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SECTION IV.

Pouvoirs de l'autorité chargée de donner l'alignement.

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590.- Un principe fondamental, en cette matière, c'est que l'autorité compétente pour délivrer l'alignement, n'a pas le droit de le refuser au riverain qui lui demande. Cons. d'Et., 2 mai 1861, Letellier-Delafosse, [S. 61.2.368, P. adm. chr., D. 61.3. 36;22 janv. 1863, de la Moskowa, S. 63.2.24, P. adm. chr., D. 63.3.1]; 11 janv. 1866, Chavannes, [S. 66.2.335, P. adm. chr., D. 66.3.70]; 23 janv. 1868, Vogt, [S. 68.2.236, P. adm. chr., D. 68.3.69]; 18 mars 1868, Labille, [P. adm. chr., D. 70 3 20]; 11 juill. 1879, Ville d'Alger, [S. 81 3.9, P. adm. chr., D. 80.3.18] Sic, Delanney, p. 196; Frémy-Ligneville et Perriquet, t. 1, n. 303; Aucoc, t. 3, n. 1051; Féraud-Giraud, Servit. de voirie, t. 1, n. 86.

591. L'autorité administrative ne peut même pas ajourner sa réponse en s'appuyant sur ce que des projets actuellement à l'étude engloberaient la parcelle sur laquelle le riverain veut construire. Cons. d'Et., 31 août 1861, Diquet et Testard, [S. 62.2.496, P. adm. chr., D. 61.5.532]; 11 janv 1866, précité;

23 janv. 1868, précité; 11 juill. 1879, précité; 12 janv. 1883, Matussière, D. 84.3.76];-23 févr. 1883, Dame Greletty, [S. 85.3.6, P. adm. chr.]; -16 juill. 1886, Consorts Ruty, [Leb. chr., p. 614, D. 84.3.77] Sic, Delanney, p. 197; Aucoc, t. 3, n. 1051. V. suprà, n. 40 et 41. 592. - D'une façon générale, l'autorité administrative, qui peut user de ses pouvoirs dans le but d'assurer la salubrité et la sécurité publiques dans l'intérêt général des habitants, ne peut au contraire en user au profit d'une commune. Aussi le préfet ou le maire commet-il un excès de pouvoir lorsqu'il refuse l'alignement dans le but unique de ménager les intérêts financiers d'une commune qui se propose d'exproprier prochainement l'immeuble. Cons. d'Et., 18 juill. 1873, Lemarié, (S. 75.2.190, P. adm. chr., D. 74.3.91]; - 11 juill. 1879, précité; 30 juill.

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1880, Gallian, [D. 81.3.80] 593. Mais si l'autorité administrative ne peut refuser l'alignement, même dans l'hypothèse d'une expropriation prochaine, le propriétaire qui persiste dans son intention de construire bâtit à ses risques et périls et le jury d'expropriation peut, en fixant l'indemnité, lui appliquer l'art. 52, L. 3 mai 1841, d'après lequel, s'il acquiert la conviction que les constructions n'ont été faites que dans le but d'obtenir une indemnité plus élevée, il n'est pas tenu compte de cette amélioration. Aucoc, t. 3, n. 1051. 594. Lorsque le fonctionnaire auquel appartient le droit de donner l'alignement se refuse à le délivrer, le recours à l'autorité supérieure est ouvert. Si, par exemple, le préfet refuse de délivrer l'alignement, il faut s'adresser au ministre qui désignera le fonctionnaire appelé par la loi à remplacer le préfet au cas d'empêchement. Si c'est le maire, le préfet pourra donner l'alignement lui-même ou le faire donner par un délégué spécial. Cass., 14 févr. 1874, Mandère, [D. 74.1.280] Cons. d'Et., 22 janv. 1875, Ville d'Alger, [S. 76.2.278, P. adm. chr., D. 75.3. 98]; 16 juill. 1886, précité. Sic, Frémy-Ligneville et Perriquet, t. 1, n. 303; Delanney, p. 196; Gillon et Stourm, n. 227; Féraud-Giraud, Servit. de voirie, t. 1, n. 86.

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Dumay, sur Proudhon, t. 2, p. 512; Féraud-Giraud, Servit. de voirie, t. 1, n. 87. · Contrà, Gillon et Stourm, n. 227. 598. Il en est ainsi, notamment, lorsqu'un préfet, en vue d'un travail public auquel il a été postérieurement renoncé, a refusé pendant deux ans l'autorisation de reconstruire un mur mitoyen et que l'atteinte portée par ce retard à la solidité du bâtiment en a ensuite rendu nécessaire la démolition pour cause de péril imminent. Cons. d'Et, 18 juill. 1873. 599. ... Et, lorsque l'autorité administrative, après avoir refusé l'alignement, a aussi refusé au propriétaire de prendre les mesures nécessaires pour arriver immédiatement à l'expropriation. Cons. d'Et., 18 mars 1868, précité.

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600. Mais un propriétaire ne peut réclamer aucune indemnité à raison du retard apporté par l'administration à la délivrance d'une permission de bâtir, lorsqu'il résulte des circonstances de l'affaire que l'administration n'est pas responsable de ce retard. Cons. d'Et., 30 mai 1884, Valette, [D. 86.3.11]; · 4 juill. 1884, Harlingue, [S. 86.3.23, P. adm. chr., D. 86.3.11] 601. Par exemple, lorsque ce retard provient de ce que le propriétaire, informé de l'existence d'un projet de prolongement d'une rue devant atteindre son terrain, à modifié ses dispositions et soumis de nouveaux plans à l'examen de l'autorité supérieure. Cons. d'Et., 4 juill. 1884, précité.

