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453.

§ 5. ESPAGNE.

La dette alimentaire est réglée, dans le Code civil espagnol de 1888-89, par les art. 142 et s.

454. - Les aliments comprennent tout ce qui est indispensable à l'entretien, logement, vêtement et assistance médicale, suivant la position sociale de la famille, ainsi que l'éducation et l'instruction de l'alimentista, s'il est mineur (art. 142).

455. Sont réciproquement obligés de se fournir des aliments: 1° les époux ; 2o les ascendants et descendants légitimes; 3o les père et mère et les enfants légitimés, et les descendants légitimes de ceux-ci; 4° les père et mère et les enfants naturels reconnus, ainsi que les descendants de ceux-ci; en dehors de ce cas, les parents ou enfants illégitimes ne se doivent que les secours nécessaires à leur subsistance, plus, quant aux enfants, l'instruction élémentaire et l'enseignement d'une profession (art. 143).

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456. Les frères et sœurs germains, utérins ou consanguins se doivent également « les secours nécessaires à la vie », quand, par suite d'une infirmité et en l'absence de faute de sa part, la personne nécessiteuse est hors d'état de pourvoir à sa subsistance (même art.).

457. Lorsque la dette pèse à la fois sur plusieurs personnes, elle incombe 1° au conjoint; 20 aux descendants, suivant la proximité du degré; 3° aux ascendants, suivant le même ordre; 40 aux frères et sœurs. Entre les descendants et ascendants, le classement s'opère suivant l'ordre dans lequel ils seraient appelés éventuellement à la succession légitime de l'indigent (art. 144). 458. A égalité de classes et de degrés, la charge se répartit entre les obligés, proportionnellement à leurs moyens. Lorsque deux ou plusieurs personnes réclament simultanément des aliments d'un même individu n'ayant pas assez de ressources pour les entretenir toutes, on observe entre elles l'ordre fixé par l'art. 144, à moins que les requérants ne soient le conjoint et un enfant soumis à la puissance paternelle, auquel cas l'enfant est préféré au conjoint (art. 145). 459.

Les aliments sont proportionnés aux ressources de celui qui les fournit et aux besoins de celui qui les reçoit; ils se réduisent ou s'accroissent, suivant que ces ressources ou ces besoins diminuent ou augmentent (art. 146, 147). Ils se paient, en général, par mois et d'avance; un mois payé est acquis aux héritiers de l'assisté, même mort avant la fin du mois (art. 148). 460. L'obligé peut s'acquitter, à son choix, soit en payant une pension, soit en prenant chez lui la personne à entretenir (art. 149); son obligation s'éteint par son décès (art. 150).

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461. L'assisté ne peut ni renoncer à son droit, ni le céder; ce droit ne peut non plus se compenser, avec ce que l'assisté doit éventuellement à l'obligé (art. 151).

-

462. L'obligation de fournir des aliments cesse, non seulement par le décès de celui qui les doit, mais encore: 1° par la mort de l'assisté; 2o par une diminution de ressources de l'obligé, telle qu'il ne pourrait plus supporter la charge sans laisser en souffrance ses propres besoins et ceux de sa famille; 3° lorsque l'assisté cesse d'avoir besoin de secours; 4° quand, étant ou non héritier nécessaire, il a commis une faute qui autoriserait l'obligé à l'exhéréder; 5° quand, descendant de l'obligé, il s'est mis, par inconduite ou incurie, dans le cas d'avoir besoin d'assistance, tant, du moins que cette cause subsiste (art. 152). V. Ernest Lehr, Eléments de droit civil espagnol, 1890, 2o part., n. 171-176.

§ 6. GRANDE-Bretagne.

463. I. ANGLETERRE. Les enfants ont, vis-à-vis de leurs parents et grands-parents tombés dans la misère et incapables de se suffire par eux-mêmes, un devoir d'assistance découlant tout à la fois du droit naturel et des lois sur l'assistance des pauvres, et dont ne les dispenseraient ni les mauvais procédés, ni l'inconduite de l'ascendant indigent.

464.- La dette alimentaire est réciproque entre parents en

ligne directe ascendante et descendante (Poor law act, St. 43, Elis., c. 2, art. 7; St. 5, Geo. IV, c. 83).

