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ture n'avait pas encore été réalisée et que les titres fussent toujours entre les mains de l'agent de change, comme celui-ci est, ainsi que nous l'avons vu, personnellement tenu de les restituer au tiers revendiquant, il serait, vis-à-vis de son correspondant, purement et simplement privé de son gage et devrait subir les conséquences de cette situation.

466. — La loi du 15 juin 1872, en déclarant l'agent de change responsable au cas où il aurait vendu des titres en dépit d'une opposition régulièrement publiée, vise manifestement l'agent de change vendeur; mais la responsabilité de l'agent de change acheteur peut elle-même se trouver engagée en vertu des principes du droit commun. Ainsi en serait-il, par exemple, sí, au moment de la livraison des titres, il les avait acceptés pour son client et qu'il en eût payé le prix sans vérifier lui-même s'ils étaient libres d'opposition. Au cas de déconfiture de l'agent vendeur et d'insolvabilité à son client, nous ne doutons pas que l'acheteur aurait un recours contre son mandataire pour la faute que celui-ci aurait commise dans l'exécution de son mandat.

467. - Il n'y a aucune distinction à établir entre les valeurs françaises et les valeurs étrangères, relativement à la responsabilité des agents de change vendeurs de titres frappés d'opposition. Les oppositions signifiées par les propriétaires dépossédés, dans les conditions prescrites par la loi de 1872, produisent leur effet en France, bien qu'il s'agisse de valeurs étrangères, et en interdisent la négociation dans toutes les Bourses françaises. Cass., 13 févr. 1884, Cahen d'Anvers, [D. 84.1.265] Sie, Crépon, n. 153 et s.; Buchère, Tr. des valeurs mobilières, p. 306.

468. Et cela est vrai, alors même que le titre, frappé d'opposition en France, n'y revient qu'après avoir été négocié dans une Bourse étrangère où n'existe aucune réglementation de la nature de celle organisée en France, et quand, par conséquent, il a été acquis dans des conditions d'entière régularité. — V. J. le Droit, des 2, 3 et 4 nov. 1879 et du 22 avr. 1883. Sic, Crépon, n. 157.

469. Au cas où des titres ont été adressés à un agent de change qui en a opéré la vente en dépit de l'opposition dont ils étaient frappés, ces titres ne doivent pas être restitués au donneur d'ordre sur l'offre de celui-ci de les remplacer par des titres semblables, sans qu'il y ait lieu, pour l'agent, de tenir compte de la défense à lui faite par le propriétaire dépossédé de se dessaisir des valeurs. Cass., 13 févr. 1884, Cahen d'Anvers, D. 84.1.269] Sic, Crépon, n. 159. 470. L'agent de change devrait les retenir, alors même que la vente n'aurait pas été opérée; l'inscription de l'opposition au bulletin vaut signification à l'agent de change et, comme l'opposition immobilise la valeur entre les mains du tiers détenteur, que par la remise du titre, il est devenu tiers détenteur, il ne peut plus s'en dessaisir au mépris de l'opposition sans devenir responsable envers l'opposant. Cass., 14 févr. 1884, précité.

471. L'art. 12, L. 15 juin 1872, affranchissant de toute responsabilité l'agent de change qui, avant toute opposition, a prêté de bonne foi son ministère à la négociation de titres au porteur perdus ou volés, ne protège que les actes accomplis par l'agent de change dans les limites de ses droits et de ses devoirs professionnels. Cet article ne peut être invoqué par l'agent de change qui a agi, non pas en sa qualité d'agent de change, mais pour son compte personnel. Cass., 5 févr. 1878, [J. des trib. de comm., 78.538]

472. Dès lors, un agent de change est à bon droit condamné à des dommages-intérêts, en vertu des art. 1382 et s., C. civ., envers le propriétaire des titres perdus ou volés lorsqu'il a acheté pour son compte, sans prendre les précautions nécessaires, et qu'il a ainsi commis une faute de droit commun. Même arrêt.

473. L'art. 16, L. 13 juin 1872, déclare les dispositions de cette loi inapplicables aux billets de la Banque de France, aux billets de même nature émis par des établissements autorisés, aux rentes et aux titres au porteur émis par l'Etat. Il faut en conclure que, relativement à ces sortes de valeurs, la chambre syndicale ne peut admettre, dans le bulletin officiel, les oppositions dont elles seraient frappées par les propriétaires dépossédés et que ceux-ci sont réduits à la publicité, par la voie de la presse ou par tel autre mode, de la soustraction commise à leur préjudice. Dans ces conditions, la responsabilité des intermédiaires de négociation ne peut être engagée qu'en vertu des principes du droit commun, c'est-à-dire, de l'article 1382, C. civ. Trib. RÉPERTOIRE. Tome III.

Seine, 2 févr. et 2 août 1883, [La Bourse et le Palais, p. 92] V. Crépon, n. 162.

474. L'agent de change qui vend des valeurs à lots est-il tenu, avant de livrer les titres, de vérifier s'ils n'ont pas bénéficié de lots tombés à des tirages antérieurs? Au cas où le nouveau détenteur du titre serait devenu insolvable après avoir touché un lot échu antérieurement à son acquisition et qui, d'après une jurisprudence qui parait solidement établie, appartenait à l'ancien détenteur, l'agent de change vendeur serait-il responsable vis-à-vis de ce dernier pour la valeur du lot? Nous ne le pensons pas. Il n'y a point en effet ici, comme en matière da titres qui ont pu être frappés d'opposition, de prescription de le loi à laquelle on puisse dire que l'agent ait manqué. C'est d'ailleurs au détenteur de valeurs à lots qu'il appartient de surveiller les tirages, si bien qu'à moins de circonstances particulières, de mandat exprès donné et accepté, après la vérification du bulletin des oppositions, le mandataire peut considérer son mandat comme rempli et, conséquemment, sa responsabilité comme dégagée. - Crépon, n. 163.