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603. Puis le Conseil d'Etat a décidé d'une façon constante qu'une telle demande était de la compétence exclusive des tribunaux de l'ordre administratif, les tribunaux judiciaires ne pouvant connaître des actes administratifs. Cons. d'Et., 19 déc. 1838, Hédé, [S. 39.2.548]; 19 déc. 1867, Herran, [S. 68.2. 293, P. adm. chr., D. 70.3.20]; 18 mars 1868, précité; 18 juill. 1873, précité;-23 janv. 1874, Bremond de Saint-Paul, [Leb. chr., p. 88]; 11 juill. 1879, précité; - 5 avr. 1889, précité. Dans le même sens, Paris, 17 août 1860, Labille, [D. 60. 5.421] Aucoc, t. 3, n. 1076; Delanney, p. 198; Féraud-Giraud, Servit. de voirie, t. 1, n. 88; Frémy-Ligneville et Perriquet, t. 1, n. 303; Féraud-Giraud, Voirie urb., n. 194.

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605. — En délivrant l'autorisation, l'agent administratif ne peut imposer au propriétaire des conditions autres que celles établies par les lois, dans un intérêt de voirie; toute autre devrait être tenue pour non écrite. Cons. d'Et., 17 avr. 1869, Tabardel, [S. 69.2.219, P. adm. chr, D. 70.3.22] - Sic, Batbie, t. 6, n. 44; Aucoc, t. 3, n. 1052; Féraud-Giraud, Servit. de voirie, t. 1, n. 79; Delanney, p. 199.

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595. Enfin lorsque l'intéressé n'obtient pas satisfaction 606. la voie administrative, il peut introduire un recours devant par le Conseil d'Etat pour excès de pouvoir (L. 7-14 oct. 1790; L. 24 mai 1872, art. 9). Cons. d'Et., 2 mai 1861, précité; - 23 janv. 1868, précité; 26 mai 1869, Labille, [D. 70.3.69] · Sic, Delanney, p. 196.

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596. En dehors du recours à l'autorité supérieure et au Conseil d'Etat pour excès de pouvoir, le propriétaire auquel l'administration refuse l'alignement ne peut user d'aucune autre voie de recours. Ainsi il ne saurait demander au conseil de préfecture ou à l'autorité judiciaire de prescrire au maire de délivrer l'alignement. Trib. confl., 18 mars 1882, Gallian, [S. 84.3. 19, P. adm. chr., D. 83.3.84] 597. En principe, le dommage résultant du refus de l'alignement ou du retard dans sa délivrance est de nature à donner ouverture à une indemnité. Cons. d'Et., 18 mars 1868, Labille, [P. adm. chr., D. 70.3.20]; 26 mai 1869, précité; - 18 juill. 1873, Lemarié, (S. 75.2.190, P. adm. chr., D. 74.3.91];

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11 juill. 1879, précité; 5 avr. 1889, Ville de Pamiers, [S. 91.3.46, P. adm. chr., D. 90.3.72] Sic, Frémy-Ligneville et Perriquet, loc. cit.; Delanney, p. 198; Aucoc, t. 3, n. 1076; RÉPERTOIRE. Tome III.

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La jurisprudence a fait de ce principe de fréquentes applications. Jugé qu'il y aurait excès de pouvoir à imposer au riverain l'obligation de construire en façade sur la voie, s'il veut construire en arrière, ou de construire en retrait, s'il veut établir sa maison sur l'alignement même. Cons. d'Et., 6 déc. 1844, Taque [S. 45.2.188, P. adm. chr., D. 45.3.98]; - 14 mars 1845, Fagot, P. adm. chr., D. 45.3.128]- Sic, Delanney, p. 199; Aucoc, t. 3, n. 1052. 607. Ou à imposer au propriétaire des conditions qui auraient pour effet de prononcer sur des questions de servitude et d'application des lois et règlements en matière de grande voirie. Cons. d'Et., 15 déc. 1859, Klein, [S. 60.2.497, P. adm. chr., D. 63.3.40] V. infrà, vo Chemin de fer, n. 1108. 608. Telle serait la clause d'un arrêté d'alignement portant que, dans le cas où un cours d'eau non navigable avoisinant la maison à laquelle cet arrêté s'applique viendrait à être couvert, le propriétaire et les locataires de la maison ne pourront réclamer d'indemnité pour privation de l'usage des eaux. Cons. d'Et., 17 avr. 1869, précité.

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vir de champ de foire a le caractère d'une voie publique, le maire commet un excès de pouvoir en insérant dans un arrêté d'alignement délivré à un riverain, une clause lui interdisant d'ouvrir, dans les constructions projetées, des portes donnant accès sur ledit terrain. - Cons. d'Et., 20 avr. 1888, Folichon, (S. 90.3.25, P. adm. chr., D. 89.3.798]

610. Le préfet ne pourrait non plus sans excès de pouvoir insérer dans l'arrêté d'alignement des clauses qui auraient pour objet de trancher un litige sur une question de propriété. Cons. d'Et., 17 janv. 1890, Dufresne, [S. et P. 92.3.44]

611. L'autorité administrative ne peut non plus, en accordant l'alignement qui lui est demandé dans la limite des règlements, imposer au pétitionnaire des conditions à l'avantage de la Paris, 5 mars 1869, sous Cass., 7 févr. 1870, Ville de Paris, S. 70.1.290, P. 70.753]

commune.

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612. Le maire ne saurait par exemple, en délivrant un alignement, obliger, par une clause spéciale, le permissionnaire à exécuter un contrat intervenu entre lui et la commune, et notamment lui interdire, conformément à une transaction, de pratiquer des ouvertures dans le mur de face. Cons. d'Et., 25 juin 1880, Chabaud et Mille, [S. 82.3.2, P. adm. chr., D. 81.3. 331

613. - ... Ou prescrire qu'il ne prendra possession d'une parcelle confinant à l'alignement qu'après avoir obtenu l'autorisation du conseil municipal, et après s'être engagé à rembourser certaines dépenses à la commune. Cons. d'Et., 8 août 1892, de Molembaix, [S. et P. 94.3.74]

614. De ce que les arrêtés préfectoraux portant délivrance d'alignement ne doivent avoir d'autre objet que d'assurer l'exécution des lois et règlements sur la voirie, il suit qu'ils ne peuvent contenir des dispositions réglant les rapports de voisinage entre les propriétaires. - Cons. d'Et., 1er juill. 1869, Le Brun de Blou, [S. 69.2.339, P. adm. chr., D. 70.3.21] — V. infrà', vo Chemin de fer, n. 1109 et 1110.

