qu'à nous réunir. Mais ce parallèle est-il aussi glorieux pour la nation que pour son chef? En recueillant le fruit de ses vertus, du moins faudrait-il nous en montrer dignes. En étant libres par lui, du moins faudrait-il que nous ne le fussions pas malgré

nous.

La puissance exécutrice, nous a-t-on dit, conserve les lois. Oui, sans doute; mais la puissance exécutrice n'a d'action coactive, à cet égard, que sur les sujets, et il n'y a de sujets que les individus; excepté le cas de dissolution qui doit appartenir à la prérogative royale, la puissance exécutrice n'a aucune action coactive sur l'assemblée nationale. Toutes deux souveraines, toutes deux législatrices, l'une et l'autre n'ont respectivement qu'une action de concours.

On a encore dit que le tiers-état avait envoyé son arrêté au roi; mais il n'a fait que communiquer, il s'est bien gardé de soumettre; et il est inutile de faire naître encore un parallèle où l'avantage ne serait pas pour nous. Le tiers-état, je le dis à regret, a triomphé de notre arrêté d'avant-hier, il a eu tort sans doute; ne lui ménageons pas un second triomphe qui serait plus fondé; et qu'il ne puisse nous reprocher d'avoir porté atteinte à la liberté publique.

On nous a cité une loi qui ordonne, dit-on, qu'en cas de divisions entre les ordres, l'objet contesté restera sans détermination; elle ne dit donc pas que l'objet contesté sera déterminé par le roi.

On nous a cité un exemple de 1356; mais, outre qu'il n'est nullement applicable à la question, j'avoue qu'en général, dans tout ce qui intéressera la constitution, il m'arrivera rarement de combattre les exemples tirés de notre histoire, plus rarement encore d'en citer. Ces exemples ne sont rien contre un principe, c'est avec des principes qu'on sau

vera la France, et c'est avec des exemples qu'on la perdra.

Enfin, messieurs, on a fait de longs reproches, mêlés de quelque amertume, aux membres de cette assemblée, qui, avec autant de douleur que de réserve, ont manifesté quelques doutes sur ce qu'on appelle notre constitution. Cet objet n'avait peut-être pas un rapport très direct avec celui que nous traitons; mais, puisqu'il a été le prétexte de l'accusation, qu'il devienne aussi celui de la défense, et qu'il me soit permis d'adresser quelques mots aux auteurs de ces reproches.

Vous n'avez certainement pas de loi qui établisse que les états-généraux sont partic intégrante de la souveraineté, car vous en demandez une; et, jusqu'ici, tantôt un arrêt du conseil leur défendait de délibérer, tantôt l'arrêt d'un parlement cassait leurs délibérations.

Vous n'avez pas de loi qui nécessite le retour périodique de vos états-généraux, car vous en demandez une; et il y a cent soixantequinze ans qu'ils n'avaient été assemblés.

Vous n'avez pas de loi qui mette votre sûreté, votre liberté individuelle à l'abri des atteintes arbitraires, car vous en demandez une; et, sous le règne d'un roi dont l'Europe entière connaît la justice et respecte la probité, des ministres ont fait arracher vos magistrats du sanctuaire des lois par des satellites armés; sous le règne précédent, tous les magistrats du royaume ont encore été arrachés à leurs séances, à leurs foyers, et dispersés par l'exil, les uns sur la cîme des montagnes, les autres dans la fange des marais, tous dans des endroits plus affreux que la plus horrible des prisons. En remontant plus haut, vous trouverez une profusion de cent mille lettres de cachet, pour de misérables querelles théologiques. En vous éloignant davantage encore, vous voyez autant de commissions sanguinaires que d'emprisonnemens arbitraires, et vous ne trouvez à vous reposer qu'au règne de votre bon Henri.

Vous n'avez pas de loi qui établisse la li berté de la presse, car vous en demandez une; et, jusqu'ici, vos pensées ont été asservies, vos vœux enchaînés; le cri de vos cœurs dans l'oppression a été étouffé, tantôt par le despotisme des particuliers, tantôt par le despotisme plus terrible des corps.

