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La loi de 1918 a un caractère essentiellement transitoire et va bientôt disparaître. Mais, nous verrions les plus graves inconvénients à ce que, dans la loi nouvelle, dans un esprit de générosité mal comprise, l'Etat renoncât à la participation financière des départements et des communes. La pierre angulaire des lois d'assistance obligatoire, c'est le principe de l'assistance communale. S'il est un service public qui, par sa nature, doive être décentralisé, c'est bien celui de l'assistance. Le soin d'assurer la subsistance de ses membres souffrants (ou surchargés d'enfants), est un devoir essentiel de la collectivité conimunale; c'est elle qui possède d'ailleurs seule, les éléments précis d'information, qui sont indispensables à une bonne distribution des services; l'Etat ne doit intervenir que pour la subventionner et la contrôler. — Il n'est pas besoin d'insister sur le danger que présenterait une atteinte permanente portée à ces principes. Les nécessités de la guerre, la perturbation des budgets communaux, ont pu justifier des dérogations temporaires à ces règles essentielles. Nous devons maintenant nous hâter d'y revenir et de les rétablir définitivement dans notre législation, comme les garanties nécessaires des droits des indigents et de l'intérêt des finances publiques. >>

Même avec l'augmentation votée, les taux d'allocation se trouvaient insuffisants, le coût de l'existence ayant encore monté après la cessation des hostilités.

M. J. Nadi, député, déposait à la Chambre, le 16 janvier 1919, une proposition tendant à les élever, compte tenu de la majoration de 10 francs par mois et par enfant provisoirement accordée (1). Il proposait de modifier ainsi l'article 3 : « Le taux des allocations ne peut être inférieur à 120 francs, ni supérieur à 180 francs pour le 1er enfant; ni inférieur à 180 francs, ni supérieur à 240 francs pour le 2o enfant ni inférieur à 240 francs, ni supérieur à 300 francs pour les autres enfants. Si l'allocation est supérieure au taux fixé cidessus, l'excédent est à la charge exclusive de la commune. » --- La proposition n'est pas venue en discussion. -- Elle était à nouveau déposée sous le no 793, le 28 avril 1920, mais avec élévation des taux : Celui-ci ne peut être inférieur à 180 francs, ni supérieur à 240 francs pour le 1er enfant ; ni inférieur à 210 francs, ni supérieur à 300 francs pour le 2o enfant; ni inférieur à 360 francs pour les autres enfants... »

Au cours de la 1re session ordinaire du Conseil supérieur de l'assistance publique, le 28 janvier 1920, M. Rondel faisait adopter

(1) Documents Chambre, no 5.525.

à l'unanimité le vœu suivant : « Le Conseil supérieur de l'assistance publique, émet le vœu que les divers tarifs inscrits dans les lois d'assistance, soient l'objet d'un relèvement prochain, proportionné à l'augmentation moyenne du prix de la vie. »

Et, peu après (mars 1920), MM. L. Proust, P Bernier, C. Chautemps, députés, proposaient à la Chambre de relever ces taux d'allocation, de 20 francs par mois et par enfant, taux maximum de 50 francs.

Le 15 mars 1920, le Conseil Supérieur de la natalité adoptait un vou tendant à ce que le § 2 de l'article 3 de la loi de 1913 soit modifié comme suit : « Le taux de l'allocation ne peut être inférieur à 210 francs par an et par enfant, ni supérieur à 240 francs; si l'allocation est supérieure à 240 francs, l'excédent est à la charge. exclusive de la commune. »

A la séance de la Chambre, du 14 juin 1920, la question de l'élévation du taux des allocations d'assistance était posée par MM. Bonnevay et Peyroux. Ces députés insistaient sur ce fait, que ce n'est pas avec l'allocation mensuelle donnée au 4e enfant au-dessous de 13 ans, que la famille peut élever un enfant. A quoi M. J. L. Bretou, Ministre de l'Hygiène et de l'Assistance publiques, répondait : << Depuis que je suis au Ministère de l'Hygiène, je n'ai négligé aucune circonstance pour améliorer d'une façon quelconque le sort des familles nombreuses. Et j'espère être bientôt d'accord avec M. le Ministre des Finances, pour saisir la Chambre de projets de loi efficaces dans ce sens. >>

Le 22 juillet 1920, à la Chambre, dépôt d'une proposition (no 1.355) de M. des Rotours, député, et quelques-uns de ses collègues, tendant à maintenir jusqu'au 1er janvier 1922, la majoration de 10 francs de la loi de 1918.

Lors de la discussion de la loi de finances de l'exercice 1920, un amendement de M. Bonnevay était adopté, qui devenait l'article 111 de la loi du 31 juillet 1920 Sont prorogées jusqu'au 31 décembre 1920, les dispositions des articles 6 et 5 de la loi du 28 juin 1918, majorant de 10 francs à la charge exclusive de l'Etat, chacune des allocations mensuelles attribuées aux bénéficiaires des lois du 14 juillet 1905 sur l'assistance aux vieillards et du 14 juillet 1913 sur l'assistance aux familles nombreuses.

Le 2o Congrès national de la natalité (Rouen, septembre 1920) émettait un vou tendant à ce que l'allocation supplémentaire à la charge de l'Etat, instituée par la loi du 28 juin 1918, fut portée à 30 francs par mois. De même, les Commissions départementales

d'assistance des Hautes-Alpes, Ardèche. Ariège, Eure, Finistère, Landes, ont demandé le relèvement des taux d'allocation (1).