615. D'autre part, l'administration ne pourrait subordonner la délivrance d'un alignement à la condition qu'un propriétaire renoncera au droit de former une demande d'indemnité contre la ville, pour le cas où l'exécution d'un plan définitif de nivellement, non encore arrêté, entraînerait des déblais et des remblais le long de sa construction. Cette clause, insérée dans l'arrêté d'alignement, ne ferait pas obstacle à ce que le proprié taire fit valoir ultérieurement le droit qu'il pourrait avoir à une indemnité, à raison du dommage que lui ferait éprouver l'abaissement du sol des rues au-devant de son immeuble. - Cons. d'Et., 23 juill. 1868, Ville de Marseille, [S. 69.2.224, P. adm. chr.] V. infrà, vis Travaux publics, Voirie.

616. — Il a été également décidé que l'administration ne peut insérer, dans la permission, des réserves paraissant impliquer une renonciation anticipée, par le propriétaire à tout ou partie de l'indemnité qu'il pourra réclamer à raison de l'expropriation des nouvelles constructions. Cons. d'Et., 23 janv. 1868, Terravalieu, [S. 68.2.236, P. adm. chr., D. 68.3.69]

617. Le préfet auquel une autorisation de construire est demandée par le propriétaire d'un terrain longeant la voie publique, ne peut subordonner cette autorisation à l'acquisition, par ce dernier, d'un terrain désigné comme retranché de la voie publique, s'il n'existe aucun plan régulièrement arrêté par suite duquel ce retranchement doive s'opérer. Cons. d'Et., 22 nov. 1866, Guéret, [S. 67.2.303, P. adm. chr.]

618. L'obligation de bâtir suivant un plan uniforme n'existe plus dans notre législation. Une simple décision administrative ne saurait imposer une charge de cette nature, qui ne peut être édictée que par une loi. S'il existe en fait des rues dont les maisons sont construites d'après un modèle uniforme, cela tient à des circonstances tout exceptionnelles. Ainsi, à Paris, l'administration était propriétaire des terrains bordant la rue de Rivoli; elle a pu, dans l'acte de vente, stipuler des acquéreurs qu'ils construiraient suivant un type uniforme. Au bois de Vincennes, à Saint-Maurice notamment, la ville, pour une raison analogue, a pu soumettre les acquéreurs à l'obligation de n'élever aucune construction excédant douze mètres de hauteur, et à une distance minima de trois mètres d'une grille uniforme construite à la limite des fonds. A Orléans, elle a atteint le même résultat au moyen de subventions accordées aux propriétaires de la rue Jeanne-d'Arc. Il en a été de même à Rennes, pour la place du Palais. Dans ces cas, il est à noter que l'infraction aux conditions de cette nature, ne saurait constituer une contraven

tion de grande voirie; es voies civiles permettent seules à l'administration de sanctionner les engagements contractés par les propriétaires. Cons. d'Et., 1er déc. 1859, Meusnier, [P. adm. chr., D. 59.3.85]; — 19 juin 1863, Minel, [S. 63.2.270, P. adm. chr., D. 63.3.61]

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619. De même, il serait illégal d'exiger d'un propriétaire, qui demande à réparer une maison le long de la voie publique, qu'il respecte les formes artistiques, les décorations architecturales qu'elle présente; l'insertion dans l'arrêté d'autorisation d'une pareille condition constituerait un excès de pouvoir flagrant. Une législation spéciale a été édictée dans le but de conserver les monuments historiques (V. suprà, vo Beaux-Arts, n. 207 et s.); ce serait le cas de l'appliquer. Cass., 13 janv. 1844, Manigold, (S. 44.1.638, P. 44.2.473, D. 45.5.536] — Cons. d'Et., 7 avr. 1859, Delondres, [S. 60.2.63, P. adm. chr., D. 59.3.75] -Sie, Aucoc, t. 3, n. 1052; Frémy-Ligneville et Perriquet, t. 1, n. 249; Delanney, p. 199.

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620. L'arrêté d'alignement ne peut fixer au propriétaire une hauteur déterminée, du moins en thèse générale. Il faut, pourtant, admettre une exception pour Paris et pour les villes auxquelles le décret du 26 mars 1852 a été étendu; là, en effet, l'administration a le droit de fixer la hauteur des maisons d'après la largeur des rues (Décr. 26 mars 1852, art. 7; Décr. 23 juill. 1884). - V. infrà, vis Paris (Ville de), Voirie.

621. Du reste, en ce qui concerne spécialement les villes, il est dérogé en plusieurs autres points au principe qui vient d'être posé. Ainsi, le préfet de la Seine peut notamment refuser de laisser bâtir les façades en pans de bois. V. infrà, vo Paris (Ville de).

622. Mais, ce que le maire ne peut faire dans l'arrêté d'alignement individuel en vertu des pouvoirs qu'il tient de la loi en matière de voirie, il peut le faire à l'aide d'un règlement municipal général. Le maire, en effet, qui est chargé de veiller à la sûreté et à la sécurité publiques, peut prendre, en vertu de la loi des 16-24 août 1790, tit. 2, et de la loi du 5 avr. 1884, des arrê tés pour prohiber ou prescrire l'emploi de certains matériaux, et interdire l'édification des constructions au delà d'une certaine hauteur. Mais c'est là une mesure de police étrangère aux règlements sur la voirie. Cass., 23 avr. 1819, Lerasle, [S. et P. chr.]; - 29 déc. 1820, Commune de Fousseret, [S. et P. chr.]; 11 mars 1830, Pernet, [P. chr.]; 5 sept. 1835, Ville de Rennes. [P. chr.]; - 11 sept. 1840, Opoix, [S. 40.1.982, P. 41. 1.101; 21 mars 1851, Quillet, [D. 51.5.549]; - 1er juill. 1853, Baltzinger, D. 53.5.253];-6 déc. 1860, Oger et Piquet, [P. 62. 1030, D. 62.1.401]; 24 janv. 1863, Farien, (S. 63.1.276, P. 64.124, D. 63.1.111] Cons. d'Et., 26 déc. 1862, Bourcier, [S. 63.2.216, P. adm. chr.Sic, Féraud-Giraud, Servit. de voirie, t. 1, n. 80; Aucoc, t. 3, n. 1053. — V. infrà, vo Règlement de police.

