Page images
PDF
EPUB

cun individu? augmente-t-elle la valeur de l'arpent? Le prix d'une victoire ou d'une dé faite n'est-il pas le même ? Un surcroît d'impôt n'en est-il pas la conséquence inévitable? Mais cette manière de raisonner qu'adopte une nation, ne plaît pas à un gouvernement. La guerre est une table de Biribi, où les gouvernemens sont les banquiers et les nations les dupes.

Si quelque chose peut surprendre dans ce tableau des gouvernemens, ce sont les progrès des arts paisibles, de l'agriculture, des manufactures et du commerce, sous cette longue accumulation de découragement et d'oppression il sert à faire voir que l'instinct n'agit pas par de plus fortes impulsions sur les animaux, que le besoin de la société et de la civilisation n'agit sur l'homme. Malgré tous ces découragemens il se dirige vers son but et ne cède qu'à l'impossibilité.

CHAPITRE II I.

De l'ancien et du nouveau systême du gouver

nement.

Rien ne paroît plus contradictoire que les principes qui ont donné naissance aux anciens gouvernemens, et l'état ou la société, la civilisation et le commerce sont capables d'élever les hommes. Le gouvernement de l'ancien systême, est une usurpation du pouvoir, pour son propre aggrandissement; le nouveau est une délégation du pouvoir, pour l'avantage commun de la société. Le premier se soutient au moyen d'un système de guerre ; le second par un systême de paix, le seul moyen d'enrichir une nation; l'un alimente les préjugés nationaux ; l'autre voudroit établir une fraternité générale, mobile d'un commerce universel. L'un mesure sa prospérité par la masse des revenus qu'il lève à force d'extorsions; l'autre prouve son excellence, par la modicité des taxes dont il a besoin. Burke a parlé de Whigs anciens et noupeut s'amuser d'épithètes et de dis

veaux. S'il

tinctions puériles, je ne dois point interrompre ses plaisirs. Ce n'est point à lui, c'est à Sieyes que j'adresse ce chapitre. J'ai déjà pris envers lui l'engagement de discuter le gouvernement monarchique, et comme ce sujet rentre de lui-même dans le parallèle de l'ancien et du nouveau systême de gouvernement, je saisis cette occasion pour lui présenter mes observations. Par circonstance je pourrai rencontrer M. Burke sur mon chemin.

Quoiqu'on puisse prouver que le systême de gouvernement que l'on qualifie à présent de NOUVEAU, est, dans ces principes, le plus ancien qui ait jamais exixté, puisqu'il est fondé sur les droits primitifs et inhérens de l'homme. Cependant, comme la tyrannie et le fer avoient suspendu l'exercice de ces droits pendant des siècles, je serai mieux compris si je le distin gue par l'épithète de nouveau, que si je lui rendois son titre légitime de plus ancien.

La première distinction générale qui s'offre entre ces deux systêmes de gouvernement, 'c'est l'ancien est héréditaire en tout ou en ` que partie, tandis que l'autre est entièrement représentatif. Il repousse, rejette toute fonction héréditaire, comme étant une tromperie faite

au genre humain; comme étant insuffisante la détermination du gouvernement.

pour

On ne peut prouver par quel droit le gouvernement héréditaire a commencé? Nu pouvoir humain ne peut s'étendre jusqu'au droit de l'établir. L'homme n'a point d'autorité sur les générations à venir, quant au droit personnel, et, par conséquent, nul individu nulle coopération n'a eu, et ne peut avoir, le droit de créer un gouvernement héréditaire. Supposez même qu'il nous fût possible de renaître, au lieu de notre postérité, nous n'aurions pas le droit de nous ravir maintenant les droits qui nous appartiendroient dans cette seconde existence. Sur quel fondement osonsnous donc prétendre les ravir aux autres ?

Tout gouvernement héréditaire est tyrannique de sa nature. Une couronne héréditaire, un trône transmissible, sous quel nom absurde qu'on le désigne, ne présentent qu'une seule explication raisonnable: c'est que le genrehumain est une propriété transmissible. Hériter d'un gouvernement, c'est hériter des peuples, comme s'ils étoient des troupeaux.

Quant à la seconde assertion que le gouverement héréditaire est insuffisant pour les

données qui rendent les gouvernemens nécessaires, il n'est besoin, pour la mettre en évidence, que d'examiner l'essence du gouvernement, et de la comparer avec les chances du gouvernement héréditaire.

Il faut que le gouvernement soit toujours en pleine maturité. Il doit être combiné de manière qu'il soit préservé de tous les accidens auxquels l'homme individuel est exposé. Or, l'hérédité, sujette à tous ces accidens, est le mode de gouvernement le plus imparfait et le plus irrégulier.

Nous avons entendu nommer les droits de l'homme, systême nivellateur; mais le seul systême auquel ce mot nivellateur soit applicable est celui d'une monarchie héréditaire. Elle est un systême d'égalisation morale; elle confère sans distinction la même autorité à toutes espèces de caractères; elle met au même niveau le vice et la vertu, l'ignorance et le savoir; en un mot, toutes les qualités bonnes ou mauvaises. Les rois se succèdent, non point à titres de créatures raisonnables, mais par une filiation purement animale. On ne s'informe ni de leur caractère, ni de leurs facultés intellectuelles. Devons-nous être surpris de l'ab

« EelmineJätka »