465. Mais la loi ne précise pas dans quel ordre ceux qui en sont tenus doivent, s'ils sont à des degrés différents, être mis en demeure de l'acquitter; les juges de paix régleraient éventuellement la question.

466. La dette alimentaire n'existe pas entre collatéraux même au deuxième degré. V. Ernest Lehr, Eléments de droit civil anglais, n. 201.

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467. II. Ecosse. Le père est tenu de fournir des aliments à ses enfants, dans la basse classe, jusqu'à ce qu'ils soient en état de gagner leur vie, dans les classes plus élevées, plus longtemps, surtout s'ils sont sans ressources personnelles ou si ce sont des filles. Ce devoir se transmet aux représentants du père s'ils se sont enrichis en recueillant sa succession, mais non à leur seul titre de parents. Il incombe à la mère, si elle est riche et si le père est indigent ou décédé; de son côté, le grandpère est tenu d'entretenir dans sa maison ses petits-enfants sans ressources, ou de leur faire une pension proportionnée à ses moyens; mais il ne doit rien à la femme ou veuve de son fils. 468. Réciproquement, les parents ont droit à des aliments de la part de leurs enfants, s'il y a lieu; et un mari en doit, durant le mariage, à ses beaux-parents. V. Bell, Principles

of the law of Scotland, n. 1631-1634.

§ 7. ITALIE.

469. L'obligation d'entretenir les enfants incombe, en première ligne, au père et à la mère, en proportion de leurs ressources respectives, et subsidiairement aux autres ascendants, suivant l'ordre de proximité (C. civ., art. 138).

470. En revanche, les enfants doivent des aliments à leurs père et mère et autres ascendants qui en auraient besoin (art. 139).

471. L'obligation réciproque de se fournir des aliments existe aussi entre beau-père, belle-mère, gendre et bru. Elle cesse: 1o quand la belle-mère ou la bru s'est remariée; 2o quand l'époux de qui dérivaient l'alliance et les enfants et descendants issus du mariage sont morts (art. 140).

472. Les frères et sœurs ont droit aux aliments strictement nécessaires lorsque, par suite d'infirmités corporelles ou intellectuelles ou pour toute autre cause qui ne peut leur être imputée, ils sont hors d'état de se les procurer (art. 141).

473. L'obligation alimentaire pèse : 1° sur l'époux; 2o sur les descendants; 3° sur les ascendants; 4° sur le gendre et la bru; 5° sur le beau-père et la belle-mère; enfin, et en dernier lieu, sur les frères et sœurs. Entre les descendants la gradation se règle suivant l'ordre dans lequel ils seraient appelés à la succession de la personne qui a droit aux aliments (art. 142).

474. Les aliments sont dus en proportion des besoins de celui qui les réclame et des ressources de celui qui les fournit; en cas de changement dans leur situation, l'autorité judiciaire ordonne, s'il y a lieu, la cessation, la réduction ou l'augmentation des aliments (art. 143-144).

--

475. Celui qui doit les aliments a le choix de satisfaire à cette obligation, soit en payant une pension, soit en recevant et entretenant dans sa propre maison la personne qui a droit aux aliments sauf le droit du juge de fixer le mode à suivre. En cas d'urgence, le juge pourrait même mettre temporairement l'obligation à la charge d'un seul d'entre ceux qui en sont tenus, sauf recours de celui-ci contre les autres (art. 145).

476. L'obligation de fournir des aliments cesse par le décès de l'obligé, encore qu'il les fournisse en exécution d'un jugement (art. 146).

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§ 9. PORTUGAL.

481. Les aliments comprennent tout ce qui est indispensable pour la nourriture, l'habitation et le vêtement, et, en outre, l'éducation et l'instruction, s'il s'agit de mineurs (C. civ. portug., art. 171).