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623. Un autre principe également important consiste en ce que l'autorité qui délivre l'alignement doit se conformer aux plans régulièrement dressés et approuvés. - Cons. d'Et., 3 déc. 1817, Bouriat, S. chr., P. adm. chr.];-30 juin 1842, Ganielle, [P. adm. chr.] Paris, 19 juill. 1834, Langlois, [S. 34.2.433, P. chr.]

624. Ainsi, un préfet ne peut, sans excès de pouvoir, donner un alignement individuel autre que celui qui résulte du plan général d'alignement. Cons. d'Et., 17 janv. 1890, Dufresne et Bouilliez, [S. et P. 92.3.44]

625. De même, si, en l'absence de plans généraux, il existe des plans partiels régulièrement approuvés, les maires non seulement peuvent, mais encore doivent se conformer à ces plans pour la délivrance des alignements. Cass., 27 juill. 1882, Maubourguet, S. 83.1.75, P. 83.1.157, D. 82.1.332]

626.

L'autorité compétente pour donner l'alignement individuel doit se conformer au plan, lors même qu'il y aurait des projets de changements. Le plan existant constitue, pour le propriétaire, un titre dont il peut exiger l'application immédiate. Le soumettre aux lenteurs qu'exige l'approbation d'un plan nouveau serait accroitre ses charges, et violer un droit acquis. Contre la décision rendue dans ces circonstances, la partie intéressée pourrait se pourvoir par la voie contentieuse. Batbie, t. 6,

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628. De ce que l'alignement individuel doit être délivré conformément au plan, il suit que l'arrêté par lequel l'autorité compétente délivrerait un alignement s'écartant de ce plan, en supposant d'ailleurs que celui-ci fût régulièrement approuvé, ne conférerait au riverain aucun droit acquis; l'agent administratif pourrait, dès lors, rapporter son arrêté et délivrer un nouvel alignement conforme au plan.. Cons. d'Et., 4 juill. 1872, Commune de Neung-sur-Beuvron, [S. 74.2.95, P. adm. chr., D. 73. 3.12]

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629. A défaut de plan général, l'alignement doit être donné à la limite mème de la voie. Bien que cette règle soit appliquée aujourd'hui à toutes les catégories de voies publiques, il est bon de montrer comment la jurisprudence est arrivée à cette solution, spécialement pour les grandes routes et pour la voirie urbaine.

630. Selon quelques auteurs, le préfet aurait le pouvoir de forcer les propriétaires à reculer, parce qu'il lui appartient de fixer les limites du domaine public, sauf à régler postérieurement l'indemnité. D'après cette opinion, la partie qui se croirait lésée par l'alignement ne pourrait pas se pourvoir au contentieux, l'arrêté d'alignement constituant, dans l'espèce, un acte de pure administration. Pendant longtemps, l'administration avait admis que, par application de l'édit de février 1765, les préfets pouvaient délivrer des alignements partiels, en l'absence de plans généraux. On s'appuyait aussi sur un arrêté du gouvernement, du 27 prair. an IX, d'après lequel le droit de donner des alignements sur les routes, soit qu'il y ait lieu à avancer, soit qu'il y ait lieu à reculer, appartient à l'autorité chargée de la grande voirie. - V. Blanche, Dictionnaire général d'administration, vo Alignement.

631. Le Conseil d'Etat avait d'abord consacré cette théorie. Cons. d'Et., 26 août 1829, Detroyat, [P. adm. chr.]; 18 janv. 1831, Lormier, [P. adm. chr.]; -15 févr. 1833, Poisiau, [S. 34.2.499, P. adm. chr.]; 29 août 1834, Blaise, [P. adm. chr.]; 2 août 1836, de Kergolay, [P. adm. chr.]; 23 août 1836, Ville de Mortagne, [P. adm. chr.]; 21 déc. 1837, Legrand, [P. adm. chr.]; 31 déc. 1838, Lequenne, [P. adm. chr.]; - 6 août 1840, Icart, [S. 41.2.102, P. adm. chr.1

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632. Mais il ne l'avait fait qu'à regret, et, en fait, il s'était efforcé, par des restrictions multiples, de mettre des limites à l'exercice de ce pouvoir dangereux pour la propriété privée. Cons. d'Et., 9 mars 1854, Gy, [P. adm. chr., D. 54.5.782]; 20 avr. 1854, Roux-Lecoynet, [D. 54.3.52]

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633. Ainsi, il décidait, que lorsqu'une route a sa largeur légale, le riverain qui a fait reconstruire sa maison à l'alignement ne peut être condamné à la démolir par le motif qu'elle fait saillie sur un autre alignement indiqué par des arrêtés préfectoraux donnant à la route une largeur plus grande. Cons. d'Et., 9 mars 1854, précité.

634. — ... Qu'une rectification d'alignement, notifiée depuis l'achèvement des travaux, ne saurait avoir pour effet d'obliger le propriétaire à reporter à la nouvelle limite qu'indique le préfet, les bâtiments élevés sur la première. Cons. d'Et., 20 avr. 1854, précité.

avr. 1870, Benoît-Giraud, [Leb. chr., p. 485] Sic, Delanney, p. 194.

638. En matière de voirie urbaine, le maire doit également se conformer au plan général, dans la délivrance des alignements individuels. S'il s'en écartait, il violerait un droit acquis fondé sur un titre, et le riverain lésé pourrait se pourvoir au contentieux contre l'arrêté ministériel qui aurait refusé de réformer l'alignement ainsi délivré.

