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encore de la bonne impression que quelque grand Prince y aura laissée » (1).

Balzac se soumit lui-même à la discipline qu'il enseignait et comme, à toutes les époques, celle-ci exige qu'on s'applique à une tâche concrète et précise, qui est dans la trame de la vie nationale, il donna l'exemple en adhérant complètement à l'œuvre de Richelieu qui s'imposait de résoudre les deux problèmes vitaux dont la solution importait au maintien et à l'intégrité politique et morale de sa patrie la disparition des Huguenots en tant que parti politique et association armée à l'intérieur (2), la suppression de la menace autrichienne à l'extérieur (3).

Il fut un français complet en un temps où les traditions nationales, la mentalité de la race et jusqu'à l'existence même de la France échappaient à peine au naufrage, où tant de défaillances, même chez les plus grands, faisaient osciller les maximes les plus certaines. Il a dit avec plus d'éloquence peut-être que de précision ce qui devait être dit sur ces questions; mais on peut lui appliquer le mot de Bossuet sur Nicolas Cornet: « Il est certain que la France n'a pas eu d'âme plus française que la sienne ».

(1) Ibidem.

(2) Balzac, Le Prince, chap. II.

J. DECLAREUIL.

(3) Ibidem, chap. XVIII, chap. XX, ch. XXVII-XXVIII.

NOTES DE JURISPRUDENCE

SOMMAIRE: Section 1. Jurisprudence administrative. - § 1. Compétence administrative. Actions en indemnité contre l'Etat pour dommages se rattachant exclusivement à l'affectation d'un immeuble domanial à un service public. Conseil d'Etat, 14 juin 1907, Villeminot.

§ 2. Recrutement des fonctionnaires publics. 1o Des règlements obligatoires pour l'agent qui nomme; 20 Qualité pour former un recours contre une nomination. Conseil d'Etat, 23 juillet 1907, Larnaudie. §3. Rapports juridiques entre l'administration et le concessionnaire d'un service public. Nature juridique du cahier des charges. C. d'Etat, 31 mai 1907, Deplanque.

Section II. Analyse de notes de jurisprudence.

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SECTION I

Jurisprudence administrative.

& I

Compétence administrative. Actions en indemnité contre l'Etat pour dommages se rattachant exclusivement à l'affectation d'un immeuble domanial à un service public.

Conseil d'Etat, 14 juin 1907. Villeminot.

A l'occasion d'une affaire Terrier (C. d'Et., 6 février 1903, Rec., p. 94 et s.), M. le commissaire du Gouvernement Romieu a, dans des conclusions remarquables, posé en règle générale la compétence des tribunaux administratifs pour le contentieux des services publics. « Tout ce qui concerne l'organisation et le fonctionnement des services publics proprement dits, généraux ou locaux, soit qu'elle procède par voie de contrat, soit

qu'elle procède par voie d'autorité constitue une opération administrative qui est, par sa nature, de la juridiction administrative, au point de vue des litiges de toute sorte auxquels elle peut donner lieu ». « Toutes les actions contre les personnes publiques et les tiers ou contre les personnes publiques elles-mêmes et fondées sur l'exécution, l'inexécution ou la mauvaise exécution d'un service public, sont de la compétence administrative et relèvent, à défaut d'un texte spécial, du Conseil d'Etat, juge de droit commun du contentieux de l'administration publique générale ou locale ». La raison, invoquée par M. Romieu, est que la gestion des services publics.

a, par elle-même, un caractère public; elle constitue une branche de l'administration publique en général, et, à ce titre, doit appartenir au contentieux administratif ». Cette formule est vivement discutée en doctrine, rejetée par les uns (BERTHÉLEMY, Droit administratif, 4o édition, p. 20 et s., p. 75 et s.), approuvée par les autres (HAURIOU, Précis de droit administratif, 6° édition, p. 799 et s.). J'ai étudié ailleurs les raisons historiques de l'évolution de la jurisprudence touchant l'interprétation de la règle de la séparation des autorités administrative et judiciaire (Principes généraux du droit administratif, 1904, p. 120 et s. et 156 et s.). Je me bornerai ici à signaler l'application intéressante de la règle ci-dessus rappelée, faite par le Conseil d'Etat dans l'arrêt du 14 juin 1907,

Villeminot.

Voici les termes dont s'est servi le Conseil d'Etat pour affirmer la compétence administrative.

