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Le 20 mars 1901, le Sénat adoptait un amendement de MM. Bernard et Piot, dégrevant les patentables en raison du nombre de leurs enfants dégrèvement de 15 % et par enfant au-dessus de 3. La diminution s'élevait donc à 30 % pour les familles de 5 enfants, à 45 % pour celles de 6, à 60 % pour celles de 7, etc. Les familles de 3 enfants étaient dégrevées de 5 %. Les familles moins nombreuses étaient, au contraire, légèrement surtaxées, afin que la réforme se suffît à elle-même (1).

Le 22 octobre 1901, dépôt à la Chambre, par M. de Lanessan, Ministre de la Marine, d'un projet de loi dont l'art. 30 était ainsi conçu : En temps de paix, après une année passée à la disposition permanente et immédiate du Ministre de la Marine, sont placés en position de dispense dans leurs foyers, sur leur demande :..

4o Le fils unique ou l'aîné des fils d'une famille de 5 enfants au moins; 5o Le 2e des fils d'une famille de 8 enfants au moins (enfants légitimes et naturels reconnus) (2).

Le Congrès d'Assistance à domicile de 1901, approuvait le principe de l'assistance aux familles nombreuses, et exprimait le vœu qu'il reçût une consécration législative.

Le 22 novembre 1901, le Sénat décidait la constitution de la Commission extraparlementaire de la dépopulation, demandés par MM. Bernard et Piot. Le 29 janvier 1902, Waldeck-Rousseau

(1) Déjà voté le 22 novembre 1900. Mais a Chambre ne devait mer ces votes, qui sont toujours demeurés théoriques.

(2) Adopté le 25 mars 1902.

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procédait à son installation (1). Malgré les meilleures intentions de ses membres, la Commission demeura silencieuse, ses discussions manquèrent d'ampleur, elle ne présenta pas avec autorité les mesures à prendre en faveur des familles nombreuses. On en parla peu et elle ne s'imposa pas (2).

Le 29 mars 1902, à la Chambre, dépôt d'une proposition de M. Guillemet, député, tendant à compléter ainsi, l'art. 49 de la loi du 19 juillet 1892 sur la durée du service militaire : « Les hommes de l'armée territoriale, pères de 4 enfants vivants, qui n'ont pas bénéficié dans la réserve, de la dispense des manœuvres, et les pères de plus de 4 enfants » (3).

Le 27 décembre 1902, à l'Académie des Sciences morales et politiques, M. le Lt-Colonel Toutée (aujourd'hui général), communiquaît un projet comportant des mesures destinées à avantager les familles nombreuses au point de vue des droits de succession.

Le 27 mars 1903, nouveau dépôt de la proposition de M. E. Rey, député, instituant l'assistance aux enfants des familles indigentes chargées d'enfants (4).

Le 17 novembre 1903, répondant à une lettre de M. Piot, sénateur, du 28 octobre, M. Combes, Président du Conseil, promettait de mettre à l'étude, les réformes financières, administratives et économiques, propres à soulager les familles nombreuses et à enrayer l'affaiblissement de la natalité. (5) « Jugeant, écrivait M. Combes, les pères et mères chargés d'enfants dignes à tous égards de sollicitude, je prie le Ministre des Finances d'étudier la possibilité d'inscrire au prochain budget, un crédit pour les familles fécondes ».

(1) Journal Officiel, 21 mars 1902.

(2) Voir Histoire de cette Commission dans un article de M. de Foville, Re. vue hebdomadaire, 1er mai 1909.-Elle était convoquée, en juin et décembre 1908

(3) Cette loi de 1892 sur la durée du service militaire disposait que : les hommes de l'armée territoriale sont assujettis à une période d'exercices de 2 semaines, sauf certains cas de dispense. La proposition déposée étendait ces dispenses aux pères de 4 enfants. Adoptée à la Chambre et transmise au Sénat qui la renvoie le même jour à la Commission de l'armée (documents, Sénat, S. O. 1902, no247. Rapport de la Commission de l'Armée par M. Gervais, Séna*, S. O. 1902, no 2939).

