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Les dépenses départementales se composent de 3 éléments : d'une part, les subventions à allouer aux communes par application du barême A, comme il vient d'être expliqué; d'autre part, les dépenses résultant des allocations dont les bénéficiaires ont le domicile de secours départemental; enfin, les frais d'administration et de contrôle départemental du service. Au paiement de ces dépenses, le département doit affecter d'abord la totalité des ressources spéciales provenant des fondations ou libéralités à lui faites en vue de l'assistance aux familles nombreuses. Le surplus est réparti entre le département et l'Etat, selon le barême B ; celui-ci comprend, comme le précédent, 3 tableaux basés, le 1er sur le centime démographique départemental; le 2e sur les charges financières du département (nombre total de centimes); le 3e sur la charge par 100 habitants résultant de l'assistance aux familles nombreuses. La somme à payer par le département est déterminée à l'aide de ces 3 tableaux, dans les mêmes conditions que la part des communes. La charge du département peut varier de 5 à 50 % comme pour la loi du 14 juillet 1905. En cas de surplus, le département pourvoit aux dépenses à l'aide des recettes ordinaires et des ressources provenant de l'impôt, d'impositions ou de taxes dont la perception est autorisée par les lois. Ces dépenses sont obligatoires pour le département, dans les conditions des articles 60 et 61 de la loi du 10 août 1871. Le Conseil général doit approuver le taux de l'allocation arrêtée par chaque commune, dans les limites de 5 à 7,50.

L'Etat doit pourvoir aux dépenses d'assistance: 1o par le paiement de la subvention à allouer au département conformément au barême B, ainsi qu'il vient d'être dit (art. 8, loi du 14 juillet 1913). 2o Par le paiement des allocations aux chefs de famille et aux femmes privés de ressources et se trouvant dans les conditions prévues à l'article 2 de la loi, et n'ayant aucun domicile de secours ; - 3o par le paiement des frais généraux d'administration et de contrôle occasionnés par l'exécution de la loi.

Ainsi, nous voyons que la répartition est faite au moyen de barêmes où se traduit la préoccupation de répartir les dépenses, de manière à secourir le plus possible les collectivités dont les charges sont effectivement les plus lourdes. Lors de la discussion du budget de l'Intérieur (19 février 1914), disait M. le Dr Monod dans son rapport, M. le Bail, député, fit remarquer à la Chambre que, dans certains départements à très forte natalité, comme le Finistère, les communes, pauvres, pour la plupart, auront bien de la peine, même dans les conditions ci-dessus, à suffire aux charges que leur impose la loi nouvelle. Aussi, proposait-il d'allouer à ces

communes, une subvention directe et complémentaire, lorsque le nombre des assistés y dépasserait de 50 % la moyenne générale de ce nombre en France; cette subvention serait du 1/4 de la dépense; elle serait portée à la moitié, lorsque la moyenne générale serait doublée. >>

Il est incontestable qu'il y a quelque chose à faire dans ce sens. Aussi le Congrès national d'assistance de 1914 a-t-il adopté le vœu suivant : « L'application de la loi du 14 juillet 1913 devant entrainer de très lourdes charges pour les communes pauvres à forte natalité, il serait opportun de prévoir pour ces communes, une subvention directe et complémentaire de l'Etat, d'autant plus élevée proportionnellement, que le chiffre de la natalité moyenne en France y serait plus dépassé. »>

Contrôle du service, sur pièces et sur place.

La loi a prévu un contrôle sérieux. Elle a fait une obligation au Conseil général d'organiser ce contrôle départemental. Au cas où cette assemblée n'aurait point constitué une organisation suffisante, il y serait pourvu par un décret rendu en forme des règlements d'administration publique.

Cela n'existait pas pour la loi de 1905. Mais l'expérience de l'application de celle-ci a prouvé que ce contrôle, tant sur pièces que sur place, est indispensable si l'on veut éviter les abus. Et, malgré le silence de la loi, il a été organisé plus ou moins bien dans presque tous les départements, pour la loi de 1905.