639. Le pouvoir du maire, au cas où il n'existe pas de plan général, a été pendant longtemps fort controversé. La jurisprudence du Conseil d'Etat a passé elle-même par des phases différentes, avant d'arriver à son point définitif. Elle avait d'abord décidé que, même en l'absence de plans généraux, le maire pouvait forcer un riverain de la voie publique à reculer ou à avancer. L'administration supérieure avait cru nécessaire d'autoriser provisoirement ce magistrat, pendant un délai limité d'abord par un décret du 27 juill. 1808, puis par des décisions royales du 29 févr. 1816 et du 18 mars 1818, à donner des alignements partiels. A l'expiration de ce dernier délai, craignant que la perte par le maire d'une attribution que celui-ci avait exercée en fait, jusqu'ici, ne fût préjudiciable aux intérêts de la voirie, elle obtint des sections réunies de l'intérieur et des travaux publics un avis de principe reconnaissant formellement à ce magistrat le droit de délivrer des alignements partiels. Cet avis du 6 avr. 1824 posa en principe que « dans les villes, bourgs et villages où il n'existe pas de plan général d'alignement approuvé en Conseil d'Etat, le maire a le droit de donner des alignements, sauf recours au préfet et successivement devant le ministre de l'Intérieur et le Conseil d'Etat; que le maire peut, en conséquence de ce droit, faire reculer les constructions dans un intérêt d'assainissement, de sûreté et d'amélioration locale, sous la réserve du règlement d'une indemnité pour la perte du terrain »>. Plusieurs arrêts du Conseil du contentieux admirent cette doctrine, et la Cour de cassation elle-même s'y rallia. Cass., 30 mars 1827, Jacquemont, [S. et P. chr.];-14 sept. 1827, Pignatel, [S. chr.];

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6 sept. 1828, Julien, [S. et P. chr.]; -18 sept. 1828, Darolles, [S. et P. chr.]; 21 nov. 1828, Huvelin, [P. chr.]; - 7 août 1829, Becq, [S. et P. chr.]; - 18 juin 1831, Falque, [S. 31.1.252, P. chr.]; 6 oct. 1832. Facquer, [S. 33.1.296, P. chr.]; 8 août 1833, Langlois, [P. chr.]; 10 mai 1834, Langlois, [S. 34.1.407, P. chr.]; 6 avr. 1837, Commune de Decize, [S. 37.1.1001, P. 37.2.316];-6 juill. 1837, Giraud, [S. 37.1.636, P. 37.2.292]; 22 mars 1838, Sorel-Lobligeois, P. 40.1.402]; 8 janv. 1841, Lieutard et Romey, [P. 42.1.197]; 30 janv. 1847, Baffoy, [S. 47.1.222, P. 47.1.326, D. 47.1. 158)]; 19 févr. 1858, de la Tullays, [D. 58.5.381] Cons. d'Et., 29 janv. 1814, Huet et autres, [P. adm. chr.]; 30 juill. 1817, Aumeunier, [P. adm. chr.]; - 3 juin 1818, Coudray, S. chr., P. adm. chr.]; 11 févr. 1820, Caron, [S. chr., P. adm. chr.]; 16 mars 1836, Picot d'Agard, [P. adm. chr.]; 4 nov. 1836, Gaucher, [P. adm. chr.]; - 29 déc. 1840, Hervé, [Leb. chr., p. 466] Circul. min. Intér., 23 août 1841. Sic, Gillon et Stourm, n. 208 et s.; Daubanton, n. 44; Dumay, sur Proudhon, t. 2, p. 461 et 743; de Cormenin, vo Voirie, § 1.

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640. A partir de 1834, cependant, la jurisprudence entra dans la voie des restrictions: le Conseil d'Etat admit que le maire ne pouvait forcer le riverain à reculer, si l'alignement traçait une ligne qui forcerait plus tard plusieurs propriétaires à reculer c'est ce qui a été jugé pour l'agrandissement d'une place et l'isolement d'une église. Dans ce cas, il avait été décidé, notamment, qu'il y a lieu de recourir à l'application de l'art. 52 de la loi de 1807 pour l'exécution d'un plan général ou partiel relatif à la portion sujette à un nouvel alignement. - Cons. d'Et., 25 juill. 1834, Gressent et Deshayes, [P. adm. chr.];-10 sept. 1835, Ville de Bordeaux, [P. adm. chr.]

635. Les préfets avaient pris l'habitude de délivrer l'alignement d'après les plans dressés par les ingénieurs, sans enquête. Aussi des principes restrictifs du droit des maires ayant prévalu, en matière de voirie urbaine, la jurisprudence du Conseil d'Etat, pour les grandes routes, décida également que, en l'absence de plan général, le préfet ne peut que maintenir à la route sa largeur actuelle. Il fut amené à décider aussi, notamment, qu'il y aurait excès de pouvoir, si ce fonctionnaire donnait un alignement non conforme à la configuration de la voie. Cons. d'Et., 10 févr. 1865, Saumartin, (S. 65.2.354, P. adm. chr., D. 65.3.72, et les conclusions de M. L'Hôpital, commiss. du gouv.]; 641. 23 mars 1867, Valleran, [S. 68.2.126, P. adm. chr., D. 67.3.39]

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636. Cette même jurisprudence a été étendue aux chemins vicinaux en l'absence d'un plan général, l'alignement doit être donné suivant les limites de la voie. Cons. d'Et., 31 mars 1865, Poncelet, [S. 65.2.356, P. adm. chr., D. 65.3.90]; 6 mars 1885, Saurin, [Leb. chr., p. 264]

637. Toutefois, lorsque le changement de largeur d'un chemin a été arrêté d'une manière précise par un abornement, l'alignement doit être accordé conformément aux limites ainsi fixées et non plus d'après les dimensions actuelles de la voie. Cons. d'Et., 25 mars 1870, Fournier, [Leb. chr., p. 326]; — 27