482. L'obligation de les fournir est réciproque entre ascendants et descendants, et entre frères et sœurs (art. 172). A défaut ou en cas d'indigence des père et mère, les enfants légitimes ou légitimés peuvent s'adresser aux ascendants les plus proches de l'une ou l'autre ligne, en suivant l'ordre des successions (art. 173); à défaut des père et mère ou autres ascendants, ils peuvent s'adresser à leurs frères et sœurs légitimes, germains, utérins ou consanguins, dans l'ordre où l'on vient de les nommer (art. 174). Les enfants naturels reconnus ne peuvent demander des aliments qu'à leurs père et mère et à leurs frères et sœurs, en suivant le même ordre (art. 175).

483. L'obligation de fournir des aliments se transmet avec l'hérédité, s'ils ont été judiciairement demandés ou fournis (art. 176).

484. Les enfants légitimes qui n'ont ni père, ni mère, ni ascendants, ni frères ou sœurs pouvant les entretenir, doivent être élevés, jusqu'à l'âge de dix ans, par l'un quelconque de leurs autres parents jusqu'au dixième degré, en préférant toujours les plus proches (art. 177).

485. Les aliments sont proportionnés tant aux moyens de celui qui les doit qu'aux besoins de celui qui les réclame (art. 178), et le chiffre primitif peut en être modifié en conséquence (art. 181).

486. L'obligation alimentaire cesse 10 lorsque celui qui fournit les aliments ne peut continuer à le faire, ou que celui qui les reçoit n'en a plus besoin; 20 dans les cas où l'exhérédation est admise (art. 179); 3° lorsque le besoin d'aliments résulte de la mauvaise conduite de l'ayant-droit et que celui-ci, en s'amendant, pourrait les rendre inutiles, s'il ne peut plus se corriger de façon à rendre les aliments inutiles, ils sont réduits au minimum (art. 180).

487. - Le droit aux aliments ne peut faire l'objet d'aucune renonciation anticipée; on ne peut renoncer qu'aux aliments échus (art. 182).

488. Si le débiteur d'une pension alimentaire justifie n'être pas en mesure de la payer, mais peut prendre chez lui l'ayant droit, il peut être autorisé à agir ainsi (art. 183).

489. Les aliments taxés ou consistant en des prestations périodiques, se paient au commencement de chaque terme (art. 184).

§ 10. PRUSSE.

490. Les parents sont tenus de nourrir et d'entretenir leurs enfants selon leurs moyens. Le Code prussien est même, à notre connaissance, le seul Code de l'univers qui fasse à la mère bien portante un devoir légal d'allaiter elle-même son enfant nouveau-né et charge le père de décider pendant combien de temps l'allaitement doit durer, sous réserve de l'avis contraire des médecins (2o part., tit. 2, 67 à 69). A l'inverse, les enfants sont tenus d'assister, dans la mesure de leurs moyens, leurs parents tombés dans le malheur ou le besoin (art. 63).

491. Lorsque la puissance paternelle a pris fin, les parents et les enfants se doivent une assistance réciproque et sont tenus, en cas de besoin, de s'entretenir les uns les autres (art. 251). Lorsque le besoin d'assistance provient de maladie, malheur ou autre circonstance qui ne soit pas imputable à faute à la victime, ils se doivent réciproquement un entretien convenable et proportionné à leur fortune (art. 252). Lors, au contraire, que la partie nécessiteuse s'est mise dans la misère par sa propre faute ou s'est conduite vis-à-vis de l'autre de telle sorte qu'elle pourrait être exhérédée par elle, elle ne peut réclamer que ce qui est absolument indispensable à son existence (art. 253).

492. Les enfants qui, après que la puissance paternelle a pris fin, continuent à être entretenus par leurs parents, contractent par là même l'obligation d'aider selon leurs moyens leurs parents dans leurs occupations (art. 254).

493. Les parents (Verwandte) en ligne directe ascendante et descendante se doivent réciproquement des aliments dans les

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494. En ligne collatérale, la dette n'existe qu'entre frères et sœurs, germains, consanguins ou utérins, légitimes ou naturels; en tant, quant à ces derniers, qu'il existe entre eux un droit d'hérédité (2o part., tit. 3, 15-16).

