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bre des députés, désavouant sur ce point sa commission, a admis une exception au principe du jour général pour les élections en faveur de la Galicie et de la Dalmatie. Dans ces pays, deux ou trois jours peuvent être fixés pour le scrutin s'il est impossible d'effectuer les opérations électorales dans le même jour. Eu égard au nombre très grand des lieux de vote et au nombre relativement assez petit des fonctionnaires disponibles pour les opérations électorales, on craignait qu'il fût impossible de terminer ces opérations le même jour dans le pays entier.

Les fonctionnaires de l'administration assistent surtout comme commissaires électoraux aux opérations dont la direction est confiée à un bureau composé de 5 ou 7 membres nommés parmi les électeurs, partie par la représentation communale du lieu de vote, partie par le commissaire et qui choisissent leur président à la majorité relative. Le détail des dispositions concernant les opérations électorales réglé aux $16-37 du code électoral est purement de nature technique et n'offre pas d'intérêt juridique spécial.

XIII

Le nouveau système électoral trouve un complément important et précieux dans la loi déjà citée qui contient des dispositions pénales destinées à garantir la liberté des élections et des réunions. D'une part, on a prévu que l'amplification de l'électorat entraînerait une intensité plus grande de la vie politique avec toutes ses conséquences. D'autre part, on a pensé que les fruits bienfaisants de la réforme électorale ne se produiront que lorsque les électeurs pourront suivre leur conviction personnelle sans entrave et exprimer la volonté générale de façon sincère. Jusqu'à présent, cela était insuffisamment amené par le droit pénal commun. De nombreux actes qui mettaient en danger la liberté des élections restaient sans répression selon la règle : nullum crimen sine lege. La loi nouvelle marque la tendance à élargir les faits criminels pour remédier aux excès de la propagande électorale illicite et pour mettre la liberté de l'opinion à l'abri des atteintes d'en haut et d'en bas. A l'égard du code pénal, cette loi spéciale est de nature supplétive; cela veut dire que ses dispositions s'appliquent seulement en tant que l'acte en question ne porte pas le caractère d'un fait punissable en vertu du droit pénal général, comme le chantage, la fraude, etc., — et qu'il n'y est pas frappé d'une peine plus sévère. Mais la loi ne vise pas seulement, comme c'était l'intention du projet gouvernemental, les élections politiques dans le sens propre, mais bien toutes sortes

d'élections se rapportant aux corps représentatifs qui sont appelés par la loi à s'occuper des affaires publiques.

Quant au détail, le législateur fort casuiste a pris pour modèle les dispositions du titre IV du décret organique français du 2 février 1852 et particulièrement le titre VI du code électoral belge dont les dispositions se trouvent souvent reproduites mot pour mot. Le titre premier menace de punition:

1) Quiconque aura donné, offert, promis ou accepté des avantages économiques sous la condition d'obtenir ou d'exprimer un suffrage ou d'obtenir l'abstention de voter ;

2) Quiconque, au jour de l'élection, aura donné ou fait donner aux électeurs gratuitement ou à prix fictif des comestibles, boissons ou d'autres aliments;

3) Quiconque, avec préméditation, soit par voies de faits, violences ou menaces contre un électeur ou une personne liée avec lui, soit en lui faisant craindre de perdre son emploi ou son métier ou d'exposer à un dommage sa personne, sa famille ou sa fortune, l'aura déterminé à s'abstenir de voter ou aura influencé son vote, et celui également qui intimide l'électeur ou une personne liée avec lui en lui faisant d'autres maux sensibles ou en l'en menaçant. Sera puni également quiconque commet ces délits immédiatement après l'élection parce que l'électeur a usé de son droit dans un sens contraire à l'influence exercée sur lui avant l'opération électorale. De même, est coupable quiconque commet les actes mentionnés pour détourner quelqu'un de poser sa candidature ou pour le déterminer à se désister d'elle;

4) Quiconque colporte de fausses nouvelles quant au lieu et au temps de l'élection, au désistement d'un candidat ou à d'autres circonstances importantes, et cela à un moment où les électeurs sont incapables de se procurer la connaissance du véritable état de choses;

5) Celui qui, avec préméditation, fausse le scrutin ou le résultat du dépouillement, ainsi que celui qui, chargé par un électeur d'inscrire son suffrage, inscrit sur le bulletin un nom autre que celui qui lui était désigné, de même celui qui, en trompant sur sa capacité électorale, vote dans une assemblée électorale ou qui prend faussement les noms et qualités d'un électeur inscrit.