Enfin, en 1862, le Conseil d'Etat dénia complètement au maire le pouvoir d'élargir la voie au détriment de la propriété riveraine. «Si les maires, chargés par la loi des 16-24 août 1790 de veiller à ce qui intéresse la sûreté et la facilité du passage sur les rues et les places publiques de leur commune, disait le Conseil, ont le droit de délivrer des alignements aux particuliers qui veulent élever des constructions le long et joignant lesdites rues et places, ces alignements ne peuvent avoir pour effet de procurer l'élargissement de la voie publique, en dehors d'un plan d'alignement arrêté par l'autorité supérieure, soit pour l'ensemble des rues et places de la commune, soit pour une ou plusieurs de ces rues ». L'alignement individuel qui forcerait à

reculer contiendrait un excès de pouvoir, et donnerait lieu au
recours devant le Conseil d'Etat.' Cons. d'Et., 5 avr. 1862,
Lebrun, S. 63.2.72, P. adm. chr., D. 63.3.57]; 5 mai 1865,
Gibault, [S. 66.2.69, P. adm. chr., D. 66.3.72]; 21 mai 1867,
Cardeau, [S. 68.2.127, P. adm. chr., D. 69.3.27];
21 mars
1879, Taddei, [S. 80.2.305, P. adm. chr., D. 79.3.76];-4 juill.
1884, Peytavie, [D. 86.3.10] Sic, Batbie, t. 6, n. 43; Aucoc,
t. 3, n. 1040 et s.; Delanney, p. 189 et s.; Frémy-Ligneville et
Perriquet, t. 1, n. 264 et s.; Ducrocq, t. 2, n. 857; Aucoc, Rev.
crit., t. 21, p. 97 et s. Contrà, Féraud-Giraud, Servit. de voi-
rie, t. 1, n. 54.

642. On a objecté que cette restriction aux pouvoirs des maires et des préfets annihile leur pouvoir, car un alignement ne se comprend que par le droit de forcer les propriétaires riverains de la voie publique à se porter sur la ligne en avançant ou en reculant. Mais on peut répondre que l'autorité administrative a, dans ce cas, le pouvoir de constater les limites de la voie publique et d'empêcher les empiètements que les riverains ne sont que trop portés à commettre.

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643. Jugé, en ce sens, qu'en l'absence d'un plan d'alignement régulièrement approuvé, le maire ne peut donner alignement de manière à élargir la voie publique. Cons. d'Et, 5 avr. 1862, précité. 644.- Que, dans le même cas, le maire auquel un particulier demande l'autorisation d'élever, le long d'une place publique, des constructions sur la limite qu'occupait précédemment un bâtiment qui vient d'être démoli, ne peut rejeter cette demande en se fondant sur ce que les constructions projetées auraient pour effet de détruire la symétrie résultant, pour la place, de la suppression de l'ancien bâtiment. Cons. d'Et., 5 mai 1865, précité.

645.-... Que l'élargissement et la régularisation de la place ne peuvent être obtenus, dans ce cas, que par la voie de l'expropriation pour utilité publique. - Même arrêt.

...

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646. Que lorsque les tracés faits sur le plan d'alignement donnent à la rue une largeur plus grande que celle prévue par l'ordonnance, qui approuve les alignements proposés par le conseil municipal, le maire ne peut, sans excès de pouvoir, donner un alignement individuel d'après les tracés erronés du plan. Cons. d'Et., 25 juill. 1890, Auscher, [Leb. chr., p. 719]

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647. ... Qu'en sens inverse, un maire excéderait ses pouvoirs, si, en donnant l'alignement à un particulier, il réduisait la largeur existante de la rue, alors qu'aucun plan, soit général, soit partiel, ne l'autorise à prescrire ce rétrécissement. - Cons. d'Et., 7 janv. 1869, Commune de Bourg-le-Roi, [S. 69.2.60, P. adm. chr., D. 69.3.36]; 21 mai 1867, précité.

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publique. - Cons. d'Et., 7 mars 1873, Ducros, [Leb. chr., 226] p. 652. Au surplus, le maire, auquel un alignement individuel est demandé, pourra, s'il est d'avis qu'il serait bon d'élargir la rue, provoquer un plan d'alignement partiel. Comme la loi ne lui impartit aucun délai pour répondre à la demande faite par le propriétaire, le plus souvent, en agissant avec quelque célérité, il fera dresser selon les règles ordinaires un plan d'ensemble, et délivrera ensuite un alignement conforme. Batbie, loc. cit.

653. En l'absence de plan d'alignement régulièrement approuvé par l'autorité compétente, le maire ne peut, sans excéder la limite de ses pouvoirs, refuser à un propriétaire l'autorisation de faire exécuter des travaux au mur de face de sa maison. Il y aurait donc lieu à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'arrêté municipal et à celle de l'arrêté préfectoral qui le maintiendrait, ainsi qu'à celle de la décision ministérielle qui confirmerait ce dernier. Cons. d'Et., 27 mai 1863, Estienne, [S. 64.2.52, P. adm. chr., D. 64.3.3]

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SECTION V.

Des recours ouverts contre les arrêtés d'alignements individuels.

654. Le plan général d'alignement d'une voie publique ayant pour effet de fixer d'une façon précise le droit des riverains, en face du domaine public, tout arrêté individuel qui s'en écarte peut être déféré à la juridiction administrative. Les deux conditions nécessaires à l'existence d'un contentieux se trouvent réunies existence d'un droit et violation de ce droit par un acte de l'administration. Le riverain qui prétend que le sous-préfet, en délivrant l'alignement, ne s'est pas conformé aux plans, portera son recours, par la voie hiérarchique, successivement devant le préfet et le ministre des Travaux publics, et, si ce dernier ne réforme pas la décision de ses subordonnés, le recours, devenu contentieux, pourra être déféré au Conseil d'Etat. Il en est ainsi sur les routes nationales et départementales, sur les chemins vicinaux de grande communication et d'intérêt commun; les mêmes règles de fond sont applicables en ce qui touche les chemins vicinaux ordinaires, avec cette différence que, la décision étant prise par le maire, le recours par la voie hiérarchique sera porté devant le préfet, pour arriver ensuite devant le ministre de l'Intérieur, avant de prendre la forme contentieuse. Lorsque l'arrêté du maire est déféré au préfet, le maire doit suspendre les travaux jusqu'à la décision de celui-ci. Cons. d'Et., 14 juin 1836, Ville de Boussac, [P. adm. chr] — Sic, FrémyLigneville et Perriquet, t. 1, n. 304.

