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Johnson, d'ailleurs assez dur dans son jugement sur Milton, fit le prologue.

Déborah fut connue du professeur Ward, et de Richardson à qui nous devons une Vie de Milton. Addison se fit le patron de Déborah, et obtint pour elle de la reine Caroline, cinquante guinées.

Un fils de Déborah, Caleb Clarke, passa aux Indes dans les premières années du XVIIIe siècle. On a su par sir James Mackintosh, que ce petit-fils de Milton avait été clerc de paroisse à Madras. Caleb Clarke eut de sa femme Marie trois enfans: Abraham, Marie, morte en 1706, et Isaac. Abraham, arrière-petit-fils de Milton, épousa, au mois de septembre 1725, Anna Clarke; il en eut une fille Marie Clarke, portée sur les registres de naissances, à Madras, 2 avril 1727. Là, disparait toute trace de la famille de Milton. On ne sait ce que sont devenus Abraham et Isaac, qui ne moururent point à Madras, et dont jusqu'à présent on n'a point fait vérifier le décès sur les registres de Calcutta et de Bombay. S'ils étaient retournés en Angleterre, ils n'auraient point échappé aux admirateurs et aux biographes de Milton : ils se sont donc perdus dans les vastes régions de l'Inde, au berceau du monde chanté par leur aïeul. Peut-être quelques

gouttes inconnues du sang libre de Milton animent aujourd'hui le cœur d'un esclave; peut-être aussi coulent-elles dans les veines d'un prêtre de Buddha, ou dans celles d'un de ces bergers indiens, qui se retire au frais sous un figuier, et surveille « ses trou<< peaux à travers les entaillures coupées dans le feuil<< lage le plus épais. >>

Shelters in cool, and tends his pasturing herds
At loopholes cut thro' thickest shade.

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Paradise lost, 13. ix.

Rien de plus naturel que la curiosité qui nous porte à nous enquérir de la famille des hommes illustres : celle de Bonaparte n'a point péri, parce qu'il a laissé après lui les reines et les rois qu'il fit avec son épée. J'ai recherché ailleurs ce qu'étaient devenus les descendans de ce Cromwell, dont le nom se trouve inséparablement uni dans la gloire à celui de Milton.

<< Il est possible, ai-je dit, qu'un héritier direct « d'Olivier Cromwell par Henri, soit maintenant << quelque paysan irlandais inconnu, catholique, << peut-être, vivant de pommes de terre dans les tour« bières d'Ulster, attaquant la nuit les orangistes, et « se débattant contre les lois atroces du Protecteur.

« Il est possible encore que ce descendant inconnu de « Cromwell ait été un Franklin ou un Washington en « Amérique (1). »

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PARADIS PERDU.

DE QUELQUES IMPERFECTIONS DE CE POÈME.

Le comte de Dorset, cherchant des livres, entra chez le libraire de Milton et mit par hasard la main sur le Paradis perdu. Le libraire pria humblement sa Seigneurie de le lire et de lui procurer des acheteurs. Le comte l'emporta, le lut, le fit passer à Dryden qui le lui renvoya avec ces mots : Cet homme nous efface, nous et les anciens.

Cependant la renommée du Paradis perdu ne marcha qu'avec lenteur; des mœurs frivoles et corrompues, l'aversion qu'on portait à des sectes religieuses dont les excès avaient fait naître l'esprit d'incrédulité, s'opposaient au succès d'un poème aussi sévère par le sujet, le style et la pensée : ni le duc de Buckingham, ni le comte de Rochester, ni le chevalier Temple, ne s'occupent de Milton. Mais, en 1688, une édition in

folio du Paradis perdu, sous le patronage de lord Sommers, fit du bruit: on eût dit que la gloire de l'ennemi des Stuart par eux opprimée, avait attendu l'année de leur chute pour éclater. Si Milton eût vécu, comme son frère, jusqu'à l'époque de la révolution de 1688, eût-il trouvé grâce devant le gouvernement nouveau? J'en doute; on ne fit que changer de roi. Le vieux régicide Ludlow accouru de Lausanne, se trouva aussi étranger sous Guillaume III qu'il l'eût été sous Jacques II: homme d'un autre temps, il retourna mourir dans sa solitude.

Peu à peu les éditions du Paradis perdu se multiplièrent. Addison lui consacra dix-huit articles du Spectateur. Alors il n'y eut plus assez d'autels pour le dieu; Milton prit dans le culte public sa place à côté de Shakspeare.

Quelques voix opposantes se firent entendre pourtant; aucune grande renommée ne s'élève sans contradicteurs. On prétendit que Milton avait imité Mosénius, Ramsay, Vida, Sannazar, Romæus, Flecther, Staforst, Taubman, Andreini, Quintianus, Malapert, Fox on aurait pu ajouter à cette liste Saint-Avit, Dubartas et le Tasse; Saint-Avit a des très belles scènes dans Éden. Il est probable que Milton, à Naples, dans la compagnie de Manso, avait lu les Sette

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