475. On peut encore se demander si la responsabilité des agents de change, quant à 'a nature des titres vendus, ne peut pas être engagée par la négociation d'actions ou d'obligations émises par les sociétés contrairement aux prescriptions de la loi du 24 juillet 1867. — Crépon, n. 164 et s.

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476. Les art. 1, 2, 3 et 24, L. 3 mai 1867, indiquent les conditions imposées aux sociétés anonymes pour leur constitution et pour la négociation de leurs actions: division du capital en actions ou coupons d'actions qui ne peuvent être moindres de cent francs, si ce capital n'excède pas deux cent mille francs, de cinq cents francs, s'il est supérieur; souscription de la totalité du capital social et versement du quart au moins du montant des actions par chaque actionnaire. Ces actions ne sont négociables que lorsque ces conditions ont été remplies, et l'art. 14 de la même loi punit d'une amende de cinq cents francs à dix mille francs la négociation ou la participation à la négociation faite en contravention aux prescriptions et aux défenses de la loi. En présence de ces prohibitions, on pourrait admettre que dans le cas où l'agent de change aurait sciemment prêté son ministère à la négociation d'actions de sociétés irrégulièrement constituées, sa responsabilité ne se bornerait pas à la répression pénale édictée par l'art. 14, mais qu'elle comprendrait encore la réparation du dommage causé à ceux qui auraient été victimes de ces négociations.

477. On a soutenu cependant que les négociations d'actions de sociétés seraient valables, même si elles avaient été faites en dehors des prescriptions de la loi de 1867 (Lyon-Caen, sous Cass., 23 janv. 1884, Picard, [S. 84.2.49, 84.1.316] — S'il en était ainsi, l'intermédiaire de la négociation ayant prêté son ministère à un acte valable, ne saurait être recherché pour les suites de cet acte. V. sur ce point, infrà, vo Société anonyme. 478. En tout cas, la question de la responsabilité de l'agent de change ne pourrait se poser, à notre sens, que relativement à la négociation d'actions de sociétés constituées régulièrement en apparence, mais plus tard déclarées nulles sur la constatation que ces apparences étaient trompeuses et, qu'en réalité, le capital n'avait pas été intégralement souscrit, ou que les actions n'avaient pas été libérées du quart.

-

479. C'est en ce sens que s'est prononcée la Cour de cassation. Elle a déclaré que l'art. 14 de la loi de 1867, n'entend défendre et punir que la négociation des titres révélant par euxmêmes les causes qui doivent empêcher de les négocier; qu'autrement le plus grand nombre des personnes atteintes par les pénalités dont il s'agit ne seraient pas en mesure de les éviter; qu'il n'existe, en effet, pour se fixer sur la négociabilité des titres d'une société anonyme d'autre moyen que l'examen, soit des titres eux-mêmes, soit des déclarations que les art. 55 et s.. prescrivent de porter à la connaissance du public; que la loi n'exige ni même ne permet d'autres et plus amples recherches; que, par conséquent, si les titres sont réguliers en la forme, si les déclarations prescrites ont eu lieu et constatent l'accomplissement des conditions de fond requises en pareil cas, telles que le versement du quart, l'art. 14 devient inapplicable, et, par suite, la négociation des actions n'étant pas défendue, ne saurait être invalidée par l'effet de découvertes ultérieures. Cass., 3 juin 1885 (deux arrêts), Bouvier et Bailly, [S. 85.1. 259, P. 85.1.640]

480.

La conséquence de cette solution est de dégager la

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culté de s'exonérer en faisant connaitre celui pour le compte duquel l'opération a été faite. Crépon, n. 217.

490. Jugé, en ce sens que, dans les ventes d'effets publics, le vendeur n'a pas d'action directe en paiement du titre contre l'acheteur: il ne peut exercer son recours que contre l'agent de change chargé par lui de vendre (Arr. du Cons. d'Et., 24 sept. 1724, art. 30 et 36; arr. du 27 prair. an X, art. 13 et 19). Cass., 19 août 1823, Lacaze, [S. et P. chr.] — Sie, Crépon, n. 216.

responsabilité des intermédiaires de la négociation, qui ne peuvent être actionnés en garantie du préjudice qui a pu être la conséquence de la négociation dès lors que celle-ci était valable. 481. Il faut de plus faire remarquer qu'au cas même où l'on déciderait que la négociation d'actions d'une société en apparence constituée régulièrement, mais plus tard déclarée nulle, serait elle-même entachée de nullité, il faudrait encore établir vis-à-vis de l'agent de change l'absence de bonne foi, c'est-àdire, la connaissance du vice au moment où l'opération était effectuée. Le mandataire, en effet, même au regard d'un acte illicite, quand l'acte ne porte pas en soi ce caractère, peut demander le remboursement de ses avances (Troplong, Mandat, n. 31). Or, le fait de négocier des actions d'une société n'a, en soi, rien de répréhensible; par suite, pour refuser à l'intermédiaire le remboursement de ses avances, il est nécessaire de démontrer sa mauvaise foi, autrement dit, de prouver qu'il avait connaissance du vice. Cass., 16 juin 1885, Rogès, [S. 83.1. 253, P. 85.1.627]

482. On a voulu assimiler les valeurs étrangères aux valeurs francaises relativement à l'application des prohibitions de la loi de 1867, prétendant que cette loi était une loi de police et de sûreté dès lors qu'elle punissait de peines correctionnelles les négociations faites avant la constitution de la société et, notamment, avant la libération du quart, et conséquemment qu'elle obligeait tout le monde et atteignait tous les actes accomplis au mépris de ses prescriptions. Crépon, n. 180.