Au premier degré, le préfet seul est compétent pour réformer les arrêtés municipaux fixant l'alignement, à observer dans des constructions sur la voie publique : il ne saurait déléguer au sous-préfet le droit qu'il tient du décret du 25 mars 1852. Cass., 5 août 1858, Defaye, [S. 59.1.95, P. 59.589, D. 58.1.425] Le conseil de préfecture, d'autre part, ne serait pas non plus compétent. Cons. d'Et., 30 juill. 1817, Aumeunier, [S. chr., P. adm. chr.]; - 1er nov. 1820, Ville d'Elbeuf, [S. chr., P. adm. chr.1; 12 avr. 1832, Ville de Nantes, [P. adm. chr.]

648. 655. Il en est ainsi alors surtout que le conseil municipal s'oppose à toute aliénation du terrain qu'une pareille mesure rendrait disponible. Cons. d'Et., 21 mai 1867, précité. 649. La Cour de cassation elle-même, après une certaine résistance, s'est ralliée à la doctrine du Conseil d'Etat, et a décidé que si les maires ont le droit de délivrer des alignements individuels obligeant les propriétaires qui veulent batir le long des rues ou places publiques à reculer ou à avancer sur leur terrain, ils ne le peuvent qu'à la condition de se conformer au plan exigé par l'art. 52, L. 16 sept. 1807; qu'à défaut de ce plan légalement approuvé, les maires sont sans pouvoir pour contraindre les propriétaires à reculer ou à avancer les constructions qu'ils font élever. Cass., 11 déc. 1869, Michaut, [S. 70.1.91, P. 70.183, D. 70.1.42]; 14 mars 1870, Commune de Vaudrey, [S. 70.1.197, P. 70.501, D. 70.1.251]; 31 mars 1870, Brunet, [S. 71.259, P. 71.774]; 12 févr. 1875, Lecarpentier, [D. 76.1. 136]; 1er févr. 1877, Cazalot, [D. 78.1.235]; - 4 févr. 1882, Astrié, [D. 82.5.20]; 23 janv. 1892, Massiani, [S. et P. 92. 1.604]

-

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656. Si l'autorité compétente pour délivrer l'alignement, s'avisait, alors qu'il n'existe pas de plan général, de faire reculer le riverain, sans doute sa décision pourrait être soumise au supérieur hiérarchique. Mais il y a plus; dans de telles circonstances, celle-ci constituerait une véritable expropriation au détriment du riverain, et la voie du recours pour excès de pouvoir serait ouverte de suite.

657. En matière de voirie urbaine, les principes généraux que nous venons de poser, subissent une légère atteinte. Au lieu du recours contentieux, qui se dégage de l'application à notre sujet des règles essentielles du droit administratif, nous trouvons ici un recours administratif, dont la notion originaire a été donnée par l'art. 52, L. 16 sept. 1807. Les lois de décentralisation de 1852, sans en changer la nature, en ont quelque peu modifié les conditions d'exercice.

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nelle de cette particularité. La compétence du Conseil d'Etat, au contraire, se concevait très-bien, quand on se rappelle que les plans généraux étaient alors approuvés par cette haute assemblée. Compétente pour approuver les plans généraux, elle l'était également pour rectifier les alignements individuels contraires à ces plans.

659. — Aussi était-il jugé d'une façon constante que les alignements délivrés par les maires devaient, au cas de recours, être déférés au préfet, puis au ministre de l'Intérieur et enfin au Conseil d'Etat. Mais le recours direct au Conseil d'Etat n'était pas recevable. Cons. d'Et., 22 oct. 1817, Habitants de Sotteville, [S. chr., P. adm. chr.];-21 mai 1823, Bordage, [S. chr., P. adm. chr.; 16 juin 1824, Versigny, [S. chr., P. adm. chr.j; 13 juill. 1828, Jullien, [S. chr., P. adm. chr.]; 22 nov. 1829, Boisselot de Bienassis, [P. adm. chr.]; 4 mars 1830, Alaus, [S. chr., P. adm. chr.]; 6 juin 1830, André, [S. chr., P. adm. chr.]

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660. Depuis 1852, le Conseil d'Etat n'approuve plus les plans généraux de voirie urbaine; cette attribution a passé au préfet. De là on a conclu que les recours contre les arrêtés des maires s'écartant de l'alignement général, s'arrêteront au préfet; que tout au plus on ira au ministre;, mais que jamais on ne s'adressera au Conseil d'Etat. Cette restriction, apportée par la jurisprudence au recours administratif de l'art. 52, est pleinement justifiée par ce motif que, dans les cas où le Conseil aurait infirmé comme non conforme au plan un alignement individuel, sa décision eût été sans portée, le préfet d'accord avec le conseil municipal, en arrètant un nouvel alignement, étant toujours à même de le mettre complètement à néant.

661. Et il faudrait appliquer la même solution en l'absence d'un plan général. L'alignement délivré par le maire ne pourrait être attaqué que devant le préfet puis le ministre de l'Intérieur. 662. C'est ainsi qu'il a été jugé que le décret du 27 juill. 1808 a cessé d'être applicable depuis celui du 25 mars 1852, et que le ministre ne commet aucun excès de pouvoir en statuant directement sur les réclamations auxquelles donnent lieu les arrêtés des préfets sans les porter au Conseil d'Etat. - Cons. d'Et., 19 juill. 1855, Crouzet, [S. 56.2.309, P. adm. chr., D. 56.3.9] Sic, Ducrocq, t. 2, n. 857.