-

495. En principe, l'obligation se gradue, entre les divers membres de la famille, d'après leurs droits héréditaires éventuels, et pèse, tout d'abord, sur les héritiers les plus proches (art. 17, sv.). Au delà du degré de frères et sœurs, les collatéraux ne sont pas tenus de se fournir des aliments, mais ceux qui les refusent perdent leurs droits éventuels sur la succession de celui qui en réclamait (22, sv.).

§ 11. RUSSIE.

496. Le Svod et les divers Codes provinciaux imposent aux parents l'obligation d'entretenir leurs enfants, et aux enfants l'obligation d'entourer leurs parents, « de respect, de dévouement et d'amour », de les aider comme ils ont été eux-mêmes aidés par eux (Svod, X, 1re part., 172, sv., 177; L. polon. de 1825, 237, sv., 336; C. civ. balt., 199-209).

497. Mais nous ne connaissons pas de dispositions ayant, en dehors des devoirs réciproques des père et mère et des enfants, la précision et l'étendue des art. 205 à 211, C. civ. français, en matière de dette alimentaire. Le Svod se borne à imposer aux enfants, même séparés de biens, le devoir de donner des aliments à leurs père et mère àgés, infirmes ou nécessiteux (X, 1re part., 194). En cas de difficulté sur l'importance de cette assistance, il appartient aux tribunaux de fixer le chiffre de la pension eu égard à la situation respective des intéressés. Arr. dép. civ. de cassation, 8 nov. 1873, Sviet. - V. Ernest Lehr, Elem. de dr. civ. russe, n. 85, 86, 89.

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§ 12. SAXE-ROYALE.

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498. La matière est réglée, dans le Code civil saxon, par les art. 1837 et s., nous allons en résumer les dispositions. 499. Le père est tenu, en première ligne, d'entretenir ses enfants (1837). S'il est décédé, indigent ou domicilié à l'étranger, la charge incombe à la mère, sauf son secours contre le père dans ce dernier cas (1838). Si la mère est également décédée, indigente ou domiciliée à l'étranger, la charge pèse, sauf recours contre elle dans le dernier cas, sur les ascendants paternels et maternels, en tenant compte de la progénité du degré et, à égalité de degré, par portions viriles (1839).

500. Faute par les père et mère ou autres ascendants de pouvoir suffire à leurs besoins, les descendants sont tenus de les assister, suivant l'ordre où ils seraient appelés à leur succession (1842).

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501. La dette alimentaire présuppose, chez le requérant, l'absence de ressources suffisantes et l'impossibilité de pourvoir lui-même à son entretien (1844). Elle incombe aux père et mère, vis-à-vis de leurs enfants, du moment que les revenus de ceuxci ne couvrent pas les frais de leur entretien (1845). 502.

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L'entretien comprend tout ce qui est nécessaire à la vie, suivant la condition sociale du requérant et, en cas de décès, les frais de sépulture; plus, s'il s'agit d'enfants, les frais d'éducation, d'instruction et de préparation à une profession (1846). Il doit être proportionné tant aux besoins de l'ayantdroit, qu'aux ressources du débiteur (1847).

503. Des aliments ne peuvent être demandés pour le passé qu'autant que, pour se nourrir, l'ayant-droit a dû faire des dettes (1849). Celui qui doit des aliments a le choix de les fournir en nature ou en argent (1850); il ne peut en exiger le remboursement si, plus tard, le bénéficiaire revient à meilleure fortune (1851). On ne peut renoncer d'avance au droit de demander des aliments (1852).

504.-L'obligation de fournir des aliments cesse par la mort du débiteur (1853). Si l'assisté s'est mis vis-à-vis de lui dans un cas qui autoriserait une exhérédation, il ne peut plus réclamer que ce qui est absolument indispensable à sa subsistance dans les conditions où y pourvoirait un établissement charitable officiel (1854).

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507. Dans les cantons de langue allemande, la dette alimentaire n'est guère prévue dans les Codes civils, mais plutôt dans les lois spéciales sur l'assistance; elle pèse réciproquement, mais à des degrés très-divers, sur les membres d'une même famille.

508. Bâle-Ville et Appenzell (R.-Int.) ne reconnaissent à cet égard aucune obligation légale.

509.