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483. On a répondu que la loi de 1867 a été édifiée uniquement en vue des sociétés françaises; que rien, dans son texte, non plus que dans les discussions qui l'ont préparée, n'indique qu'on ait voulu l'appliquer aux sociétés étrangères; què les actions d'une société étrangère, même non autorisée à agir en France, pourraient donc y être négociées, quand même elles ne seraient pas libérées du quart (Lyon-Caen, Sirey, 81.2.25), et que, par suite, l'intervention de l'agent de change dans la négociation ne saurait être considérée comme un manquement à une prescription de la loi engageant la responsabilité de l'officier public. Cass., 16 juin 1885, précité.

484. La remise d'actions industrielles à un agent de change par son client constitue un simple dépôt et, dès lors, ne peut, lorsqu'il s'agit d'une somme supérieure à 150 fr., être prouvée que par écrit ou par des présomptions appuyées sur un commencement de preuve par écrit. Bordeaux, 3 janv. 1860, Angiboust,

[S. 60.2.541, P. 60.660]

485. On peut voir un commencement de preuve par écrit de cette remise d'actions à l'agent de change, dans un compte émané de celui-ci, où le client est crédité du montant des coupons de dividendes desdites actions. Même arrêt.

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mettant.

487. En premier lieu, l'agent de change acheteur doit verser à l'agent de change vendeur du prix des titres négociés. Comme la responsabilité que peut encourir l'agent de change vendeur pour la livraison des titres, celle qui incombe à l'agent de change acheteur pour le paiement du prix se trouvait autrefois réglée par l'art. 13 de l'arrêté du 27 prairial an X qui lui faisait une obligation de se faire remettre par son client avant la négociation la somme nécessaire pour désintéresser sa contrepartie. Aujourd'hui en vertu de la loi du 28 mars 1885, nous rappelons que cette responsabilité n'a d'autre base que le contrat même qui est intervenu entre l'agent de change de son client. Crépon, n. 215.

488. Mais, dans cette mesure, il convient de remarquer que, par suite des conditions dans lesquelles s'opere l'achat, effectué par lui en son nom personnel et sans qu'il ait le droit d'indiquer celui pour le compte duquel il est fait, il est seul responsable du paiement du prix vis-à-vis de l'agent de change vendeur.

489. L'agent de change acheteur n'aurait pas même la fa

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491.Jugé, de même, que l'agent de change vendeur n'a pas d'action personnelle contre les clients de l'agent de change acheteur, pour les contraindre à l'exécution du marché conclu en leur nom. Néanmoins, si le transfert des effets au nom des tiers acheteurs a été opéré, l'agent de change vendeur peut les contraindre à lui donner l'autorisation de revendre ces effets en leur nom, si mieux ils n'aiment exécuter le marché. - Paris, 14 janv. 1848, Fauche, [S. 49.2.267, D. 48.2.14] 492. Rappelons que les difficultés qui peuvent surgir entre agents de change relativement au paiement du prix sont du ressort de la chambre syndicale chargée de les trancher. - Crépon, n. 218. 493. En second lieu, le prix des titres achetés doit être remis à l'agent de change acheteur par le client dont il tenait son mandat.

494. La sanction de cette obligation est que l'agent de change qui, sur l'ordre de son client, a acheté des titres sans être nanti des fonds nécessaires pour payer, à une action contre son mandant en remboursement des avances qu'il aurait été obligé de faire. On ne voit pas, en effet, pourquoi on lui dénierait l'action de mandat, puisqu'on suppose le mandat réguliè rement exécuté, d'autant que la faute, s'il y en a une, ne peut être imputée qu'au donneur d'ordre qui devait mettre l'agent en situation de satisfaire aux engagements pris et qui ne saurait être admis à reprocher à son mandataire de lui avoir fait confiance. C'était déjà la solution à laquelle on s'arrêtait sous l'empire de l'arrêté de prairial, et cette solution est d'autant plus certaine aujourd'hui qu'aucun texte de loi, nous le rappelons, n'impose plus à l'agent de change acheteur l'obligation de se faire remettre les fonds avant la négociation. Cass., 13 juill. 1859, Sévelinge, [S. 59.1.545 et la note de G. Dutruc, P. 59.4. 136, D. 59.1.402;9 mars 1885, Dufau, [S. 85.1.241, P. 85.1. 609 Sie, Crépon, n. 184; Ruben de Couder, n. 206. 495. Non seulement l'agent de change a une action en remboursement de ses avances, mais comme gage de ce remboursement, il a le droit de retenir les titres qui lui ont été livrés. Crépon, n. 210.

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496. Ainsi, il a été jugé que l'agent de change qui achète des valeurs à la Bourse ne peut être tenu de se dessaisir, au profit de l'acheteur, des titres achetés, qu'autant que celui-ci lui remet le prix de l'acquisition; et qu'il doit être assimilé à ce point de vue aux créanciers nantis de gages, dont la position est fixée par les art. 546 et 547, C. comm. Metz, 23 juin 1857, syndic Gory, (S. 58.2.328, P. 57.1120, D. 58.2.36] 497. Et il a été jugé, dans le même sens, que l'agent de change a le droit de retenir les titres par lui achetés à la Bourse, jusqu'au paiement du prix d'achat par ses clients, non seulement dans le cas où ceux-ci seraient demeurés solvables, mais même dans l'hypothèse où ils seraient tombés en faillite: ces titres sont en ses mains un gage de sa créance. Même arrêt. – V. aussi Cass., 8 nov. 1854, Maguin, [S. 54.1.753, et la note de Devilleneuve, P. 55.1.1587 Sic, Mollot, n. 602; Ruben de Couder, n. 165.