663. Mais qu'il s'agisse de grande ou de petite voirie, qu'il y ait ou non un plan général, le recours au Conseil d'Etat pour excès de pouvoirs est toujours possible. 664.

De tout ce qui précède, il résulte avec évidence que cette législation de l'alignement est d'une rigueur excessive. Il nous reste à voir si la jurisprudence n'a pas cherché à y apporter des adoucissements, notamment s'il n'existe pas de recours donnés aux particuliers contre les modifications aux arrêtés d'alignement, contre le mauvais vouloir de l'administration, contre

ses erreurs.

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665. La jurisprudence du Conseil d'Etat reconnaît le droit à indemnité au profit du riverain qui a reçu de l'autorité compétente un alignement différent du plan général. Ainsi, lorsqu'un particulier a fait une construction selon l'alignement à lui donné par le maire et confirmé par le préfet, s'il arrive que l'administration revienne sur son arrêté et modifie l'alignement, le propriétaire a droit à indemnité. - Cons. d'Et., 12 déc. 1818, Hazet, [S. chr., P. adm. chr.]— V. suprà, n. 171 et s.

666. La jurisprudence a, de même, reconnu le droit à indemnité au riverain lorsque l'administration refuse de lui délivrer l'alignement ou ne le lui délivre qu'avec retard. — V. suprà, n. 590 et s.

667. On admet que le riverain peut demander des dommages-intérêts, lorsque, en l'absence de plan général, l'administration lui a délivré un alignement le faisant avancer sur la voie publique, et qu'ensuite, la parcelle usurpée a été de sa part l'objet d'une revendication. La jurisprudence de la Cour de cassation a résisté longtemps à adopter cette solution; mais, aujourd'hui, ces principes nous semblent prévaloir, et, en présence d'une faute aussi caractérisée, il nous semble difficile d'écarter la responsabilité de la personne morale à qui la voie publique appartient.

668. Dans une affaire où il s'agissait d'une application mal faite d'un plan général d'alignement, le Conseil d'Etat a décidé qu'il n'y avait pas lieu à dommages-intérêts; mais, cette espèce ne saurait prévaloir contre la doctrine exposée ci-dessus, car le particulier appuyait sa requête sur une convention passée entre lui et l'administration. On s'est borné, dès lors, à réserver

les droits qu'il pouvait avoir à faire valoir devant l'autorité judiciaire. Cons. d'Et., 5 août 1881, Bourdais, [S. 83.3.20, P. adm. chr., D. 83.3.18]

-

669. On considère le conseil de préfecture comme compétent pour statuer sur les dommages-intérêts réclamés à raison d'un refus d'alignement ou d'un simple retard dans la délivrance. Il faudrait, selon nous, étendre également cette compétence au cas où la demande en indemnité serait fondée sur une erreur dans la délivrance d'un alignement, et à celui où des modifications au plan général causeraient un préjudice au particulier qui aurait construit en vertu de ce premier plan.

670.- Ainsi, si par suite de la construction d'un immeuble sur un terrain retranché d'une place publique par voie d'alignement, et vendu par la ville, un ancien riverain se trouve privé en partie des droits de jour qu'il possédait sur le terrain retranché, le conseil de préfecture est compétent pour statuer sur l'action en dommages-intérêts intentée contre la ville. Cons. d'Et., 25 avr. 1890, Raymond, [S. et P. 92.3.81, D. 91.3.102]

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671. Mais le conseil de préfecture n'est pas compétent pour statuer sur la même action en tant qu'elle est dirigée solidairement contre le propriétaire qui a construit et contre la ville. - Même arrêt.

672. Il n'est pas non plus compétent pour connaître de l'action récursoire intentée par la ville contre le propriétaire acquéreur et constructeur. Même arrêt.

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673 bis. Les tiers ne peuvent attaquer les arrêtés d'alignement qu'au cas où ils y auraient un intérêt personnel : si, par exemple, il leur causait un préjudice. C'est ce qui arriverait, notamment, au cas où l'alignement délivré à un propriétaire aurait pour effet de le faire avancer sur la rue et de reculer dans une impasse les propriétaires voisins. Cons. d'Et., 23 juill. 1834, Gressent et Deshaies, [P. adm. chr.] - De même, l'arrêté, portant autorisation de construire en façade, donné par le maire à un propriétaire riverain de la voie publique, peut être attaqué pour excès de pouvoir, par un voisin dont la propriété se trouve séparée de la voie publique par le terrain sur lequel a été donnée l'autorisation de construire. Cons. d'Et., 13 avr. 1881, Bansais, [S. 82.3.29, P. adm. chr.] — Mais le voisin qui n'élève aucune prétention de propriété sur le terrain_compris dans l'alignement donné n'est pas fondé à réclamer. Il en est ainsi surtout si l'alignement est motivé par la nécessité de raccorder entre elles les anciennes façades d'un même côté de rue, et que loin de rétrécir la voie publique, il l'élargit en face de la propriété du réclamant. Cons. d'Et., 7 mai 1823, Rougier, [P. adm. chr.] Ainsi, un particulier ne peut porter devant les tribunaux une demande en indemnité basée sur le dommage que lui fait éprouver le reculement de la maison voisine exécuté par ordre de l'administration. Cons. d'Et., 25 avr. 1852, Dru, [Leb. chr., p. 239] — D'une manière générale, un recours formé dans l'intérêt public n'est recevable, ni de la part d'un propriétaire voisin, ni même de la part du maire de la commune qui est traversée par la route. Cons. d'Et., 15 juill. 1841, de Turin, [S. 42.2.38, P. adm. chr.]; - 7 mars 1873, Ducros, [Leb. chr., p. 226]; 21 nov. 1873, Ville d'Hyères, [Leb. chr., p. 852] – Sic, Aucoc, t. 3, n. 1072.

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