Soleure, Appenzell (R.-Ext.) et Saint-Gall l'imposent aux père et mère et aux enfants (C. sol., 250, 251; L. appenz. sur le droit de famille, 12; L. Saint-Gall, 26 févr. 1835, 26).

510. L'obligation s'étend, en général, aux ascendants et aux descendants à Berne (y compris les conjoints, L. 1er juill. 1857, 12), à Lucerne (L. 5 déc. 1856, 11-18), à Zoug (L. 8 nov. 1880, 16), en Argovie (C. iv., 194, 207), ou Thurgovie (L. 15 avr. 1861, 1-5).

511. Elle s'étend aux père et mère, enfants et frères et seurs, dans les cantons primitifs, à Glaris (L. 5 mai 1873, 9-10) et à Zurich (L. 30 juin 1853); en sus, aux ascendants et descendants dans les cantons de Bâle-Campagne (L. 7 nov. 1859, 5) et des Grisons (C. civ., 68).

512. En thèse générale, dans ces divers cantons, l'assistance de la famille ne peut être réclamée que dans les cas où, si elle faisait défaut, l'indigent tomberait à la charge de l'assistance publique. Elle existe, en cas de parenté naturelle dùment constatée, dans les mêmes limites qu'entro parents légitimes. Seul, le Code du Tessin porte, dans son art. 130, que, si des enfants naturels sont en concours, dans leur réclamation d'aliments, avec des enfants légitimes, légitimés ou adoptifs ou avec des ascendants légitimes, et qu'il soit impossible de satisfaire tout le monde, ils ne peuvent être placés qu'après les autres requérants. V. Huber, System und Geschichte des schweiz. Privatrechts, t. 1, § 13, n. 2.

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514. I. Le créancier et le débiteur d'aliments sont de même nationalité. D'après un premier système, l'obligation alimentaire étant d'ordre public parce qu'il importe que les familles subviennent dans la mesure du possible aux besoins de leurs membres, il faut, en vertu de l'art. 3, C. civ., appliquer dans tous les cas la loi française, quelle que soit la nationalité des parties. -Trib. Seine, 10 mai 1876, Bouchard, [Clunet, 76.184] - Sic, Aubry et Rau, t. 1, § 31, p. 82; Demolombe, t. 1, n. 70; Weiss, Tr. élém. de dr. int. pr., p. 498; Fiore, Dr. int. pr. (trad. PradierFodéré), p. 205; Barde, Theor. des statuts, p. 55 et s.; Audinet, Princ. élem. de dr. int. pr., n. 551; Despaguet, p. 421; Vincent et Pénaud, Dict. du dr. int. pr., vo Aliments, n. 22.

515. On en a conclu, notamment, que les tribunaux français étaient compétents pour statuer sur une demande en pension alimentaire formée par un étranger, « cette action, dit le jugement, étant fondée sur une obligation dérivant du droit naturel avant d'avoir été consacrée par le droit public, et l'exécution d'une telle obligation intéressant, par suite, à un certain degré l'ordre public et tout au moins le droit des gens privé ». Paris, 19 déc. 1833, Favre, [S. 34.2.384, P. chr.]- Trib. Seine, 3 mai 1879, Ve Frings, [Clunet, 79.489] Pour la compétence des tribunaux français sur une demande en pension alimentaire entre étrangers, V. infrà, v° Etranger.

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516. Il faudrait donc s'occuper exclusivement des dispositions de la loi française sans tenir aucun compte de la loi étrangère. Ainsi, en France, un enfant adultérin peut réclamer des aliments à ses auteurs; il faudrait accorder le même droit à un étranger par application de la loi française alors même que la loi nationale de cet étranger et de ses père et mère lui refuserait ce droit. Vincent et Pénaud, vo Aliments, n. 23. Contrà, Olivi, Rev. de dr. int., 1885, p. 62.

517.- Un grand nombre de législations considèrent les collatéraux et tout au moins les frères et sœurs comme tenus de la dette alimentaire. Il en est ainsi, par exemple, en Espagne (V. suprà, n. 456): or, il faudrait décider suivant une application stricte de ce système qu'un sujet espagnol ne pourrait demander en France des aliments à ses frères et sœurs. La loi nationale des parties est ici plus extensive que la loi française et cependant celle-ci sera seule appliquée.