498. Mais ce droit de rétention est limité à la garantie des avances que l'agent de change a pu faire valablement sur les titres négociés, et n'implique aucune contradiction des droits du propriétaire. Il n'est pas besoin, en effet, de la tradition pour que le mandant devienne propriétaire des titres au porteur achetés pour son compte, il suffit qu'il se soit produit ce qu'on appelle, en langage de bourse, la spécialisation, c'est-à-dire une indication suffisante du lien qui s'est établi entre les titres et la personne pour laquelle ils ont été acquis.

499. Ainsi, il a été jugé que les actions achetées par un agent de change pour le compte d'un client deviennent la propriété de ce dernier, indépendamment de toute livraison, par le seul fait de l'inscription des titres sur les livres de l'agent de change au nom du client, avec désignation de leur origine et de leurs numéros, ces mentions équivalant à une fiche indicative

du nom du propriétaire; attachée sur les titres mêmes. Paris, 6 juill. 1870, Banès, (S. 71.2.207, P. 71.662, D. 71.2.182]

500. Dès lors, ces actions peuvent être revendiquées par le client, lorsqu'elles se trouvent dans la caisse de l'agent de change au moment de sa déconfiture. Paris, 6 juill. 1870, Jalleton, [S. 70.2.234, P. 70.909, D. 71.2.1821; 6 juill. 1870, précité. Sic, Alauzet, t. 2, n. 687.

501. Mais, au cas d'achat d'obligations par un agent de change, on ne peut considérer comme constituant une spécialisation au profit du client, dans le sens donné à ce mot en langage de bourse, le fait, par le commis de l'agent de change, d'avoir indiqué par erreur au client les numéros d'obligations qu'il croyait avoir été achetées pour lui, mais qui, en réalité, l'avaient été pour un autre. Aix, 9 avr. 1870, Jogand, [S. 70. 2.323, P. 70.1184, D. 71.2.58]

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510. C'est ce que décide la Cour de cassation : « Attendu, a-t-elle dit par son arrêt du 8 nov. 1854, que M... pouvait sans doute retenir les actions non payées et se faire autoriser par justice à les revendre dans le cas où leur valeur ne lui serait pas remboursée par son client, mais qu'aucune disposition de la loi n'autorise l'agent de change à aliéner lui-même des effets qu'il ne détenait qu'à titre de dépôt et dont la propriété était irrévocablement acquise à son client. » — Cass., 8 nov. 1854, Magnin, S. 54.1.753, P. 55.1.158]; 13 juin 1883, d'Hauterive, [D. 84.1.2321 Sic, Lyon-Caen et Renault, n. 1528. 511. Par suite, si l'agent revend en baisse, en l'absence d'un ordre, il est responsable envers son client de la perte réalisée sur l'opération. Cass., 8 nov. 1854, précité.

-

512. Il est tenu, en pareil cas, de restituer d'autres titres de même nature, ou d'en payer la valeur au cours, soit du jour de la demande en restitution, soit du jour de la condamnation, au choix du client. - Bordeaux, 3 janv. 1860, Angibous, (S. 60. 2.541, P. 60.660]

513. Jugé spécialement que l'agent de change qui a acheté des valeurs à terme sans recevoir, à titre de couverture, les sommes nécessaires pour la livraison, ne peut revendre ces valeurs sans mise en demeure préalable à son client, d'avoir à en prendre livraison en acquittant le prix; et cela alors même que la cessation de paiements de ce dernier serait alors notoire et sa faillite Paris, 10 mai 1856, Dabrin, [S. 56.2.620, P. 57.

502. En conséquence, ce client ne peut exciper d'une telle erreur pour revendiquer de l'agent de change les obligations portant les numéros indiqués, lesquelles seraient sorties à un tirage au sort donnant droit au remboursement au-dessus du cours. Même arrêt. 503. D'ailleurs, ces obligations ne pouvant, après le tirage, faire l'objet d'une opération de bourse, puisqu'elles ne sont plus susceptibles de hausse ni de baisse, se seraient, même achetées pour le compte du client et dans l'ignorance du tirage, trouvées éteintes et amorties. Le vendeur serait même fondé à les revendiquer entre les mains des tiers porteurs, à la charge de rembourser le prix auquel elles auraient été achetées de bonne foi; et, si ces tiers porteurs ne pouvaient être retrouvés, il aurait un recours utile contre l'agent de change qui les aurait vendues. Même arrêt. 504. imminente. L'inscription sur les livres et sur les bordereaux opère donc certainement spécialisation des titres transmis, s'il s'agit de valeurs au porteur. Pour les valeurs nominatives, on conçoit qu'il y ait plus d'hésitation, car la propriété de pareils titres n'est transférée en réalité au client acheteur, à l'égard des tiers, qu'au moment où le transfert est opéré en son nom. Cass., 19 août 1823, Lacaze, [S. et P. chr.]; 24 juill. 1844, Durand, [S. 44.1.787, P. 44.2.246]; 16 févr. 1848, Grant, [S. 48.1.369, P. 48.1.425, D. 48.1.67] Sic, Galland, Code des transferts, p. 40 et s.; Boistel, p. 429'; Ruben de Couder, n. 276. Cependant, comme l'intérêt de l'agent de change est identique dans les deux hypothèses, nous estimons qu'il est préférable encore de s'en tenir à la même solution.

