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<< Pai pris auprès des cours étrangères les moyens les » plus propres pour tranquillifer tous les bons citoyens ». Quels font donc fes moyens? Le public eft intéreffé à les connoître, la politique ne doit plus être mystérieuse: liberté & machiavélifme font deux chofes incompatibles. De la franchise, de la franchise! c'eft ce qui convient aux peuples libres. Le temps n'eft plus où l'on fe repofoit aveuglément du foin des relations étrangères fur la bonne foi des miniftres & de leurs maîtres.

Paffons à la réponse de M. Paftoret : «La conftitution, » dit-il au roi, vous a donné des amis dans tous ceux » qu'on appeloit autrefois vos fujets ». Cette phrafe eft trop générale on peut être bon Français fans être l'ami ni des rois, ni du roi. Les légiflateurs Briffot, Fauchet & Condorcet n'ont jamais paffé pour de mauvais citoyens : ils ne fe flattent cependant pas d'être les amis du roi; ils fe difent tout bonnement les amis du peuple. M. Paftoret ne devoit pas juger de tous par lui seul.

« Et nous auffi nous avons besoin de vous aimer ». Flagornerie pure! Une nation n'a qu'un feul befoin; c'est le befoin de la liberté, & elle peut être libre fans roi. S'il étoit vrai que le peuple crût que l'amour des rois fût un befoin, le peuple ne feroit jamais libre. Ah! du moins le préfident de l'affemblée nationale auroit dû diftinguer entre les befoins réels & les befoins factices.

« La constitution vous a fait le plus grand monarque » de l'Europe ». La révolution l'auroit fait le plus grand monarque, s'il l'avoit voulue, & protégée avec énergie; mais les voyages de Saint - Cloud & de Montmédi ont affez prouvé que Louis XVI n'ajoutoit pas foi à la gran deur conftitutionnelle : on dit qu'à fes yeux fon beau-frère Léopold & Selim font des monarques plus grands que lui.

Extrait d'une lettre de Coblentz.

Nous fommes ici en grande compagnie; elle eft nombreuse, & notre dernière remonte qui nous porte au complet, arrive le 26 de ce mois. Les troupes viennent de tous côtés; il paroît que cela ne fera pas long. L'ambassadeur ruffe auprès des princes eft arrivé le 20; tous les corps font allés, le 22, lui faire vifite. L'ambaffadeur suédois, ceux de l'empereur & des différens cercles de l'empi e, arrivent le 28.

Ce qu'en France on appelle vulgairement les ci-devant parlemens, s'affemblent à Bruxelles. Nous ne tarderons pas de N°. 117.

C bis.

nous y rendre. La cour de France eft déclarée l'endroit où fe rendront les princes; toutes les armes font arrivées, le dernier envoi au plus tôt. La dernière livraison a été faite jeudi paffé.

Le 23 Septembre 1791.

Le camp de Coblentz, autrefois composé de vagabonds & de vils transfuges, ne l'eft aujourd'hui que de gentilshommes français. Ces preux chevaliers, fi fiers de fervir autrefois en qualité d'officiers dans l'armée de leur maître, fervent aujourd'hui en qualité de foldats dans l'armée de M. d'Artois, prince français. Ces nobles brigands font en effet nombreux; on les dit au nombre de 7 à 8000; la meilleure difcipline règne parmi eux; l'or y abonde, ils s'entretiennent cependant à leurs frais; mais quel sacrifice répugne à l'honneur outragé? Les officiers de cette troupe choifie font des maréchaux de camp : cette armée fe dit l'élite de la France.

C'est là que font allés les trois gardes-du-corps arrêtés à la fuite du roi à Varennes. Ils font partis de Paris le furlendemain de l'amniftie, accompagnés de 15 de leurs camarades. Avant le départ ils ont été faire leur cour à Louis XVI & à fa femme. Le roi leur a recommandé dè pargner le fang le plus qu'ils pourroient; Antoinette leur a remis un fac de louis d'or, qu'un homme feul pouvoit à peine porter. Le bon roi! la bonne REINE!...... ils ont donné 25 mille francs chacun aux pauvres de Paris.

Depuis le décret qui permet les émigrations, il eft de fait que tous les jours il fort de France un nombre étonnant de ci-devant nobles, qui vont ou à Worms, ou à Coblentz leurs femmes les fuivent & leur portent de l'argent. Nous avons la certitude que le fignalement des membres patriotes de l'affemblée conftituante eft donné aux frontières, & qu'il leur feroit difficile de fortir de France: l'armée de Worms & de Coblentz veut fe venger fur ux lorfqu'elle aura fait la conquête de la France.

Depuis trop long-temps nous nous endormons fur ces

bruits & préparatifs de guerre : les comités de l'affemblée onftituante, d'accord avec les miniftres de Louis XVI n'ont cherché qu'à nous inspirer une fauffe fécurité, tandis que tous les faits, toutes les probabilités fe réuniffent à annoncer une guerre certaine, & une guerre qui n'est pas fans inconvéniens pour la France. Nous fommes fans argent, la confiance ne renaît point, les artisans font fans travail, & nous n'avons pour nous raffurer contre les hoftilités des princes que l'acceptation de Louis XVI. Mais de deux chofes l'une ou l'acceptation de Louis XVI eft de bonne foi, ou elle eft de mauvaise foi fi elle est de bonne foi, la fréquence des émigrations nous prouve qu'elle eft inutile. Si elle eft de mauvaife foi, la popu larité dont il eft malheureusement entouré dans ce moment nous en fait un ennemi d'autant plus dangereux qu'il fera plus caché.