Vous n'avez pas, ou vous n'avez plus de loi qui nécessite votre consentement pour les impôts, car vous en demandez une; et depuis deux siècles, vous avez été chargés de plus de trois ou quatre cents millions d'impôts, sans en avoir consenti un seul.

Vous n'avez pas de loi qui rende responsables tous les ministres du pouvoir exécutif, car vous en demandez une; et les créateurs de ces commissions sanguinaires, les distributeurs de ces ordres arbitraires, les dilapidateurs du trésor public, les violateurs du sanctuaire de la justice, ceux qui ont trompé les vertus d'un roi, ceux qui ont flatté les passions d'un autre, ceux qui ont causé le désastre de la nation, n'ont rendu aucun compte, n'ont subi aucune peine.

Enfin, vous n'avez pas une loi générale, positive, écrite, un diplôme national et royal tout à la fois, une grande charte, sur laquelle repose un ordre fixe et invariable, où chacun apprenne ce qu'il doit sacrifier de sa liberté et de sa propriété, pour conserver le reste; qui assure tous les droits, qui définisse tous les pouvoirs. Au contraire, le régime de votre gouvernement a varié de règne en règne, souvent de ministère en ministère; il a dépendu de l'âge, du caractère d'un homme. Dans les minorités, sous un prince faible, l'autorité royale, qui importe au bonheur et à la dignité de la nation, a été indécemment avilie, soit par des grands, qui d'une main ébranlaient le trône et de l'autre foulaient le peuple, soit par des corps, qui dans un temps envahissaient avec témérité ce que dans un autre ils avaient défendu avec courage. Sous des princes orgueilleux qu'on a flattés, sous des princes vertueux qu'on a trompés, cette même autorité a été poussée au-delà de toutes les bornes. Vos pouvoirs secondaires, vos pouvoirs intermédiaires, comme vous les appelcz, n'ont été ni mieux définis ni plus fixés. Tantôt les parlemens ont mis en principe qu'ils ne pouvaient pas se mêler des affaires d'état; tantôt ils ont soutenu qu'il leur appartenait de les traiter comme représentans de la na

tion. On a vu, d'un côté, des proclamations annonçant les volontés du roi, de l'autre des arrêts dans lesquels les officiers du roi défendaient, au nom du roi, l'exécution des ordres du roi. Les cours ne s'accordent pas mieux entre elles; elles se disputent leur origine, leurs fonctions; elles se foudroient mutuellement par des arrêts.

Je borne ces détails, que je pourrais étendre jusqu'à l'infini; mais si tous ces faits sont constans, si vous n'avez aucune de ces lois que vous demandez et que je viens de parcourir, ou si, en les ayant (et faites bien attention à ceci), vous n'avez pas celle qui force à les exécuter, celle qui en garantit l'accomplissement et qui en maintient la stabilité, définissez-nous donc ce que vous entendez par le mot de constitution, et convenez au moins qu'on peut accorder quelque indulgence à ceux qui ne peuvent se préserver de quelques doutes sur l'existence de la nôtre. On parle sans cesse de se rallier à cette constitution; ah! plutôt perdons de vue ce fantôme pour y substituer une réalité. Et quant à cette expression d'innovation, quant à cette qualification de novateurs, dont on ne cesse de nous accabler, convenons encore que les premiers novateurs sont dans nos mains, que les premiers novateurs sont nos cahiers; respectons, bénissons cette heureuse innovation qui doit tout mettre à sa place, qui doit rendre tous les droits inviolables, toutes les autorités bienfaisantes, et tous les sujets heureux.

C'est pour cette constitution, messieurs, que je forme des vœux; c'est cette constitution qui est l'objet de tous nos mandats, et qui doit être le but de tous nos travaux ; c'est cette constitution qui répugne à la seule idée de l'adresse qu'on nous propose : adresse qui compromettrait le roi autant que la nation; adresse enfin qui me parait si dangereuse, que non seulement je m'y opposerai jusqu'au dernier instant, mais que, s'il était possible qu'elle fût adoptée, je me croirais réduit à la douloureuse nécessité de protester solennellement contre elle. >

CONSTITUTION DE L'ASSEMBLÉE.