505. Cette solution nous parait d'autant plus sûre, qu'en enjoignant aux agents de change d'inscrire les numéros des titres sur leurs livres et sur leurs bordereaux (art. 13, L. 15 juin 1872), le législateur paraît avoir manifestement témoigné de son intention de faciliter la spécialisation des titres.

506. Pour les effets du transfert d'ordre, relativement à la propriété des titres, V. infrà, n. 597 et s.

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507. En cas de non envoi des fonds destinés à payer les titres achetés, quels sont les droits de l'agent de change sur le gage? A-t-il la faculté d'exécution, c'est-à-dire peut-il, pour les soins du règlement de l'opération, revendre les titres sans y être autorisé par justice?

508. On l'a soutenu et jugé un délai de cinq jours au plus, a-t-on dit, étant fixé pour la consommation de la négociation, l'agent de change ne doit pas être astreint à mettre son client en demeure de prendre livraison de l'effet acheté pour son compte. Le client est mis en demeure par la loi. S'il fallait que l'agent de change recourut à une demande judiciaire, puis à un jugement définitif pour obtenir l'autorisation de revendre, le temps lui manquerait, et des frais considérables lui seraient imposés Paris, 7 mars 1811, Delaunay, [S. et P. chr.]; 9 juin 1836, Mène, [S. 37.2.85, P. chr.]; 21 juin 1836, Drucker, S. 36.2.545, P. 37.1.331; 18 janv. 1838, Bardet, [S. 39.2.145, P. 38.1.133; 24 févr. 1857, Mercier, S. 57.2.201, P. 57.367, D. 57.2.134 - Sic, Mollot, n. 183; Bédarride, n. 309; Guillard, p. 500 et s.; Ruben de Couder, n. 167.

509. Cette opinion est, croyons-nous, trop absolue. Il faut distinguer entre le cas où les titres ont été remis à l'agent de change par son client avant l'opération, à titre de couverture, et le cas où ces titres ont été livrés avant l'opération, sur paiement avancé par l'agent de change que son client n'avait pas nanti des fonds nécessaires pour payer. Dans le premier cas, nous expliquerons plus loin (V. infra, n. 526), comment, par suite de la nature même du contrat de couverture, les titres sont à la dis

301, D. 57.2.2]; - 10 mai 1856, Courpon, [Ibid.]
514. Et, en un tel cas, la déclaration faite par l'acheteur
depuis sa faillite, qu'il avait donné ordre à l'agent de change de
revendre ne saurait dispenser de la preuve d'une mise en de-
meure. - Mêmes arrêts.

515. Est-ce à dire qu'une mise en demeure régulière soit toujours nécessaire pour autoriser l'agent de change à opérer la revente? Nous ne le pensons pas. Nous estimons, au contraire, que le consentement du client pourra valablement suppléer à cette mise en demeure. Et nous pensons même que la manifestation de ce consentement ne sera assujettie à aucune règle précise. Il faut tenir compte, en effet, des usages de la Bourse et des exigences du marché financier, et il est impossible de méconnaitre que ces usages s'accommoderaient difficilement des formalités de justice et des délais qu'elles entraînent. Aussi ne sommes-nous pas éloignés de penser qu'une adhésion, même tacite, serait suffisante, comme par exemple au cas où l'agent de change ayant donné avis à son client de l'achat opéré pour son compte, et l'ayant invité à lui faire parvenir les fonds nécessaires pour effectuer le paiement sous peine de poursuivre la revente de ses titres, celui-ci se serait abstenu de répondre à son avertissement et de lui envoyer aucune somme d'argent. La jurisprudence, au surplus, parait être fixée en ce sens.

516. C'est ainsi qu'il a été jugé que la mise en demeure qu'un agent de change doit adresser à son client, avant de revendre les valeurs pour lui achetées, peut résulter d'une simple lettre, et que le silence gardé après la réception de l'avis donné peut autoriser l'agent à procéder à la revente. Paris, 24 févr. 1857, précité.

-...

517.- Que la ratification des actes accomplis par un mandataire au delà de son mandat n'étant pas assujettie aux formes et conditions exigées par l'art. 1338, C. civ., mais seulement aux prescriptions de l'art. 1998, et pouvant, par suite, résulter de tous actes et circonstances annonçant une volonté certaine d'approuver ce qui a été fait par le mandataire au delà de ses pouvoirs, les juges ne font qu'user légitimement de leur droit d'appréciation en voyant, dans l'avis donné par un agent de change de la revente de titres faite sans mise en demeure régulière, dans l'absence de protestation du client et des actes subséquents, la volonté d'acquiescer à l'opération effectuée. Cass., 13 juin 1883, précité.

518. Ce que nous venons de dire s'applique toutefois plus particulièrement aux marchés au comptant, c'est-à-dire aux opérations dans lesquelles il y a achat devant aboutir à la livraison des titres et au paiement des titres livrés sur avances de l'agent de change, en l'absence de fonds envoyés à temps par le

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D'autre part, en l'absence de remise de fonds, on ne saurait imposer à l'agent de change, intermédiaire nécessaire quand il s'agit d'opérations à effectuer sur des valeurs cotées, les risques souvent considérables de ces opérations dont la loi le déclare responsable. Le moyen de concilier les intérêts du client et de l'agent, se trouve dans la remise de ce qu'on appelle une couverture. 521.