Pour un service encore plus délicat, comme est celui de l'assistance aux familles nombreuses, et pour éviter les abus qui pourraient se produire encore plus fréquemment, un contrôle est plus encore indispensable. Ici, en effet, le nombre des allocations unitaires sera réduit ou augmenté; elles seront supprimées, non seulement en suite d'un accroissement de ressources, mais encore si l'un des parents meurt ou disparait, si un enfant naît ou meurt dans la famille, ou s'il atteint l'âge de 16 ans, s'il entre en apprentissage ou si, au contraire, il l'interrompt. Le simple aperçu des cas qui peuvent se présenter, montre qu'un contrôle sérieux et incessant est nécessaire. Cela seul permettra d'arriver à ce que les allocations ne soient pas indûment perçues et que des abus ne puissent se produire. A ce sujet, la circulaire du 24 juillet 1913 dit : « Il y a nécessité d'un contrôle sur place et sur pièces, notamment en ce qui concerne, d'une part, les décès des enfants entrant en compte, d'autre part, leur accession à 13.ans, chaque décès et chaque 13e anniversaire d'enfant assisté devant entraîner une réduction automatique de l'allo

cation. Faute de ce contrôle, des assistés continueraient à toucher indûment la somme, bien que la plupart des enfants dont il avait été tenu compte lors de la détermination de celle-ci, soient morts ou aient dépassé 13 ans ; ainsi les abus les plus graves et les plus onéreux seraient commis. Le contrôle sur pièces ne laissera point passer les 13es anniversaires des enfants; le contrôle sur place recherchera notamment si les conditions existant au jour de l'inscription n'ont pas été modifiées. »

Contrôle par les inspecteurs du travail.

En dehors de ces contrôles sur pièces et sur place, effectués par des agents spécialement désignés à cet effet dans les départements, les inspecteurs du travail peuvent être appelés à contrôler l'application de la loi de 1913, en ce qui touche l'exécution des contrats d'apprentissage. L'article 5 du règlement d'administration publique du 4 décembre 1913, contient une disposition qui organise le contrôle à exercer sur l'exécution des contrats d'apprentissage passés en faveur des enfants de 13 à 16 ans. Cet article est ainsi conçu « L'exécution des contrats d'apprentissage est surveillée par les contrôleurs de l'assistance aux familles nombreuses. Elle peut être en outre soumise au contrôle des inspecteurs du travail. Lesdits contrôleurs et éventuellement les inspecteurs du travail, constatent les manquements, soit aux devoirs des maîtres et des apprentis, soit aux prescriptions des règlements, et les signalent au préfet, qui en avise le maire du domicile de secours de l'assisté, pour la suite à donner. »

Dans une circulaire du 25 février 1914, le Ministre de l'Intérieur disait aux préfets : « La surveillance de l'exécution des contrats d'apprentissage ne peut être exercée par les inspecteurs du travail, que si ceux-ci en sont expressément chargés par la délibération du Conseil général ou, à défaut, par le décret organisant le service dans chaque département. » Nul n'est en effet mieux qualifié pour surveiller l'exécution technique des contrats d'apprentissage (manquements aux devoirs des maîtres et apprentis, ou aux prescriptions du règlement du 4 décembre 1913), que les inspecteurs du travail qui, au cours même de leurs visites ordinaires dans les établissements industriels, commerciaux ou agricoles, sont tout naturellement appelés à relever des infractions dignes d'être signalées. Le Ministre invitait donc les préfets à veiller à ce qu'une clause spéciale du règlement départemental confiât ce contrôle particulier et très limité aux inspecteurs du travail, dans les attributions professionnelles desquels il entre en effet normalement.

Et, en fait, il en a été ainsi décidé dans beaucoup de départements.

Comité de patronage.

Innovation intéressante, l'article 14 dispose que le préfet, sur l'avis du Conseil général, pourra créer des comités de patronage. Le règlement du 1er décembre 1913, en a défini ainsi le rôle et le fonctionnement :

ART. 28. Les comités de patronage constitués en vertu de l'article 14 de la loi du 14 juillet 1913 ont pour rôle : 1o de concilier et d'aider les familles nombreuses en vue de l'application de la loi ;2o de fournir tous les renseignements de nature à éclairer le bureau d'assistance sur la situation des familles à secourir, sur la détermination des personnes à qui les allocations doivent être versées, et sur les modalités de paiement de ces allocations; -3o de développer chez les familles nombreuses, les notions et la pratique de l'hygiène et de la prévoyance.