Diverses dénominations proposées.

( 15-17 juin 1789. )

Discours de MIRABEAU. - Réplique de MIRABEAU. de la motion de SIEYES.

Le 15 juin, l'abbé Sieyes, après avoir rappelé la résolution prise le 10 du même mois, sur sa proposition, démontra, par un enchaînement de principes et de conséquences, la nécessité de procéder à la constitution de l'assemblée en assemblée active. Passant ensuite à l'énumération des différens titres sous lesquels cette constitution pourrait se faire, et leur trouvant à tous des inconvéniens, il se détermina pour celui d'Assemblée des représentans connus et vérifiés de la nation française, ·

D'autres dénominations furent proposées par différens membres; les uns voulaient la constituer sous le titre de majorité des députés délibérant en l'absence de la minorité duement invitée, les autres sous celui de représentans du peuple français; enfin M. Legrand proposa le nom d'Assemblée Nationale, qui fut adopté.

Parmi les discours qui furent prononcés dans cette occasion à jamais mémorable, on doit compter celui de Mirabeau comme un des plus éloqnens.

DISCOURS DE MIRABEAU sur la motion de l'abbé

Sieyes. (Séance du 15 juin 1789.)

Messieurs, je n'ai jamais été moins capable qu'aujourd'hui de discuter une question importante, et de parler devant vous. Agité depuis plusieurs jours d'une fièvre opiniâtre, elle me tourmente dans ce moment même; je sollicite donc une grande indulgence pour ce que je vais dire. Si mon ame parle à votre ame, vos forces suppléeront à mes forces; mais j'ose vous demander, en même temps, une grande attention pour la série des résolutions que j'aurai l'honneur de vous offrir. Longtemps méditées, rédigées dans un moment plus favorable, je les soumets à votre sagesse avec plus de confiance que le peu de mots que je vais balbutier.

Nous sommes prêts à sortir du cercle où votre sagesse s'est longtemps circonscrite. Si vous avez persévéré avec une fermeté rare TOME Ier.

[blocks in formation]

dans un système d'inaction politique, infiniment décrié par ceux qui avaient un grand intérêt à vous faire adopter de fausses mesures, c'était pour donner le temps aux esprits de se calmer; aux amis du bien public, celui de seconder le vœu de la justice et de la raison; c'était pour vous assurer mieux que, même dans la poursuite du bien, vous n'excéderiez aucunes bornes; c'était, en un mot, pour manifester une modération qui convient surtout au courage, ou plutôt sans laquelle il n'est pas de courage vraiment durable et invincible.

Cependant le temps s'est écoulé; les prétentions, les usurpations des deux ordres se sont accrues; votre sage lenteur a été prise pour faiblesse ; on a conçu l'espoir que l'ennui, l'inquiétude, les malheurs publics, incessamment aggravés par des circonstances presque inouies, vous arracheraient quelque démarche pusillanime ou inconsidérée. Voici le moment de rassurer vos amis, et d'inspirer la retenue, la crainte, j'ai presque dit la terreur du respect à vos adversaires, en montrant, dès vos premières opérations, la prévoyance de l'habileté jointe à la fermeté douce de la raison.

Chacun de vous sent, messieurs, combien il serait facile aujourd'hui d'essayer, par un discours véhément, de vous porter à des résolutions extrêmes. Vos droits sont si évidens, vos réclamations si simples, et les procédés des deux ordres si irréguliers, leurs principes tellement insoutenables, que la manifestation parallèle en serait au-dessus de l'attente publique.