526. La vérité, à nos yeux, est que la convention par laquelle un client remet à un agent de change un certaine somme pour le garantir des risques que peut lui faire courir une opération de cette nature est une convention sui generis, qu'on ne peut expliquer que par l'intention commune des parties et par les usages de la Bourse, et qu'elle se réduit, à permettre à l'agent de change de disposer de ces sommes pour le cas où certaines éventualités viendraient à se réaliser, et cela sans avoir recours aux formalités préalables ordinairement usitées. Bien qu'on ne puisse guère consulter sur ce point que des arrêts rendus sous l'empire d'une législation qui ordonnait tout à la fois à l'agent de change de se nantir avant l'opération des fonds nécessaires pour la règler et le laissait sous la menace de l'exception de jeu, on voit qu'ils accusaient une tendance de plus en

La couverture n'est autre chose que le dépôt effec-plus marquée à régler le contrat d'après la volonté présumée des tué par le client entre les mains de l'agent, de valeurs ou d'une somme présumées suffisantes pour couvrir les différences qui peuvent exister au moment de la liquidation des opérations.

522. Il est certain que l'agent de change a sur cette somme ainsi déposée un certain droit de disposition, puisque l'intention commune des parties est précisément de le mettre en garde contre les éventualités de la négociation aléatoire qu'il consent à passer. Mais comme l'étendue du droit de disposition qu'on peut avoir sur une chose varie avec la nature du titre qui le confère et que l'intérêt du client et de l'agent sont la plupart du temps contradictoires, il importait de préciser avec soin la nature des droits que pouvait avoir l'agent de change. Plusieurs systèmes à cet égard se sont fait jour: selon les uns l'agent de change serait propriétaire des sommes à lui remises à titre de couverture; selon les autres, il en serait créancier gagiste; dans une troisième opinion enfin, la couverture ne constituerait qu'un paiement anticipé.

523. Nous n'admettrons, pour notre part, aucun de ces trois systèmes. Il est un point d'abord qui nous parait hors de doute, c'est que la couverture ne saurait conférer à l'agent de change un droit de propriété sur les sommes ou valeurs dont elle se compose. Rien ne serait moins conforme, en effet, à la volonté présumée des parties que la constitution d'un état de choses définitif pour une opération aussi incertaine et rien ne serait moins conforme non plus, à la nature de cette opération. Aussi a-t-on décidé avec raison que si les valeurs remises en dépôt entre les mains de l'agent venaient à se déprécier avant la conclusion du marché, la perte devrait en être supportée par le client en vertu du principe Res perit domino. Mollot, n. 178. 524. Nous ne pensons pas davantage et pour des raisons analogues, qu'on puisse rattacher la remise des sommes ou valeurs entre les mains de l'agent de change à l'idée de gage ou de nantissement. Le gage, en effet, d'après l'art. 2079, C. civ., n'est, dans les mains du créancier, qu'un dépôt lui assurant un privilège sur la chose déposée. La réalisation, d'autre part, n'en peut avoir lieu par le créancier que sur ordre du juge, si le gage est civil, et, si le gage est commercial, que huit jours après une simple signification faite au débiteur. Or, tout cela est en pleine contradiction avec ce qu'ont entendu faire les parties contractantes qui, loin de vouloir se soumettre aux délais, s'exposer aux entraves qui sont la conséquence forcée des formalités de justice, n'ont eu en vue que les moyens de satisfaire aux exigences que pouvait amener la liquidation des opérations à effec

tuer.

525. A fortiori, ne saurions-nous admettre que la couverture constitue un paiement anticipé; on ne paie, en effet, par anticipation que ce qui sera dù à une échéance à venir; or, ici, non seulement on ne sait pas si l'on devra, mais on espère même ne pas devoir, l'opération étant faite, non en vue d'une perte, mais en vue d'un gain. Il est vrai que la doctrine du paiement anticipé a été consacrée par un certain nombre d'arrêts; mais c'était à une époque où les marchés à terme n'étaient pas reconnus et on conçoit que sous l'empire de cette législation il pouvait être nécessaire de protéger les agents de change contre la mauvaise foi de spéculateurs qui prétendaient trouver dans l'exception de jeu, non seulement un moyen de ne pas tenir les engagements pris pour leur compte, mais encore un moyen de se faire restituer la couverture par eux remise. Or, aujourd'hui, que la loi du 28 mars 1885 a reconnu la validité des marchés à terme, on ne voit pas pourquoi on chercherait dans des circonstances extrinsèques l'explication d'un fait juridique qu'il est possible d'analyser en lui-même.

parties en reconnaissant toutefois à l'agent de change un véritable droit de disposition sur la couverture.

527. C'est ainsi qu'il a été jugé que l'agent de change auquel l'un de ses clients a remis des effets au porteur, à titre de couverture, pour garantie de marchés à terme, peut disposer de ces effets sans autorisation de justice, si son commettant ne fait pas les fonds au jour de la livraison des rentes achetées pour son compte. Paris, 21 juin 1836, Brucker, [S. 36.2.545, P.

...

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chr. 528. . Sauf à ne pouvoir appliquer le prix provenant de la vente de ces effets qu'au remboursement de sa créance liquidée, et non à celle dont la liquidation n'est pas et ne doit pas encore être faite. - Paris, 18 janv. 1838, Bardet, [S. 39.2.145, P. 38. 1.133]

529. Que l'agent de change a un droit de rétention absolu sur les valeurs des couvertures qu'il doit exiger et qui lui ont été fournies en exécution de l'arrêté du 27 prair. an X; tellement que la faillite postérieure du client ne modifie aucunement ce droit de rétention; que les sommes par lui retenues lors d'un arrêté de compte avec son client, avant la liquidation des opérations effectuées, ne sont pas sujettes à répétition, quoique le jour de l'ouverture de la faillite ait été reporté à une époque antérieure. Paris, 28 févr. 1857, Moreau, [S. 57.2.387, P. 37. 1034]

...