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518. Aussi certains auteurs se sont-ils refusés à admettre un système aussi exclusif. Ils appliquent, en principe, la loi française en vertu du statut réel, mais décident que si une législation étrangère se montrait plus rigoureuse en matière d'obligation alimentaire, il y aurait lieu de sanctionner ses dispositions. Ainsi, dans l'exemple précédent, un sujet espagnol pourrait être tenu de fournir des aliments à son frère en France, quoique la loi française n'impose aucune obligation de ce genre aux collatéraux. L'ordre public n'est, en effet, aucunement intéressé à ce que les obligations naissant de la parenté et du mariage soient plus étroites à l'égard d'étrangers que de Français. — Weiss, loc. cit.; Audinet, loc. cit.; Vincent et Pénaud, vo Aliments, n.

27.

519. Mais dans les cas où la loi étrangère refuse des aliments à certaines personnes auxquelles la loi française en accorde, comme le décident les législations anglaise et américaine, qui refusent aux alliés le droit aux aliments, il y aurait lieu à l'application de la loi française. Un sujet anglais pourrait donc obtenir en France des aliments de son beau-père.

520.- Dans un second système, on applique la loi nationale commune aux deux parties: le principe du statut personnel est alors substitué à celui du statut réel, et les tribunaux français ne pourront accorder des aliments que lorsque cela résultera de la loi étrangère. L'obligation alimentaire considérée par la loi comme une obligation dérivant de la filiation et du mariage est, comme toutes les questions se rapportant à l'état des personnes, de statut personnel. Laurent, Dr. civ. int., t. 5, ǹ. 88; Renauld, Rev. crit., 1883, p. 724; Durand, Dr. int. pr., p. 369; Brocher, Cours de dr. int. pr., t. 1, p. 297; Olivi, Rev. de dr. int., 1885, p. 36.

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521. On répond à l'idée d'ordre public qu'invoquent les partisans de la première opinion par cette considération que l'obligation alimentaire est certainement d'ordre public, en ce sens que le débiteur d'aliments ne pourrait s'y soustraire ou le créancier y renoncer, mais cette notion ne va pas jusqu'à faire préférer la loi territoriale à la loi personnelle des parties. Et cela est si vrai que les partisans de la première opinion ont été obligés de faire à la loi personnelle cette concession qu'on l'appliquera toutes les fois qu'elle sera plus rigoureuse que la loi territoriale.

522. Ainsi, il a été jugé que la demande en pension alimentaire formée compéteminent devant la juridiction française par un étranger devenu Français contre un étranger, doit, lorsqu'elle soulève incidemment une question de filiation, être appréciée d'après les règles du statut étranger commun aux deux parties, et sous l'empire duquel l'obligation alimentaire aurait pris naissance. Paris, 2 août 1866, de Civry, (S. 66.2.342, P. 66.1245, D. 67.2.41]

523. Que l'obligation pour les enfants et pour les gendres de fournir des aliments naissant du mariage, c'est, à la loi qui régit l'union conjugale des époux qu'il y a lieu de recourir pour savoir s'ils doivent en être tenus.—Alger, 16 janv. 1882, Broni Yso, [Clunet, 82.626]

524.

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Que le mariage engendre entre époux des droits et des devoirs qui les suivent en pays étranger comme dans leur propre patrie, Paris, 9 août 1878, France judic. t. 3, p. 11] 525. Si la loi territoriale accorde des aliments alors que la loi personnelle des parties est muette, laquelle devra prévaloir? Les auteurs qui se prononcent pour l'application de la loi personnelle au litige font ici fléchir cette règle. Les dispositions qui établissent une obligation alimentaire entre proches parents