Que dans les circonstances où le roi luimême a senti qu'il fallait donner à la France une manière fixe d'être gouvernée, c'est-àdire une constitution, on oppose à ses volontés et au vœu de son peuple les vieux

2

préjugés, les gothiques oppressions des siècles barbares; qu'à la fin du dix-huitième siècle une foule de citoyens dévoile et suive le projet de nous y replonger; réclame le droit d'arrêter tout, quand tout doit marcher, c'est-à-dire de gouverner tout à sa guise, et qualifie cette prétention vraiment délirante de propriétés; que quelques personnes, quelques gens des trois états, parce que dans l'idiome moderne on les a appelés des ordres, opposent sans pudeur la magie de ce mot vide de sens à l'intérêt général, sans daigner dissimuler que leurs intérêts privés sont en contradiction ouverte avec cet intérêt général; qu'ils veuillent ramener le peuple de France à ces formes qui classaient la nation en deux espèces d'hommes, des oppresseurs et des opprimés; qu'ils s'efforcent de perpétuer une prétendue constitution, où un seul mot, prononcé par cent cinquante-un individus, pourrait arrêter vingtquatre millions d'hommes et le roi; une constitution où deux ordres qui ne sont ni le peuple, ni le prince, se serviront du second pour pressurer le premier; du premier pour effrayer le second, et des circonstances, pour réduire tout ce qui n'est pas à eux à la nullité; qu'enfin, tandis que vous n'attestez que les principes et l'intérêt de tous, plutôt que de river sur nous les fers de l'aristocratie, ils invoquent hautement le despotisme ministériel, sûrs qu'ils se croient de le faire toujours dégénérer, par leurs cabales, en une anarchie ministérielle : c'est le comble, sans doute, de la déraison orgueilleuse; et je n'ai pas besoin de colorer cette faible esquisse, pour démontrer que la division des ordres, que le veto des ordres, que l'opinion et la délibération par ordre seraient une invention vraiment sublime, pour fixer constitutionelle ment l'égoïsme dans le sacerdoce, l'orgueil dans le patriciat, la bassesse dans le peuple, la division entre tous les intérêts, la corruption dans toutes les classes dont se compose la grande famille, la cupidité dans toutes les ames, l'insignifiance de la nation, la tutèle du prince, le despotisme des ministres!

Cependant, messieurs, que concluronsnous de ces tristes vérités, sinon la nécessité de redoubler de sagesse et de persévérance, pour parvenir à une constitution, qui nous

tire d'un état de choses si déplorable; et de proportionner notre émulation et nos efforts aux difficultés de cette entreprise, sublime sans doute, mais simple, et qui ne demande que le concours des lumières et de la suite dans les volontés; car c'est aux développemens de la raison que la nature a remis la destinée éternelle des sociétés; et la raison seule peut faire des lois obligatoires et durables; et la raison et la loi seules doivent gouverner l'homme en société.

Espérons donc, messieurs, loin de nous. décourager, et marchons d'un pas ferme vers un but qui ne saurait nous échapper.

Mais toutes les voies de douceur sont épuisées, toutes les conférences sont finies; il ne nous reste que des partis décisifs et peut-être extrêmes..... Extrêmes! oh! non, messieurs, la justice et la vérité sont toujours dans un juste milieu : les partis extrêmes ne sont jamais que les dernières ressources du désespoir; et qui donc pourrait réduire le peuple français dans une telle situation?

Il faut nous constituer, nous en sommes tous d'accord; mais comment? sous quelle forme? sous quelle dénomination?

En états-généraux? Le mot serait impropre, vous l'avez tous senti; il suppose trois ordres, trois états, et certes ces trois ordres ne sont pas ici.

Nous proposerait-on de nous constituer sous quelque autre dénomination synonyme de celle d'états-généraux? Je demanderai toujours, aurez-vous la sanction du roi, et pouvez-vous vous en passer? L'autorité du monarque peut-elle sommeiller un instant? ne faut-il pas qu'il concoure à votre décret, ne fût-ce que pour être lié? et quand on nierait, contre tous les principes, que la sanction fût nécessaire pour rendre obligatoire tout acte extérieur de cette assemblée, accorderat-il aux décrets subséquens une sanction dont on avoue qu'il est impossible de se passer, lorsqu'ils émaneront d'un mode de constitution qu'il ne voudra pas reconnaître?

Êtes-vous sûrs d'être approuvés de vos commettans? N'allez pas croire que le peuple s'intéresse aux discussions métaphysiques qui nous ont agités jusqu'ici. Elles ont plus d'importance qu'on ne leur en donnera sans doute; elles sont le développement et la con

« EelmineJätka »