L'affemblée conftituante n'a rien décrété sur nos relations pofitives avec les puissances étrangères : c'eft de ces relations que dépend en grande partie le fuccès de la guerre qui va s'allumer; la légiflature doit donc y pourvoir d'une manière digne d'un peuple libre: qu'elle annule tous les traités faits avec les defpotes de l'Europe, qu'elle promette affiftance à tous les peuples qui voudront fecouer le joug, & bientôt elle verra retirer ces esclaves enrégimentés qui menacent notre révolution; révolution qui n'est pas consommée, ainsi que l'a voulu persuader le corps conftituant.

Que l'affemblée légiflative prête fon attention à l'état actuel de nos fubfistances: il est manifeste qu'on a le projet d'affamer la France, on veut nous faire manquer de pain, pour que nous recourions au parti du roi qui nous en donnera. Que cet appât eft dangereux & perfide ! Les agens de la royauté font prefque maîtres de tous les approvisionnemens; ils ont plus d'une récolte entière à leur difpofition; elle est serrée aujourd'hui, demain les greniers feront ouverts, fi le bon peuple veut avoir recours à fon

bon roi.

Encore un coup la guerre n'eft pas indifférente à l'état actuel de la France, & les frères du roi le favent bien; ils comptent fur l'épuisement de nós finances, fur la difette du numéraire, sur l'impatience d'un peuple, qui peut-être n'étoit pas mûr pour la liberté : c'est donc à la législature à parer à ce grand inconvénient; il femble que dans les circonftances préfentes elle pourroit retirer le décret sur les émigrans, ordonner que tout Français reftât en France, jufqu'à ce que l'armée des contre-révolutionnaires ait difparu; ordonner aux émigrés de rentrer, fous peine de confifcation; déclarer les princes déchus, non pas du droit de citoyen, ils n'ont pas l'honneur de l'être, mais de leur droit à la couronne; prohiber l'exportation de l'or, du numéraire, du bled & de tous comeftibles; envoyer des commiffaires à fon choix, vifiter toutes les places frontières; défigner un général chargé du commandement dès gardes nationales & de la troupe de ligne, avec l'affiftance d'un confeil civil nomé par le corps législatif; défendre expressément au roi de paroître en perfonne à la tête des armées, dont on a eu la folie, fi ce n'est la fcélératesse, de le déclarer chef fuprême : voilà des moyens efficaces à employer pour éviter la guerre ; & la légiflature doit d'autant moins les négliger, qu'il eft plus probable que la nation feroit trahie, fi jamais la guerre avoit lieu.

Nouvelles poftérieures. L'empereur a donné aux princes français les espérences les plus pofitives. L'impératrice de Ruffie a rappelé de France fon miniftre, M. Simolin, & a envoyé aux princes deux millions de roubles. M. Romanzow, chargé de négocier avec les princes, leur a annoncé cette nouvelle de fa part de fa fouveraine. Le roi d'Espagne, de fon côté, a envoyé cent millions qui réfuttent d'un emprunt fait à Gênes. Les troupes arrivent en force, 30 mille hommes commandés par le général Bender defcendent vers le Luxembourg; 24 mille Suédois fous les ordres de M. Bouillé arrivent auffi; M. Maillebois commande 24 mille hommes, & le gééranl Doflice en ommande 76 mille.

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<< Pai pris auprès des cours étrangères les moyens les » plus propres pour tranquillifer tous les bons citoyens ». Quels font donc fes moyens? Le public eft intéreffé à les connoître, la politique ne doit plus être mystérieuse: liberté & machiavélifme font deux chofes incompatibles. De la franchise, de la franchise! c'eft ce qui convient aux peuples libres. Le temps n'eft plus où l'on fe repofoit aveuglément du foin des relations étrangères sur la bonne foi des miniftres & de leurs maîtres.

Paffons à la réponse de M. Paftoret : «La constitution, » dit-il au roi, vous a donné des amis dans tous ceux » qu'on appeloit autrefois vos fujets ». Cette phrase eft trop générale on peut être bon Français fans être l'ami ni des rois, ni du roi. Les légiflateurs Briffot, Fauchet & Condorcet n'ont jamais paffé pour de mauvais citoyens : ils ne fe flattent cependant pas d'être les amis du roi; ils fe difent tout bonnement les amis du peuple. M. Paftoret ne devoit pas juger de tous par lui feul.

« Et nous auffi nous avons besoin de vous aimer ». Flagornerie pure! Une nation n'a qu'un feul befoin; c'eft le befoin de la liberté, & elle peut être libre fans roi. S'il étoit vrai que le peuple crût que l'amour des rois fût un befoin, le peuple ne feroit jamais libre. Ah! du moins le préfident de l'affemblée nationale auroit dû diftinguer entre les befoins réels & les befoins factices.

<< La conftitution vous a fait le plus grand monarque » de l'Europe ». La révolution l'auroit fait le plus grand monarque, s'il l'avoit voulue, & protégée avec énergie; mais les voyages de Saint Cloud & de Montmédi ont affez prouvé que Louis XVI n'ajoutoit pas foi à la gran deur conftitutionnelle : on dit qu'à fes yeux fon beau-frère Léopold & Selim font des monarques plus grands que lui.

Extrait d'une lettre de Coblentz.

Nous fommes ici en grande compagnie; elle eft nombreuse, & notre dernière remonte qui nous porte au complet, arrive le 26 de ce mois. Les troupes viennent de tous côtés; il paroît que cela ne fera pas long. L'ambassadeur ruffe auprès des princes eft arrivé le 20; tous les corps font allés, le 22, lui faire vifite. L'ambaffadeur suédois, ceux de l'empereur & des différens cercles de l'empi e, arrivent le 28.

Ce qu'en France on appelle vulgairement les ci-devant parlemens, s'affemblent à Bruxelles. Nous ne tarderons pas de No. 117.

C bis.

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