sont inspirées, dit-on, par des considérations de moralité et de décence publique qui leur donnent un caractère absolu et doivent les faire appliquer même aux étrangers. En appliquant cette doctrine à deux frères de nationalité française, en Italie, on devrait décider que, malgré le silence de la loi française, il faudrait accorder des aliments à celui qui en demande à l'autre en se fondant sur la loi italienne. V. suprà, n. 472 et 473. Renault, loc. cit.; Durand, p. 370. Contrà, Laurent, t. 5, n. 88. 526. II. Le créancier et le débiteur d'aliments sont de nationalité différente. — Un auteur, d'ailleurs resté seul de son opinion, enseigne que, dans ce cas, le juge doit appliquer la loi française, qu'il s'agisse de deux étrangers ou d'un français et d'un étranger. A défaut de motifs suffisants pour préférer l'une des deux lois étrangères qui paraissent également applicables, il tranche la question en faisant retour au principe de la lex fori. Demangeat, Condit. des étrangers, p. 361.

527.

S'il s'agit de deux étrangers, quelle loi faudra-t-il appliquer, la loi personnelle du créancier ou celle du débiteur? On admet généralement que la première devra prévaloir et que celui auquel sa loi nationale accorde des aliments y aura droit malgré le silence de la loi personnelle du débiteur. C'est ainsi qu'un sujet italien pourra demander, en Espagne, des aliments à son frère français. V. suprà, n. 456, 472 et 473. — Weiss, p. 499 et 500; Durand, p. 369; de Folleville, Naturalisat., n. 661; Laurent, t. 5, n. 90; Vincent et Pénaud, v° Aliments, n. 36.

528. Mais, d'après une autre opinion, c'est la loi du débiteur qui doit être appliquée : le débiteur qui n'est pas tenu aux aliments d'après sa loi nationale, ne saurait être obligé à les fournir parce que la loi nationale du créancier lui donne le droit de les réclamer. Un beau-père américain ne serait donc pas tenu de fournir des aliments à son gendre italien, en France, car une personne ne peut être obligée que par la loi à laquelle elle est soumise, c'est-à-dire par sa loi nationale. Au contraire, si la loi nationale du débiteur établit l'obligation alimentaire, le demandeur pourra obtenir des aliments alors même que sa loi nationale ne les lui accorderait pas. Ainsi un beau-père bavarois pourrait exiger en Espagne des aliments de sa bru française, parce que, dans les mêmes circonstances, elle y serait obligée en France et que la même loi doit avoir partout la même force. Cass. Rome, 22 avr. 1887, Aria, [Clunet, 89.162] - Sic, Audinet, n. 552-c; Olivi, Rev. de dr. intern., 1885, p. 60. 529. S'il s'agit d'un Français et d'un étranger, certains auteurs soutiennent qu'il y a lieu d'appliquer la loi française lorsqu'elle est plus favorable, l'obligation alimentaire étant fondée sur l'ordre public. Ainsi un gendre français pourrait obtenir en France des aliments de son beau-père américain. Trib. Seine, 14 août 1869, de B..., [Clunet, 74.45, note 2] - Sic, Audinet, n. 552-a.

530. Lorsque la loi française n'est pas plus favorable, c'est la loi personnelle du débiteur qui doit régir le litige. Par suite, on accorderait des aliments en France à un sujet français de son frère italien. Audinet, n. 552-b.

531. Dans une autre opinion, il faut choisir entre la loi du débiteur et celle du créancier, et non appliquer tantôt l'une et tantôt l'autre; et c'est la loi du débiteur qui devra être préférée parce qu'il n'y a pas à tenir compte de la différence de nationalité des demandeurs : un Français obtiendra donc des aliments, en Italie, de sa sœur italienne, parce que c'est la loi italienne qui accorde des aliments dans ce cas en même temps qu'elle sanctionne l'obligation du débiteur, et que s'il en était autrement les dispositions législatives resteraient sans valeur pratique possible. Mais de là, il ne faudrait pas conclure par réciprocité qu'un étranger pût être obligé aux aliments dans le cas où il pourrait en obtenir, si sa loi nationale ne lui impose pas cette prestation. Olivi, Rev. de dr. intern., 1885, p. 59 et 60.

532.- Un auteur applique encore ici la loi personnelle du demandeur alors même qu'il en résulterait pour celui-ci le droit aux aliments contrairement à la loi française. De Folleville, Naturalisat., n. 661.

