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LIBRAIRIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES, FILS ET CIR
IMPRIMEURS DE L'institut, rUE JACOB, 56

1859
Fic

DEC 4 1882

575-9

AVANT-PROPOS.

d

Un homme d'un esprit vif et fin, M. le vicomte de Ségur, disait, en parlant de son frère aîné, M. le comte de Ségur : Je pourrais en être jaloux; j'aime mieux en être fier. 1 avait pris le bon parti. Tous deux étaient fils du maréchal de Ségur, qui, couvert de blessures, mais actif, laborieux, dévoué, fut ministre de la guerre aux plus belles années du règne de Louis XVI. Le vicomte de Ségur, qui, déjà maréchal de camp, quítta le service à la Révolution, briguait, dans les lettres, des succès qu'il y aurait peut-être obtenus, si sa vie n'eût été livrée aux plaisirs. Quoiqu'il ait donné vingt-quatre ouvrages dramatiques, aux Français, à l'Odéon, à l'Opéra-Comique et même au grand Opéra, rien n'est resté de lui au théâtre : une chanson charmante, L'Amour et le Temps, serait aujourd'hui son titre unique à la célébrité, si l'on n'avait de lui trois volumes in-12 intitulés Les Femmes. L'ouvrage abonde en observations aussi vraies qu'ingénieuses: on voit qu'il avait bien étudié son sujet. Il indique le rôle des femmes et particulièrement, chose étrange! celui des mères dans la société de son temps. On va voir sous quels rapports les mères y occupaient une place importante, y exerçaient une magistrature aimable, aussi respectée que chérie ; et, puisque l'ensemble de cette collection a pour objet de reproduire les mœurs,

a

on nous saura gré d'en saisir, dans le fragment qui suit, un des traits les moins connus; qu'on en juge:

un;

« Autrefois, sous Louis XV et sous Louis XVI, un jeune homme entrant dans le monde y faisait ce que l'on appelait un début. Il cultivait les arts d'agrément; le père indiquait et suivait la direction de ce travail; car c'en était mais la mère, la mère seule pouvait porter son fils à ce dernier degré de politesse, de grâce et d'amabilité qui finissait son éducation. Outre sa tendresse naturelle, son amour-propre se trouvait tellement de la partie, que l'on peut juger du soin, de la recherche qu'elle mettait à donner à ses enfants, à leur entrée dans le monde, tout le charme qu'elle pouvait développer en eux ou leur communiquer. De là venaient cette politesse si rare, ce goût exquis, cette mesure dans les discours, dans les plaisanteries, cette grâce de maintien, en un mot, cet ensemble qui classait ce qu'on appelait la bonne compagnie, et qui distingua toujours la société française, même chez les étrangers. Un jeune homme avait-il manqué, dans sa jeunesse, à une attention pour une femme, à un égard pour un homme plus âgé que lui, à une déférence pour la vieillesse, que la mère du jeune étourdi en était instruite le soir même par ses amis; et le lendemain il était sûr d'une leçon et d'une réprimande.

« La société, répartie en mille cercles différents, se tenait, sous tous ces rapports, sans se voir habituellement. La politesse, le goût, le bon ton étaient une espèce de dépôt que chacun gardait avec soin, comme s'il n'eût été confié qu'à lui. C'est à la politesse que les femmes, avec raison, taient le plus d'importance : elle est, en effet, la première expression du respect qu'on leur doit. La politesse est de plus si précieuse dans le commerce de la vie, que l'on a

met

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