ART. 29. Le préfet détermine le nombre des membres des comités de patronage. Ces membres sont désignés et remplacés, s'il y a lieu, par le préfet. La durée de leurs fonctions est de 3 ans. Leur mandat est renouvelable.

ART. 30. Les comités de patronage arrêtent leur règlement intérieur, sous réserve de l'approbation du préfet. Chaque année, ils adressent au préfet un rapport sur la situation des familles nombreuses de leur circonscription.

Et la circulaire du 5 décembre 1913 ajoute que les membres de ces comités ont qualité pour visiter régulièrement les familles assistées, pour leur rappeler les diverses obligations légales qui leur incombent à l'égard des enfants, notamment en ce qui concerne la vaccination (dans la 1re année d'âge et dans le cours de la 11o) et la fréquentation scolaire, pour leur expliquer la nécessité constante de l'hygiène individuelle et la nécessité spéciale des mesures prophylactiques contre les maladies contagieuses, si la famille comprend un tuberculeux, pour engager les parents à faire la déclaration facultative de la maladie, déclaration qui impose aux services publics, l'obligation de prendre périodiquement des mesures de désinfection, pour y faire pénétrer les notions de puériculture et, s'il existe dans la circonscription une consultation de nourissons avec mutualité maternelle, où quelque œuvre similaire, pour en faire comprendre à la mère les bienfaits, pour y faire connaître les dangers de l'alcoolisme, pour signaler, dans les villes pourvues d'un bureau d'hygiène, au directeur de ce bureau, et dans les autres

communes, à la fois au maire et au sous-préfet, les maisons habitées par ces familles et présentant des conditions d'hygiène particulièrement défectueuses, pour exercer leur patronage sur les enfants, notamment sur ceux de 13 à 16 ans placés en apprentissage, pour accorder de façon générale à la famille assistée, en se tenant scrupuleusement en dehors de toute question confessionnelle ou politique, une protection affectueuse qui lui soit un réconfort matériel et moral dans les circonstances difficiles de la vie. Ce comité assure la liaison entre les familles nombreuses et le bureau d'assistance, pour lequel il est un auxiliaire précieux.

Le préfet fixe la circonscription territoriale de ces comités, qui peut être un canton, une commune ou, dans les grandes villes, un arrondissement ou un quartier. Il fixe aussi le nombre des membres, remplace ceux qui négligent de remplir la mission qu'ils ont acceptée, ou qui usent de leur qualité pour une action personnelle autre que celle prévue par la loi. Bien entendu, les femmes peuvent être nommées membres de ces comités. Et le Ministre de l'Intérieur ajoute même : « La vérité est qu'on ne conçoit guère un tel comité qui ne soit pas composé en majorité de femmes. Le comité peut ne comprendre que des femmes. Ces femmes seront en outre toutes désignées pour assurer aussi l'application de la loi sur l'assistance aux femmes en couches. »>

La circulaire n'a pas voulu gêner l'action des comités, par quelque règle trop précise. Chacun d'eux arrête, sous l'approbation du préfet, son règlement intérieur. Le décret prescrit seulement que tout comité doit, chaque année, adresser au préfet un rapport sur la situation des familles nombreuses de sa circonscription. Et le Ministre insiste sur la création de ces comités. Il demande aux préfets de faire tous leurs efforts pour susciter des initiatives ou, plutôt, pour discerner et utiliser les dévouements en réserve.

A ce sujet, signalons ce que disait M. le Dr Monod, dans son rapport au Congrès. d'assistance de 1914: « Ce genre d'institutions semble en faveur depuis quelques années. C'est ainsi que l'on a vu réorganiser les commissions de surveillance des prisons et les comités de patronage des détenus ; c'est encore ainsi, pour ne citer que quelques exemples typiques, que la loi du 22 juillet 1912 sur les tribunaux pour enfants, dans la création des délégués à la surveillance des mineurs, table sur le concours bénévole des particuliers pour l'application de la loi; ou que, pour l'assistance des femmes en couches, le législateur a institué la surveillance à domicile, exclusivement basée sur des concours bénévoles. Cette tendance est fort intéressante, au point de vue de la doctrine. Elle semble vouloir donner à

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