533. Le changement de nationalité a-t-il de l'influence sur

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la demande en pension alimentaire? On peut se demander s'il faut appliquer la loi personnelle du demandeur au moment où il forme sa demande ou la loi sous l'empire de laquelle il se trouvait avant la naturalisation. La question dépend du point de départ que l'on assigne à l'obligation alimentaire. 534. On doit appliquer la loi qui régit actuellement le demandeur si l'on admet que l'obligation alimentaire prend naissance le jour où il est tombé dans le besoin. C'est ainsi qu'il a été jugé que le bénéfice de l'art. 14, C. civ., peut être réclamé par l'enfant devenu Français qui forme contre son père étranger une demande d'aliments, l'obligation alimentaire n'ayant pris naissance qu'au moment où le demandeur était tombé dans le besoin, c'està-dire, dans l'espèce, après l'acquisition par lui de la qualité de Français. Cass., 13 déc. 1865, de Brunswick, [S. 66.1.157, P. 66.403, D. 66.1.21]

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535. Certains auteurs sont d'avis que la créance d'aliments naît en même temps que les rapports de parenté ou d'alliance sur lesquels elle se fonde. De Folleville, Naturalisat., n. 662 et s.; Weiss, p. 500; Vincent et Pénaud, v° Aliments, n. 41.

536. - On doit en conclure que le changement de nationalité ne saurait avoir aucune influence sur la dette d'aliments si les rapports de parenté étaient antérieurs à la naturalisation : ainsi un Français serait toujours tenu des aliments à l'égard de certains parents et alliés alors qu'il acquerrait la nationalité d'un pays dont les lois ne sanctionnent pas l'obligation alimentaire. De même, le citoyen d'un pays où cette obligation est inconnue ne saurait, s'il devenait Français, en être tenu pour une cause antérieure à sa naturalisation. Vincent et Pénaud, yo Aliments, n. 42 et s.; Weiss, loc. cit.

...

537. — Jugé, en ce sens, que le statut qui régit l'obligation alimentaire entre père et enfant, c'est-à-dire la loi nationale des parties au moment de la naissance, n'a pas cessé d'ètre la loi de l'obligé, le changement de nationalité et la compétence qui en résulte étant absolument indifférents. Paris, 2 août 1866, de Civry, [S. 66.2.342, P. 66.1245, D. 67.2.41] 538. Qu'il faut appliquer la loi nationale des parties au moment où a pris naissance l'obligation alimentaire, c'està-dire entre père et fils au moment de la naissance de l'enfant, parce que la dette alimentaire découle de la filiation; ainsi, si après avoir eu un enfant, un Français se fait naturaliser Américain, il faut appliquer la loi française à la demande d'aliments formée par le fils, et non pas la loi américaine qui ne reconnait pas l'obligation alimentaire. - Trib. Seine, 22 mai 1877, [Clunet, 77.428]

539. Laurent, devant les divergences de la doctrine et de la jurisprudence, préconise la conclusion de traités internationaux pour une solution commune à tous les Etats (Droit civil internat., t. 5, n. 94). On lui a objecté que les lois des divers pays ont un élément qui dépend des mœurs et des traditions locales ce qui pourrait faire craindre que, par des concessions mutuelles, on ne heurtat l'élément national du droit positif des différents peuples. Nous pensons que cette objection n'est pas sérieuse et que, le droit aux aliments étant fondé sur la filiation, les législations ne diffèrent pas sur cette question à un point tel qu'un accord paraisse impossible. La question ne se pose guère que pour les collatéraux et pour les alliés : or, peut-on dire que c'est le résultat de mœurs profondément différentes que la sanction en Italie de l'obligation alimentaire à l'égard des frères et sœurs, tandis que cette obligation n'a pas lieu en France, alors que les législations civiles de ces deux peuples de même race sont inspirées des mêmes principes? Il est permis d'espérer que, grâce à l'intervention de l'Institut de droit international qui s'est heureusement manifestée par la conclusion de règlements internationaux sur divers points du droit, un accord se fera entre les législateurs; en attendant l'unité qui résulterait d'une convention internationale, il faut résoudre les conflits de lois par des traités particuliers.

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RÉPERTOIRE.

Tome III.

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