« Il résulte de l'instruction que les dommages dont le sieur Villeminot demande la réparation sont la conséquence directe du fonctionnement normal de l'Ecole de Chimie dans l'immeuble où l'Etat l'a installée, sans qu'aucune faute puisse être imputée à l'Université ou à la Faculté de Paris chargées de la gestion de cette école. Aucun vice de construction ou aucun défaut d'entretien n'étant relevé (1), les dommages dont s'agit se rattachent exclusivement à l'affectation d'un immeuble domanial à un service public. Il appartient, dès lors, au Conseil d'Etat, de statuer sur l'action en réparation dudit préjudice qui n'engage que la responsabilité de l'Etat ».

(1) Le Conseil d'Etat écarte implicitement, pour ce motif, la compétence des conseils de préfecture (travaux publics).

$2

Recrutement des fonctionnaires publics: 1o Des règlements obligatoires pour l'agent qui nomme; 2° Qualité pour former un recours contre une nomination.

Conseil d'Etat, 12 juillet 1907, Larnaudie.

Le Conseil d'Etat vient de confirmer et de préciser sa jurisprudence relative aux garanties en matière de recrutement des fonctionnaires publics, sur les deux points suivants :

1o Les règles sur le recrutement des fonctionnaires publics, qui sont obligatoires pour l'agent qui nomme, ne sont pas seulement celles inscrites dans des lois ou des décrets du Président de la République ; les règlements faits par d'autres agents sont aussi obligatoires. Le Conseil d'Etat l'avait décidé implicitement en 1905, pour les arrêtés ministériels règlementant le recrutement des agents de leur département ministériel (C. d'Etat, 7 juillet 1905, Warnier, dans cette Revue, 1905, p. 561 et la note); il vient de le décider nettement pour les règlements faits par les préfets pour les employés de leur préfecture. Cette règle est intéressante à signaler, car il semble bien qu'à un moment le Conseil d'Etat ne l'a pas admise (Conseil d'Etat, 9 août 1893, Joubert de la Mothe, Revue du droit public, 1904, p. 522).

2o Ont qualité pour attaquer une nomination irrégulière tous ceux appartenant à la catégorie d'agents parmi lesquels, aux termes du règlement, le choix aurait dû porter. C'est ce qui a été décidé à diverses reprises par le Conseil d'Etat (C. d'E., 20 mai 1904, Berrest, dans cette Revue, p. 404; 10 mars 1905, Demange, Revue, 1905, p. 360; 15 déc. 1905, de la Taste, Revue, 1906, p. 59 et s.; 1er juin 1906, Alcindor, Revue, 1906, p. 483 et s., etc.).

Voici le texte de l'arrêt du Conseil d'Etat du 12 juillet 1907, Larnaudie.

<< Considérant qu'aux termes de l'art. 2 de l'arrêté du préfet de la Seine en date du 15 juin 1900, relatif à l'organisation du personnel administratif des asiles d'aliénés, les commis de ces asiles doivent être recrutés parmi les expéditionnaires du service intérieur de la préfecture de la Seine;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, que le sieur Larnaudie, qui a été nommé commis de l'asile d'aliénés de Vaucluse par l'arrêté attaqué n'était pas, antérieurement à cette nomination, expéditionnaire à la préfecture de la Seine, mais secrétaire de la mairie de Sarlat; qu'ainsi cette nomination a été faite en violation des dispositions précitées de l'arrêté réglementaire du 25 juin 1900 et que le sieur Montheuil, expéditionnaire du service intérieur de la préfecture de la Seine, est recevable et fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué;

Décide:

L'arrêt susvisé du préfet de la Seine du 22 janvier 1906 est annulé.

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Rapports juridiques entre l'administration et le concessionnaire d'un service public. Nature juridique du cahier des charges,

Conseil d'Etat, 31 mai 1907, Deplanque.

Dans l'arrêt du 21 décembre 1906 (Syndicat Croix de Seguey Tivoli, v. suprà, p. 411 et s. et la note du professeur DUGUIT), le Conseil d'Etat a eu à déterminer la situation des particuliers à l'égard des services publics. Dans l'arrêt du 31 mai 1907, Deplanque, ce sont les rapports de l'administration et du concessionnaire d'un service public qui sont examinés. L'importance de l'arrêt Deplanque est considérable. La décision du Conseil d'Etat précise la situation juridique, les obligations et la sanction des obligations des concessionnaires des services publics vis-à-vis de l'administration. Elle opère un changement marqué sur la jurisprudence antérieure. Examinons d'abord les faits de la cause.

I

Exposé des faits (1).

Un sieur Deplanque a été, le 11 novembre 1897, agréé comme successeur des sieurs M. et autres, concessionnaires de l'éclai

(1) Les éléments de cet exposé sont empruntés aux conclusions du com. missaire du gouvernement, M. Romieu.

« EelmineJätka »