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<< était en paix; les rois demeuraient en silence, comme << s'ils sentaient l'approche de leur souverain. Les << vents caressaient les vagues, annonçant tout bas de << nouvelles joies au doux océan. Les étoiles, regar<< dant immobiles et surprises, ne voulaient pas s'en« fuir malgré toute la lumière du matin, elles s'ob<< stinaient à briller dans le ciel, jusqu'à ce que leur « Seigneur leur parlât lui-même, et leur dit de s'en << aller. >>

Reçu Bachelier en 1628, Milton, Maître en 1632, quitta Cambridge par esprit d'indépendance, et refusa d'entrer dans le clergé. « Celui qui s'engage dans « les ordres, dit-il, souscrit à son esclavage et prête «< un serment: il lui faut alors ou devenir parjure ou <<< briser sa conscience. >>

Quelques passages de sa première élégie latine où il a l'air de préférer les plaisirs de Londres aux ennuis de Cambridge, devinrent la source des calomnies que l'on répandit contre lui dans la suite: on l'accusa d'avoir été voMi de l'Université après les désordres d'une impure jeunesse ; des pamphlets assurèrent qu'il avait été forcé d'aller cacher sa vie en Italie. Johnson pense que Milton fut le dernier étudiant de l'Univer

sité, puni d'une peine corporelle. Rien de tout cela n'est vrai, et ne s'accorde même pas avec les dates d'une vie aussi correcte que religieuse.

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Le père de Milton ayant fait une petite fortune, s'était retiré à la campagne d'Horton, près Colebrooke, en Buckingham-Shire. Milton l'y rejoignit, et passa cinq années enseveli dans la lecture des auteurs grecs et latins. Il faisait, de temps en temps, quelques courses à Londres pour acheter des livres et prendre des leçons de mathématiques, d'escrime et de musique.

Il écrivait à un ami qui lui reprochait de vivre dans la retraite « Vous croyez qu'un trop grand amour << d'apprendre est une faute; que je me suis aban<< donné à rêver inutilement mes années dans les bras « d'une solitude lettrée, comme Endymion perdait << ses jours avec la lune sur le mont Latmus..... Mais « ces belles espérances dont vous m'entretenez, qui << flattent la vanité et la jeunesse, ne s'accordent point

«'avec ce Casque obscur de Pluton, dont parle Ho« mère. Je mettrais bas.ce Casque, si dans ma vie << cachée je n'avais d'autre vue que de satisfaire une << frivole curiosité. Mais l'exemple terrible, rapporté « dans l'Évangile, du serviteur qui avait enfoui son << talent, est présent à mes yeux : ce n'est pas le plaisir << d'une étude spéculative, c'est la considération même << du Commandement évangélique, qui m'empêche << d'aller aussi vite que d'autres et me retient par un « religieux respect. Cependant, afin que vous voyiez « que je me défie quelquefois de moi-même, et que « je prends note de certain retardement en moi, j'ai <«< la bardisse de vous envoyer quelques-unes de mes « rêveries de nuit, dans la forme des stances de Pé<< trarque.

How soon hath Time, the subtle thief of youth,
Stoln on is wing my three and twentieth year!
My hasting days fly on with full carreer,
But my late spring no bud or blossom shew'th.

<< Combien vite le temps, adroit voleur de la jeunesse, « a dérobé sur son aile mes vingt-trois années! Mes << jours hâtés fuient en pleine carrière; mais mon der<< nier printemps ne montre ni boutons, ni fleurs....>>

De 1624 à 1638 il composa l'Arcades, Comus ou le

Masque, Lycidas, dans lequel il semble prophétiser la mort tragique de l'évêque Laud, l'Allegro et le Penseroso, des Élégies latines et des Sylves.

Johnson a fait de l'Allegro et du Penseroso une vive analyse.

« L'homme gai entend l'alouette le matin; l'homme « pensif entend le rossignol le soir..

« L'homme gai voit le coq se pavaner, il prête « l'oreille à l'écho qui répète le bruit du cor et de la « meute dans le bois : il voit le soleil s'élever avec « gloire; il écoute le chant de la laitière, il regarde <«<les travaux du laboureur et du faucheur, il jette « les yeux sur une tour éloignée où réside quelque «belle dame la nuit il fait ses délices de quelque « conte fabuleux.

:

« L'homme pensif tantôt se promène à minuit pour « rêver, tantôt écoute le triste son de la cloche du « Couvre-Feu. Si le mauvais temps l'oblige de rentrer << chez lui, il s'assied dans une chambre éclairée par « la lueur du foyer. Ayant près de lui une lampe so<< litaire, il épie l'étoile du pôle pour découvrir l'ha<< bitation des ames séparées de leurs corps, ou bien il << lit les scènes pathétiques de la tragédie ou de l'épo«pée. Quant vient le matin, matin obscurci par la <<< pluie et le vent, il erre dans les sombres forêts où

« EelmineJätka »