D'autres dispositions de cette loi se réfèrent aux entraves apportées à l'élection, à l'exercice sans droit de l'électorat, et à la falsification du dépouillement. Les actes visés sont qualifiés les uns délits, les autres contraventions. La punition qui consiste en arrêts simples ou en arrêts forcés, va d'une semaine à un an Seulement, le délit ci-dessus indiqué sous le n° 2 est menacé d'une amende de 10 à 200 couronnes pronon

cée par l'autorité administrative. D'ailleurs, les juges de district sont compétents pour connaître de ces délits, de même que pour connaître du délit de dispersion des réunions électorales publiques dans les circonstances développées par le § 15 de la loi.

XIV

Nous n'avons pas le dessein, dans cette étude, de pronostiquer ce que seront, au point de vue politique, les effets du suffrage universel en Autriche. L'établissement de ce suffrage pour la formation des organes représentatifs a trop souvent donné lieu à des surprises. Les présages sont toujours de valeur problématique dans le domaine de la politique appliquée. Ils ridiculiseraient celui qui les ferait en Autriche.

Il est clair que le suffrage universel ne sera qu'un des éléments parmi plusieurs autres qui détermineront l'histoire et la destinée de cette vieille monarchie. Tout dépendra du fait que, sous le règne du suffrage universel, les électeurs et les élus saisiront ou non les tendances évolutionnistes de l'empire des Habsbourgs. Des milliers d'Autrichiens majeurs se trouveront dans la nécessité de se poser la question célèbre qu'Hippolyte Taine a indiquée dans la préface de l'Ancien Régime. Ils parviendront peut-être également à ce résultat que la construction qui est une constitution soit édifiée non pour l'architecte ou pour elle-même, mais pour le propriétaire qui va s'y loger. Tôt ou tard, on verra clairement si l'architecte a bien compris les besoins du propriétaire.

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Mais c'est justement sous ce rapport que la théorie juridique est fondée à tourner son attention vers la base constructive du bâtiment. Elle y voit le fonctionnement d'un système qui embrasse presque tous les côtés du problème et dont nous croyons avoir suffisamment mis en évidence les défauts et les qualités. On regrette souvent que la théorie ne puisse utiliser l'expérimentation qui est à la disposition du naturaliste. La science politique doit combler ce vide par le maniement exact et intelligent de la méthode comparative que nous croyons être, malgré les justes objections lancées contre elle par M. Deslandres, non pas l'unique mais le plus fécond moyen de saisir et d'éclaircir les phénomènes du droit public. L'introduction du suffrage universel en Autriche constitue une expérience dans le sens de la physique politique. L'avenir dira si l'expérience a réussi. Mais nous croyons fermement que l'appareil juridique de cette tentative mérite déjà d'être étudié et examiné par la jurisprudence internationale.

EGON ZWEIG.

CHRONIQUE CONSTITUTIONNELLE D'ESPAGNE

Les élections législatives en Espagne.

L'Espagne est un pays où la matière électorale a une grande importance; cela tient à la fréquence des élections législatives par suite de la courte durée réelle beaucoup plus courte que la période légale du mandat des représentants du peuple; c'est la conséquence de la dissolution des Cortes. Pendant les cinq années de son règne, Alphonse XIII a procédé trois fois à des élections générales; si les Cortes avaient duré le délai légal, il n'y aurait eu lieu qu'à une seule élection.