(4) Journal Officie'. Débats Chambre, p. 1.397. Documents Chambre, S.O., 1903, p. 332 Dépôt du rapport, 20 février 1905. Documents Chambre, S. O. 1905, p. 169, no 2.258. Dépôt d'un 2e rapport: 11 janvier 1906. Débats Chambre, p. 12. Documents Chambre, 1906, p. 3, no 2.890.

(5) Cette promesse était renouvelée à M. Piot, les 25 juin 1904 et 8 janvier 1905.

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Malgré ces bonnes intentions du Gouvernement, nous avons vu que peu de choses avaient été faites pour venir vraiment en aide aux familles nombreuses. Les enfants légitimes des familles miséreuses, quel que fût le nombre des enfants, ne recevaient légalement aucun secours. Par contre, les lois du 5 mars 1869, du 24 juillet 1889, sur le service des Enfants Assistés, en accordaient aux enfants illégitimes, ce qui était une atteinte à la justice et à la morale. La loi de 1889 disposait, en effet, que des secours pourraient être accordés aux enfants illégitimes ou naturels laissés à leurs parents ou ayants-droit. Le secours ne durait qu'un certain nombre d'années après la naissance. Leur durée en était fixée par les Conseils généraux. Elle variait donc selon les départements; mais, généralement, elle était de 3 ans avec, dans certains cas, prolongation facultative d'une année, parfois d'une année, avec renouvellements successifs jusqu'à concurrence de 3 ans.

Il est certain que le sort de la fille-mère présente un intérêt réel. La société a le devoir de donner à la malheureuse, délaissée par le père de son enfant, ce qui est en son pouvoir un secours matériel aussi élevé que possible. Mais, seule, la fille-mère avait ainsi le droit de recevoir, pour son enfant une aide pécuniaire. Les mères, veuves ou divorcées, se la voyaient refusée et, à plus forte raison, les femmes ayant leur mari. Elles pouvaient être dans une misère complète, chargées d'enfants, rien ne leur était accordé par la loi..... Nous disons, par la loi car, à la vérité, malgré les textes, dans la pratique, tout enfant manquant du nécessaire, en danger d'abandon, était secouru. Une enquête, à laquelle s'est livrée la Direction Générale de l'Assistance Publique, montre, en effet, que presque tous les départements se faisaient un devoir de venir en aide, dans une mesure plus ou moins large, aux catégories les plus intéressantes des enfants légitimes. Mais, il existait entre les départements, des inégalités choquantes. Dans certains, on accordait des secours aux familles nombreuses, après 2 ou 3 enfants; dans d'autres, seulement après 6 ou 7. La durée des secours variait aussi; ils étaient accordés ou retirés suivant les circonstances, sans règles bien établies. Or, comme le disait M. Emile Rey, dans la proposition citée plus haut : « A des besoins permanents, précis, il faut une aide permanente, déterminée. Si l'on veut soulager sérieusement et efficacement ces familles nombreuses, il est indispensable de leur allouer des secours fixes, connus d'avance, de véritables pensions d'existence. Ce n'est qu'à cette condition que l'on délivrera ces familles de l'angoisse du lendemain et que, en leur faisant connaître les ressources mises à leur disposition,

on leur permettra de règler sur elles leurs dépenses et l'effort qui leur restera à faire pour subvenir à leurs besoins ».

Le 27 juin 1904, une loi modifiait le régime des enfants assistés, et venait permettre de comprendre les enfants légitimes au nombre des bénéficiaires des secours temporaires (1).

Mais cela n'était pas suffisant et, de plus en plus, s'imposait la nécessité d'une loi venant en aide aux familles nombreuses, en considération même du chiffre de leurs enfants et de leur état d'indigence. C'est ce que le Conseil Supérieur avait exprimé en ces termes, dès 1898, (rapport de M. Henri Monod): « Il faut une organisation telle, que la collectivité contribue à l'éducation de leurs enfants, pour la part qu'il leur est impossible de fournir ellesmêmes; c'est son devoir et c'est son intérêt » (2).