Le 6 décembre 1920, le Conseil Supérieur de la natalité demandait que les dispositions de la loi du 28 juin 1918 fussent prorogées d'urgence afin d'éviter que les majorations ne cessassent d'être attribuées le 31 décembre 1920, et cela sans préjudice des modifications à la loi du 14 juillet 1913, demandées par le Conseil dans sa séance du 15 mars 1920 (2).

Au cours de la séance du 23 décembre 1920, au Sénat, à l'occasion de la discussion d'une proposition de loi relative aux vieillards, infirmes et incurables, M. Paul Strauss, rapporteur, disait, aux applaudissements du Sénat: « Les tarifs d'allocations d'assistance obligatoire ne sont plus en harmonie avec les nécessités économiques. Le Parlement ne peut pas échapper à l'obligation qui lui incombe de réviser à très bref délai, suivant le vœu du Conseil supérieur de l'assistance publique, les minima et les maxima des taux d'allocations... C'est une nécessité inéluctable. » Et, peu après, M. Mauger: Les vieillards et les familles nombreuses ne peuvent se contenter de promesses; il leur faut, à l'heure actuelle, quelque chose de plus substantiel pour subvenir aux besoins de la vie. »

L'article 55 de la loi du 31 décembre 1920, votant deux douzièmes provisoires, prorogeait jusqu'au 28 février 1921, les dispositions de la loi du 28 juin 1918.

Dans le projet de budget de l'exercice 1921, no 1.523, art. 54, le Gouvernement proposait de doubler le taux des allocations de la loi de 1913 (5 à 7 fr. 50 par mois, nous l'avons vu). - Mais l'adoption de cette mesure aurait eu pour corollaire, la suppression des allocations temporaires de 10 francs par mois, à la charge exclusive de l'État, aucun article du projet de loi de finances ne prévoyant, en effet, le maintien de celles-ci. Dans leur rapport no 2.002, du 12 janvier 1921, MM. Ch. Dumont, Bokanowski, de Lasteyrie, députés, au nom de la Commission du budget de la Chambre, et, peu après, M. André Fallières, au nom de la Commission chargée d'examiner le budget du Ministère de l'Hygiène, no 2.075, 28 janvier 1921, ont fait remarquer que la modification proposée, aurait la double conséquence, d'augmenter la participation des départements et des communes, et de diminuer l'importance des secours perçus

(1) Recueil des procès-verbaux des séances du Conseil Supérieur de l'assistance, no 116, décembre 1920.

(2) Voir plus haut, chapitre nombre des enfants.

par les assistés. « Si les perspectives de baisse écartent la possibilité, dit M. A. Fallières, d'accorder à la fois, et le doublement des allocations de la loi de 1913 et le maintien de la majoration temporaire de l'État, il ne semble pas, non plus, que l'heure soit venue de faire subir une réduction, sous une forme quelconque, aux intéressés. » Le maintien du statu-quo est apparu comme la solution la plus juste et la plus raisonnable, et a été proposé, le 28 janvier 1921, par la Commission chargée d'examiner le budget de l'Hygiène. Un article inséré dans le projet de loi de finances, autorise ce maintien jusqu'au 31 décembre 1921.

Le budget n'ayant pu être voté avant la fin février 1921, la loi votant un 3e douziènie provisoire pour le mois de mars, a, en attendant, prorogé jusqu'au 31 mars 1921, les dispositions de la loi du 28 juin 1918.

Caractère de l'Allocation

Nous avons vu que l'allocation est fixe; par conséquent, contrairement à ce qui a lieu dans la loi du 14 juillet 1905, le bénéficiaire ne peut pas recevoir une allocation plus ou moins réduite, en raison de ses ressources (1). S'il est reconnu avoir des ressources suffisantes pour élever ses enfants, il n'est pas admis. Sinon, il est admis et, dès lors, il reçoit « sans déduction d'aucune sorte », dit l'article 5 de la loi, une allocation dont le taux dépend exclusivement du nombre de ses enfants.

Dans le régime de la loi de 1905, à moins que les ressources de l'assisté ne vinssent à se modifier, fait relativement rare, le bénéficiaire touchait, jusqu'à sa mort, une allocation mensuelle fixe. I en est différemment en ce qui concerne la loi de 1913. Sans parler du cas où les ressources de l'assisté deviennent suffisantes et où le secours pourra lui être entièrement enlevé, mais les ressources de l'intéressé restant identiques, le nombre des allocations unitaires qu'il reçoit sera augmenté, si sa femme meurt, disparait, l'abandonne, devient incurable, etc... ou chaque fois que lui naîtra un

(1) Commission Centrale. Est entachée d'illégalité, la décision d'une Commission cantonale qui, saisie d'une réclamation en radiation, tout en maintenant le postulant sur la liste d'assistance, réduit le nombre des allocations au-dessous de celui que la loi détermine (24 juin 1914). Recours du Préfet de la Lozère contre une décision de la Commission cantonale de St Amans maintenant M. Bonnal sur la liste de Rieutort-de-Randon, mais seulement pour deux allocations. M. J. M. Roussel, rapporteur. (Revue des Établissements de bienfaisance, janvier 1915).

Commission Centrale. Est entachée d'illégalité la décision d'une Commission cantonale qui, tout en reconnaissant le droit du postulant à être inscrit, ne lui accorde qu'un nombre d'allocations inférieur à celui que la loi détermine, alors même que, dans ses dernières conclusions, le postulant réduit sa prétention au nombre ainsi accordé (2 juillet 1914). Recours du Préfet du Morbihan contre une décision de la Commission cantonale de Sargeau concernant M. Blancho. M. Mariani, rapporteur. (Revue des Établissements de bienfaisance, janvierfévrier 1915.)

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