A la suite de l'avènement au pouvoir du parti conservateur, le Congrès des députés et la partie élective du Sénat ont été dissous le 30 mars 1907; on a fixé au 21 avril les élections des Députés, et au 5 mai la désignation des Sénateurs électifs.

Au point de vue de l'ordre matériel, les élections de 1907 ont été moins troublées que les précédentes; d'ailleurs, cela ne veut pas dire qu'elles marquent un progrès dans les mœurs électorales. L'accord intervenu entre le parti conservateur et libéral, le fait par le gouvernement d'avoir laissé en Catalogne la lutte s'agiter entre solidaires et antisolidaires avec la victoire à peu près prévue des premiers, les divisions au sein du parti républicain, tout cela semblait faciliter le succès des candidats ministériels dans des conditions telles que les validations pourraient avoir lieu très rapidement dans la Chambre populaire. Il n'en a pas été ainsi. Le nombre des élections contestées a été plus considérable que l'on était en droit de s'y attendre, et la discussion des élections à la Chambre a donné lieu à des débats dans lesquels la sincérité électorale a paru aussi défectueuse que dans les occasions antérieures.

A la charge du Gouvernement, on doit noter les destitutions non motivées et inopportunes de Maires en plus grand nombre qu'auparavant, ainsi que les nominations excessives de délégués gouvernementaux dans les districts; il faut ajouter les déploiements exagérés de la force

publique, qui ont fait parler de contrainte; le gouvernement a aussi permis que les élections de Madrid fussent combattues, à tel point que l'on n'a pas encore pu valider toutes les élections des députés de la capitale de la Nation; enfin et surtout, il n'a pas veillé avec une assez grande énergie à ce que les députés de la majorité opposent une barrière aux abus électoraux par l'annulation des élections dans lesquelles les faits dénoncés et prouvés à la Chambre exigeaient cette annulation.

Mais si l'attitude du gouvernement, qui a provoqué l'abstention du parti libéral, doit être critiquée avec sévérité, heureusement, dans les élections dernières, il s'est produit un événement dont il faut souhaiter la généralisation dans certains districts: l'abstentionnisme des électeurs, très répandu dans la plupart des circonscriptions, a presque complètement disparu. A Valence, en Catalogne, surtout à Barcelone -et à Saragosse on a pu noter ce fait. A Valence, la lutte entre radicaux, républicains et conservateurs a été très animée, à tel point que, dans certains bureaux de vote de 300 électeurs, trois heures après l'ouverture du scrutin, 200 électeurs avaient exprimé leur suffrage. A Barcelone, les 7 candidats solidaires ont obtenu chacun de 35.000 à 40.000 voix, et les candidats antisolidaires environ 22.000 chacun; ces chiffres montrent combien le peuple barcelonais a été empressé autour des urnes électorales. A Saragosse, la présentation de la candidature de M. Moret par les classes commerçantes et industrielles a donné à l'élection une animation telle que le nombre des votants est supérieur à celui des élections antérieures. Ces cas sont restés isolés; l'abstentionnisme a été la règle générale; néanmoins, cela prouve que pour combattre l'abstentionnisme il y a mieux que des sanctions légales; c'est l'existence de véritables programmes électoraux avec une lutte véritable des idées; or, c'est ce qui, sauf quelques circonscriptions, manque généralement.

Le succès électoral de la Solidaridad a été la note retentissante des élections. Sur 44 députés nommés par la Catalogne, 4 seulement n'ont pas eu l'appui de la Solidaridad. 18 républicains, 16 régionalistes, 6 carlistes ont triomphé. La Solidaridad est née du mouvement de protestation contre la loi dite des juridictions; chaque parti conservait son absolue liberté pour la défense de son programme en dehors des points contenus dans le Manifiesto electoral. Catalanistes de nuances très diverses, carlistes et républicains constituent la Solidaridad catalana. Selon les déclarations faites au meeting du théâtre Tivoli; elle a pour objet de protester contre la loi précitée; elle affirme la nécessité de relever la dignité du suffrage, que la Solidaridad estime

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