530.- Mais qu'il n'a pas le droit de retenir, en garantie des avances qu'il a faites pour ses clients, des valeurs appartenant à ceux-ci, et qui se trouvent entre ses mains, à moins que ces valeurs ne lui aient été remises à titre de couverture. — Rênnes, 24 août 1859, Archdeacon, [S. 60.2.36, P. 60.856]

531. Que l'art. 1967, C. civ., qui refuse au perdant le droit de répéter ce qu'il a volontairement payé s'applique au paiement des dettes résultant de jeux de Bourse, et que les sommes payées à un agent de change pour dettes de cette na.ture et qui lui avaient été remises, non à titre de dépôt, mais à titre de couverture, doivent être considérées comme un paiement volontaire. Cass., 24 juill. 1866, Lemée, [S. 67.1.24, P. 67.33, D. 66.1.387 Paris, 19 janv. 1867, Stique, [S. 67.2.87, P. 67.445]

532.

Qu'un agent de change peut disposer des valeurs qui lui ont été remises par son client, si elles ne lui ont pas été remises à titre de dépôt, mais en compte et pour être portées au crédit du remettant, en déduction de sa dette. Cass., 26 août 1868, Delbosc, [S. 69.1.20, P. 69.30, D. 68.1.439] V. infrà, vo Effets publics.

...

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533. Que les juges du fond peuvent, par une appréciation souveraine de l'intention des parties, décider que des sommes remises à un agent de change, à titre de couverture, c'est-à-dire, pour le garantir des risques que comportaient les opérations de jeu sur les fonds publics entreprises pour le compte de son client, constituaient, de la part de ce dernier, un paiement volontaire des différences dont il était devenu débiteur, par suite du résultat des opérations. - Cass., 4 août 1880, X..., [D. 81. 1.113]

354.- Que lorsque ces constatations ont été faites, toute action en répétition des sommes remises à l'agent de change à titre de couverture est justement refusée au client, que la couverture lui ait été remise en espèces ou qu'elle ait consisté en des valeurs au porteur. Cass., 27 nov. 1882, Adam, [S. 83.1. 211, P. 83.1.511, D. 83.1.199]

535.- Cette dernière solution mérite d'être particulièrement remarquée. En effet, d'après ce que nous avons exposé, il semble qu'il ne puisse s'élever de difficultés sur le droit, pour l'a

gent de change, de disposer de la couverture, quand elle consiste en une somme d'argent; mais la question peut paraître plus délicate quand, au lieu d'espèces, ce sont des valeurs qui lui ont été remises. L'agent a-t-il le droit de réaliser ces valeurs sans le consentement de son client, tout au moins, sans une mise en demeure? A quel moment peut-il être autorisé à les réaliser? Toutes ces questions, en définitive, sont dominées par la nature du contrat, par l'intention des parties et les conditions en prévision desquelles elles ont contracté. Or, comme il est bien évident que l'intention des parties est que si, à un moment donné, l'opération ne donne pas les résultats espérés, l'agent de change, pour la régler, aura le droit de se servir des valeurs qui lui ont été livrées à cet effet, et qu'on ne peut en faire usage pour ce règlement qu'en les réalisant sans retard, c'est avec raison, croyonsnous, qu'on lui reconnait la faculté de disposer de ces valeurs comme on lui reconnait celle de disposer des sommes qu'il a pu recevoir directement pour cet objet.

536. Faudrait-il adopter une solution différente dans le cas où les valeurs remises à titre de couverture, au lieu d'être au porteur, seraient nominatives? Nous ne le pensons pas. Nous avons déjà dit que le contrat de couverture ne comporte pas une translation de propriété des sommes ou valeurs remises à l'agent de change, mais une simple mise à sa disposition en vue d'éventualités déterminées. Ces éventualités venant à se produire, pourquoi l'agent de change serait-il empèché par le caractère nominatif des valeurs de les réaliser? Des valeurs nominatives se réalisent tout aussi facilement que des valeurs au porteur, et il n'y a, conséquemment, aucun motif de ne pas laisser la convention s'exécuter telle qu'elle a été conclue, c'està-dire de ne pas permettre à l'agent de se procurer les fonds nécessaires à l'aide des valeurs qui sont entre ses mains.

537. Jugé en ce sens que la remise entre les mains des agents de change, pour couverture, d'un certificat de dépôt à la Banque d'actions au porteur, équivaut à la remise des actions mêmes et en produit tous les effets entre les parties. Paris, 6 nov. 1863, de Boishardy, [J. des trib. de comm., t. 13, n. 46931

538. Il est bien évident au surplus que des stipulations particulières peuvent modifier les conditions du contrat de couverture. C'est ainsi qu'il a été jugé que l'agent de change à qui des actions de chemin de fer sont remises en nantissement de leur prix, dont il a fait l'avance, avec mandat de les vendre au comptant, sous condition de report, c'est-à-dire avec la faculté de les racheter à terme, n'acquiert pas sur ces actions, par l'effet de cette vente, des droits plus étendus que ceux résultant du nantissement. Par suite, il ne peut, après les avoir rachetées à terme, les revendre pour son propre compte, avant d'avoir mis son client en demeure de lui rembourser la valeur pour laquelle elles servent de nantissement. Cass., 14 juill. 1857, Gærg, S. 58.1.202, P. 58.938, D. 57.1.436]