Une loi du 20 juillet 1904, relative aux contributions directes de l'exercice 1905, venait apporter un léger soulagement aux familles, dans l'établissement du loyer matriciel (3). Son art. 4 disposait :

Les conseils municipaux qui, en vertu de l'art. 4 de la loi du 13 juillet 1903, déduisent à titre de minimum de loyer, une somme constante de la valeur locative d'habitation de chaque contribuable, afin d'obtenir le loyer matriciel qui servira de base à la contribution mobilière peuvent, dans les conditions prévues à l'article précité, augmenter cette somme constante de 1/10 pour chaque personne en sus de la 1re qui se trouve à la charge du contribuable et à son domicile, sans que, toutefois, la déduction totale puisse dépasser le double du minimum de loyer. Sont seuls considérés comme personnes à la charge du contribuable, pour l'appli

(1) L'article 44 de la loi de finances du 22 avril 1905 s'occupait également de la question. Voir plus loin, dans un chapitre spécial.

(2) Il ne s'agissait alors que d'assistance aux mères chargées d'enfants. (3) La loi du 31 janvier 1900 avait déjà autorisé la ville de Paris, dans la répartition entre les contribuables, de son contingent dans la contribution personnelle-mobilière, à considérer comme non-imposables, les habitants dont le loyer rée' d'habitation était inférieur à 500 francs, et à déterminer en outre les loyers matriciels devant servir de base à la contribution personnelle-mobilière, en déduisant du loyer réel d'habitation de chaque imposable, une somme uniforme qui ne pouvait excéder 375 francs. (art. 8). La loi du 13 juillet 1903 (art 4) avait étendu ce principe à tout le pays : dans les chefs-lieux de département et dans les communes dont la population agglomérée dépasse 5.000 habitants, les loyers matriciels servant de base à la contribution mobilière pourront, sur la demande des conseils municipaux, être déterminés en déduisant de la valeur locative d'habitation de chaque contribuable, à titre de minimum de

cation du présent article, les enfants ayant moins de 16 ans révolus, les ascendants âgés ou infirmes, les enfants orphelins ou abandonnés et par lui recueillis ».

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Au cours de l'année 1905, M. Argeliès, député, demandait l'adoption d'un article additionnel à la loi de finances, tendant à l'organisation d'un service de secours aux familles nombreuses et nécessiteuses, assuré par la contribution des communes, des départements et de l'Etat (1). Le 8 mars 1905, au moment de la discussion du budget de l'exercice 1906, il présentait un projet d'amendement à la loi de finances, d'après lequel «l'Etat contribuerait, à partir du 1er janvier 1906, dans les conditions prévues à l'art. 43 de la loi de finances du 29 mars 1897, et à l'art. 61 de la loi de finances du 30 mars 1902, au paiement des allocations annuelles constituées par les départements ou les communes, d'accord avec les Conseils Généraux, au profit des familles nécessiteuses comptant au moins 4 enfants de moins de 13 ans à l'époque où l'allocation annuelle aurait été constituée. Le crédit à voter devait faire l'objet d'un chapitre spécial au budget du Ministère `de l'Intérieur, et être réparti entre les départements, en raison directe du nombre de familles secourues, suivant un tableau et d'après un barême annexés à la loi de finances. Dans chaque département, le Conseil Général répartirait entre les communes, la subvention qui lui aurait été accordée. Dans chaque commune, la répartition individuelle serait faite par le Conseil municipal ».

L'amendement était renvoyé à la Commission du budget, après déclaration du Président qu'il n'y avait pas à voir là une opposition, mais au contraire une préoccupation sympathique (2).

Le 21 mars 1905, était votée une loi sur le service militaire, qui contenait un article relatif aux soutiens de famille (art. 22). Les familles de ces militaires pouvaient recevoir, jusqu'à concur

loyer, une somme constante, dont la quotité sera fixée par les assemblées. En ce qui concerne Paris, M. Duval Arnoult, conseiller municipal, proposait de dégrever de la taxe mobilière, les loyers inférieurs à 300 francs (au lieu de 500 frs), et les loyers de 300 à 1.499 francs quand le nombre des pièces du logement serait inférieur au nombre des enfants qui y seraient domiciliés plus deux. (Bulletin municipal de la Ville de Paris, 7 janvier 1904).

(1) Cette méthode avait été suivie en 1897 pour l'organisation de l'assis tance aux vieillards.

(2) Débats Chambre, 1905, p. 881 et suivantes. Voir Bulletin de l'Alliance Nationale pour l'accroissement de la population française, 15 avril 1905, p. 45.

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