539. Ajoutons qu'il ne faut pas confondre la réalisation des valeurs qui auraient été remises à l'agent de change à titre de couverture avec la revente qui serait faite par l'agent, avant l'échéance du terme, des valeurs achetées pour le compte de son client. Ces exécutions, qui sont dans les usages de la Bourse, ont lieu lorsque des variations trop brusques venant à se produire dans les cours, l'agent craint que la couverture à lui donnée ne soit insuffisante pour le garantir de tous risques. Ces exécutions avant l'échéance du terme sont-elles légales? Nous ne le pensons pas. On a essayé de les défendre à l'aide de cousidérations tirées des nécessités du marché à de certains jours, des ruines qui pourraient être la conséquence de la moindre perte de temps. Nous avons montré que nous étions disposés à tenir grandement compte de ces nécessités du marché; toutefois, il ne faut pas abuser de cet ordre de considérations jusqu'à les faire passer avant les principes qui régissent les contrats. Or, nous rappelons qu'à moins de réserves spéciales et contraires, l'agent de change s'est directement obligé à effectuer, pour le compte de son client, une opération qui ne doit se liquider qu'à une date déterminée; on ne concevait donc pas qu'il put, sans le consentement de l'autre partie, changer la date et liquider l'opération plus tôt qu'il n'avait été convenu, sous prétexte de risques qu'il a dù prévoir.

540.- Il a été jugé en ce sens que l'agent de change qui a acheté des valeurs à terme sans recevoir, à titre de couverture, la somme nécessaire pour la livraison, ne peut revendre ces valeurs sans mise en demeure préalable faite à son client d'avoir

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22 juin 1882, d'Hauterive, [S. 83.2.203, P. 83.1.1001] 541. Mais le client est irrecevable à opposer la nullité de cette exécution arbitraire si, par une ratification postérieure, il en a couvert l'irrégularité. Même arrêt.

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542. La mème solution devrait être donnée pour le cas où un report serait fait d'office par l'agent de change dans une opération engagée avant la précédente liquidation, et qui aurait dù être réglée avant cette liquidation. Si l'opération n'était pas acceptée par le client, et qu'elle se traduisit par de nouvelles pertes, l'agent de change nous paraîtrait grandement exposé à ce que ces pertes fussent laissées à sa charge. 543. C'est ainsi qu'il a été jugé qu'un agent de change ne peut d'office reporter une opération à terme faite pour son client, sous le prétexte que celui-ci était absent au moment de la liquidation; que le report ne produit d'effet vis-à-vis du client qu'autant qu'il a été précédé de l'autorisation expresse ou tacite de ce dernier; que la preuve de cette autorisation tacite, qui est à la charge de l'agent de change, ne saurait être présumée, lorsque le client a protesté contre le report, à l'expiration de la quinzaine. Lyon, 16 janv. 1884, [D. 85.2.207]

544. Terminons, en ce qui concerne la responsabilité de l'agent de change acheteur vis à-vis de l'agent de change vendeur, par cette observation que l'agent acheteur ne pourrait point s'exonérer de la responsabilité qui lui incombe quant au paiement, en faisant connaître le nom de son mandant. Ce nom, en effet, doit rester inconnu; et aucun lien de droit n'ayant été créé entre l'agent vendeur et le commettant de l'agent acheteur il est naturel qu'aucun droit d'action ne puisse exister du vendeur contre

ce commettant.

545.Jugé, à cet égard, que l'opération de bourse consommée entre agents de change ne fait naitre d'obligations qu'entre eux; le vendeur et l'acheteur ne peuvent donc avoir d'action directe l'un contre l'autre, mais seulement contre les agents de change qui seuls ont consommé le marché. — Cass., 3 mai 1887, Crédit Lyonnais, [D. 87.1.196]

546. Nous arrivons à un autre terme de l'opération : l'agent de change vendeur doit verser à son commettant le prix qu'il a reçu de l'agent de change acheteur. 547. De même que l'agent acheteur qui a les fonds nécessaires pour payer doit faire toutes diligences pour que les titres soient livrés dans les délais réglementaires, de même l'agent vendeur qui peut livrer les titres doit faire toutes diligences pour en toucher le prix dans les jours où la livraison et le paiement doivent être effectués. Ces jours écoulés, sans que ces diligences aient été faites et sans que le prix ait été touché, l'agent vendeur serait responsable vis-à-vis de son client de l'état d'insolvabilité dans lequel aurait pu tomber l'agent acheteur. - Crépon, n. 219.

548. - Jugé que l'agent de change qui a livré, sans en être payé, les titres d'actions qu'il a été chargé de négocier, est responsable du prix de ces actions envers son client, dans le cas où, par suite de la disparition de l'acheteur, ce prix n'est pas payé par ce dernier. Vainement il offrirait de rendre seulement un pareil nombre d'actions semblables à celles qu'il a livrées (C. civ., art. 1382 et 1392). Cass., 6 févr. 1818, Vandermarcq, [S. 48.1.292, P. 48.1.428, D. 48.1.158] Sie, Mollot, n. 518 et 519; Buchère, Opérat. de bourse, n. 703.

549. L'agent de change vendeur, lorsqu'il a touché le prix des titres, doit, disons-nous, le remettre à son commettant. Aucun délai sans doute n'est imparti par les règlements pour cette remise; mais il est bien évident qu'elle doit avoir lieu sans aucun retard, soit par envoi immédiat des fonds, soit par versement aux mains du client.

550. Toutefois, il n'en peut être ainsi qu'autant que, par suite d'opérations antérieures, il n'y a pas de compte à faire entre l'agent de change et son commettant. Si ce compte existe, et si en conséquence d'avances par lui précédemment faites, l'agent se trouve créancier de son mandant, il a incontestablement le droit de retenir, pour se rembourser de sa créance, tout ou partie des sommes versées en paiement des derniers titres vendus. Crépon, n. 220.

551. — Il a été jugé, il est vrai, que l'agent de change n'est pas autorisé à opposer en compensation avec le prix d'effets par lui vendus les sommes avancées pour son client; mais ces décisions qui ne sont intervenues qu'à l'occasion d'opérations quali

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